Coh´ esion, coh´ erence et pertinence du discours Michel Charolles To cite this

Coh´ esion, coh´ erence et pertinence du discours Michel Charolles To cite this version: Michel Charolles. Coh´ esion, coh´ erence et pertinence du discours. Travaux de Linguistique : Re- vue Internationale de Linguistique Fran¸ caise, De Boeck Universit´ e, 1995, pp.125-151. <halshs- 00334043> HAL Id: halshs-00334043 https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00334043 Submitted on 24 Oct 2008 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destin´ ee au d´ epˆ ot et ` a la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publi´ es ou non, ´ emanant des ´ etablissements d’enseignement et de recherche fran¸ cais ou ´ etrangers, des laboratoires publics ou priv´ es. Travaux de Linguistique, 1995, 29, 125-151. COHESION, COHERENCE ET PERTINENCE DU DISCOURS M.Charolles Université de Nancy 2 Un discours n'est pas qu'une simple suite d'énoncés posés les uns à côté des autres. Il suffit d'examiner le moindre texte écrit ou la moindre transcription de l'oral pour relever toutes sortes d'expressions indiquant que tel ou tel segment doit être relié de telle ou telle façon à tel ou tel autre. L'occurrence de ces marques relationnelles contribue sans nul doute à conférer au propos une certaine cohésion ou continuité. L'analyse linguistique du discours a pour mission essentielle de décrire ces marques, à charge pour d'autres disciplines d'exploiter, le cas échéant, les données fournies par cette étude en vue d'une meilleure connaissance des phénomènes de tous ordres liés à la circulation des textes et documents dans la société. Lorsque l'on aborde les phénomènes de discours dans cette perspective une des premières difficultés que l'on rencontre consiste à dresser un inventaire raisonné et exhaustif des différents systèmes de marques de cohésion disponibles dans une langue donnée. La réalisation de ce programme va évidemment de pair avec une caractérisation aussi fine que possible des pouvoirs relationnels de ces différents systèmes de marques et de chacune des expressions qui en font partie. Les travaux en la matière ne manquent pas. Dans la période récente, un grand nombre d'études ont en effet paru sur les marques temporelles, l'anaphore, les connecteurs, etc. Il est évidemment très difficile d'avoir une connaissance approfondie de toutes ces recherches qui sont de surcroît parfois d'inspiration très diverse. Un des défis auquel est confronté l'analyse linguistique du discours consiste cependant à essayer de mettre ces travaux en relation afin de mieux comprendre comment les différents types d'expressions contribuant à la cohésion peuvent interagir lors de l'interprétation du discours. Cette tâche, comme nous voudrions le montrer, ne peut mener bien loin si l'on en reste à une "simple" analyse des marques linguistiques. La caractérisation du fonctionnement de ces marques oblige déjà à intégrer certains paramètres pragmatiques et cognitifs dans la mesure où elles ne véhiculent jamais que des instructions interprétatives invitant le destinataire à accomplir un certain nombre 2 d'opérations inférentielles à partir du donné linguistique en cours de traitement et du contexte dans lequel ce donné apparaît. Cela, qui amène déjà le linguiste aux confins de son domaine de compétence, est cependant encore insuffisant. Pour comprendre véritablement comment les marques de cohésion contribuent à l'interprétation du discours on ne peut faire l'économie d'une réflexion plus générale sur ce qui fait sa cohérence ou pertinence. Ce que l'on peut attendre d'une telle réflexion c'est tout d'abord qu'elle explique pourquoi nous sommes très généralement enclins à établir certains rapports entre des énoncés qui pourtant ne sont reliés par aucune marque de cohésion. On peut attendre ensuite d'une telle réflexion qu'elle fournisse des pistes pour une taxonomie et, comme nous le verrons, une hiérarchisation des relations de cohérence. Enfin, on peut escompter d'une réflexion sur la cohérence qu'elle permette de comprendre comment et pourquoi ces marques interagissent lors du traitement du discours. I. MARQUES DE COHESION ET PLANS D'ORGANISATION DU DISCOURS. L'analyse linguistique du discours (écrit aussi bien qu'oral) a pour objectif essentiel, nous l'avons déjà dit, de répertorier et décrire les différents systèmes de marques contribuant à sa cohésion. Il s'agit en somme, pour le linguiste, d'étudier comment chaque langue fournit aux locuteurs toute une batterie de moyens leur permettant d'indiquer certains rapports qu'ils établissent entre les différentes choses qu'ils ont à dire. Il s'agit donc de repérer les différents systèmes de solidarité à même de conférer au discours une certaine continuité ou homogénéité. Ces systèmes sont de nature très diverse et il convient, dans un premier temps, de bien les identifier. Parmi ces systèmes il importe tout d'abord de distinguer très clairement, comme le font M.A.K.Halliday et R.Hasan au début de Cohesion in English (1976), ceux qui mettent en oeuvre ce que, à la suite de L.Tesnière (1959), on peut appeler des connexions structurales (cf; également F.Corblin 1987b). Les connexions structurales relèvent essentiellement du dispositif syntaxique. La syntaxe est un puissant facteur d'intégration des données verbales qui repose sur des relations entre des termes appartenant à des catégories grammaticales déterminées et susceptibles d'occuper des positions prédéterminées. Le domaine dans lequel s'exercent ces contraintes, comme le rappelle fort justement J.C.Milner (1989), est fini. La portée du système de projection régissant la distribution des catégories syntaxiques est en effet limitée, ce qui n'exclut bien 3 évidemment pas la récursivité. Pour se rendre compte du caractère limité des connexions syntaxiques il n'est qu'à songer aux phénomènes de rection verbale. Le verbe ne peut, comme on sait, régir qu'un nombre fini d'actants ou de rôles thématiques fixés dans le lexique-grammaire ; le verbe n'appelle donc, en tant que catégorie occupant la position la plus haute dans l'architecture projective de la phrase, qu'un nombre fini de positions dépendantes. Sorti de la phrase il n'y a plus, ainsi que le soulignaient déjà E.Benveniste (1974) et R.Jakobson (1963), de cadre préconfigurant la distribution des unités verbales, il n'existe pas de structure formelle dans laquelle les unités phrastiques devraient rentrer pour occuper une position prédéfinie. Tout ce que l'on peut dire à ce niveau c'est qu'une phrase en suit ou précède une autre (cf. E.Benveniste 1974). Bien sûr, il n'est pas exclu de penser que certains types de discours répondent à des principes organisationnels supérieurs. C'est ce qu'ont essayé de montrer notamment les analystes du récit à la suite de Propp. Néanmoins ces principes sont loin de présenter la force et la régularité d'une syntaxe et il faut bien reconnaître que, par- delà leur indéniable intérêt, les "story grammars" ne fournissent pas des critères fiables de reconnaissance des catégories entrant dans la composition des récits ni, non plus, de véritables règles de composition de ces catégories (cf, entre autres, sur ce point P.N.Johnson-Laird 1983). De toute façon, il semble exclu qu'un modèle général des "superstructures textuelles" (cf. T.A. van Dijk et W.Kintsh 1983, J.M.Adam 1990) ou des échanges conversationnels (pour une critique cf. J.Searle in Searle et alii ed. 1992) fournisse jamais un cadre structural comparable à celui qu'offre les différents formalismes syntaxiques. Le discours commence donc là où finit le pouvoir des connexions structurales. Les linguistes qui s'intéressent au discours n'auraient pas à se préoccuper du système des connexions structurales qui pèse sur l'organisation des phrases si certains phénomènes relevant typiquement de leur champ d'étude ne s'expliquaient, au moins partiellement, par des considérations syntaxiques. C'est ce qui se passe en particulier avec l'ellipse (cf. pour une entrée en matière discursive M.A.K.Halliday et R.Hasan 1976) dont la résolution exige une restitution en principe fidèle de la structure grammaticale et de tel ou tel matériel lexical emprunté à une phrase précédente. Ce comblement destiné à saturer la structure ellipsée ne peut se faire qu'en respectant étroitement la configuration de la phrase d'appui, ce qui fait que l'ellipse, quoique puissant facteur de cohésion discursive, ne peut fonctionner qu'à très courte distance (cf. A.Zribi-Hertz 1985). L'ellipse apparaît donc comme un phénomène relevant à la fois de la phrase et du discours. Il en va de même pour l'interprétation des constructions détachées. Les constructions détachées mettent en jeu des constituants syntaxiquement 4 périphériques dont certains comportent des catégories-tête (participes, gérondifs, infinitifs) exigeant un gouverneur, ne serait-ce que (quand c'est le cas) pour contrôler leur accord. Or s'il y a bien, pour la recherche de ce contrôleur, attraction du côté de la phrase qui accueille la construction détachée, les cas où l'interprétation se fait par le truchement du seul discours antérieur sont également très nombreux (cf. notamment B.Combettes 1990, A.Berrendonner & M.J.Reichler- Béguelin 1989), avec du reste une plus grande marge de manoeuvre que dans le cas de l'ellipse. Les constructions dont la résolution met en jeu la phrase et son au-delà plus ou moins immédiat sont à l'origine de connexions qui sont à la fois structurales et non structurales. A côté en effet des liens structuraux ou partiellement structuraux il existe, dans les différentes langues, tout un ensemble d'outils relationnels de nature sémantico-pragmatique qui, en quelque sorte, complètent le système des relations distributionnelles et positionnelles de caractère syntaxique ainsi que le dispositif logico-énonciatif (thème/propos). uploads/Marketing/ cohe-trvx-ling 2 .pdf

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  • Publié le Dec 03, 2022
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