LES ENJEUX DE LA PRATIQUE DE LA GOUVERNANCE D’ENTREPRISE AU CAMEROUN : LE CAS E

LES ENJEUX DE LA PRATIQUE DE LA GOUVERNANCE D’ENTREPRISE AU CAMEROUN : LE CAS ETIP Robert Sangué-Fotso Direction et Gestion | « La Revue des Sciences de Gestion » 2015/1 N° 271 | pages 109 à 118 ISSN 1160-7742 DOI 10.3917/rsg.271.0109 Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- https://www.cairn.info/revue-des-sciences-de-gestion-2015-1-page-109.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Direction et Gestion. © Direction et Gestion. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. 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Powered by TCPDF (www.tcpdf.org) © Direction et Gestion | Téléchargé le 31/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 41.202.219.74) © Direction et Gestion | Téléchargé le 31/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 41.202.219.74) La Revue des Sciences de Gestion, Direction et Gestion n° 271 – Organisation janvier-février 2015 109 Dossier II Des parties prenantes extérieures Les enjeux de la pratique de la gouver- nance d’entreprise au Cameroun : le cas ETIP1 par Robert Sangué-Fotso Robert SANGUÉ-FOTSO Docteur en Sciences de Gestion Enseignant Assistant Université de Yaoundé II Cameroun D epuis que l’affaire Enron a jeté le trouble dans l’univers nord-américain des affaires, la question de la gouvernance est au cœur des débats. Dans ce contexte, les acteurs du système de gouvernance des entreprises sont confrontés à un dilemme selon leurs missions respectives de conseil, d’audit et de contrôle ; et face aux dirigeants d’entreprise. Cette situation a des conséquences directes sur l’éclatement des scandales financiers. Ainsi, J.K. Galbraith (2004, p49) précise que « … les mythes de l’autorité de l’investisseur, de l’actionnaire administrateur, les réunions rituelles du conseil d’administration et l’assemblée générale annuelle des actionnaires continuent, mais, pour tout observateur sain d’esprit de la grande société anonyme moderne, la réalisation est incontournable. Le pouvoir dans l’entreprise appartient à l’équipe de direction, bureaucratie qui contrôle sa tâche et sa rémunération. Une rémunération qui frise le vol. C’est parfaitement évident. C’est cela qu’on a appelé à certaines occasions récentes, le "scandale d’entreprise". » La question des scandales financiers est principalement centrée sur l’efficacité des mécanismes de gouvernance et la capacité des parties prenantes de l’entreprise à contrôler les dirigeants. Les enjeux de ces scandales ont permis de développer des réflexions sur la gouvernance d’entreprise (désormais GE) à travers des travaux de recherche (G. Charreaux, 1997 ; P.Y. Gomez, 2003 ; B. Pigé, 2010 ; P. Wirtz, 2005) et des rapports (OCDE, 1999 ; Vienot, 1995 et 1999 ; Cadbury, 1992 ; D. Bouton 2002). Les objectifs poursuivis dans ces travaux sont de développer des outils efficaces pour encourager des pratiques morales et éthiques en gestion, et améliorer les mécanismes de contrôle. L’abondante littérature sur la GE retrace quatre principaux objec- tifs : la configuration du pouvoir à l’intérieur des entreprises, le contrôle, la prévention des conflits et la répartition équitable de la valeur créée. Les dysfonctionnements persistants dans les organisations montrent que ces objectifs ne sont généralement pas atteints ; ce qui conforte ainsi l’idée d’analyser les pratiques des entreprises en matière de gouvernance au Cameroun. La 1. Le terme ETIP (Entreprise Travaux Industriels et Portuaires) traduit la dénomi- nation sociale attribuée à l’entreprise étudiée afin de respecter l’anonymat. © Direction et Gestion | Téléchargé le 31/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 41.202.219.74) © Direction et Gestion | Téléchargé le 31/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 41.202.219.74) La Revue des Sciences de Gestion, Direction et Gestion n° 271 – Organisation 110 Dossier II Des parties prenantes extérieures janvier-février 2015 GE, au-delà de s’intéresser aux problèmes de coordination et de contrôle, contribue à analyser l’ensemble des mécanismes nécessaires à la résolution des conflits d’intérêts entre les dirigeants et les autres parties prenantes de l’entreprise. La propriété est l’un des fondements de la corporate governance (T. Pedersen et S. Thomson, 1999 ; R. Whitley, 1992 ; A. Shleifer et R.W. Vishny, 1986 ; D.C. North et R.P. Thomas, 1973) dont la traduction généralement utilisée en français est la gouvernance d’entreprise (G. Charreaux, 1997 ; R. Pérez, 2003). Selon M. Mendy (2010), pour comprendre les pratiques de GE dans un pays, il faut analyser l’impact de ses systèmes de propriété comme cadre définissant le pouvoir ; mais aussi comme cadre de performance que se donnent les entreprises. L’analyse des pratiques de gouvernance des dirigeants est néces- saire à la compréhension du fonctionnement des entreprises et à l’amélioration de leurs performances. Les dirigeants sont au cœur des processus de décision et il est fort possible, comme le relève M. Paquerot (1997), que les stratégies personnelles viennent influencer celles de l’entreprise. Justifiées par l’inefficacité des mécanismes de contrôle, diverses réflexions ont porté sur le système de GE à l’échelle mondiale. Concernant l’Afrique, des efforts restent à fournir car la GE constitue l’un des domaines de la recherche encore peu exploré. Pour E. Cohen (2002), malgré la lourdeur et l’opacité des modes de contrôle interne des entre- prises, la faible financiarisation de l’activité économique matéria- lisée par la quasi-absence d’un marché boursier, l’Afrique mérite pourtant une attention particulière compte tenu des singularités que les entités qui y sont concernées font apparaître aussi bien par leurs caractéristiques stratégiques et organisationnelles que par leurs caractères financiers. Les pratiques africaines de GE ne peuvent être étudiées qu’à la lumière des réalités africaines. Ces dernières déterminent leur environnement et leurs conditions de naissance et de pérennité (M. Mendy, 2010). M. Foucault (1978)1 souligne qu’« il ne s’agit pas de jauger des pratiques à l’aune d’une rationalité économique […], mais plutôt de voir comment des formes de rationalisation s’inscrivent dans des pratiques, ou des systèmes de pratiques, et quel rôle elles y jouent ». En effet, les représentations tradition- nelles importent davantage pour comprendre les mécanismes de gouvernance que la seule hypothèse fondée sur la rationalité des individus. À cet égard, D.C. North (1990, p 46-47) souligne que « l’avenir est lié au passé à travers les institutions informelles de chaque société ». La dimension informelle constitue la caractéristique essentielle à prendre en compte lorsqu’il s’agit de comprendre le fonctionne- ment des entreprises camerounaises. Le Cameroun a connu un passé colonial de longue durée (1884-1960). Par conséquent, il est impossible de cerner ses institutions, sa culture, sa politique en faisant l’impasse sur son héritage colonial2. Lorsqu’on parle 1. Michel Foucault, lors de la Table ronde du 20 mai 1978 « Nouveau millénaire, défis libertaires », L’impossible Prison. Recherches sur le système pénitentiaire au xixe siècle. Dits Ecrits tome IV, texte n° 278, visible sur : http://1libertaire. free.fr/MFoucault300.html 2. En plus de l’héritage colonial allemand (1884-1916), le Cameroun a connu un double héritage français et anglais (1916-1960) dont l’impact est manifeste des pays africains, certains experts estiment que les problèmes économiques que connaissent ces derniers résultent d’un blocage culturel et ils proposent comme remède un changement des mentalités pour se conformer à la modernité occidentale (A. Kabou, 1991 ; D. Etounga Manguellé, 1991). Pourtant, il n’en demeure pas moins que le problème de la GE en Afrique a au moins deux sources principales : la faiblesse des institutions caractérisées par des textes inadaptés et l’inobservation des lois existantes. L’environnement institutionnel camerounais est globalement stable, ce qui pourrait être un facteur facilitateur de la gouvernance d’entreprise. La vétusté des lois N° 87/1141 du 20 août 1987 fixant la rémunération et les avantages des personnels des sociétés d’État, des établissements publics et des sociétés d’économie mixte et N° 99/012 du 22 décembre 1999 portant statut général des établissements publics et des entreprises du secteur public et parapublic (toujours d’actualité) sont de parfaites illustrations des contraintes environnementales qui influencent l’avancée de la gouvernance et la restauration de l’éthique managériale. Prolongeant différents travaux sur la GE, il apparaît qu’il n’existe pas de modèle unique de gouvernance. Mais certains éléments communs se dégagent pour constituer des « standards internatio- naux » auxquels les entreprises africaines doivent se conformer. L’importation en Afrique des modèles occidentaux a connu des échecs. Ceci en raison de leur transposition par des dirigeants africains formés en Occident, dans un environnement diffé- rent. Les traditions locales influent sur le fonctionnement des organisations africaines, en termes de réponse à donner aux demandes familiales et communautaires, ainsi que de modalités de répartition équitable de la richesse. Les logiques sociales, principalement caractérisées par la circulation des personnes et des biens (E. Kamdem, 2002 ; E. Mutabazi, 2001), prévalent très souvent sur les logiques économiques. L’objet de cet article est d’abord d’analyser les pratiques de gouvernance en conformité avec le cadre institutionnel, ensuite d’analyser le fonctionnement des institutions de gouvernance. L’article s’articule autour de deux préoccupations majeures. La première retrace le cadre institutionnel de la gouvernance au Cameroun, tout en mettant en exergue des critiques qui illustrent des questions concrètes de uploads/Management/ rsg-271-0109.pdf

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  • Publié le Jul 25, 2022
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