Sujet – L’analyse des classes sociales de Marx est-elle encore pertinente aujou

Sujet – L’analyse des classes sociales de Marx est-elle encore pertinente aujourd’hui ? En avril 2015, le quotidien L’Humanité se pose une question : « Les classes sociales sont-elles toujours un point de répère pertinent dans notre société ? ». Cette question paraît intéressante dans la mesure où Marx a élaboré son analyse au milieu du XIX°, au moment de la Révolution Industrielle. Or de nombreuses transformations économiques et sociales ont eu lieu depuis plus d’un siècle et demi. L’analyse marxiste des classes part du principe que les critères de différenciation sont des inégalités économiques. Celles-ci génèrent alors une lutte des classes qui crée une conscience de classe. Or, la croissance des 30 Glorieuses a généré une moyennisation de la société qui rend moins pertinentes Ces différenciations. Cependant, la fin des 30 Glorieuses a interrompu le processus de moyennisation. L’accroissement des inégalités économiques remet alors au goût du jour l’analyse des classes de Marx I. L’analyse de Marx n’est plus adaptée pour expliquer la stratification sociale actuelle L’évolution économique et sociale que connaissent les PDEM, à partir des années 50, rend caduque l’analyse de Marx. En effet, les transformations sociales de la France de la seconde moitié du XXe siècle sont marquées par une transformation numérique des classes sociales et par le développement de la société de consommation qui vont dans le sens d'une moyennisation. A. Les critères de différenciation de l’analyse marxiste sont inadaptés aux sociétés post- industrielles 1. L’analyse des classes de Marx Marx étudie les sociétés occidentales au milieu du XIX° siècle, au moment où l’industrialisation génère un creusement des écarts entre deux classes. Il les explique par la plus-value que réalisent les propriétaires sur la seule vraie richesse: la force de travail de leurs salariés. Selon Marx l’histoire de toute société jusqu’à nos jours n’est que l’histoire de la lutte des classes. Cette lutte s’est caractérisée par l’opposition entre les deux classes fondamentales dans tous les modes de production. Dans le système capitaliste, les deux classes en opposition sont la bourgeoisie, propriétaire des moyens de production et les ouvriers qui sont exploités, car la classe bourgeoise extorque une partie de sa création de richesses. Mais les inégalités économiques et sociales ne suffisent pas pour qu’un groupe devienne une classe. Plusieurs étapes sont indispensables. La première est que les individus doivent vivre de manière semblable et donc exercer le même travail. Ces conditions objectives créent alors une classe en soi. Ces conditions, si elles sont nécessaires ne sont pas suffisantes. En effet, tant que les individus n’ont pas pris conscience de leur appartenance à une même communauté ayant des intérêts semblables, ils sont en concurrence et ne sont pas solidaires. Il faut que la classe en soi devienne une classe pour soi. Il est alors impératif qu’ils prennent conscience des relations antagoniques qui les lient aux autres classes : la classe sociale n’existerait réellement que dans la mesure où elle aurait conscience d’elle- même, mais il ne peut y avoir de conscience de classe sans luttes de classes préalables. La condition suffisante, selon Marx, pour que la classe prenne conscience d’elle- même est qu’elle entre en lutte contre d’autres classes : c’est la lutte qui détermine la prise de conscience. 2. Ne correspond pas à la réalité de la seconde moitié du XX° siècle Or, le processus de croissance entamée au début des années 50 va être à l’origine d’une transformation de la structure sociale qui rend peu pertinente l’analyse de Marx. Les deux classes fondamentales de l’analyse de Marx sont de moins en moins dominantes numériquement (doc 1). En effet, les parts respectives dans la population active des indépendants (ceux qui possèdent les moyens de production) et des ouvriers diminuent : de 1980 à 2000 les ouvriers sont passés de 35 % à 25 % de la population active. La part des indépendants (agriculteurs et artisans) a été divisée par 2 : de 15 à 8% des actifs. Il n’y a donc plus de classes au sens marxiste du terme, car il n’y a plus deux groupes économiquement opposés. Il n’y a plus réellement ni propriétaires, ni exploités puisque la part des emplois salariés a augmenté et représente près des 80 % des emplois aujourd’hui. La conséquence : le sentiment d’appartenance à une classe sociale devient moins prégnant dans les années 60 : la part des français ayant le sentiment d’appartenir à une classe sociale est passée de 61 à 59% entre 1964 et 1967. Car la condition essentielle de la prise de conscience : la lutte des classes semble peu pertinente aux français : 37% des français considèrent en 1967 que la lutte des classes n’est pas une réalité (doc 3). Ce sentiment s’explique par la moyennisation de la société. B. La moyennisation de la société Les inégalités quantitatives et qualitatives diminuent. La plus grande partie de la population appartient alors à une vaste classe moyenne. 1. La réduction des inégalités quantitatives L’augmentation des revenus permise par la croissance a d’abord profité aux plus pauvres puisque leur revenu augmente plus rapidement que celui des autres catégories (doc 2). Ainsi, entre 1955 et 1960, le pouvoir d’achat du salaire ouvrier a augmenté de 4,8 % par an en moyenne. Cette croissance rapide permettait alors à un jeune ouvrier d’espérer en fin de carrière un revenu proche de celui des cadres qu’il voit, et à un ouvrier plus âgé d’attendre pour ses enfants un sort nettement meilleur au regard du sien propre, puisque le temps de rattrapage du salaire ouvrier vers celui des cadre était d’environ 30 ans (doc 2) 2. La réduction des inégalités qualitatives Ce rapprochement des styles de vie est visible dans la réduction des inégalités de consommation. Ainsi, en 1985, les inégalités de consommation entre les 10% les plus riches et les 10% les plus pauvres sont relativement faibles : les 10% des ménages les plus riches dépensaient 2 fois plus que les 10% les ménages les plus pauvres. Certaines consommations, considérées comme ostentatoires et réservées à une élite, se démocratisent : c’est le cas des dépenses de communication. En 1995, les 10% les plus riches dépensaient 2 fois plus pour ces achats que les 10% les plus pauvres ; en 2005, l’écart n’est que de 1,8(document 4). Cette réduction des inégalités de consommation engendre alors un rapprochement des valeurs. Inglehart montre ainsi qu’une fois ses besoins matériels immédiats satisfaits, l’homme tourne ses préférences vers des besoins non matériels, de nature intellectuelle ou esthétique. Les revendications changent d’après R.Inglehart : de matérielles, elles deviennent immatérielles. Une grande partie de la population partage ainsi de nouvelles valeurs. Cette réduction des inégalités quantitatives et qualitatives se traduit alors par la constitution d’une vaste classe moyenne et la disparition des extrêmes. Si une grande partie de la population appartient à la même classe : la classe moyenne, il n’y a donc plus de classes au sens marxiste. En effet, selon Marx, la notion de classe impose un conflit ; il ne peut y avoir de conflit avec une seule classe. II. La théorie marxiste des classes connaît un regain d’actualité avec la crise Or, ce mouvement de moyennisation semble remis en cause par la crise à la fin des années 70. Les inégalités quantitatives et qualitatives augmentent, ce qui redonne de l’actualité à l’analyse de Marx. A. Des inégalités persistantes 1. Des inégalités économiques En effet, depuis la fin des années 70, les inégalités de revenu augmentent à nouveau. On est alors passée d’une société en toupie au double-diamant. Dans un ouvrage publié en 1999, The New Class Society, E.Wysong , R.Perrucci et D.W.Wright dessinent les nouveaux contours de la société américaine. Elle est formée sur la mode d’un « double diamant » ». Le premier diamant est composé de 20 % de privilégiés, ceux qui encadrent une équipe ou dispose d’une expertise reconnue ; le seconde est formée « de la nouvelle classe laborieuse qui représente 80 % de la population : salariés et travailleurs indépendants d’exécution. Ce phénomène se retrouve en France où la crise a créé une coupure entre les groupes, ce qu’E .Todd, puis J .Chirac ont appelé « la fracture sociale ». En effet, le phénomène de rattrapage des cadres par les ouvriers est stoppé (doc 2) : il fallait 35 ans en 1975 pour qu’un ouvrier puisse avoir le niveau de vie d’un cadre ; en 2007, il faut 166 ans. L’analyse de Marx paraît aujourd’hui adaptée, puisqu’on retrouve deux groupes aux niveaux de vie très différents. Simplement, la base de l’opposition a changé : ce n’est plus seulement la possession de moyens de production qui fait l’appartenance à une classe, mais la possession d’un capital culturel. Plutôt que de parler de classe ouvrière, on parlera de classes populaires. En effet, les ouvriers ne sont pas les seuls membres de ce groupe ; on rajoute les employés. Les membres de ce groupe ont 3 points commun : un statut social dévalorisé, un faible revenu, un niveau de diplôme peu élevé. En 2012, ouvriers et employés représentent près de la moitié uploads/Management/ correction-classes-sociales-sont-elles-de-retour.pdf

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  • Publié le Jul 14, 2022
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