CHAIRE CARDINAL MERCIER CORNELIO FABRO, c.P.S. PARTICIPATION ET CAUSALITÉ SELON
CHAIRE CARDINAL MERCIER CORNELIO FABRO, c.P.S. PARTICIPATION ET CAUSALITÉ SELON S. THOMAS D'AQUIN PRÉFACEDE L. DE RAEYMAEKER PUBLICATIONS UNIVERSITAIRES DE LO UV AIN 2. PLACE CARDINAL MERCIER LOUVAIN 1961 ÉDITIONS BÉATRICE-NAUWELAERTS lO, RUE DE L'ABBAYE PARIS (VIe) PRÉFACE Le R. P. Cornelio FABRO, de la congrégation des Padri Stimatini, fit paraitre, en 1939, La nozione metafisica di partecipazione se- condo S. Tommaso, ouvrage d'une importance considérable, qui d'emblée lui assura une pIace de choix dans le monde de la philoso- phie. Depuis lors, il a fait preuve de la plus grande activité en pu- bliant de nombreuses contributions relevant de la métaphysique, de la psychologie, de l'histoire de la philosophie, notamment des études sur Hegel, Marx, Kierkegaard. Nanti d'une bonne formation scientifique, le R.P. FABRO avait débuté jadis par des recherches dans le domaine de la biologie. Sans doute, le goùt des données lui en est-il resté, ainsi que l'amour des situations nettes. S'agit-il d'histoire, il écarte les intermédiaires pour aller aux sources et il tient à lire les auteurs dans leur langue. Lors- qu'il résolut de s'enquérir de la pensée kierkegaardienne, il commen- ça par apprendre le danois et il publia lui-meme la traduction ita- lienne des principaux passages du Journal de Kierkegaard. Poursuivant ses recherches dans différents secteurs de la philoso- phie et de l'histoire, le R.P. FABRO ne se laissa pas détourner de la tache principale qu'il s'était assignée, celle de révéler le sens authen- tique de la métaphysique de S. Thomas. Le volume sur la Partecipa- zione, paru en 1939 et réédité en 1950, ne constituait qu'une pre- mière partie. Pour écrire la suivante, l'auteur prit son temps; il voulut d'abord élargir ses horizons et laisser murir sa pensée. Ce nous est un honneur et une joie d'avoir pu l'inviter à l'Institut Supérieur de Philosophie de l'Université de Louvain, en 1954, pour y occuper la «Chaire Cardinal Mercier», et de lui avoir fourni de la sorte l'occasion de mettre au point les conclusions de ses patientes recherches. Il en est résulté ce volume, intitulé ParticiPation et cau- salité. L'ouvrage projette une vive lumière sur des points fondamen- taux de la métaphysique de $. Thomas, en meme temps qu'il aide à 8 L. DE RAEYMAEKER situer celle-ci dans l'histoire générale de la pensée philosophique. Par cette publication, le R.P. FABRO aura contribué à précipiter et, en quelque sorte, à faire aboutir le mouvement de rénovation de la métaphysique thomiste. Beaucoup inclinaient à penser que, dans ce domaine, il n'y avait guère de progrès à réaliser, du moins au niveau des principes. Sans doute aussi, s'imaginaient-ils qu'en matière philosophique, OÙ la précision est de rigueur, les memes mots recouvrent partout les memes idées. C'est assurément une illusion. Et il est à noter que, me me et surtout, les termes les plus usuels, qui sont les plus impor- tants, s'emploient en des acceptions qui diffèrent d'un auteur à l'autre: c'est en cela d'ailleurs que se manifeste la différence fon- cière des systèmes, comme c'est aussi dans cette ligne que doit se situer la source de leur multiplicité. Pour s'en convaincre, il n'est que de chercher le sens des mots les plus courants: tels «etre», «étant». Ils possèdent une importance particulière, tant dans la philosophie grecque que dans celle du moyen age et dans maint système de l'époque moderne et contem- poraine. Or, il serait erroné de croire que Parménide, Pl:i.ton, Aris- tote, s'entendent sur le sens à attribuer à «lÒ D'V»; de meme, il se- rait inexact de prétendre que chez S. Bonaventure, S. Thomas, Henri de Gand, Jean Duns Scot, «ens», «esse», s'emploient de la meme façon; enfin, il serait nalf d'en référer au dictionnaire pour établir que sein, en allemand, est la traduction littérale du mot latin esse et d'en conclure, sans plus, qu'en se servant de ces mots Hegel et Saint Thomas leur attribuaient exactement la me me portée. Les significations métaphysiques ne se constatent pas à la manière des choses physiques; elles doivent faire l'objet d'une saisie intellec- tive, qui n'est pas de la meme qualité chez tous les penseurs, puis- qu'elle n'est pas chez tous également pénétrante et étoffée. Aussi bien, tout au long de l'histoire, une évolution s'est manifestée dans la manière philosophique de concevoir l' «etre» et, conséquemment, dans la manière d'entendre les problèmes qui s'y rattachent. Dès lors, comment, d'un philosophe à l'autre, le sens précis du mot «etre» n'en aurait-il pas été modifié? Comment un glissement de sens ne se serait-il pas produit au cours des siècles? Lorenz Fuetscher, l'auteur de Akt lmd Potenz paru en 1933, sua- rézien convaincu et perspicace, faisait remarquer que c'èst sur l'etre, point de départ de la métaphysique et point de vue propre à cette discipline, que thomistes et suaréziens se trouvent en désaccord et que, dès lors, à moins qu'ils arrivent à s'entendre sur ce point, la dis- PRÉFACE 9 cussion de toute autre question, - naturellement subséquente,- doit etre tenue pour stérile et oiseuse. Dans le camp thomiste, la meme conviction a surgi et s'est peu à peu répandue. Depuis un quart de siècle, c'est dans cette perspective que, de divers cotés, l'on s'attache à étudier les écrits de S. Thomas et à approfondir sa doc- trine. En fin de compte, quelle est l'attitude fondamentale du Doc- teur Angélique en matière de métaphysique? En quoi cette attitude diHère-t-elle de celle de ses prédécesseurs et de ses contemporains? Il apparut bientòt que la position de S. Thomas, en métaphysique, est profondément originale. Elle l'est bien plus que les thomistes n'ont accoutumé de le dire. Il est vrai que le Docteur Angélique s'est pénétré de doctrines d'origine diverse, grecque, latine, arabe, juive; mais loin de demeurer l'esclave de ses sources et de se borner à les ordonner en un système éclectique, il a réussi à se les assimiler person- nellement: tout en prenant appui sur elles, il s'en est libéré; en s'ai- dant de leur lumière, il a conçu une métaphysique qui lui est propre; et tout l'ensemble doctrinal, y compris le point de vue formel, s'en est trouvé renouvelé. Dès lors, étant soumis à un éclairage nouveau, les problèmes, comme les solutions, en ont acquis un sens jusqu'alors inconnu. D'aucuns prétendent que, depuis Platon, l'étude de l'etre s'est en- lisée parce qu'elle a été réduite tout entière à celle de la quiddité. En un sens, cette opinion pourrait se défendre, à condition toutefois d'y mettre au moins une réserve, à vrai dire considérable: c'est qu'elle ne peut s'appliquer à la doctrine de S. Thomas. En eHet, songe-t-on encore à mettre en doute que le Docteur Angélique ait établi une distinction foncière entre l'essence et l'esse, ou à contester qu'à ses yeux l'essence est un principe potentiel, tandis que l'esse est un acte? Comment alors s'étonner que c'est à l'acte prernier, à savoir l'esse, que S. Thomas accorde la primauté? Par conséquent, dans la conception thomiste, le champ d'applica- tion de la théorie aristotélicienne de l'acte et de la puissance se pro- longe bien au delà du domaine des catégories, puisqu'il englobe l'or- dre de l'esse lui-meme; pour autant, la position d'Aristote se trouve largement dépassée. Mais, dès lors que l'esse apparaìt comme un ac- te authentique, il prend figure de perfection et c'est à bon droit que S. Thomas y applique la théorie platonicienne de la participation: pour ce faire, c'est Platon, cette fois, que le Docteur Angélique a dti dépasser, car il lui a fallu considérer l'esse, source absolument uni- verselle de participation, comme irréductible à n'importe quelle es- sence et le situer au delà de toute idée quidditative. lO L. DE RAEYMAEKER lelle que la conçoit S. Thomas, l'essence n'est que le mode d'étre, principe potentiel se rapportant, intégralement et de soi, à l'acte d'étre. Ce n'est plus l'essence (l'idée quidditative, la catégorie), mais l'étre qui porte l'accent métaphysique principal, car c'est à l'étre que participe toute réalité définissable. L'esse, la perfection la plus radicale et la plus répandue, «perfectio omnium perfectionum», est à considérer comme le principe foncier de toute réalité et le foyer de toute intelligibilité. La conclusion s'impose: loin de se ramener à quelque forme d'essentialisme, le système de S. Thomas en prend plutot le contre-pied, car il se fonde sur une métaphysique de l'esse, au sens le plus strict du moto L'école thomiste a-t-elle jamais perdu de vue cette inspiration pro- fonde de la doctrine du maltre? Il parait difficile de répondre par une négation catégorique. Quoiqu'il en soit, le thomisme d'aujour- d'hui prend une conscience de plus en plus nette de la signification et des exigences fondamentales de la philosophie du Docteur Angé- lique. Il n'est pas interdit d'y voir le signe d'une robuste santé in- tellectuelle et d'une grande vigueur philosophique. Cette situation favorable est le fruit d'un vaste mouvement de recherche historique et de réflexion philosophique, auquel le R.P. FABRO collabore de la manière la plus efficace. A plus d'un égard . il y a fait reuvre de pionnier. Etre, participation, causalité: autant de thèmes qui lui sont fami- liers et qui l'ont conduit uploads/Philosophie/ 18-partecipation-et-causalite.pdf
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- Publié le Aoû 28, 2021
- Catégorie Philosophy / Philo...
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