Pratiques : linguistique, littérature, didactique Grammaire de texte - Théorie
Pratiques : linguistique, littérature, didactique Grammaire de texte - Théorie du discours - Narrativité Michel Charolles Citer ce document / Cite this document : Charolles Michel. Grammaire de texte - Théorie du discours - Narrativité. In: Pratiques : linguistique, littérature, didactique, n°11-12, 1976. Récit 1. pp. 133-154; doi : https://doi.org/10.3406/prati.1976.969 https://www.persee.fr/doc/prati_0338-2389_1976_num_11_1_969 Fichier pdf généré le 29/03/2019 GRAMMAIRE DE TEXTE - THÉORIE DU DISCOURS - NARRATIVITÉ Michel CHAROLLES Cet article n'a d'autre ambition que de présenter quelques problèmes généraux des grammaires de texte et théorie du discours et leurs développements plus particuliers en ce qui concerne la narrativité. Il ne prétend donc nullement faire une synthèse d'un courant bibliographique d'ailleurs difficile à suivre car en pleine évolution. Il s'agira tout au plus d'établir un schématique bilan de lectures relativement limitées et désordonnées mais centrées sur quelques notions fortes : compétence et performance textuelles et discursives, macro et micro-structures, pragmatique et cadre co- gnitif, théorie des mondes... Ces notions, pour importantes qu'elles soient en elles-mêmes et pour différentes que soient parfois les significations que leur donnent divers auteurs, se retrouvent néanmoins dans la plupart des travaux que nous avons examinés et surtout s'organisent en un développement qui signale une problématique plus ou moins stabilisée que viennent dynamiser les argumentations originales de telle ou telle contribution. Bien entendu, c'est sur ce consensus que nous insisterons et notre propos se construira suivant ce fil théorique conducteur le long duquel nous définirons, lorsque nous en aurons donné les attendus, les « macronotions » de texte, de discours, de grammaire de texte, de théorie du discours, sous l'étiquette desquelles se regroupent les auteurs envisagés. Le lecteur trouvera en fin d'article la liste des publications que nous avons pris en compte pour notre travail. Sans mésestimer les contributions de chercheurs moins connus, nous avons toutefois focalisé nos références sur certaines études de Teun A. Van Dijk et Janos Petôfi qui nous ont paru fournir un état plus avancé et plus large des problèmes que se posent les théoriciens du texte et du discours. 133 1. DÉFINITION ET TACHE D'UNE GRAMMAIRE DE TEXTE Le projet d'une Grammaire de Texte (GT) trouve ses origines dans une problématique à référence fondamentalement chomskyenne. D'une manière schématique on peut dire, qu'au départ au moins, la nécessité de construire une grammaire qui dépasse le cadre de la phrase est apparue quand : a) se sont révélées certaines insuffisances de la grammaire générative et transformationnelle (GGT) b) on s'est aperçu qu'il était possible de transférer au niveau textuel les attendus empiriques fondateurs de la GGT. 1.1. LIMITES D'UNE GRAMMAIRE DE PHRASE GÉNÉRATIVE ET TRANSFORMATIONNELLE. Une GGT est incapable de rendre compte d'une manière adéquate de phénomènes linguistes à la fois importants et nombreux comme la pronomi- nalisation, la relativisation, la définitivisation... Ces problèmes ne peuvent en effet être traités correctement dans le cadre de la phrase et ils ne reçoivent de solution satisfaisante que s'ils sont envisagés dans un champ plus large. Sans chercher à prouver chacune des affirmations qui précèdent il est néanmoins facile de montrer qu'une grammaire de phrase (GP) est relativement impuissante lorsqu'elle aborde, par exemple, le problème de la pro- nominalisation. Soit en effet la phrase suivante : 1) « Georges espère que Jean partira avec lui. » Devant une phrase comme celle-là une GGT pourra tout au plus : • opérer à partir de la structure profonde un étiquetage des syntagmes nominaux afin d'expliciter leurs rapports de coréférence. 1') «Georges espère que Jean partira avec lui.» SN i SN 2 SN , • formuler les contraintes qui pèsent sur l'application de la transformation pronominale. On dira par exemple après Langacker (G. Fauconnier 1974 pp. 17-20), qu' « un pronom ne peut à la fois précéder et commander son antécédent » d'où Pagrammaticalité de 2. 2) « II espère que Jean partira avec Georges ». SN 4 SN 2 SN i Si maintenant on examine la séquence suivante : 3) « Georges espère que Jean partira avec lui. Il le lui a demandé par écrit. » II est évident que les trois pronoms de la deuxième phrase ne pourront être rapportés à leur réfèrent dans les limites de cette seule phrase. Une grammaire dont le champ s'étendra au-delà de la phrase devra se donner les moyens d'assurer des référentiations transphrastiques, d'analyser les contraintes (quantification, distance...) qui pèsent sur ces opérations et expliquer pourquoi 3 admet 3' 3' « II » de P2 — » « Georges » « le » — — — > « Jean partir avec Georges » lui — — — > « Jean » alors que 4 admet 4' 134 4) « Georges espère que Jean partira avec lui. Il le lui a indiqué par écrit. » 4' « II » de P2 > « Georges » le » — — — » p, lui — — — > « Jean » et que 5 admet 5' ou 4'. 5) « Georges espère que Jean partira avec lui. Il le lui a confirmé par écrit. » 5' « II » de P2 » « Jean « le » — — » « Jean partir avec Georges » « lui » > Georges. L'examen de ces simples exemples suffit donc à montrer : • que le problème de la pronominalisation relève d'une Grammaire qui dépasse le champ de la phrase ; • que ce problème ne reçoit de solution satisfaisante au niveau trans- phrastique que si on prend en compte un certain nombre de faits sémantiques (la relation sémantique « espérer » / « demander », « indiquer », « confirmer » permet seule d'expliquer les référentiations proposées dans l'exemple considéré). 1.2 COMPÉTENCE ET PERFORMANCE TEXTUELLES. La fondation d'une GGT repose sur un certain nombre de considérations empiriques qui méritent d'être rappelées car c'est à partir de leur simple transfert que se trouve définie une Grammaire de Texte (GT). 1.2.1. attendus empiriques et définition d'une GGT. Chomsky définit les tâches et objectifs d'une GGT en partant des faits empiriques suivants : si tout sujet parlant une langue L est capable d'émettre, comprendre et paraphraser un nombre infini de phrases de L qu'il n'a jamais rencontrées ; si, d'autre part, il est en mesure de formuler des jugements de grammaticalité sur une phrase donnée, c'est qu'il a intériorisé un certain nombre de règles linguistiques qui lui confèrent ces capacités. Ces règles constituent ce que l'on appelle sa compétence linguistique. Cette compétence n'apparaît jamais en elle-même mais se manifeste à l'occasion des performances qu'elle rend possible. La grammaire se présente alors comme un modèle de cette compétence du sujet idéal, c'est-à-dire comme un dispositif qui, à partir d'un nombre fini de symboles catégoriels, de règles de réécriture et de règles de transformation pourra énumérer et décrire toutes les phrases grammaticales de L et analyser toutes les phrases semi-grammaticales ou agrammaticales de L. La grammaire ainsi définie sera un pur modèle : son dispositif sera neutre par rapport aux problèmes de l'émission et de la réception qui relèvent de la performance et de la théorie que l'on peut en faire. 1.2.2. Attendus empiriques et définition d'une GT. Par transfert au plan textuel des attendus empiriques précédents on obtient : si tout sujet parlant une langue L est capable d'émettre, comprendre et paraphraser un nombre infini de textes de L ; si, d'autre part, il est en mesure de formuler des jugements de textualité sur un texte donné, c'est qu'il a intériorisé un certain nombre de règles qui lui confèrent ces capacités. D'où il découle : — qu'il existe une compétence textuelle ; — qu'une GT devra se construire comme une modélisation de cette compétence textuelle ; 135 — qu'il faut distinguer compétence et performance textuelles et prévoir une théorisation de cette dernière. 1.2.3. Remarques sur 1.2.2. a) Une GT est plus « intéressante » qu'une GGT car elle est fondée sur des considérations « empiriquement plus satisfaisantes » que celles sur lesquelles reposent une GGT : à savoir que nous communiquons presque exclusivement à l'aide d'énoncés qui ont une dimension supérieure à la phrase. b) une GT est plus puissante qu'une GGT car elle va pouvoir rendre compte de phénomènes linguistiques phrastiques et textuels : elle intégrera donc comme une de ses composantes de base une Grammaire de Phrase. c) une GT pour présenter les mêmes garanties de rigueur scientifique qu'une GGT devra se construire elle aussi comme un dispositif déductif comportant des symboles catégoriels, des règles de réécriture et des règles de Transformation. 2. FORME D'UNE GRAMMAIRE DE TEXTE. L'évolution plus ou moins récente des travaux en GT se caractérise par une utilisation quasi systématique d'analyses issues de la sémantique générative, de divers systèmes logiques contemporains et de la théorie des actes de langage. Cette évolution a des conséquences importantes, comme nous allons le voir, sur la forme même de la Grammaire. 2.1. LA SÉMANTIQUE GÉNÉRATIVE. Alors que la syntaxe est la composante de base de la GGT les Grammairiens du texte considèrent avec les Sémanticicns Générativistes que cette place doit être occupée par la sémantique. L'élément minimal de uploads/Management/ prati-0338-2389-1976-num-11-1-969.pdf
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- Publié le Jul 26, 2022
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