The Journal of Specialised Translation Issue 4 - July 2005 32 Le traitement des
The Journal of Specialised Translation Issue 4 - July 2005 32 Le traitement des noms de produits dans la traduction français- allemand Alexander Künzli Département de français, d’italien et de langues classiques Université de Stockholm, Suède RESUME Les noms de produits jouent un rôle important dans la vie économique moderne. En traductologie, on part cependant du principe qu’ils ne soulèvent pas de problèmes de traduction : ils sont censés être simplement préservés en langue d’arrivée. La présente étude s’attache à montrer que le traitement des noms de produits soulève toutefois maintes questions. Cinq étudiantes en traduction et cinq traducteurs professionnels ont été invités à traduire un texte du français vers l’allemand en pensant à haute voix. L’analyse des traductions écrites fait ressortir une incertitude dans le traitement des noms de produits. En effet, plus de la moitié des répondants ne s’engagent pas pour une solution unique de traduction. L’hypothèse de l’existence d’une incertitude est confirmée par les protocoles de verbalisation. Ils montrent que le traitement des noms de produits peut constituer un problème de traduction pour au moins les raisons suivantes : (1) présence ou absence de déterminant défini, (2) attribution du genre, (3) changement ou préservation du nom du produit, (4) rhétorique (renforcement du nom du produit par des déterminants possessifs). Les résultats ont des implications pour la recherche en traduction et son enseignement. MOTS-CLES noms de produits, traduction français-allemand, étudiants en traduction, traducteurs professionnels, protocoles de verbalisation. ABSTRACT Product names play an important role in commerce today. From a translation theory point of view, it is implicitly supposed, however, that they do not raise translation problems. Indeed, translators are simply expected to render them in the target language without making any changes. The present study reveals nevertheless that the processing of product names is associated with uncertainty among trainee translators and professional translators alike. Five trainee translators and 5 professional translators were asked to translate a text from French into German while thinking aloud. Their verbalisations were transcribed into what are termed think-aloud protocols and analysed in parallel with their written translations. The analysis of their written translations shows that more than half of the participants did not opt for one translation strategy alone when processing the product name Galeo 4710, which figures in the French source text. Instead, they vacillated between different solutions. The think-aloud protocols confirm that the processing of product names can raise translation problems for at least the following reasons: (1) The presence or absence of a definite article; (2) The need to attribute gender The Journal of Specialised Translation Issue 4 - July 2005 33 to the product name; (3) Whether to change or preserve the product name; (4) Rhetoric (reinforcement of the product name by the use of possessive modifiers). The results have implications for both teaching translation and research. KEYWORDS product names, French-German translation, trainee translators, professional translators, think-aloud protocols. 1. Introduction Les noms de produits jouent un rôle important dans la vie économique moderne. Lorsqu’ils occupent une position particulière, ils sont sur toutes les lèvres ; c’est ce que relève également le Duden (Duden : Die Grammatik 1998 : règle 1039). On peut en conclure que les noms de produits méritent aussi de la part du traducteur une attention toute particulière. En traductologie, on suppose cependant que le traitement des noms de produits ne constitue pas un problème, puisqu’ils sont, en général, simplement repris tels quels dans la langue d’arrivée. Or, la présente étude s’attache à montrer que les noms de produits peuvent causer des maux de tête à des étudiants en traduction et à des traducteurs professionnels. Elle fait partie d’un projet de recherche dans lequel vingt répondants ont été invités à traduire un texte du français vers l’allemand et du français vers le suédois, en pensant à haute voix. Les verbalisations ont été transcrites en protocoles de verbalisation et analysées en parallèle avec les traductions écrites. Nous nous consacrerons ici uniquement aux résultats issus de la traduction français-allemand et en particulier à la question de savoir quels problèmes les répondants ont rencontrés pour rendre en allemand le nom de produit Galeo 4710 figurant dans le texte de départ français (voir Annexe). Les protocoles de verbalisation montrent que ce nom de produit a donné lieu à maintes questions. Tout d’abord du point de vue linguistique : (1) présence ou absence de déterminant (quelle est la forme la plus idiomatique : der Galeo ou simplement Galeo ?), (2) attribution du genre (comment le traducteur sait-il quel genre attribuer au nom de produit : der Galeo ou das Galeo ?), (3) changement ou préservation du nom de produit (les noms de produits sont-ils vraiment toujours simplement repris tels quels dans la langue d’arrivée ?). Le traitement des noms de produits peut cependant également poser des problèmes du point de vue rhétorique, c’est-à-dire par rapport aux stratégies mises en œuvre par les entreprises pour engager le consommateur dans un dialogue fictif par le biais de la répétition du nom du produit et de l’utilisation de déterminants possessifs (votre Galeo). Les résultats montrent que la traduction d’un tel dialogue fictif ne se déroule en aucun cas de manière automatique. Le traducteur se retrouve souvent dans un champ de tension entre sa loyauté envers l’entreprise et son rejet de telles stratégies destinées à créer une pseudo-proximité. The Journal of Specialised Translation Issue 4 - July 2005 34 Jetons d’abord un regard à la grammaire. Le Duden mentionne, entre autres, les noms de produits comme troisième branche des noms propres à côté des noms de personnes et de lieux. Les noms de produits sont définis comme des noms propres dont la fonction est d’identifier clairement des produits commerciaux et de les rendre reconnaissables et vendables en tant que tels (règle 1039). Ils font référence à un produit tout en le distinguant d’autres. Cette définition souligne explicitement la dimension économique : les noms de produits doivent aider à vendre des produits. Ils font partie de stratégies d’entreprise choisies délibérément. Quelle aide le Duden nous fournit-il pour ce qui est des questions posées d’entrée de jeu ? En ce qui concerne l’emploi avec ou sans déterminant du nom propre, la règle 554 précise que les noms propres sont d’habitude dépourvus de déterminant (idem en français, voir Riegel, Pellat & Rioul 1999 : 176). Parallèlement, le Duden précise que cette règle est souvent enfreinte, par exemple dans le cas de certains noms propres toponymiques comme les cours d’eau ou les montagnes (der Rhein ‘le Rhin’ et das Matterhorn ‘le Cervin’). Le français ne se distingue ici pas de l’allemand (voir Riegel et al. : 177). Il est intéressant pour le traducteur germanophone de constater que parmi les exemples d’emplois avec déterminant défini que donne le Duden, il n’en figure aucun qui appartienne à la catégorie des noms de produits. On pourrait y voir un argument implicite pour l’absence de déterminant dans le cas des noms de produits. En ce qui concerne l’attribution du genre, le Duden fournit dans les règles 348 et suivantes des indications précises sur différentes catégories de noms propres. Les noms de produits n’y figurent toutefois pas. La liste de certaines finales desquelles on peut prédire le genre du nom en question est cependant potentiellement intéressante pour le traducteur (règle 358) ; encore que la finale –o (Galeo) n’y figure pas. La traductologie s’est, elle aussi, penchée sur le problème du traitement des noms propres. Toutefois, les questions concernant l’emploi avec ou sans déterminant et l’attribution du genre n’ont guère été abordées. Peut- être en raison du fait qu’il semble s’agir d’un problème plus important dans la traduction vers l’allemand, langue qui connaît trois genres (der, die, das). La traductologie fournit cependant des réponses à la question de savoir si les noms de produits sont modifiés ou au contraire préservés dans la langue d’arrivée. Newmark (1988 : chap. 6) propose une série de stratégies de traduction pour rendre les noms de personnes et d’institutions ainsi que des termes culturels. D’après lui, les noms de produits et de propriétaires ne sont cependant pas à traduire en général (p. 72). Ballard (1993) en arrive à la même conclusion tout en soulignant que le traitement des noms propres ne se distingue à cet égard pas d’autres aspects de la traduction : même en présence d’un principe général vers lequel le traducteur pourrait s’orienter, la pratique fluctue souvent. The Journal of Specialised Translation Issue 4 - July 2005 35 Nous disposons à présent également des premières études dans lesquelles on a étudié empiriquement ce qui se passe dans la tête des traducteurs lorsqu’ils sont confrontés au traitement des noms propres. Englund Dimitrova (2001) examine comment des noms de personnes sont traduits du russe en suédois. Elle montre notamment que certains noms peuvent avoir des connotations pour les receveurs du texte de départ qu’ils n’ont pas pour ceux de la langue d’arrivée (pour une comparaison intéressante avec les enjeux posés au traducteur chinois dans le traitement des noms géographiques et des noms étrangers de personnes, voir Zhihong, 2001). De plus, uploads/Marketing/ 2005-kuenzli-alexander-le-traitement-des-noms-de-produits-dans-la-traduction-francais-allemand.pdf
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- Publié le Jul 27, 2022
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