■6-040-K-09 Apnées et hypopnées centrales du sommeil G. Roisman, C. Rabec, P. E

■6-040-K-09 Apnées et hypopnées centrales du sommeil G. Roisman, C. Rabec, P. Escourrou Les apnées centrales du sommeil sont caractérisées par des épisodes de suspension de la ventilation résultant d’inhibitions transitoires et parfois récurrentes du pacemaker pontomédullaire qui génère le rythme ventilatoire. La survenue de ces apnées centrales au cours du sommeil est le plus souvent un phénomène physiologique, notamment à l’endormissement. En revanche, un nombre exagéré de ces événements est susceptible de fragmenter le sommeil et/ou de constituer un facteur de risque associé à une augmentation de la morbimortalité. L’identification des causes d’apnées et hypopnées centrales du sommeil et leur traitement nécessitent une démarche diagnostique et thérapeutique basée sur la bonne connaissance de la physiopathologie de cette anomalie respiratoire du sommeil. Dans la rubrique des apnées et hypopnées centrales du sommeil, la classification internationale des troubles de sommeil (ICSD-2) prend seulement en compte les formes cliniques sans hypercapnie à l’éveil. En revanche, l’ICSD- 2 considère que les événements apnéiques centraux survenant chez des sujets hypercapniques sont un épiphénomène dans le cadre des syndromes d’hypoventilation–hypoxémie au cours du sommeil. L’insuffisance cardiaque est sans doute la cause la plus fréquente d’apnées et hypopnées centrales du sommeil, lesquelles sont associées à une augmentation de la morbimortalité liée à cette maladie. © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots-clés : SAS central ; Apnées centrales ; Sommeil ; Insuffisance cardiaque ; Cheyne-Stokes ; Ventilation auto-asservie Plan ■Apnées et hypopnées centrales du sommeil 1 Introduction 1 Classification 2 Physiopathologie 2 Formes cliniques des apnées–hypopnées centrales du sommeil 5 Épidémiologie 11 Diagnostic 12 Traitement 13 ■Apnées et hypopnées centrales du sommeil Introduction L’arrêt de la respiration au cours du sommeil peut résulter d’une obstruction des voies aériennes supérieures au niveau oro- pharyngé (apnée obstructive), d’une absence de la commande automatique de la ventilation (apnée centrale), ou d’une combi- naison des deux (apnée mixte). Les apnées centrales du sommeil sont caractérisées par des épisodes de suspension de la venti- lation résultant d’inhibitions transitoires et parfois récurrentes du pacemaker pontomédullaire qui génère le rythme ventila- toire. Une apnée centrale est usuellement définie comme la cessation du débit nasobuccal sans évidence d’effort inspiratoire pendant au moins dix secondes [1, 2]. Les hypopnées centrales sont définies par l’American Academy of Sleep Medicine (AASM) comme la réduction d’au moins 30 % du débit nasobuccal asso- ciée à une diminution d’au moins 3 % de la saturation en oxygène (O2) de l’hémoglobine (SaO2) et/ou à un microéveil sans évi- dence d’augmentation des résistances oropharyngées pendant l’événement (ex. : ronflement, plateau inspiratoire ou décalage de phase thoraco-abdominale) [1]. Chez le sujet normal, quelques rares apnées ou hypopnées centrales peuvent être observées occasionnellement, notamment à l’endormissement mais également après des réactions d’éveil et parfois en sommeil paradoxal [3]. La survenue de ces apnées centrales est un phénomène physiologique. En revanche, un nombre exagéré de ces événements est susceptible de fragmen- ter le sommeil et/ou de constituer un facteur de risque associé à une augmentation de la morbimortalité. Les patients ayant une insuffisance respiratoire chronique hypercapnique dont l’hypoventilation s’aggrave au cours du sommeil font souvent des événements apnéiques centraux, notamment des hypopnées en sommeil paradoxal. La classi- fication internationale des troubles de sommeil (International Classification of Sleep Disorders. Second Edition [ICSD-2]) inclut ces situations parmi les syndromes d’hypoventilation–hypoxémie au cours du sommeil (SHHS) et non dans les apnées–hypopnées centrales du sommeil (AHCS) [4]. Dans ce chapitre sera traité essentiellement l’ensemble de conditions entraînant des apnées–hypopnées centrales chez des sujets adultes n’ayant pas d’hypercapnie diurne. Cependant, la physiopathologie et les contextes morbides des événe- ments centraux associés à l’hypercapnie seront également évoqués. EMC - Pneumologie 1 Volume 12 > n◦1 > janvier 2015 http://dx.doi.org/10.1016/S1155-195X(14)67179-6 Article à jour au 02/12/2019 6-040-K-09 ■Apnées et hypopnées centrales du sommeil Classification Chez l’adulte, la classification internationale des troubles de sommeil (ICSD-2) identifie cinq formes cliniques, dont le diagnostic est établi sur la base de critères cliniques et polysom- nographiques [4] : • les apnées centrales du sommeil primitives ou idiopathiques (ACSI) ; • la respiration périodique de Cheyne-Stokes (RPCS) ; • la respiration périodique de haute altitude (RPHA) ; • les apnées centrales dues à des maladies non liées à la RPCS ; • les apnées centrales dues à des médicaments ou des drogues. Les apnées « complexes » du sommeil ont été décrites dans le contexte d’apparition d’événements respiratoires centraux chez des patients atteints d’un syndrome d’apnées–hypopnées obstruc- tives du sommeil (SAHOS) et traités par pression positive continue (PPC). La classification ICSD-2 ne prend pas en compte les apnées complexes du sommeil qui ne font pas objet d’un consensus et dont la définition et même l’existence sont controversées [5]. Elles seront néanmoins traitées dans ce chapitre. “ Point fort Formes cliniques des apnées centrales du sommeil, selon l’ICSD-2 • Apnées centrales du sommeil primitives ou idiopa- thiques (ACSI) • Respiration périodique de Cheyne-Stokes (RPCS) • Respiration périodique de haute altitude (RPHA) • Apnées centrales dues à des maladies non liées à la RPCS • Apnées centrales dues à des médicaments ou des drogues Physiopathologie Physiologie du contrôle de la ventilation La commande ventilatoire doit s’adapter aux variations des charges métaboliques et mécaniques afin de maintenir l’homéostasie des échanges gazeux. Le contrôle de la ventilation concerne de nombreux mécanismes physiologiques qui peuvent être groupés en trois composants majeurs. Le premier module la ventilation en fonction des besoins métaboliques, raison pour laquelle on le nomme système de contrôle métabolique ou automa- tique. Dans ce système, la quantité et le pattern de ventilation sont régulés de manière à maintenir dans des limites très étroites, les pressions partielles en dioxyde de carbone (CO2) et en O2 du sang artériel systémique (PaCO2 et PaO2, respectivement), tout en minimisant en même temps le travail requis pour atteindre ces objectifs physiologiques. Dans ce système, de nombreuses boucles de régulation font intervenir les chémorécepteurs du corps caro- tidien (sensibles à l’hypoxie) et du tronc cérébral (sensibles à l’hypercapnie), des mécanorécepteurs bronchopulmonaires et des muscles respiratoires, et des réseaux de neurones pacema- ker du tronc cérébral. Ces réseaux de neurones, connus également sous le nom de complexe pré-Bötzinger, traitent l’ensemble de l’information afférente provenant des chémorécepteurs et des mécanorécepteurs. En fonction de cette information, ils génèrent l’activité rythmique de la respiration de manière à qu’elle soit adaptée aux besoins métaboliques. Le deuxième composant est le système de contrôle comportemental, qui permet d’adapter la ven- tilation à la réalisation des nombreuses activités de la vie normale comme par exemple la phonation ou la déglutition. Enfin, le sti- mulus de l’éveil constitue une troisième influence sur la ventilation, dans le sens d’une stimulation inhérente à l’état de veille. Le sti- mulus de l’éveil exerce également une activité excitatrice sur les motoneurones innervant les muscles dilatateurs du pharynx, tels ceux de l’hypoglosse [6]. Stabilité du contrôle métabolique de la ventilation Contrôle de la ventilation au cours du sommeil Au cours du sommeil et en particulier en sommeil lent, le contrôle de la ventilation est dominé par le système métabo- lique. La fonction ventilatoire est alors fortement dépendante de l’activité afférente des chémorécepteurs et des mécanorécepteurs bronchopulmonaires et des muscles respiratoires [7]. Ce système de contrôle constitue un très bon exemple de contrôle par boucle de régulation à rétroaction négative. La principale variable régulée ici est la pression partielle artérielle de CO2 (PaCO2). Tout système mécanique contrôlé par une boucle de régula- tion, comme c’est le cas du système respiratoire, est susceptible de devenir instable. Le gain d’une boucle de régulation est une gran- deur souvent utilisée pour exprimer le rapport entre l’amplitude de la réponse d’un système mécanique et la perturbation de la variable qu’il régule. Un système ayant un gain très élevé répon- dra rapidement et vigoureusement à la perturbation. Au contraire, un système ayant un gain très diminué répondra lentement et faiblement à la même perturbation. Une augmentation du gain de la boucle du système de contrôle métabolique déstabilise la ventilation à l’éveil et au cours du som- meil. Cependant, cette instabilité est plus marquée au cours du sommeil puisque à l’éveil la ventilation fonctionne en grande partie sous l’influence comportementale. Le stimulus de l’éveil exerce d’ailleurs une influence tonique qui tend également à sta- biliser la ventilation. La disparition du stimulus d’éveil au cours de l’endormissement est responsable d’une baisse de la ventilation alvéolaire pouvant aller jusqu’à 20 % [8]. Composants de la boucle de régulation de la ventilation Dans un schéma simplifié, on peut considérer les composants majeurs de cette boucle comme étant l’effecteur, le délai cir- culatoire et le contrôleur (Fig. 1A, 2). L’effecteur représente les poumons, le sang et les réserves tissulaires de CO2. Le gain de l’effecteur (plant gain) reflète l’efficacité du soufflet ventilatoire, soit la variation de la PACO2 par unité de changement de ven- tilation alvéolaire. Le délai circulatoire est le temps nécessaire pour que le sang contenu dans le capillaire pulmonaire atteigne les chémorécepteurs. Ce délai est inversement proportionnel au débit cardiaque. Le contrôleur représente la commande respi- ratoire, soit l’ensemble des structures responsables de l’activité rythmique de la uploads/Management/ 2015-apnees-et-hypopnees-centrales-du-sommeil 1 .pdf

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  • Publié le Oct 04, 2021
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