1 2 Ouvrage : Regards photographiques sur Sfax Auteur : Yosra Zaghdene Edition

1 2 Ouvrage : Regards photographiques sur Sfax Auteur : Yosra Zaghdene Edition : Avril 2017 Dépôt légal : Avril 2017 Imprimerie : MIP Livres 978-9938-865-52-3 Editeur : Bayram Edition et Diffusion, Rte sidi Mansour Habena 1 BP139, 3094Sfax- Tunisie Cette édition a été imprimée à l’occasion de Sfax Capitale de la culture arabe pour l’année 2016 3 Table des matières  Table des matières : .......................................................... 3  Introduction : .................................................................... 5 Chapitre premier Le projet Artocratie à Sfax : ........................................... 9 Chapitre second « Du roman-photo à la médina » regard photographique de Frédéric Poletti sur Sfax : ............................................... 47 Chapitre troisième Les remparts de Sfax en photo-peinture : une vision personnelle pour ma ville natale : ................................... 75  Conclusion : .................................................................... 99  Bibliographie : ................................................................104 4 À Sfax ... 5 Introduction Le regard photographique est une sélection et une découpe faite dans le continuum de l’espace- temps de la réalité. Une partie est choisie alors que le reste est écarté. Afin de choisir un référent et de le saisir, il faut le cadrer. Le cadre se fait donc une vision condensée et plus précise que le regard commun. Il est le prolongement ou l’avatar de la vision humaine, il en vient en supplément. Une parenté entre le regard et la photographie nous est familière, pourtant, son évidence trop diaphane mérite d’être réinterrogée dès qu’elle se scinde en deux comportements aussi complémentaires qu’antinomiques : la photographie regarde le réel, elle se fait regard photographique pour être, par suite, elle- même regardée. Entre les deux regards où elle est visionnée, on se rend compte qu’on n’a affaire ni au même regard, ni à la même photographie ni à la même réalité. Définies comme des approches temporaires (œuvre singulière ou projet) inspirées du sujet référent ou comme une ligne directrice pour toute une carrière, les pratiques photographiques demandent d’être re- questionnées, et que soit interrogées, à nouveau, les transactions pouvant s’engager entre le regard et la photographie. Il est donc urgent de se demander si le photographe est toujours nécessairement là d’où émane le regard photographique. Que serait ainsi de la 6 culture, de la société, de l’idéologie… définies comme déclencheurs et prétextes du regard photographique ? Ce regard n’est-il pas envisagé selon la conception de Michel Foucault comme un « dispositif anthropotechnique » subissant les influences des mythes associés à la technique photographique aussi bien que celles des représentations des ordres politique et social ? Ces regards ne sont-ils pas, en fait, envisageables dans les logiques pragmatiques qui les engendrent et les expériences pratiques qui les concrétisent ? L’intérêt sera focalisé sur le regard photographique comme un point de vue sur la réalité ; Sfax comme réalité. Pour penser la photographie à Sfax, des pratiques photographiques et des inscriptions sociales serviront d’appui et de référence pour une étude sociotechnique où le travail du sociologue peut rejoindre celui du plasticien afin de pouvoir scruter le fonctionnement concret du regard photographique. Regards photographiques sur Sfax est une approche où le regard sera appréhendé comme un phénomène sémiotique capable d’ébranler les stéréotypes culturels en leur permettant de signifier d’une manière autre que la leur. Sfax sera dévoilée dans les viseurs de trois photographes dans trois approches différentes pénétrant au fin fond de la ville conçue avant tout comme un espace de production d’une société qui en use quotidiennement ; un espace social, hérité, culturel, patrimonial, un espace de 7 signifiés et de valeurs symboliques ; un espace susceptible d’être l’objet de différentes tentatives d’interprétation depuis les pistes artistiques jusqu’aux perspectives humanistes et sociales. De la retrouvaille enthousiaste et affective entre la ville et un regard, émerge un modèle mental de l’espace réel de la ville de Sfax qui nous relie au passé, au présent et à l’avenir. La photographie serait-elle ainsi ce qui rend la ville visible ou plutôt ce qui s’offre de la ville par le biais du visible ? Si on conçoit la photographie en tant que trace, elle serait la trace de quoi ? De la ville ? De la ville qu’on compte photographier ou de la ville qui s’est comme inconsciemment photographiée ? De la ville elle-même ou d’un phénomène de cette même ville ? De la ville ou de son photographe ?… La photographie ne serait-elle pas comme la complicité de tout cela à la fois ? 8 9 CHAPITRE PREMIER Le projet Artocratie à Sfax 10 Jean René ou JR est un artiste français contemporain né à Paris le 22 février 1983. L’artiste use de la technique du collage photographique pour s’autoriser d’exposer sur les murs, partout dans le monde, dans une liberté totale. Son art est surtout adressé à une catégorie de spectateurs non habitués aux institutions artistiques, c’est pour cela que Jean René les rencontre chez eux, à la rue. En évoquant ses œuvres, Jean René confirme : « Je possède la plus grande galerie d’art au monde : les murs du monde entier. J’attire ainsi l’attention de ceux qui ne fréquentent pas les musées habituellement »1. Jean René se réclame « un artiste urbain », un artiste de la ville, ou des villes du monde entier. Dans Le Monde paru le 1 octobre 2009, Martine Vals considère l’art de Jean René comme un « révélateur d’humanité », le 13 août 2015 le journaliste Jesse Mc Cartly décrit Jean René comme un « jeune artiste français et humaniste imperturbable qui se fait connaitre par le surnom JR et qui a émergé ces dernières années comme l’une des figures les plus ambitieuses du monde de l’art »2. Lors d’un entretien réalisé par la journaliste Aurélie Champagne le 27/07/2011, l’artiste parle passionnément d’Artocratie à Sfax : 1- « NY organisation rolls out project to end gender based violence », guyanatimesinternational.com, 3 février 2012. http://www.guyanatimesinternational.com/?p=13715. 2- http://www.rencontresarles.com/ http://www.rencontresarles. com/C 11 « Il y a dix ans exactement, j’ai collé trois petites photos en inscrivant : "Mon expo à moi, c’est la rue". A l’époque, je ne savais même pas que la Maison européenne de la photographie (MEP) était à deux pas. Je venais du graffiti, je n’avais aucune idée de ce qu’était la photo, un musée. Un an plus tôt, j’avais trouvé un appareil photo dans le métro et je m’y étais mis. J’ai fait un collage ici simplement parce que c’est un mur à un angle de rue, prisé par les graffitis et que ce coup-ci, il était libre. C’est l’un des premiers projets d’Inside out. On a été contactés spontanément par six photographes en Tunisie qui voulaient faire des portraits de Tunisiens. Certains avaient participé à la Révolution. C’est le fonctionnement même d’Inside out et ce que montre le premier épisode de la websérie qui retrace le projet : ça doit venir que des gens. Là-bas, j’ai été marqué par Sfax : sur la place, en face de la mairie, il y avait le plus grand portrait de Ben Ali du pays. Il y en avait un autre sur le siège du parti. Pour moi, c’est symbolique : les gens sont venus, et tout le monde s’est mis à coller des mosaïques de portraits. Un projet artistique participatif à grande échelle qui transforme les messages sur l’identité personnelle des gens en une œuvre artistique. En utilisant des portraits photos en noir et blanc, chacun peut faire découvrir, révéler et faire partager les histoires et les images de gens à travers le monde. 12 Et puis, ça a commencé à chauffer. On voit les affiches se faire déchirer. Il y a un bonhomme qui m’a marqué – je crois qu’il est dans le deuxième épisode de la websérie – : quand les gens se sont mis à arracher les affiches, un bonhomme a dit : « Vous avez le droit de coller des affiches et d’autres ont le droit de les déchirer : c’est le principe de la démocratie et on est en train de l’apprécier. Les gens ont eu des problèmes en collant – certains pensaient que c’était des martyrs, d’autres qu’il s’agissait d’une nouvelle campagne politique. C’est super intéressant : ça pose la question de l’image dans le contexte d’une révolution. Au final, les colleurs ont réussi. La réussite ne tient pas au fait que les photos soient restées ou non, mais plutôt au fait que les gens aient touché aux murs : en collant ou en arrachant les images »3. 3- Entretien fait avec l’artiste Jean René par la journaliste Aurélie Champagne le 27/07/2011. 13 1. La prise en compte de la ville en tant qu’espace public Dans une ville où la force expressive de l’art a été, pour longtemps opprimée et censurée, et où la seule manifestation possible de l’art devait afficher sa neutralité envers la réalité politique économique et sociale, un projet tel Artoctratie ne pouvait qu’être iconoclaste et amorcer une vie artistique longtemps négligée. Les rues de Sfax n’accueillaient « l’art » qu’en l’occasion de la fête du « changement du 7 novembre » de chaque année (des profiteurs et des forcés réalisaient alors ces fameuses caravanes de uploads/Management/ livre-regards-photographiques-sur-sfax.pdf

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  • Publié le Apv 14, 2021
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