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Tous droits réservés © Les Publications Québec français, 2002 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/ Document généré le 30 déc. 2020 15:36 Québec français L’évaluation source de motivation ou de démotivation? Rolland Viau Littératures de la francophonie Numéro 127, automne 2002 URI : https://id.erudit.org/iderudit/55820ac Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) Les Publications Québec français ISSN 0316-2052 (imprimé) 1923-5119 (numérique) Découvrir la revue Citer cet article Viau, R. (2002). L’évaluation source de motivation ou de démotivation? Québec français, (127), 77–79. Si vous voulez que votre enfant cesse d'écouter une émission de télévision, imposez-lui un exam sur ce qu'il a vu après chaque épisode. Cette boutade reflète bien ce que plusieurs chercheursi en psychopédagogie pensent de l'impact de l'évaluation sur la motivation des élèves : elle les démotive à apprendre. Pourtant, les enseignants vous diront que sans évaluation, leurs élèves ne sont pas motivés à travailler. Si nous ne leur imposons pas régulièrement des tests ou de examens, disent-ils, ils ne font rien. Qui a raison, les cherch et les enseignants ? L'évaluation source de motivation ou de CI6motivàllOR ? par Rolland Viau* C et article a pour but de faire le point sur l'impact de l'évaluation sur la motivation des élèves. Dans un premier temps, nous présenterons les raisons qui amènent les chercheurs à considérer l'évaluation, telle qu'elle est pratiquée de nos jours, comme un facteur démoti- vant pour les élèves. Dans un deuxième temps, nous examinerons la position des enseignants en expliquant pourquoi les élèves ne tra- vaillent pas si une activité n'est pas notée. Enfin, nous terminerons en formulant quatre principes d'action qui peuvent guider les en- seignants qui désirent faire de leurs pratiques évaluatives un fac- teur de motivation plutôt que de démotivation. Pourquoi l'évaluation suscite-t-elle plus de démotivation que de motivation à apprendre ? Les chercheurs, dont Carole Ames, considèrent que les prati- ques évaluatives des enseignants démotivent l'élève à apprendre parce qu'elles sont centrées sur la performance. Dans cette appro- che de l'évaluation, les enseignants considèrent que l'élève a ap- pris lorsqu'il a obtenu de bonnes notes. Pour juger de sa perfor- mance, ils la comparent généralement avec celle des autres élèves : si sa note est la plus élevée du groupe, il est vu aux yeux de ses ca- marades et de l'enseignant comme le meilleur ; si sa note est la plus faible, il est considéré comme le cancre de la classe. Les pratiques évaluatives centrées sur la performance de l'élève sont celles qui sont les plus souvent utilisées dans les écoles. Selon une enquête américaine, citée par Midgley, 99 % des professeurs des écoles se- condaires américaines évaluent la performance de leurs élèves ; 26 %, les efforts qu'ils ont fournis ; et seulement 18 %, les progrès qu'ils ont réalisés. On peut penser que ces résultats seraient sensi- blement les mêmes au Québec. Marvin Covington spécifie que les pratiques évaluatives cen- trées sur la performance suscitent parfois la motivation des plus forts, mais nuisent généralement à celle des élèves moyens et fai- bles. Pour ces élèves, l'erreur est vue comme « une plaie » à éviter absolument, car elle réduit leurs chances de « passer ». Menacés encore une fois de se retrouver au bas de l'échelle, ils oublient ra- pidement qu'ils sont à l'école pour apprendre et qu'apprendre peut être agréable et motivant. A U T O M N E 2002 | Québtc français 127 | 77 Et pourtant... Pourtant, les enseignants ont raison lorsqu'ils affirment que plusieurs élèves ne travaillent pas si les activités qui leur sont pro- posées ne sont pas notées. En posant constamment la question « Le travail compte-t-il pour le bulletin ? », les élèves affirment clairement que pour eux, les activités importantes en classe sont celles qui sont notées. Pour plusieurs enseignants, les notes de- viennent donc l'instrument privilégié pour motiver leurs élèves à travailler. Le fait de noter constamment les travaux réalisés lors des acti- vités ou d'utiliser parfois des récompenses pour motiver un élève amène effectivement ce dernier à « faire ce que le prof lui de- mande », mais suscite rarement sa motivation intrinsèque à appren- dre, c'est-à-dire à s'engager en profondeur dans ses apprentissages et à persévérer. Un élève qui est seulement motivé par la note opte souvent pour le principe MINIMAX : le minimum d'effort pour le maximum de points. Par exemple, dans les cours de français, il se limitera à lire les textes obligatoires qui feront l'objet d'examens et négligera ceux qui lui sont suggérés pour parfaire ses connaissan- ces. De plus, comme le soulignent Lepper et Hodell, lorsqu'il en a la chance, il choisira des exercices qui lui demanderont peu d'ef- fort cognitif en se limitant la plupart du temps à mémoriser la règle ou la procédure à l'étude et à l'appliquer machinalement. Ne vou- lant surtout pas risquer d'être original de peur d'échouer, il se mon- trera peu audacieux et encore moins créatif. En français, par exem- ple, lorsqu'il doit rédiger un texte, il ne fera que reprendre un texte ou un exemple donné par l'enseignant en ne changeant que quel- ques mots, plutôt que de s'efforcer de trouver des façons originales de rédiger. Cette situation est provoquée par ce que les chercheurs appel- lent l'effet de surjustification. Cet effet se produit lorsque la moti- vation intrinsèque à apprendre d'un élève diminue du fait d'un usage abusif des notes ou des récompenses comme moyen de le faire tra- vailler (Tang et Hall). En d'autres termes, le fait de constamment évaluer un élève, et ce, depuis le début du primaire, amène ce der- nier à ne plus travailler pour le plaisir d'apprendre, mais pour les conséquences de l'apprentissage, c'est-à-dire pour les notes ou les récompenses annoncées. En fait, leurs nombreuses années passées sur les bancs d'école ont amené les élèves à comprendre que ce n'est pas tant le fait d'apprendre qui est important à l'école, mais de réussir les épreuves et d'obtenir un diplôme. D'ailleurs, en rentrant à la maison, ne se font-ils pas demander par leurs parents combien ils ont eu à l'examen plutôt que de se faire questionner sur ce qu'ils ont appris ? Dans les cours de français, l'effet de surjustification peut expliquer, par exemple, pourquoi plusieurs élèves ne voient aucun intérêt à reprendre une partie d'une production écrite dans le seul but de l'améliorer ou de lire d'autres ouvrages que les chapitres de manuels imposés pour en connaître davantage sur un thème à l'étude. Comme on peut le constater, les enseignants subissent les con- trecoups des pratiques évaluatives mises de l'avant par leurs prédé- cesseurs. En perpétuant cette tradition, ils ne font qu'alimenter la perception des élèves que l'école n'est pas un lieu où l'on apprend, mais une vraie cour de justice où ils se font constamment juger pour des fautes qu'ils ont commises. Que peut-on faire pour améliorer la situation ? Faire de l'évaluation une composante de l'enseignement qui fa- vorise la motivation à apprendre des élèves se révèle un défi de taille pour un enseignant. La valeur que la société accorde à la compéti- tivité et à la performance, la pression des parents pour que leurs en- fants soient notés et l'atmosphère evaluative qui règne dans plu- sieurs établissements scolaires sont des arguments de taille pour ceux qui ne désirent pas changer. Mais, pour les enseignants qui dési- rent aller contre vents et marées, une piste peut être exploitée : mettre en œuvre des pratiques évaluatives centrées sur le processus d'apprentissage plutôt que sur les performances seulement. Dans les pratiques évaluatives centrées sur l'apprentissage, l'ac- cent est mis sur le processus d'apprentissage plutôt que sur les ré- sultats. Le progrès accompli par l'élève devient alors l'un des prin- cipaux critères d'appréciation. Pour le mesurer, on compare ses performances actuelles à ses performances précédentes, plutôt que de comparer ses résultats à ceux de ses camarades. Dans ce contexte d'évaluation, la performance n'est que l'un des indices retenus pour évaluer l'apprentissage réalisé par l'élève. L'acquisition de straté- gies d'apprentissage efficaces, le développement de l'autonomie et de la créativité deviennent des indices tout aussi importants que la performance. L'examen n'est plus l'outil d'évaluation par excel- lence. Le portfolio ou le dossier d'apprentissage, dans lequel sont colligés les travaux importants de l'élève, est considéré comme un outil plus adéquat que le relevé de notes pour évaluer le processus d'apprentissage. Les pratiques évaluatives centrées sur le processus d'apprentis- sage suscitent la motivation à apprendre, car elles favorisent la per- ception que l'élève a de la valeur des activités, même si celles-ci ne sont pas notées. Ce contexte l'amène à attribuer principalement ses succès ou ses échecs à l'effort qu'il uploads/Management/ le-valuation-source-ou-non-de-motivation-viau.pdf

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  • Publié le Fev 04, 2021
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