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40 ISSN 1712-8056[Print] ISSN 1923-6697[Online] www.cscanada.net www.cscanada.org Canadian Social Science Vol. 13, No. 9, 2017, pp. 40-55 DOI:10.3968/9852 Copyright © Canadian Academy of Oriental and Occidental Culture Communiquer pour Interpréter: Cas de l’Interprète en Situation de Dialogue Raymond Jean Rocher [a],*; CHEN Xiangrong [a] [a]French Department, Guangdong University of Foreign Studies, Guangzhou, China. *Corresponding author. Supported by Guangdong University of Foreign Studies (GDUFS). Received 12 June 2017; accepted 15 August 2017 Published online 26 September 2017 Résumé Dans cet article, nous nous proposons de distinguer différents modèles de l’interprétation élaborés par des chercheurs en interprétation dont les travaux ont traités de la communication dans le cadre d’une relation tripartite en face-à-face entre des interlocuteurs et un interprète. A travers la trajectoire évolutive de ces modèles nous tenterons de mettre en valeur des paramètres communs permettant d’identifier une compétence de communication spécifique à l’interprétation de dialogue. A l’issue desquels nous discuterons de la légitimité du droit à communiquer de l’interprète. Mots clés: Interprétation de dialogue; Communiquer; Interaction; Modèle Rocher, R. J., & Chen, X. R. (2017). Communiquer pour Interpréter: Cas de l’Interprète en Situation de Dialogue. Canadian Social Science, 13 (9), 40-55. Available from: http://www.cscanada.net/index.php/css/article/view/9852 DOI: http://dx.doi.org/10.3968/9852 INTRODUCTION Après maintes années d’expérience et d’observation de l’interprétation, nous avons remarqué qu’à l’issue d’interactions, nombre d’interlocuteurs attachent une grande importance à la communication lorsqu’ils évaluent la compétence de l’interprète. Par conséquent, nous sommes partis du constat suivant: interpréter, c’est communiquer. Aussi, à partir de ce postulat, nous avons élaboré notre réflexion sous l’angle spécifique de la compétence de communication de l’interprète de dialogue. A travers nos toutes premières investigations, nous nous sommes rendus compte que la compétence de communication était un sujet sans définition théorique concrète et précise, ni élaboration systématique, et que l’enseignement des langues étrangères et la recherche en interculturel étaient quasiment les seuls domaines où les chercheurs portaient leur attention à la compétence de communication à travers des travaux sur la formation et le développement des relations interpersonnelles. 1 Lors de nos recherches, nous avons constaté que les études concernant la compétence de communication de l’interprète étaient inexistantes que ce soit en Occident ou en Chine. Selon nos sources, seules des recherches en sciences du langage, en sciences sociales et en sciences de la communication ont été publiées dont la quasi totalité est le fruit du travail de chercheurs principalement issus du continent nord-américain. 2 Toutefois si en Occident les recherches en compétence de communication prospèrent déjà depuis les années 1950, rien, à notre connaissance, n’a encore été réellement exploré dans le domaine de l’interprétation. Pour ce qui concerne le contexte chinois, nous savons que si la communication interculturelle y connait un certain succès, les travaux académiques sur la compétence de communication en situation d’interaction restent en devenir et encore plus dans le jeune domaine de l’interprétation. 1 Concernant la compétence de communication interculturelle, le nombre de concepts est estimé à environ 300 (Spitzberg et Chagnon, 2009). 2 De manière spécialisée, la compétence de communication a été analysée plus ou moins nommément par les représentants de trois champs disciplinaires que sont les sciences du langage (Hymes, Canale, Swain, etc.), sciences sociales (Goffman, Bourdieu, Crozier, etc.) et les sciences de la communication (Wiemann, Spitzberg, Cupach, etc.). On peut en déduire qu’à ce jour, l’étude de la compétence de communication se situe pour l’essentiel à la croisée de ces trois champs de recherche. 41 Copyright © Canadian Academy of Oriental and Occidental Culture Raymond Jean Rocher; CHEN Xiangrong (2017). Canadian Social Science, 13(9), 40-55 Compte-tenu de l’historique des recherches en compétence de communication, nous avons l’intention d’orienter notre analyse à la fois sous l’angle socio- culturel et sous l’angle interactif et interpersonnel dans le domaine de l’interprétation de dialogue, tout en retenant l’esprit d’interdisciplinarité propre à la recherche en communication. Fondamentalement, la question posée par cet article est: qu’est-ce qu’interpréter en situation de dialogue? Est-ce seulement transmettre des informations ou s’engager pleinement dans la communication? Dans la présente étude, nous tenterons d’engager une réflexion à partir de trois types de modèles de l’interprétation ici dénommés linéaire, triangulaire et tripolaire. Au regard de l’évolution des représentations des modes d’échange, nous cherchons à comprendre la structure de la communication avec interprète, ce qui nous conduit à nous poser la question d’une interprétation de dialogue relevant pour l’essentiel d’une communication au même titre que des échanges unilingues directs. Et de fait, de savoir si l’engagement de l’interprète dans la communication participe d’un droit à communiquer revendiquant un statut similaire aux autres participants à l’interaction. 1. INTERPRÉTER EN SITUATION DE DIALOGUE 1.1 Le Concept d’Interprétation de Dialogue Le concept d’interprétation de dialogue a été développé à partir des travaux de Ranier Lang (1978) en interprétation juridique. Dans les faits, il a été conçu pour désigner une interaction entre deux parties assistée par un interprète se déroulant dans un format dialogique, à savoir un échange se développant généralement sous la forme d’une communication en face-à-face où chacune des parties impliquée est un individu ayant la possibilité de parler et d’agir en son nom propre pour un objectif commun. Plus que l’interprétation de liaison, la notion d’interprétation de dialogue met en relief la dynamique du discours interactif des échanges tripartites (à savoir une médiation de l’interprète entre deux parties). L’interprétation de dialogue n’est pas limitée aux situations intra-sociales, même si l’interprétation de dialogue est principalement utilisée dans le cadre de l’interprétation en milieu social. 3 Dans le domaine des études en interprétation, l’interprétation de dialogue (Dialogue Interpreting) 3 Voir les ouvrages suivants: Lang, R., 1978. Behavioral Aspects of Liaison Interpreters in Papua New Guinea: some Preliminary Observations. In Gerver, David/Sinaiko, H. Wallace (Eds.), Language Interaction and Communication (pp.231-244). New York/ London: Plenum; Wadensjö, C., 1992. Interpreting as Interaction - On Dialogue Interpreting in Immigration Hearings and Medical Encounters. (Dissertation): Linköping: Linköping University, Department of Communication Studies; Triadic Exchanges: Studies in Dialogue Interpreting (Mason, 2001). se situe dans un paradigme défini par une interaction basée sur le discours dialogique (dialogic discourse- based interaction). 4 Afin de repositionner dans l’histoire des études en interprétation ce paradigme du discours dialogique en interaction, il faut savoir que les thèses doctorales de Cynthia Roy (1989) et Cecilia Wadensjö (1992) ont fourni à la fois un ensemble d’approches conceptuelles cohérentes à l’interprétation de dialogue et une large base à la méthodologie analytique du discours, proposant ainsi ce nouveau paradigme pour l’étude de l’interprétation. Ce même paradigme a pris de l’ampleur au tournant des années 2000 à travers des études empiriques basé sur le discours, dont des travaux sur le rôle du contexte et les dynamiques de l’interaction en communication face-à-face (Wadensjö, 1998), sur le «mythe de la neutralité» dans la langue des signes en interprétation (Metzger, 1999) et sur le «mythe de l’invisibilité» en interprétation dans le milieu médical (Angelelli, 2001). L’engouement pour le paradigme du discours dialogique en interaction a été clairement associé à la reconnaissance croissante de l’interprétation en milieu social comme un domaine important de la pratique professionnelle et donc un domaine fécond de la recherche. De plus, il est important de souligner que le cadre de recherche est issu des études du discours sociologique et sociolinguistique et pour partie seulement du domaine de la traductologie. En conséquence, notre étude bien que relevant de l’interprétation laisse transparaître une approche associée à la sociolinguistique inspirée par les travaux d’Erving Goffman (sociolinguistique interactionniste) et de Dell Hymes (ethnographie de la communication). Par ailleurs, ce concept d’interprétation de dialogue en face à face—en présentiel—sous-tend la question d’une compétence à communiquer avec efficacité et appropriété. Nous le savons la définition de cette compétence de communication est multiple et de fait, nous pensons qu’elle a besoin d’être redéfinie au regard de l’activité de celui qui l’exerce, dans notre cas, l’interprétation de dialogue. En la matière, nous supposons qu’elle est un outil permettant à l’interprète d’assurer la gestion de multiples facteurs tels que les individus et leurs discours, les langues et cultures, l’environnement et les techniques associées, les règles et les fonctions. En tant qu’interprète de dialogue, prétendre à une meilleure communication en face à face, ce n’est pas simplement s’en remettre au bon jugement de ses clients, c’est aussi prendre en considération la nature, les moyens et le contexte de la mission d’interprétation sans oublier le statut, la position et les besoins des clients; c’est adopter les techniques les plus appropriées et les plus souples pour réaliser le meilleur résultat en économisant l’effort. De nature interpersonnelle et interculturelle, cette compétence de 4 Voir Introducing Interpreting Studies de l’interprète autrichien Franz Pöchhacker. Copyright © Canadian Academy of Oriental and Occidental Culture Communiquer pour Interpréter: Cas de l’Interprète en Situation de Dialogue 42 communication permet à l’interprète de mobiliser des savoirs afin de s’ajuster à un milieu, de s’adapter à une multiplicité de situations et d’assurer sa tâche de manière appropriée et efficace dans un contexte d’interaction spécifique. De fait, nous la concevons comme un pilier majeur de la compétence en interprétation de dialogue. Il nous faut à présent aborder la question des modalités de la communication de uploads/Management/ communiquer-interprete.pdf

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  • Publié le Mar 16, 2022
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