Retromarketing: how marketing has turned to the past Le rétromarketing : commen
Retromarketing: how marketing has turned to the past Le rétromarketing : comment le marketing s’est tourné vers le passé Damien Hallegatte Professeur, Université du Québec à Chicoutimi 555, boul. de l’Université Chicoutimi (Québec) G7H 2B1 CANADA Téléphone : 418 545-5011, poste 5233 Damien_Hallegatte@uqac.ca Abstract During last decades, retromarketing expanded with respect to temporal distance, market segments and product categories. From 1990’s onwards, the baby-boomers, a large and affluent market segment, started to buy products from the past, without shameful nostalgia, and were then followed by young people. This phenomenon was due to occidental consumer’s state of mind in the end of the 20th century, and then allowed by society, facilitated by technology and stimulated by commercial companies. Key-words: retro, retromarketing, retrobranding, nostalgia, past Résumé Le rétromarketing s’est développé ces dernières décennies en termes de distance temporelle, segments de marché et catégorie de produits. À partir des années 1990, ce sont les bébé- boumeurs, un segment de marché large et solvable, qui ont commencé à acheter des produits issus du passé, sans nostalgie honteuse, et ont ensuite été suivis par les jeunes. Ce phénomène a été déclenché par l’état d’esprit des consommateurs des pays occidentaux de la fin du 20e siècle, et s’est vu autoriser par la société, faciliter par la technologie et encourager par les entreprises commerciales. Mots-clés : rétro, rétromarketing, rétromarquage, nostalgie, passé Communication présentée au 14e Congrès des tendances du marketing, Paris, 23 et 24 janvier 2015 2 Introduction Les produits rétro, c’est-à-dire associés au passé (Brown, 1999), sont maintenant courants dans de nombreuses catégories de produits, par exemple l’automobile (Fiat 500, Mini), l’habillement (de style vintage) ou l’électronique (au design rétro). Cependant, l’exemple le plus frappant est celui de l’industrie de la musique populaire, où des artistes célèbres dans les années 1960 et 1970 se taillent la part du lion dans le palmarès des artistes ayant généré le plus de revenus de concerts de 2000 à 2009 : sur les 25 premiers, 16 d’entre eux (64 %) sont actifs depuis plus de 30 ans, et 10 (40 %) le sont même depuis plus de 40 ans1. Dans cette liste se trouvent, par exemple, Elton John (603 M$), Billy Joel (418 M$), les Eagles (347 M$), Cher (257 M$) et Tina Turner (212 M$). En outre, dans ce palmarès, les 18 artistes qui sont apparus avant le milieu des années 1980 ont généré un revenu brut moyen par place disponible de 87 $ alors que, pour les 7 artistes qui sont apparus par la suite, ce chiffre est de 45 $. Cette « logique rétro » (Brown, 2001) se trouve poussée à son extrême dans le cas des concerts générations, où l’association des artistes au passé est non seulement très explicite, mais constitue la raison d’être de ces évènements (Derbaix et Derbaix, 2010). Ainsi, la caractéristique principale de l’industrie de la musique populaire depuis le début du 21e siècle est qu’elle est résolument tournée vers le passé (Reynolds, 2011). Le rétromarketing (Brown, 1999), qui est la gestion de ces produits associés au passé, marginal jusqu’à la fin des années 1980, est aujourd’hui devenu une stratégie courante, qui cible tous les segments d’âge et concerne même des catégories de produits hautement techno- logiques comme l’automobile ou axées sur la créativité comme la musique populaire. Cependant, il n’est pas banal que le marketing se tourne vers le passé, pas simplement pour éventuellement bénéficier de relations et d’attitudes plus fortes vis-à-vis des marques du passé (Kessous et Roux, 2010), mais pour utiliser le passé comme un élément central de positionnement, c’est-à-dire pour vendre le passé (Hallegatte, 2014). En fait, le développement du rétromarketing pourrait être vu comme une aberration pour le marketing moderne normalement axé vers la nouveauté et le progrès continu, et qui implique que des choses du passé, mises en obsolescence par les techniques de marketing elles-mêmes, peuvent avoir autant sinon plus de valeur que des choses actuelles (Brown, 2001). Or, la littérature, focalisée principalement sur le concept de nostalgie per se (ex. : Divard et Robert- Demontrond, 1997 ; Holak, Matveev et Havlena, 2008 ; Holbrook, 1993 ; Kessous et Roux, 2010 ; Schindler et Holbrook, 2003), avance des explications très partielles et éparses de ce phénomène. Certes, le passé est un objet de désir en soi, puisqu’il est différent du présent mais néanmoins familier, qu’il demeure inaccessible, qu’il est source de sens et librement interprétable (Hallegatte, 2014), mais cela n’explique pas pourquoi le rétromarketing s’est répandu à partir de la fin des années 1980 et qu’il s’agit aujourd’hui d’une tendance majeure en marketing. Nous synthétisons donc ici les explications démographiques, psychosocio- logiques, historiques, socioculturelles, technologiques et organisationnelles du développement du rétromarketing. Mais, avant cela, nous traçons l’évolution du rétromarketing depuis les années 1960 en termes de distance temporelle entre l’époque de référence et l’époque actuelle, de segments de marché visés et de catégories de produits concernées. 1 Source : Billboard, vol. 121, no 51, p. 166 (19 décembre 2009). 3 Évolution du rétromarketing Bien qu’il existe des exemples de rétromarketing datant d’avant la Seconde Guerre mondiale (Brown, 2001), l’arrivée de produits rétro sur le marché de masse est un phénomène récent, né dans les années 1960. En 1964, le magazine Time témoignait de l’importance de la renaissance de l’Art nouveau dans des produits de consommation, soit l’ameublement et la décoration2. Deux ans plus tard, une rétrospective d’un artiste associé à ce mouvement, à Londres en 1966, a suscité un engouement sans précédent pour cette période passée, ce qui peut être considéré comme le premier « évènement rétro » dans le domaine de l’art (Guffey, 2006). Cependant, ce n’est que dans les années 1970 que l’on peut considérer qu’une première vague rétro de masse est apparue. On a notamment assisté à une renaissance du rock’n’roll des années 1950 et à l’apparition de « films nostalgiques » (Jameson, 1991), relatant un passé récent idéalisé ou stéréotypé, n’ayant aucune prétention d’exactitude historique, comme American Graffiti ou Grease, ainsi que des émissions de télévision, comme la série Happy Days. Ce rétromarketing des années 1970 comporte une évolution importante par rapport à celui des années 1960, en termes de distance temporelle de la période à laquelle il est fait référence (voir le tableau 1). La plupart des produits rétro des années 1970 ne sont séparés de leur référent que de 15 à 25 ans, contrairement à ceux des années 1960, pour lesquelles cette distance est d’environ un demi-siècle. Le rétromarketing des années 1970 a donc permis aux consommateurs ciblés d’expérimenter de nouveau un passé récent, et cette tendance s’est confirmée par la suite. Par exemple, les publicités de la fin des années 1980, qui s’appuient sur la nostalgie, faisaient généralement référence aux années 1960 et au début des années 1970, c’est-à-dire environ 20 ans auparavant (Havlena et Holak, 1991). Cet intérêt pour les décennies 1960 et 1970 a persisté par la suite, puisqu’elles ont une signification particulière pour l’ensemble de la société (Hallegatte, 2013, p. 63), et celui pour les décennies 1980 et même 1990 est apparu, ce qui a élargi considérablement la fenêtre de distance temporelle du rétromarketing, l’intervalle se situant actuellement entre 15 et 50 ans. Années 1960 Années 1970 Années 1980 et 1990 Depuis 2000 Distance temporelle 50 ans et plus De 15 à 25 ans De 15 à 50 ans Segments de marché Classes sociales supérieures Ceux qui étaient jeunes lors de l’époque de référence Tous Catégories de produits Ameublement et décoration Produits de culture populaire Produits de consommation courante Toutes Tableau 1. Évolution du rétromarketing contemporain 2 « New Look at Art Nouveau », Time, 21 août 1964. 4 Outre la distance temporelle, les principaux segments ciblés par le rétromarketing ont évolué (voir le tableau 1). Selon Havlena et Holak (1991), les publicités et produits « nostalgiques » de la fin des années 1980 s’adressaient aux bébé-boumeurs ou aux personnes âgées, en leur rappelant généralement la période de leur adolescence respective, mais ce n’est plus le cas. Par exemple, la New Beetle ne cible apparemment pas seulement ceux qui ont connu l’original, et les groupes de musique rock des années 1970 ne se privent pas du segment des jeunes. D’ailleurs, les vieux succès rock des années 1960 et 1970 constituent une partie importante de la liste de chansons incluses dans les jeux vidéo musicaux Rockband et Guitar Hero. Le rétromarketing cible aujourd’hui des segments de consommateurs n’ayant pas vécu la période de référence, sachant qu’ils peuvent être nostalgiques d’une époque qu’ils n’ont pas vécue (Baker et Kennedy, 1994 ; Holak, Havlena et Matveev, 2006 ; Holbrook et Schindler, 1991 ; Stern, 1992 ; Vignolles, Bonnefont et Veillé, 2012) ou, plus précisément, qu’ils n’ont pas vécue directement (Hallegatte et Marticotte, 2014), ou que le passé peut tout simplement leur apparaître cool. Cependant, l’évolution la plus évidente et la plus étonnante du rétromarketing est le nombre et le type de catégories de produits touchées par ce phénomène (voir le tableau 1). De l’ameublement et la décoration dans les années 1960, à la culture populaire dans les années 1970, on uploads/Marketing/ retromarketing-how-marketing-has-turned-to-the-past 1 .pdf
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- Publié le Apv 22, 2021
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