149 L’Autre qui n’existe pas et ses Comités d’éthique Éric Laurent et Jacques-

149 L’Autre qui n’existe pas et ses Comités d’éthique Éric Laurent et Jacques- Alain Miller Neuvième séance du séminaire (mercredi 29 janvier 1997) Nous avons aujourd’hui au séminaire, un invité, avec lequel nous allons parler de ce moment de l’expérience analytique, qui s’appelle, depuis Lacan, la passe. Et bien que cette invitation était convenue il y a un an, avant que ne soit fixée et la modalité de ce séminaire et son titre, ça tombe bien. Ça tombe bien dans la mesure où le moment qui s’appelle la passe est précisément celui où est supposé apparaître au sujet que l’Autre n’existe pas, où au moins, où un autre rapport est supposé se nouer entre le sujet et l’inexistence de l’Autre. Puisque cet invité ne vous est pas, pour la plupart, connu, je vais vous le présenter brièvement, tout d’abord vous le présenter au présent, par ce qu’il est aujourd’hui. Au présent, c’est ce qui s’appelle dans l’institution analytique, d’orientation lacanienne, un A.E, un analyste de l’École. Ce qui veut dire que son expérience dans l’analyse, comme analysant, a reçue une sanction collective, émanant de l’institution, émanante d’une commission déléguée de cette institution qui a le pouvoir de reconnaître à quelqu’un ce titre. Ce titre lui a été reconnu par l’école qui s’appelle École Européenne de psychanalyse, et validé, répercuté dans l’école brésilienne de psychanalyse, dans la mesure où notre invité exerce la psychanalyse à San Salvador de Bahia au Brésil. Mais dans la mesure où la sanction dont j’ai parlé concerne un parcours, certes un parcours analytique subjectif, je ne veux pas manquer de dire un mot de son parcours vu de l’extérieur. Donc un petit mot pour vous le présenter au passé. Bernardino Horne, puisque c’est de lui qu’il s’agit, est argentin, et sa formation comme analysant, comme analyste, s’est déroulée à Buenos Aires, à Londres et à Paris. À Buenos Aires, dans l’Association psychanalytique argentine, société composante de l’IPA, où il a été l’analysant d’un analyste notoire, dont certains livres sont publiés en France, Angel Garma, et en contrôle avec un certain nombre de luminaires de l’époque. Ensuite il a poursuivi par des contrôles à Londres, en particulier avec Donald Metzer, et enfin il a poursuivi sa formation comme analysant à Paris, et c’est à partir de là qu’il a demandé, comme on dit, à faire la passe. J’ajouterai une petite information pour vous expliquer pourquoi ce collègue argentin est aujourd’hui un analyste à Bahia. Vous devez vous souvenir qu’au début des années soixante-dix l’Argentine a connu une dictature militaire et comme notre collègue était à l’époque engagé dans des activités considérées comme subversives de l’ordre social, et qui d’ailleurs l’étaient, il faut bien le dire, il s’est trouvé contraint de s’exiler et c’est ainsi qu’il s’est retrouvé à cette E. LAURENT, J.-A. MILLER, L'Autre qui n'existe pas et ses comités d'éthique Sém n° 9 - 29/1/97 150 date au Brésil et qu’il y a pris racines et qu’il y est resté depuis lors. Il faut bien dire que, puisque nous sommes à parler cette année du symptôme social, la dictature a été - mettons ça au passé- un symptôme social latino-américain, et qui a marqué l’histoire, le destin de notre collègue. Alors je pense que vous..., j’ai le texte de son intervention, je pense que vous l’écouterez facilement, pour une part, dans la mesure où il fait partie de la même communauté de discours que ceux qui font ce séminaire cette année. Il a le même vocabulaire, il a les mêmes références, et, bien qu’il vienne d’autres langues, et d’autres contrées, c’est la même communauté, transnationale. En même temps vous aurez peut-être un petit peu de difficulté, ça vous forcera à tendre l’oreille, des difficultés de langue parce que le français n’est pas sa langue maternelle, il fait donc un effort spécial pour communiquer en français, et aussi peut-être des difficultés de style, dans la mesure où il use parfois d’un style évocateur et elliptique, qui lui est propre, par exemple son intervention s’appelle Cette ombre épaisse. Il n’en dit pas plus. C’est parce qu’il pense que tout ceux qui sont ici savent tout de suite d’où provient cette expression, c’est-à- dire qu’il nous fait beaucoup de crédit, de loin. Moi j’aurais à dire « L’ombre épaisse » ici, j’éprouverais le besoin de renvoyer à la page 24 de Scilicet numéro 1, où Lacan évoque « cette ombre épaisse qui recouvre, je cite approximativement, qui recouvre le rapport du psychanalysant au psychanalyste ». Donc là nous avons une ellipse, voilà j’ai déjà éclairci la référence, parce que je crois que c’est quand même nécessaire, bien qu’il y ait en effet ici beaucoup de lecteurs de Lacan. Et puis aussi l’extrême précision de ses références. Vous verrez qu’il lit, et qu’il cite, il cite certainement beaucoup plus que nous ne le faisons, les collègues du Champ freudien, et qu’il a une connaissance de cette littérature, la nôtre, précise et voilà quelque chose où nous pourrions en prendre de la graine. J’ajouterai encore que, concernant la passe, la question a été posée, je vais dire un mot d’incitation, dans les termes de « fait ou fiction ? » La passe est-elle un fait ou une fiction ? Certainement, elle est une fiction, pour autant qu’on appelle fiction ce qui existe parce qu’on parle. Toute la psychanalyse, à cet égard, peut être rangée dans le registre de la fiction, et pourtant, et disons plutôt en conséquence, la référence au réel de l’expérience est nécessaire et elle est d’ailleurs constante chez Lacan et on s’aperçoit à partir de Lacan qu’elle est constante chez Freud. Et bien à cet égard je crois qu’on peut dire que Bernardino Horne expose, présente, un certain réalisme de la passe, que c’est sur le réalisme de la passe qu’il met l’accent. Son intervention va en quelque sorte de l’ombre initiale, référence à Lacan, à l’éclair du moment de la passe et le cœur de son exposé est un essai pour caractériser, analyser, décomposer la chute de l’objet à la fin de l’expérience analytique. Et il fait beaucoup de précisions, schémas à l’appui et en trois moments. J’ajouterai que son point de départ, comme vous l’entendrez, c’est, chez Freud, le point de vue dit économique, c’est-à-dire qu’il oppose le quantitatif E. LAURENT, J.-A. MILLER, L'Autre qui n'existe pas et ses comités d'éthique Sém n° 9 - 29/1/97 151 libidinal au registre, à la dimension sémantique, et que, dans le cas de ce réalisme de la passe, Bernardino Horne donne une grande place au concept de fixation, et caractérise comme un plaisir dans l’inertie statique, enfin vous l’entendrez, et il propose une distinction, je le souligne parce qu’il le fait rapidement, entre le statut mobile et le statut immobile de la jouissance. Enfin il propose, il saisit, quelque chose qu’il appelle la deuxième rencontre avec la chose freudienne, la deuxième rencontre avec Das Ding, et il semble que, peut-être je n’ai pas tout lu, il me semble que c’est vraiment quelque chose qui lui est propre, de caractériser ainsi par ce biais la fin de l’analyse. Donc je l’invite maintenant, s’il veut bien, à prendre place à cette tribune et à nous délivrer son intervention. Bernardino Horne : Je dois dire que ça me fait très plaisir d’être ici parmi vous. Je remercie Jacques-Alain Miller et Éric Laurent, de me donner l’occasion de vous parler de quelques unes des conséquences de la passe, et de me permettre de le faire de cette place où se définit, s’articule, l’orientation lacanienne du Champ freudien, orientation qu’emprunte de façon marquante, mon point de vue. Je vous présenterai quelques réflexions concernant la question du quantitatif à la fin de l’analyse. De l’Esquisse jusqu’à Analyse finie et infinie, le point de vue économique constitue un des axes de la réflexion poursuivie par Freud. Cependant, dans son testament, comme Lacan appelle ses derniers textes, Freud regrette de ne pas l’avoir suffisamment travaillé pour lui donner la place qu’il mérite dans la théorie. J’ai repris le thème à partir de considérations que Freud fait dans L’interprétation des rêves sur les mécanismes de condensation. Dans le travail que j’ai présenté à Buenos Aires, qui s’appelait « La voie de la perplexité », je faisais remarquer que la première interprétation de l’analyste consistait à signaler un élément d’un rêve comme une condensation. Cela implique de signaler un amalgame de jouissance et une convergence de sens. Cela veut dire aussi ouvrir une divergence qui contient le nœud de non-sens. Il s’agit d’un élément de fixation de jouissance qui bloque et freine le désir, lorsqu’il interdit la métonymie et dénonce aussi la jouissance en tant que plaisir dans l’inertie, nirvana. Je vous rappelle que le célèbre mot d’esprit famillionnaire, est une condensation de familier et millionnaire. Il y a dans l’intention de travailler le point de vue quantitatif le danger de tomber dans un modèle du genre hydraulique à la manière dont l’Esquisse était compris auparavant. Cette « ombre épaisse » ? Freud a toujours soutenu l’idée d’un appareil uploads/Management/ cours-09.pdf

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  • Publié le Jui 28, 2022
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