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81 C. Haag, H. Laroche M@n@gement vol. 12 no. 2, 2009, 82-117 M@n@gement Copies of this article can be made free of charge and without securing permission, for purposes of teaching, research, or library reserve. Consent to other kinds of copying, such as that for creating new works, or for resale, must be obtained from both the journal editor(s) and the author(s). M@n@gement is a double-blind refereed journal where articles are published in their original lan guage as soon as they have been accepted. For a free subscription to M@n@gement, and more information: http://www.management-aims.com © 2009 M@n@gement and the author(s). Christophe Haag 2009 Hervé Laroche Dans le secret des comités de direction, le rôle des émotions : proposition d’un modèle théorique M@n@gement, 12 (2), 82-117. accepté par Alain Desreumaux M@n@gement est la revue officielle de l’AIMS M@n@gement is the journal official of AIMS ISSN: 1286-4892 Editors: Emmanuel Josserand, HEC, Université de Genève (Editor in Chief) Jean-Luc Arrègle, EDHEC (editor) Stewart Clegg, University of Technology, Sydney (editor) Esteban Garcia Canal, Universidad de Oviedo (editor) Louis Hébert, HEC Montréal (editor) Martin Kornberger, University of Technology, Sydney (editor) José Pla-Barber, Universitat de València (editor) Michael Tushman, Harvard Business School (editor) Martin G. Evans, University of Toronto (editor emeritus) Bernard Forgues, EMLyon Business School (editor emeritus) M@n@gement vol. 12 no. 2, 2009, 82-117 82 Dans le secret des comités de direction, le rôle des émotions : proposition d’un modèle théorique Dans le secret des comités de direction, le rôle des émotions : proposition d’un modèle théorique Cet article tente de déconstruire deux mythes managériaux en place depuis longtemps : celui du dirigeant « froid » et celui du comité de direction « asepti sé ». Le comité de direction est abordé comme un groupe susceptible d’affron ter des événements problématiques. En se fondant sur différents travaux de recherche issus de ce que les chercheurs appellent « la révolution affective» et en s’appuyant sur les témoignages de 40 dirigeants de grandes entreprises en France, nous proposons un modèle théorique – le modèle de contagion émotionnelle (MCE) – qui place le management des émotions comme facteur de performance au sein du comité de direction. Le MCE articule l’intelligence émotionnelle du dirigeant et sa communication verbale en situation probléma tique. Le modèle débouche sur des propositions de recherche concernant les caractéristiques que prend cette communication en fonction de l’intelligence émotionnelle du dirigeant, les effets de cette communication sur les membres du comité de direction, et l’effet résultant sur le comité dans son ensemble. Mots clés : émotion, intelligence émotionnelle, dirigeant, comité de direction, contagion émotionnelle This article aims at debunking the myths of the «cold» CEO and of the «emo tionnally dry» boardroom by investigating the impact of CEOs emotions on the group dynamics and performance of Boards of directors. Based on the «affective revolution» literature and on qualitative accounts from 40 top-level French CEOs, we propose an Emotional Contagion Model that explains why and how emotionally intelligent CEOs communicate more effectively within the boardroom in crisis situations. Testable propositions are suggested for future research. Key-Words: emotion, emotional intelligence, leader, executive committee, emotional contagion INTRODUCTION Que se passe-t-il dans les comités de direction (codir) ? Ces instances sont l’objet de tous les fantasmes. Le codir est par essence une instance à l’accès étroitement contrôlé, marquée par le statut et le secret. Parce qu’il est réservé aux personnes les plus puissantes, on y voit volontiers le lieu ultime d’exercice du pouvoir, là où s’élaborent les décisions stratégiques. Le codir combine en apparence la légitimité du statut hiérarchique et celle de la collégialité. Non seulement telle décision a Christophe Haag Hervé Laroche EMLYON Business School haag@em-lyon.com ESCP Europe laroche@escpeurope.eu 83 C. Haag, H. Laroche M@n@gement vol. 12 no. 2, 2009, 82-117 été prise par les plus gradés, mais encore elle a été « discutée » entre eux. Hiérarchie et consensus : voilà ce qui semble sortir des portes closes des salles de réunion. Bien entendu, ce mythe du lieu de pouvoir ultime a été critiqué. Bien loin de constituer de véritables instances décisionnelles, les codir se raient tout au plus des lieux de régulation du pouvoir, de maintien des équilibres politiques. C’est le tableau qu’en dresse par exemple Nicolas Flamant (2002), après avoir observé directement le fonctionnement de deux comités. Que l’atmosphère y soit guindée ou débridée, l’évite ment semble être le premier souci du dirigeant. Sur la scène du codir se joue un rituel sans poids véritable. Il est sans doute raisonnable de prendre ces représentations comme les extrémités d’un continuum. Entre la coalition de pouvoir homogène et la mise en scène escamotant les conflits latents, nous aborderons le codir comme un lieu où l’action se fabrique (de manière toujours problématique) à travers la collaboration (jamais totalement acquise) des membres de l’équipe dirigeante. Loin du tableau qu’en fait Fla mant, d’autres rares études sur le sujet (Brundin, 2002; Brundin & Melin, 2006; Brundin & Nordqvist, 2008) voient dans ces comités se nouer des conflits de pouvoir ouverts, avec des « prises de bec » et des discussions stratégiques intenses ; ce sont des moments chargés d’émotions où joue et se joue le leadership du dirigeant. C’est sur ces deux derniers points que cet article désire apporter une contribution. Le leadership du dirigeant est ici envisagé comme une res source pour la construction de l’action collective. Mais sur quoi s’appuie ce leadership ? Sur quelles compétences ? Au mythe du codir tout-puis sant est souvent associé celui de l’intelligence froide du dirigeant : le di rigeant ne devrait sa performance qu’à la mécanique intellectuelle qu’il a développée grâce à son expérience ou sur les bancs d’école (Hunter & Hunter, 1984) et qui lui permet de prendre des décisions rationnelles. Cependant, c’est aussi en dévoilant son côté humain et émotionnel que le dirigeant peut être performant (Brundin & Melin, 2006; Kisfalvi & Pit cher, 2003). De nombreux observateurs soutiennent aujourd’hui qu’aux niveaux hiérarchiques les plus élevés de l’organisation, l’intelligence analytique ne suffit plus à faire la différence entre un bon dirigeant et un dirigeant d’exception (Bennis & Goldsmith, 1994; Bennis & Peters, 2000; Goleman, Boyatzis, & McKee, 2002; Zaleznik, 1977). En nous appuyant sur des entretiens avec des dirigeants, nous soutenons que les dirigeants ont à gérer des situations émotionnelles difficiles, que la performance globale du codir peut être influencée, et que la régulation émotionnelle de ces situations est devenue un enjeu important. Nous utilisons le terme « réguler » pour désigner le mécanisme psychologi que permettant d’assurer un bon équilibre émotionnel au sein du codir, en amplifiant, en diminuant ou en modifiant les émotions ressenties par les membres de codir, selon leur utilité dans une situation donnée. Pour opérer efficacement cette régulation, pour « rectifier le tir », les dirigeants interrogés utilisent consciemment leurs émotions. Autrement dit, ils s’appuient sur leur intelligence émotionnelle. Cet article vise à mieux comprendre comment l’intelligence émotionnelle du dirigeant influence la réaction du codir face à des problématiques M@n@gement vol. 12 no. 2, 2009, 82-117 84 Dans le secret des comités de direction, le rôle des émotions : proposition d’un modèle théorique difficiles. Notre objectif est de proposer un modèle qui permette d’explorer les processus par lesquels le dirigeant peut initier une dynamique collective à l’intérieur du codir. À la différence des études citées plus haut, nous visons plus à analyser les micro-processus liés à des situations d’action que le rôle général des codir dans la structure de l’organisation. La situation typique étudiée est celle où le dirigeant cherche à mobiliser les membres du codir face à un événement négatif (une menace). Sur le plan théorique, nous nous appuierons sur une littérature récente mais abondante qui développe les fondements émotionnels du leadership. Nous proposerons sur cette base un « modèle de contagion émotionnelle » (MCE) qui vise à expliquer comment le dirigeant émotionnellement intelligent peut réguler les états émotionnels des membres du codir de manière à les homogénéiser et à construire un état émotionnel stable au sein du groupe. L’intérêt de ce modèle et de la problématique qu’il propose sera ensuite appuyé empiriquement par l’analyse d’une série d’entretiens menés avec des dirigeants de grandes entreprises. Ces entretiens font ressortir que, en ce qui concerne la place accordée aux émotions dans la communication du dirigeant au sein de son codir, il existe une différence très nette entre les dirigeants très émotionnellement intelligents et les dirigeants peu émotionnellement intelligents. Pour poursuivre l’étude de ces processus de contagion émotionnelle et dépasser les limites de l’étude qualitative, nous avancerons dans une dernière section des propositions testables empiriquement qui constitueront, en plus du modèle général, la contribution principale de l’article. LA REVOLUTION AFFECTIVE DANS LES THEO RIES ORGANISATIONNELLES ET LES THEORIES DU LEADERSHIP Une « révolution affective » dans les théories du management (Bar sade, Brief, & Spataro, 2003) a mis au jour l’existence d’interactions émotionnelles fortes entre les différents acteurs de l’entreprise. Les émotions ne se font pas refouler aux portes de l’entreprise (Ashford & Humphrey, 1995). Au contraire, les organisations sont des lieux de vie qui ont uploads/Management/ aims-article.pdf
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- Publié le Jui 17, 2022
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