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ARTICLES ACADÉMIQUES ACADEMIC ARTICLES ARTICLES PROFESSIONNELS PROFESSIONAL ARTICLES 83 résumé L’objectif de cet article est d’analyser la performance sociale d’une innovation qui a émergé à la suite des succès du microcrédit, dans les années 1990. Il s’agit de la micro assurance, qui permet de protéger essentiellement les populations à faibles revenus, brisant ainsi le cycle infernal de retour à la pauvreté suite aux divers chocs de la vie quotidienne. Par anticipation, nous avons affirmé que la micro assurance réduisait la pauvreté à travers la performance sociale et que les modèles d’affaires ayant une performance sociale supérieure étaient susceptibles d’atteindre les couches de population les plus pauvres. Les résultats de notre recherche indi quent que les objectifs des organisations dépendent fortement des modèles d’af faires, qui par ailleurs ont chacun une définition de la pauvreté. Nous avons évalué quatre (4) dimensions de la performance sociale; à savoir, le ciblage des pauvres et des exclus, l’adaptation des produits et services à la clien tèle cible, l’amélioration de la situation socioéconomique et sociale des clients et de leur famille et la responsabilité sociale de l’organisation. Le modèle commu nautaire, malgré un score plus faible en ce qui concerne la dimension responsabilité Assurances et gestion des risques, vol. 79(1-2), avril-juillet 2011, 83-124 Insurance and Risk Management, vol. 79(1-2), April-July 2011, 83-124 Les auteurs : Josiane Lise Mabopda Foka, PAA, MBA, est doctorante en administration, chargée de cours à l’École des Sciences de la Gestion de l’Université du Québec à Montréal (ESG- UQÀM) et chercheur au Groupe international de recherche en éthique financière et fiduciaire (GIREFϕ). Cet article est basé sur l’essai de MBA Recherche rédigé par Josiane Lise Mabopda Foka, sous la direction du Professeur De Serres. Andrée De Serres, Ph.D, est professeure titulaire au Département de Stratégie, Responsabilité sociale et environnementale, à l’École des Sciences de la Gestion de l’Université du Québec à Montréal (ESG-UQÀM), titulaire de la Chaire SITQ immobi lier de l’UQÀM, et directrice du GIREFϕ. La micro assurance outil de lutte contre la pauvreté : quelle performance sociale ? par Josiane Lise Mabopda Foka et Andrée De Serres Assurances et gestion des risques, vol. 79(1-2), avril-juillet 2011 84 sociale, s’est avéré être le modèle le plus socialement performant avec la moyenne de points globale la plus élevée. Ce modèle met l’accent sur le ciblage des pauvres et sur l’amélioration de la situation socioéconomique des clients, tandis que les autres modèles affichent un score élevé en responsabilité sociale. La priorité accordée à chacune des dimensions dépend elle aussi du modèle d’affaires. abstract This paper discusses the social dimension of microinsurance, a new financial arrangement that has emerged following the success of microcredit in the 90’s. Microinsurance protects low-income people, specifically against the everyday shocks of life, thus breaking the infernal cycle of poverty. The author hypothesizes that microinsurance reduces poverty through social performance and that business models with higher social performance were likely to reach the poorest stratum of the population. The research, focusing on four dimensions of social perform ance, posits that organization objectives rely heavily on business models, which otherwise each have their own interpretation of poverty. 1. INTRODUCTION La micro assurance « formelle » est un secteur d’activités récent et innovateur qui a véritablement pris son essor à la fin des années 1990. S’interroger sur la rentabilité revient aussi à se demander quel mode de gouvernance convient le mieux. Peut-on se lancer en micro assurance avec le double objectif de réduire la pauvreté dans les populations à faibles revenus et celui de maximiser les profits des actionnaires ? Ces questions comportent un enjeu de taille. Les conséquences du succès des entreprises commençant à envahir ce secteur d’activités appellent à la réflexion. La forme juridique et le modèle d’affaires retenu par les différents intervenants en micro assurance exercent un impact non seulement sur le succès de l’entre prise mais aussi sur le développement social de la clientèle appelée à bénéficier des effets de l’accès à ses produits de micro assurance. En conséquence, le succès et la viabilité des modèles d’affaires se mesu rent non seulement par la performance financière mais aussi par la performance sociale des institutions (Double Bottom Line). Le sec teur est plus propice à la recherche d’une certaine rentabilité équili brée qui permet une réduction de la vulnérabilité des plus pauvres à travers une performance sociale. On se trouve alors dans une logique de création de la valeur à long terme, qui diffère de la valorisation des actions à court terme et qui de plus, s’inscrit dans une mesure de la performance sociale de l’institution financière, difficile à évaluer. La micro assurance outil de lutte contre la pauvreté : quelle performance sociale ? 85 Les régulateurs et les investisseurs sont de plus en plus appelés à prendre en compte non seulement la performance financière des entreprises mais aussi leur performance sociale, imposant la nécessité d’une réflexion plus approfondie sur le rôle et la responsabilité sociale des entreprises. Les multiples scandales financiers, environnemen taux et sociaux pointent du doigt la recherche de profits à tout prix. 2. APPARITION DU CONCEPT DE LA RESPONSABILITÉ SOCIALE (RSE) SOUS SA FORME MODERNE DANS LES ANNÉES 1960 La responsabilité sociale de l’entreprise (RSE) se définit comme « l’ensemble des obligations, légales ou volontaires, qu’une entre prise doit assumer afin de passer pour un modèle imitable de bonne citoyenneté dans un milieu donné.1 » Cependant, le caractère volon taire de la RSE, c’est-à-dire de la volonté des entreprises d’aller au- delà de leurs obligations juridiques, demeure dominant.2 Les interventions se multiplient et, en conséquence, les théories principales en matière d’éthique des affaires peuvent être qualifiées en vertu de trois courants (Gendron; 2000 : 74) : la Business & Society, la Business Ethics, et la Social Issue Management. Ces trois théories bien qu’ayant des fondements différents s’accordent sur la capacité de l’entreprise privée de ne pas négliger le bien commun malgré leur mission de profitabilité. En 1987, tablant sur des préoccupations à un niveau macroéconomique, la Commission mondiale sur l’environne ment et le développement dans le Rapport Brundtland définit le développement durable (DD) comme « un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des généra tions futures de répondre aux leurs ». En 1991, le rapport Sauver la planète a essayé de compléter cette définition, en introduisant l’importance de l’amélioration des conditions de vie des communau tés tout en tenant compte de la « capacité de charge » des écosystèmes. Que ce soit sur le plan microéconomique (RSE), ou macroéco nomique (DD), toute cette construction sociale autour de la RSE et du DD contribue aussi à la recherche de solutions pour l’élimination de la pauvreté. « Le débat engagé depuis quelques années autour du concept de la RSE se conjugue avec les interrogations soulevées au niveau mondial sur le devenir de notre planète dans ses aspects envi ronnementaux, économiques et sociaux autour du concept de déve loppement durable formalisé par l’ONU en 1992 au Sommet de Rio » (De Serres, Roux, 2006). La pérennité de l’entreprise dépendra de la capacité de survie des quelques milliards de pauvres sur la planète. Insurance and Risk Management, vol. xx(x-x), xxxx-xxxx 2010 86 Insurance and Risk Management, vol. 79(1-2), April-July 2011 L’humain étant dorénavant mis au cœur des décisions de l’entreprise, quel est l’impact des opérations sur les populations défavorisées ? La réduction de la pauvreté s’impose comme une condition de pérennité car elle ne profite pas seulement aux pauvres, mais à tous les acteurs et secteurs de l’économie formelle et informelle. Cet objectif se cristallise par l’adoption en 2005 de la politique du Millénaire par les Nations unies3. Dans le cadre de cette lutte contre la pauvreté, des innovations en micro finance au début des années 70 ont été saluées, et ce, malgré certaines critiques concernant, en l’occurrence le microcrédit. Le bilan de cette innovation que l’on pourrait attribuer à Muhammad Yunus4, prix Nobel de la paix 2006, reste positif. La micro assurance arrive un peu plus tard dans le cycle des innovations et des mesures mises en place pour réduire la pauvreté, et c’est sa performance sociale qui fait l’objet de cet article : La micro assu rance outil de lutte contre la pauvreté : quelle performance sociale ? Ainsi, l’objectif de notre travail est de répondre à la question qui suit : la micro assurance peut-elle favoriser la réduction de la pauvreté à travers une performance sociale ? 3. ÉTAT DES LIEUX DE LA MICRO ASSURANCE La micro assurance, la pauvreté et la vulnérabilité sont intrinsè quement liées et force est de constater que : « Sur les 4 milliards d’êtres humains vivant dans les pays en développement avec moins de 2 dollars par jour, à peine 10 millions possèderaient une protection de base contre les aléas et les situations de détresse. Une centaine de millions d’êtres humains sombrent chaque année dans la pauvreté, faute de pouvoir subvenir aux frais de maladie qu’ils doivent supporter. La maladie et le coût des prestations de santé sont pour les pauvres les principaux uploads/Management/ 2011-79-no1-2-foka.pdf
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- Publié le Jui 21, 2022
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