M. Buniva (EC) L’écoute 1 L’écoute, préalable à la communication Le caractère c

M. Buniva (EC) L’écoute 1 L’écoute, préalable à la communication Le caractère chinois qui signifie « écouter » associe divers symboles dont certains représentent les oreilles, les yeux et le cœur ; il indique que, pour bien écouter, il faut accorder à l'autre toute son attention, qu'il ne faut pas se fier uniquement à ses oreilles, mais aussi à ses yeux et à son cœur. Il serait intéressant de savoir quelle proportion de la population écoute de cette manière!... Trop souvent dans le processus de communication, on accorde beaucoup d'importance à l'acte de parler et l'on considère l'écoute comme secondaire. Or, écouter est une aptitude complexe qui requiert une formation et un entraînement, et qui influence toutes les formes de communication. I. On entend beaucoup, on écoute peu... Écouter et entendre sont deux actions différentes. La plupart des gens naissent avec la capacité d'entendre. L'audition est un processus physiologique automatique et involontaire par lequel on perçoit des stimuli sonores comme les sons, les bruits, la voix : c'est un processus dans lequel l'individu est passif. Tandis que dans un processus d'écoute, il est actif. Si les divers éléments de l'appareil auditif d'une personne fonctionnent correctement, son cerveau traite les impulsions électrochimiques qu'elle reçoit afin qu'elle puisse entendre ; mais ce qu'elle choisit de faire avec les impulsions que son cerveau reçoit relève de l'écoute, qui n'est pas nécessairement innée. Par conséquent, alors qu'entendre est une chose qui arrive tout simplement, écouter exige un effort psychologique délibéré et conscient pour interpréter et mémoriser ce que l'on entend. A priori, on pourrait croire que notre écoute est performante. En effet, une étude américaine a révélé que les étudiants de niveau universitaire consacraient autant de temps à l'écoute de médias de communication qu'à la communication interpersonnelle : ils passent 55,4% de leur journée à écouter contre seulement 17,1% à lire, 16,1% à parler et 11,4% à écrire (Adams, 2008). D'ailleurs on estime qu'à 20 ans, un individu a reçu au-moins 10 000 h d'entraînement à l'écoute, 15 000 h à 30 ans, et 20 000 h ou plus à 40 ans... Mais en fait, on surestime beaucoup notre qualité d’écoute : la plupart des gens estiment qu'ils écoutent avec une précision de 70 à 80 % (c’est-à-dire qu'ils croient pouvoir écouter les autres et retenir avec précision 70 à 80 % de leurs messages) ; or, des chercheurs ont montré que l'efficacité d'écoute de la plupart des gens atteint seulement 25 % (Wolving et Gwynn Coakly, 1988) ... M. Buniva (EC) L’écoute 2 II. Comment fonctionne l'écoute ? Le processus d'écoute est plus complexe qu’il n’y paraît et repose sur cinq étapes: la réception, la compréhension, la mémorisation, l'interprétation/évaluation et la réponse. 1. La réception La réception (l'acte d'entendre) est la première étape du processus d'écoute. Notre univers bourdonne de sons qui rivalisent pour obtenir notre attention. En règle générale, on entend ce que l'on veut bien écouter, c'est-à-dire que l'on choisit de prêter l'oreille à certains sons tout en bloquant les autres. Ainsi, on prête d'abord attention à un message (la sélection) qui suscite notre intérêt, ensuite on regroupe les stimuli auditifs (l'organisation) qui aideront à le comprendre (l'interprétation). Cf. par ex. notre capacité, dans un restaurant bondé et bruyant, à n’écouter que la conversation du convive qui est en face de nous… 2. La compréhension La deuxième étape, celle de la compréhension, consiste à faire un rapprochement entre ce que l'on écoute et ce que l'on sait déjà. À cette étape, on peut poser des questions à l'émetteur ou reformuler ses paroles. Hélas, différents facteurs peuvent nuire à la compréhension :  Par exemple, il a été démontré il y a longtemps que certains mots qui font référence à des préjugés ou à des sujets délicats suscitent une réaction émotionnelle chez les récepteurs, ce qui les empêche d'avoir une bonne compréhension du message. Ces mots, appelés « mots d'alerte », provoquent une surdité émotionnelle qui réduit beaucoup l'efficacité de l'écoute (Nichols et Stevens, 1956). Parmi les mots reconnus comme étant des mots d'alerte, mentionnons entre autres : « sexualité », « suicide », « sida », « handicapé » ...  L'environnement (trop chaud, trop froid, trop en désordre) et le locuteur lui- même (s'il parle trop vite, trop lentement, trop fort, trop bas) sont d'autres facteurs qui peuvent nuire à la compréhension.  Enfin, la pensée est plus rapide que la parole…ce qui peut nuire à la concentration sur le message : alors que l'on peut en moyenne saisir plus de 500 mots à la minute, la plupart des gens ne peuvent en prononcer que 125 à 150 ; la rapidité de la pensée laisse donc du temps pour que l'on puisse s'évader mentalement ou rêvasser. L’idéal serait d'utiliser ce temps de réserve pour mieux saisir le message du locuteur en le résumant intérieurement, en posant des questions et en reformulant ses paroles. M. Buniva (EC) L’écoute 3 3. La mémorisation Une fois que le cerveau a attribué un sens au message, il passe à l'étape suivante, celle de la mémorisation, au cours de laquelle on tente de retenir ce que l'on a écouté en vue d'un usage ultérieur. Chacun détermine pour soi les informations qu'il veut emmagasiner dans sa mémoire et celles qu'il peut oublier (on ne peut pas tout mémoriser, oublier certaines données est nécessaire à une bonne santé mentale). Le caractère émotionnel ou la redondance d'un message augmentent les chances de retenir celui-ci. Une fois le message mémorisé, on devrait pouvoir y accéder au besoin. On ne se rappelle toutefois que de 50 % du contenu d'un message aussitôt après l'avoir entendu, et environ 25 % après un certain temps. Pour bien mémoriser un message, on a recours à trois procédés mnémoniques de base :  Le premier est la répétition. Plus on répète une idée, plus on a de chances de s'en souvenir plus tard.  Le deuxième procédé est la reformulation. En résumant dans nos propres mots ce que l'émetteur vient juste de dire, on vérifie si l'on a bien compris ses propos, mais cela aide aussi à les mémoriser.  Le troisième procédé est la visualisation. Visualiser les idées du locuteur, c'est-à-dire relier une image visuelle à un nom, un lieu ou des chiffres, facilite la mémorisation. 4. L'interprétation et l’évaluation Au cours de la quatrième étape, on décode le message en adoptant une perspective dualiste — en considérant le message tant du point de vue de l'émetteur que du récepteur. Lorsqu'on y parvient, on donne alors un sens au message (qui doit correspondre le plus possible au sens donné par l'émetteur), on analyse de façon critique le contenu du message. On distingue alors les faits des inférences, on examine les preuves et l'on relève les mots d'alerte comme les préjugés ou les arguments erronés susceptibles de changer la signification du message. On demeure vigilant en écoutant « entre les lignes » et en évitant de tirer des conclusions hâtives. 5. La réponse Au cours de la dernière étape, celle de la réponse, on réagit de façon verbale ou non verbale au message de l'émetteur. En tant que récepteur, notre rôle est de lui communiquer nos idées, nos besoins et nos émotions sous forme de réactions que l'on nomme « rétroactions » (cf. V-1 plus bas). M. Buniva (EC) L’écoute 4 III. Les types d'écoute Notre écoute varie sensiblement en fonction du but que l’on se fixe face à l’interlocuteur. 1. L'écoute appréciative Lorsque la principale motivation à écouter est le plaisir ou la détente (décompresser, s'évader ou se divertir), on pratique l'écoute appréciative. Écouter de la musique et regarder un film ou un spectacle d'humour, cela n'exige pas que l'on organise ou mémorise les stimuli auditifs. 2. L'écoute informative Lorsqu'on écoute dans le but de recueillir des informations, on pratique l'écoute informative : écouter les consignes du professeur ou du patron, une conférence, une description de tâches ou l'opinion de quelqu'un sur un sujet. 3. L'écoute critique On cherche souvent non seulement à s'informer mais aussi à évaluer ce que l'on entend. Écouter avec un esprit critique permet de déterminer l'utilité, la justesse et la véracité d'un message. Lorsqu'on pratique l'écoute critique, on met à contribution sa pensée critique avant de décider d'accepter, de rejeter ou de nuancer un message. Un penseur critique analyse calmement les preuves et les conclusions présentées par l'émetteur et détermine si elles sont pertinentes ou non. Il écoute attentivement afin de décider si le message de l'émetteur est logique et vaut la peine d'être retenu (Boostrom, 1992). Un bon auditeur critique : reconnaît ce qu'il sait ou ne sait pas; a l'esprit ouvert et prend le temps de réfléchir aux idées énoncées; prête attention tant aux personnes qui partagent son opinion qu'à celles qui ne la partagent pas; cherche des raisons valables d'accepter ou de rejeter une opinion ; prête attention aux non-dits en plus de ce qui est clairement énoncé ; insiste pour obtenir les preuves les plus solides; réfléchit à la corrélation entre les conclusions et uploads/Management/ ecoute-active.pdf

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  • Publié le Jui 11, 2021
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