1 MERCREDI 12 MAI 1971 LITURATERRE 1 Ce mot se légitime de L'Ernout et Meillet:
1 MERCREDI 12 MAI 1971 LITURATERRE 1 Ce mot se légitime de L'Ernout et Meillet: lino, litura, liturarius. Il m'est venu, pourtant, de ce jeu du mot dont il arrive qu'on fasse l'esprit : le contrepet revenant aux lèvres, le renversement à l'oreille. Ce dictionnaire (qu'on y aille) m'apporte auspice d'être fondé d'un départ que je prenais (partir, ici est répartir) de l'équivoque dont Joyce (James Joyce, dis-je) glisse d'a letter à a litter, d'une lettre (je traduis) à une ordure. On se souvient qu'une "messe-haine" à lui vouloir du bien, lui offrait une psychanalyse, comme on ferait d'une douche. Et de Jung encore… Au jeu que nous évoquons, il n'y eût rien gagné, y allant tout droit au mieux de ce qu'on peut attendre de la psychanalyse à sa fin. A faire litière de la lettre, est-ce saint Thomas encore qui lui revient, comme l'œuvre en témoigne tout de son long ? Ou bien la psychanalyse atteste-t-elle là sa convergence avec ce que notre époque accuse du débridement du lien antique dont se contient la (1). Conférence du 12 mai 1971, incluse dans le séminaire D'un discours qui ne serait pas du semblant, au titre de la séance VII. Ce texte lui-même a été publié dans Littérature, n° 3, Paris, Larousse, 1971. Nous donnons la double transcription : à gauche, de l'enregistrement, à droite, de l'édition. enregistrement édition Ce mot, que je viens d'écrire, intitule ce que je vais vous offrir aujourd'hui. Il faut bien, puisque vous êtes convoqués là, que je vous lance quelque chose. C'est évidemment inspiré par l'actualité. C'est le titre dont je me suis efforcé de répondre à une demande qui m'a été faite d'introduire un numéro qui va paraître sur "Littérature et Psychanalyse". Ce mot, lituraterre — je l'ai inventé —, se légitime de l'Ernout et Meillet. Il y en a peut-être ici qui savent ce que c'est: c'est un dictionnaire dit étymologique du latin — ce qui n'est pas complètement vrai. Cherchez à lino, litura, vous trouverez, et puis liturarius. Il est bien précisé que ça n'a rien à faire avec littera, la lettre. Que ça n'ait rien à faire, moi je m'en fous. Je ne me soumets pas forcément à l'étymologie quand je me laisse aller à ce jeu de mots dont on fait à l'occasion le mot d'esprit, le contrepet dans l'occasion évident en revenant aux lèvre et le renversement à l'oreille. Ce n'est pas pour rien que quand vous apprenez une langue étrangère, vous mettez la première consonne de ce que vous avez entendu la seconde, et la seconde, la première. Donc ce dictionnaire, qu'on s'y reporte, m'apporte auspice, d'être fondé du même départ que je prenais d'un premier mouvement, d'un départ au sens de réparti, départ d'une équivoque dont Joyce — c'est James Joyce dont je parle —, dont James Joyce glisse de a letter à a litter, d'une lettre — [à Viki?] — à une ordure. Il y avait, vous vous en souvenez peut-être, mais très probablement vous n'en avez jamais rien su, y avait une mécène qui lui voulait du bien, qui lui offrait une psychanalyse, et même que c'était de Jung qu'elle la lui offrait. Au jeu que nous évoquons, il n'y eût rien gagné puisqu'il allait tout droit, avec ce a letter, a litter, tout droit au mieux de ce que l'on peut attendre de la psychanalyse à sa fin. A faire litière de la lettre, est-ce saint Thomas encore — vous vous souvenez peut-être, ou vous n'avez jamais su : sicut palea —, est-ce Saint Thomas encore, qui revient à Joyce, comme son œuvre en témoigne tout au long ? Ou bien est-ce la psychanalyse qui atteste, sa convergence avec ce que notre époque accuse d'un débridement du lien, du lien antique dont se 2 LITURATERRE contient la pollution dans la culture ? J'avais brodé là-dessus comme par hasard un peu avant le mai de 68, pour ne pas faire défaut, ce jour-là, aux paumés de ces affluences que je me trouve maintenant déplacer, quand je fais visite quelque part : c'était à Bordeaux [, le spectacle (?)]. La civilisation, y rappelai-je en prémisse, c'est l'égout. Il faut dire sans doute, que c'est peu après que ma proposition d'octobre 67 ait été accueillie comme on sait, c'est-à-dire dans doute que, en jouant de ça, j'étais un peu las de la poubelle à laquelle j'ai rivé mon sort. Pourtant, on sait que je ne suis pas seul à, pour partage, l'avouère. L'avouère, pour prononcer à l'ancienne, l'avoir dont Beckett fait balance au doit qui fait déchet de notre être. Cet avouère sauve l'honneur de la littérature et ce qui m'agrée assez me relève du privilège que je pourrais croire tenir de ma place. La question est de savoir si ce dont les manuels semblent faire étal depuis qu'ils existent — je parle des manuels de littérature —, soit que la littérature soit accommodation des restes. Est-ce affaire de collocation dans l'écrit, de ce qui d'abord primitivement serait chant, mythe parlé, procession dramatique ? Pour la psychanalyse, qu'elle soit appendue à l'Œdipe — l'Œdipe du mythe — ne la qualifie en rien pour s'y retrouver dans le texte de Sophocle. C'est pas pareil. L'évocation par Freud d'un texte de Dostoïevski ne suffit pas pour dire que la critique de texte, jusqu'ici chasse gardée du discours universitaire, ait reçu de la psychanalyse plus d'air. Ici pourtant, mon enseignement a place dans un changement de configuration qui actuellement, sous couleur d'actualité, actuellement s'affiche d'un slogan de promotion de l'écrit. Mais ce changement — dont d'autres témoignages, par exemple que ce soit de nos jours qu'enfin Rabelais soit lu — montre qu'il repose peut-être sur un déplacement d'intérêt à quoi je m'accorde mieux. Je suis, comme auteur, moins impliqué qu'on n'imagine. Mes Écrits : un titre plus ironique qu'on ne croit puisqu'il s'agit, en somme, soit de rapports, qui sont fonction de Congrès soit, disons, j'aimerais bien qu'on les entende comme ça, des lettres ouvertes où je [ne?] fais sans doute question, chaque fois, [que?] d'un pan de mon enseignement, mais enfin, ça en donne le ton. Loin en tout cas de me commettre dans ce frotti-frotta littéraire, dont se dénote le psychanalyste en mal d'invention, j'y dénonce la tentative immanquable à démontrer l'inégalité de sa pratique à motiver le moindre jugement littéraire. Il est pourtant frappant que ce recueil de mes Ecrits, je l'ai ouvert d'un article que j'isole en l'extrayant de sa chronologie — la chronologie y fait règle — et que là, il s'agisse d'un conte, lui- pollution dans la culture. J'avais brodé là-dessus, comme par hasard un peu avant le mai de 68, pour ne pas faire défaut au paumé de ces affluences que je déplace où je fais visite maintenant, à Bordeaux ce jour-là. La civilisation, y rappelai-je en prémisse, c'est l'égout. Il faut dire sans doute que j'étais las de al poubelle à laquelle j'ai rivé mon sort. On sait que je ne suis pas seul, à, pour partage, l'avouer. L'avouer ou, prononcé à l'ancienne, l'avoir dont Beckett fait balance au doit qui fait déchet de notre être, sauve l'honneur de la littérature, et me relève du privilège que je croirais tenir de ma place. La question est de savoir si ce dont les manuels semblent faire étal, soit que la littérature soit accommodation des restes, est affaire de collocation dans l'écrit de ce qui d'abord serait chant, mythe parlé, procession dramatique. Pour la psychanalyse, qu'elle soit appendue à l'Œdipe, ne la qualifie en rien pour s'y retrouver dans le texte de Sophocle. L'évocation par Freud d'un texte de Dostoïevski ne suffit pas pour dire que la critique de textes, chasse jusqu'ici gardée du discours universitaire, ait reçu de la psychanalyse plus d'air. Ici mon enseignement a place dans un changement de configuration qui s'affiche d'un slogan de promotion de l'écrit, mais dont d'autres témoignages, par exemple, que ce soit de nos jours qu'enfin Rabelais soit lu, montrent un déplacement des intérêts à quoi je m'accorde mieux. J'y suis comme auteur moins impliqué qu'on n'imagine, et mes Écrits, un titre plus ironique qu'on ne croit : quand il s'agit soit de rapports, fonction de Congrès, soit disons de "lettres ouvertes" où je fais question d'un pan de mon enseignement. Loin en tout cas de me commettre en ce frotti-frotta littéraire dont se dénote le psychanalyste en mal d'invention, j'y dénonce la tentative immanquable à démontrer l'inégalité de sa pratique à motiver le moindre jugement littéraire. Il est pourtant frappant que j'ouvre ce recueil d'un article que j'isole de sa chronologie, et qu'il s'y agisse d'un conte, lui-même bien particulier de ne pouvoir rentrer dans la liste ordonnée des enregistrement édition 3 MERCREDI 12 MAI 1971 même, il faut le dire, bien particulier de ne pouvoir entrer dans la liste ordonnée —vous savez qu'on l'a faite — des situations dramatiques. Enfin laissons ça. Lui, le conte, il se fait de ce qu'il advient de la poste d'une lettre missive, au su de qui se uploads/Management/ lacan-lituraterre.pdf
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- Publié le Jul 22, 2022
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