XIIème Conférence de l'Association Internationale de Management Stratégique Les
XIIème Conférence de l'Association Internationale de Management Stratégique Les Côtes de Carthage – 3, 4, 5 et 6 juin 2003 1 Structure concurrentielle et stratégies des entreprises Ababacar MBENGUE Université de Reims UFR des Sciences Économiques et de Gestion 57 bis, rue Pierre Taittinger 51096 REIMS Cedex Tél : +33 (0)326 91 38 01 - Fax : +33 (0)326 91 38 69 - Laboratoire E.U.R.O.P. Équipe Universitaire de Recherche sur les Organisations et leurs Performances EA 3315 Email :mbengue@univ-reims.fr Résumé Cette recherche étudie le lien entre la structure concurrentielle et les stratégies des entreprises. Elle s’inscrit de ce fait dans le sillage des nombreux travaux de management stratégique consacrés à l’interaction concurrentielle (Porter, 1980, 1985; Bettis et Weeks, 1987). Mais, alors que les travaux antérieurs consacrés à cet important thème ont généralement porté exclusivement soit sur les aspects économiques, soit sur les aspects cognitifs, cette recherche a voulu intégrer ces deux dimensions. La structure concurrentielle est ainsi définie comme la combinaison d’une structure économique (« groupes stratégiques ») et d’une structure cognitive (« groupes concurrentiels cognitifs »). Les groupes stratégiques sont des groupes d’entreprises qui suivent des stratégies proches ou similaires. Quant aux groupes concurrentiels cognitifs, ils désignent des entreprises qui sont perçues par les acteurs comme étant en concurrence les unes avec les autres (Mbengue, 1992 ; 1995). Quant aux stratégies des entreprises, elles sont conceptualisées en termes de « postures » et de « mouvements » (Mbengue, 1992). La posture stratégique représente la stratégie de l’entreprise à un moment donné ou, plus exactement, sur une période donnée. Quant aux mouvements stratégiques, ils sont révélés par les variations, dans le temps, de la posture stratégique. Sur la base de la distinction entre posture et mouvement stratégiques et de celle établie par Mintzberg & Waters (1985) entre stratégies intentionnelles et stratégies réalisées, il a été possible de conceptualiser les stratégies des entreprises en termes d’intentions de mouvements stratégiques, de réalisations de mouvements stratégiques et de postures stratégiques passées, actuelles (atteintes) et visées. Les résultats empiriques obtenu sur un échantillon issu du secteur français des parfums et cosmétiques montrent que les facettes économique et cognitive de la structure concurrentielle ont des impacts différents et complémentaires sur les décisions stratégiques des entreprises. L’article présente ensuite une discussion approfondie de ces résultats ainsi que de leurs implications. Mots clés Concurrence, groupe stratégique, groupe cognitif, stratégie, modèle causal XIIème Conférence de l'Association Internationale de Management Stratégique Les Côtes de Carthage – 3, 4, 5 et 6 juin 2003 2 Structure concurrentielle et stratégies des entreprises 1. INTRODUCTION Cette recherche tente d'articuler et d'examiner empiriquement les liens entre la structure concurrentielle et les stratégies des entreprises. Elle s’inscrit de ce fait dans le sillage des nombreux travaux de management stratégique consacrés à l’interaction concurrentielle (Porter, 1980, 1985; Bettis et Weeks, 1987). Toutefois, alors que les travaux antérieurs consacrés à cet important thème ont généralement porté exclusivement soit sur les aspects économiques, soit sur les aspects cognitifs, cette recherche a voulu intégrer les deux. Dès lors, il devient possible d’évaluer de manière empirique et de comparer les influences qu’exercent spécifiquement sur la stratégie des entreprises aussi bien les aspects économiques objectifs que les aspects cognitifs de la structure concurrentielle. L'article se décompose en quatre parties. La première partie présente le cadre conceptuel de la recherche. Elle analyse la notion de « stratégie » et décrit les arguments théoriques justifiant l’existence de relations d’influence entre aussi bien les aspects économiques que cognitifs de la structure concurrentielle et les choix stratégiques des entreprises. Cette première partie se termine par la formulation des hypothèses de la recherche. La deuxième partie présente le cadre empirique de la recherche, autrement dit les procédures de recueil et d'analyse des données. La troisième partie contient les résultats empiriques. La quatrième et dernière partie présente une discussion des implications de la recherche et ouvre quelques axes de recherche future 2. CADRE THÉORIQUE L’étude de la relation entre la structure concurrentielle et les stratégies des entreprises commande de commencer par un effort de définition de ces deux notions. Dans le cadre de cet article, les stratégies des entreprises sont définies en termes de postures et de mouvements et la structure concurrentielle en termes économiques et cognitifs. 2.1. STRATEGIE DES ENTREPRISES : POSTURES ET MOUVEMENTS STRATEGIQUES La posture stratégique de l'entreprise représente la stratégie de cette dernière à un instant donné ou, plus exactement, sur une période donnée. La posture stratégique d’une entreprise est matérialisée par les produits ou services que cette dernière offre, les marchés ou clientèles qu'elle sert, les technologies qu'elle met en oeuvre, le mode d'organisation qu'elle a adopté, le type d'avantage concurrentiel qu'elle poursuit, le style de management qu'elle utilise, etc. C'est XIIème Conférence de l'Association Internationale de Management Stratégique Les Côtes de Carthage – 3, 4, 5 et 6 juin 2003 3 donc la photographie de l'entreprise à un instant donné ou, plus exactement, le film, la caractérisation du comportement stratégique de l'entreprise sur une période donnée. Photographie et film sont deux perspectives -statique et dynamique- pour décrire une même réalité : la posture stratégique de l'entreprise. Pour décrire la posture stratégique de l'entreprise, il faut disposer d'un référentiel. Il peut s'agir de variables stratégiques par rapport auxquelles on pourra identifier les postures de l'entreprise ou, de façon plus synthétique, de stratégies-types dont on vérifiera si l'entreprise les applique ou pas. Le mouvement stratégique représente la variation de comportement, le degré de changement de la stratégie de l'entreprise. Le mouvement stratégique de l'entreprise est révélé par les variations, dans le temps, de sa posture stratégique (variations dans les produits ou services offerts, les marchés ou clientèles servis, les technologies employées, le mode d'organisation adopté, le type d'avantage concurrentiel poursuivi, le style de management utilisé, etc.). Il convient de noter que cette définition du mouvement stratégique couvre également les cas où l'entreprise ne change pas de stratégie. En effet, dans un tel cas, on constatera une variation nulle de la posture stratégique de l'entreprise. Le mouvement stratégique (variation de la posture stratégique) peut se faire de deux manières : par changement d'orientation ou par changement d'intensité. Dans le premier cas, le changement est fondamentalement qualitatif, l'entreprise changeant radicalement de stratégie en modifiant sensiblement sa combinaison de positions sur les variables stratégiques. Des exemples éloquents sont donnés par les stratégies dites de retournement de situation (« turnaround strategies »). Dans le deuxième cas, le changement est essentiellement quantitatif, l'entreprise accentuant ou au contraire atténuant ses positions sur les différentes dimensions stratégiques sans pour autant en modifier la structure. 2.2. STRUCTURE CONCURRENTIELLE ET STRATEGIES DES ENTREPRISES Les travaux consacrés aux stratégies concurrentielles des entreprises ont dans leur grande majorité exclusivement porté sur des éléments économiques et « objectifs » tels que les ressources des firmes, les technologies ou les barrières à l'entrée (Porter, 1980, 1985 ; McGee et Thomas, 1986 ; Thomas et Vankatraman, 1988). Toutefois, à partir des années soixante- dix, certains auteurs (Child, 1972; Anderson et Paine, 1975; Weick, 1979) ont commencé à mettre l’accent sur l’influence d’éléments « cognitifs » comme les perceptions, croyances et intuitions des dirigeants sur les stratégies des entreprises. Des travaux plus récents ont fait ressortir que les stratégies des entreprises étaient simultanément influencées par des facteurs objectifs ou économiques aussi bien que par des facteurs cognitifs (Child et Smith, 1987; XIIème Conférence de l'Association Internationale de Management Stratégique Les Côtes de Carthage – 3, 4, 5 et 6 juin 2003 4 Porac, Thomas et Baden-Fuller, 1989). La présente recherche s’appuie sur cet important résultat et s’inscrit de ce fait dans le sillage de ces derniers travaux. 2.2.1. Structure concurrentielle économique et stratégies des entreprises Dans le cadre de l’analyse de la structure concurrentielle ou des stratégies concurrentielles, les chercheurs ont souvent procédé au regroupement d’entreprises des secteurs étudiés en « groupes stratégiques » (Mbengue, 1992). Inventé par Hunt (1972) et popularisé par Porter (1973, 1979, 1980), le concept de « groupe stratégique » est employé pour désigner un ensemble d'entreprises distinctes qui, au sein d'un secteur donné, suivent des stratégies proches ou similaires. La « stratégie », dans cet esprit, représente ce que font les entreprises et la manière dont elles le font. Cela inclut les politiques de R&D, d'approvisionnement, de production, de positionnement (en particulier le choix des produits ou services offerts et des marchés servis), les politiques de distribution, de prix, etc. Depuis le début des années soixante-dix, le thème des groupes stratégiques a fait l'objet d'un nombre considérable de travaux aussi bien théoriques qu'empiriques (Mbengue, 1992). Les travaux consacrés aux groupes stratégiques fournissent un cadre utile pour la définition et l’opérationalisation de la dimension économique et objective de la structure concurrentielle (Caves et Porter, 1977; Porter, 1979, 1980; Cool, 1985; Fiegenbaum, 1987). C’est ainsi qu’ à la suite de Nohria et Garcia-Pont (1991) nous utiliserons dans cette recherche les groupes stratégiques pour représenter la structure concurrentielle objective. La théorie des groupes stratégiques postule l’existence d’un lien direct entre l’appartenance, pour une entreprise, à un groupe stratégique donné et les choix stratégiques subséquents de uploads/Management/ aims2003-848.pdf
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- Publié le Jan 01, 2022
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