AIMS 2005 XIVième Conférence Internationale de Management Stratégique, Pays de
AIMS 2005 XIVième Conférence Internationale de Management Stratégique, Pays de la Loire, Angers 2005 – http://www.strategie-aims.com/ 1 La représentation de la Responsabilité Sociale des Entreprises : une confrontation entre les approches théoriques et les visions managériales Mourad Attarça Maître de Conférences Université Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines LAREQUOI, laboratoire de recherche en management 47, boulevard Vauban - 78047 Guyancourt mourad.attarca@quoi.uvsq.fr Thierry Jacquot Maître de Conférences Université Nancy 2 GREFIGE – IAE Nancy 13, rue Michel Ney - 54037 Nancy Cedex thierry.jacquot@univ-nancy2.fr Résumé : Le thème de la Responsabilité Sociale de l’entreprise (RSE) est à la mode. Le succès de cette notion auprès des dirigeants d'entreprise traduit la volonté de mieux maîtriser les contraintes sociétales et de favoriser un développement commercial et une performance économique durables. Au-delà des finalités affichées, les préoccupations et les pratiques réelles des entreprises correspondent-elles véritablement aux valeurs véhiculées par le concept de la RSE ? Nous étudions dans cet article la diffusion des principes de la RSE au sein des entreprises à travers leurs discours. Il s’agit de repérer les éléments de convergence et de divergence entre les approches théoriques de la RSE avec les préoccupations manifestées par les entreprises en matière de responsabilité sociale. Nous abordons dans une première partie la variété des thématiques valorisées dans les travaux académiques. Dans un deuxième temps, nous analysons les préoccupations affichées par les équipes dirigeantes en matière de RSE, telles qu'elles sont communiquées aux diverses parties prenantes de l'entreprise. Sur la base d’un échantillon d’entreprises européennes, nous étudions la rhétorique mise en œuvre et les représentations que le discours de la RSE véhicule. Nous confrontons, dans une troisième partie, les préoccupations théoriques et les "postures" managériales en matière de RSE. Mots clés : Responsabilité sociale de l’entreprise, Discours, Management stratégique AIMS 2005 XIVième Conférence Internationale de Management Stratégique, Pays de la Loire, Angers 2005 – http://www.strategie-aims.com/ 2 Introduction Le thème de la Responsabilité Sociale de l’entreprise (RSE) est à la mode : auprès des managers et au sein même des entreprises, auprès des pouvoirs publics et des législateurs, mais également auprès de la communauté académique. La notion de la RSE vient s’ajouter à des nombreux autres concepts (entreprise citoyenne, management sociétal, éthique des affaires, développement durable…) qui renvoient peu ou prou à la même idée : l’entreprise doit être considérée comme une institution sociale dont les activités s’inscrivent dans la vie de la Cité et qui, à ce titre, est responsable vis-à-vis de tous les autres acteurs de la société. Le succès de cette thématique n’est vraisemblablement pas dû au hasard. Nos sociétés modernes sont à la recherche de nouveaux repères face aux bouleversements qu’elles connaissent : menaces sur les ressources écologiques, accélération du rythme des innovations technologiques, mondialisation et globalisation des économies, développement de la société de l’information, globalisation des marchés financiers, etc. L'émergence de la thématique de la responsabilité sociale de l’entreprise fait également écho à l'évolution de la répartition des pouvoirs au sein de nos sociétés : concentration du pouvoir économique entre les mains de grandes firmes multinationales, recul du pouvoir des puissances publiques, développement de l'économie financière au détriment de l’économie réelle, accroissement de l'écart entre les pays les plus riches et les pays les plus pauvres, etc. Comme le souligne Buccholz (1996), il y eut prise de conscience collective que la performance économique ne conduit pas nécessairement au bien-être de la société et au progrès social : destruction de l’environnement, insécurité dans le travail, discrimination vis-à-vis de certains groupes sociaux, etc. Le développement de la notion de RSE peut ainsi apparaître comme le reflet d’une volonté de définir de nouvelles règles -économiques, sociales, écologiques- permettant un meilleur-être, une meilleure cohabitation entre tous les acteurs de la société. L’idée de développement durable incarne cette volonté de définir de nouvelles règles de vie commune. Il s’agit de "répondre aux besoins présents sans compromettre la capacité pour les générations futures de satisfaire les leurs" (rapport Bruntland, Nations-Unis, 1987), mais aussi de concilier, protection de l’environnement naturel (Planet), développement social (People) et développement économique (Profit). Du point de vue des entreprises, la RSE se traduit par "l’intégration volontaire de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et leurs relations avec leurs parties prenantes" (Livre vert de la Commission européenne sur la responsabilité sociale des entreprises, 2001). Une des manifestations les plus remarquables de la prise en compte par les firmes des enjeux sociétaux est la multiplication des chartes éthiques, des codes de bonne conduite et autres codes de valeurs qui sont adoptées par les d'entreprises (Alpha, 2004). L’appropriation par les dirigeants et les managers du vocabulaire issu de la RSE semble également indiquer une certaine adhésion aux valeurs de responsabilités sociales. Cela traduit la volonté des entreprises de mieux maîtriser les contraintes sociétales et de favoriser un développement commercial et une performance économique durables. Ainsi, pour certains dirigeants, la responsabilité sociétale est vécue comme une nouvelle contrainte, alors que pour d’autres, il s’agit d’une opportunité pour créer une image valorisante et manifester un certain volontarisme social. Pourtant, au-delà des finalités affichées, les préoccupations et les pratiques réelles des entreprises correspondent-elles véritablement aux valeurs véhiculées par le concept de la RSE ? En effet, la mise en avant des grands principes d’entreprise citoyenne, de développement durable ou d’éthique des affaires révèle également des effets de mode et un certain "marketing sociétal". Quelle est alors la part du discours et des stratégies symboliques dans les engagements sociétaux des entreprises ("éthique ou cosmétique" pour reprendre l’alternative célèbre mise en évidence par P.F. Smets) ? Et, au-delà, comment l’entreprise gère-t-elle les contradictions potentielles entre les intérêts économiques et les attentes sociales des différents stakeholders ? Nous nous proposons dans cet article d’étudier la diffusion des principes de la RSE dans les entreprises à travers leurs discours. Il s’agit de repérer les éléments de convergence et de divergence AIMS 2005 XIVième Conférence Internationale de Management Stratégique, Pays de la Loire, Angers 2005 – http://www.strategie-aims.com/ 3 entre les approches théoriques de la RSE avec les préoccupations manifestées par les entreprises en matière de responsabilité sociale. Dans un premier temps, nous aborderons la variété des thématiques valorisées dans les travaux académiques. En effet, le concept de RSE recouvre des thématiques et des problématiques très diversifiées : relations sociales, conditions de travail, protection de l’environnement, développement durable, entreprise citoyenne, etc. Cette première partie de notre contribution visera à faire le point sur les orientations de la RSE telles qu'elles sont développées dans les travaux académiques. Dans un deuxième temps, nous analyserons les préoccupations affichées par les équipes dirigeantes en matière de RSE, telles qu'elles sont communiquées aux diverses parties prenantes, et leur valorisation sélective. Sur la base d’un échantillon d’entreprises européennes, l’étude de la rhétorique mise en œuvre et des représentations que le discours de la RSE véhicule, conduira à comparer les orientations des entreprises en matière de RSE au regard des orientations académiques actuelles. Nous serons ainsi en mesure, dans une troisième partie, de porter un jugement critique sur la convergence des préoccupations théoriques et des "postures" managériales. 1. La Responsabilité Sociale de l’Entreprise : principes, concepts et limites 1.1. Principes théoriques de la responsabilité sociale de l’entreprise La notion de la responsabilité sociale - ou sociétale1 - de l’entreprise (RSE) est fondée sur l’idée que les entreprises doivent assumer des responsabilités qui vont au-delà de leur sphère d’activités directe. Les activités économiques de l’entreprise peuvent se traduire par des externalités négatives pour l’ensemble de la société : pollution, chômage, pauvreté, insécurité, etc. Cette théorie -ou cette doctrine- se veut une réponse aux thèses défendues par plusieurs auteurs sur le pouvoir disproportionné dont disposent les entreprises et leurs dirigeants dans nos sociétés modernes (Bearle et Means, 1932 ; Bowen, 1953 ; Mills, 1956)2. Ainsi, de part le pouvoir dont elles disposent, les entreprises ont des obligations morales vis-à-vis de la société : le pouvoir (économique, financier, technologique…) implique la responsabilité (Frederick, 1994). L’approche théorique de la RSE rejoint celle des parties prenantes, dans sa version normative. L’entreprise -par l’intermédiaire de ses dirigeants- a l’obligation morale de répondre équitablement aux demandes de toutes ses parties prenantes : actionnaires, consommateurs, riverains, société civile en général, pouvoirs publics, etc. (Freeman et Evan, 1990). Le concept de RSE renvoie à une vision de l’entreprise dont la finalité ne serait pas celle d’accumuler des richesses au profit de ses seuls actionnaires mais de trouver un équilibre entre les intérêts, nécessairement hétérogènes et parfois contradictoires, de toutes ses parties prenantes. Les intérêts de l’entreprise doivent être ainsi des intérêts éclairés (enlightnement) c'est-à-dire des intérêts raisonnables et équilibrés (Frederik, 1994). Une entreprise socialement responsable a ainsi nécessairement une approche à long terme de ses objectifs, de sa stratégie et de ses bénéfices. Le principe théorique de la RSE postule par ailleurs qu’un comportement responsable n’est pas incompatible avec une meilleure performance financière. Un comportement socialement responsable permet de créer un environnement institutionnel favorable à l’exercice des activités économiques de l’entreprise. Frederik (1994) précise qu’une acceptation volontaire des principes de responsabilités est toujours préférable à la réglementation ou à l’intervention contraignante des pouvoirs publics. uploads/Management/ aims2005-603.pdf
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- Publié le Nov 30, 2021
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