Antiphon Antiphon, en grec ancien Ἀντιφῶν / Antiphôn (Rhamnos, Attique v.-480ŔA
Antiphon Antiphon, en grec ancien Ἀντιφῶν / Antiphôn (Rhamnos, Attique v.-480ŔAthènes -410), est l'un des dix grands orateurs attiques. Ce sophiste hédoniste s’était spécialisé dans plusieurs domaines de la sophia (la connaissance, le savoir) telle que le juridique, l’onirocrisie, la mantique et la thérapeutique par les mots. Sommaire [masquer] 1 Antiphon de Rhamnonte et d'Athènes 2 Biographie 3 Antiphon le thérapeute, précurseur de la psychanalyse 4 Discours 5 Œuvre mathématique 6 Œuvre philosophique o 6.1 Antiphon, le contestataire libertaire 7 Notes 8 Bibliographie o 8.1 Bibliographie en ligne o 8.2 Éditions et traductions 8.2.1 Éditions savantes 8.2.2 Autres éditions en ligne o 8.3 Sur (les) Antiphon 8.3.1 Principales monographies et articles 8.3.2 Autres publications 9 Liens externes Antiphon de Rhamnonte et d'Athènes[modifier] La question de savoir si Antiphon de Rhamnonte (de l'oligarchie des Quatre-Cents) et Antiphon d'Athènes sont un seul et même personnage historique, d'une part, et si les textes de l'orateur (selon la tradition initiée par Caecilius de Calé Acté1), du politique, du logographe, du rhéteur (auteur des Tétralogies2) et du sophiste (auteur des fragments sur papyrus3 de De la concorde et De la vérité), d'autre part, sont du même ou de plusieurs auteurs fait l'objet de débats toujours d'actualité4. Enfin d'autres Antiphon ont été connus en Grèce antique5, comme le poète tragique6 auquel Aristote fait référence dans La Rhétorique (VI, 27). Biographie[modifier] Né dans le dème attique de Rhamnos, Antiphon est le fils de Sophilos, un aristocrate sophiste athénien, et le petit-fils d'un fervent partisan des Pisistratides. Antiphon apprend l'art oratoire de son père et entame une carrière de logographe et de sophiste, enseignant à son tour la rhétorique. Après avoir été le maître de Thucydide, qui le défend ensuite avec chaleur dans ses écrits, il s'engage en politique sur la fin de sa vie : il participe à la révolution oligarchique des Quatre-Cents en -411. À la chute du régime, en -410, il est jugé pour trahison, et malgré un discours passionné de défense7, il est condamné à boire la ciguë8,9. Pour des commentateurs contemporains10 Antiphon le sophiste est distinct d'Antiphon le logographe, mais plusieurs spécialistes argumentent d'après des découvertes papyrologiques récentes, que le sophiste et l'orateur ne font qu'un11. Antiphon le thérapeute, précurseur de la psychanalyse[modifier] Antiphon estimait que « chez tous les hommes, la pensée (gnomè) gouverne le corps pour la santé et la maladie et pour tout le reste. » Théorie qu'on peut aujourd'hui retrouver dans l'effet placebo. Concernant le thérapeute Antiphon, pseudo-Plutarque nous dit (traduction Louis Gernet12) : « Au temps où il s’adonnait à la poésie, il institua un art de guérir les chagrins, analogue à celui que les médecins appliquent aux maladies : à Corinthe, près de l’agora, il disposa un local avec une enseigne où il se faisait fort de traiter la douleur morale au moyen de discours ; il s’enquérait des causes du chagrin et consolait ses malades. Mais, trouvant ce métier au-dessous de lui, il se tourna vers la rhétorique. » Antiphon peut être considéré comme un des précurseurs de la psychanalyse. Il est l'inventeur d'une méthode d'interprétation des rêves ainsi que d'une thérapie de l'âme fondée sur le discours. Il prétendait guérir les maladies humaines par l'expression des sentiments par les mots, et l'interprétation rationaliste des rêves. Grâce à Lucien de Samosate, nous possédons le propos d'ouverture de son traité Sur l'art d'échapper à l'affliction : « L'île des songes est proche de deux sanctuaires de Tromperie et de Vérité. C'est là que sur leur enceinte sacrée et leur oracle qu'elle domine l'interprète des rêves à qui Sommeil avait alloué ce privilège. » ŕ Histoire véritable II, 33. Discours[modifier] Si la tradition attribue 60 discours à Antiphon, nous n'en conservons que six en entier, ainsi que des fragments de vingt autres. Le premier discours que nous ayons remonte à 430 av. J.-C. La tradition fait de lui le fondateur de l'éloquence judiciaire, l'un des trois types d'éloquence grecque ŕ il est d'ailleurs le premier orateur dont les discours aient été publiés. C'est un logographe, trois des discours que nous conservons concernent des affaires d'homicide. Il est également l'auteur des Tétralogies, des exercices rhétoriques mettant en regard deux discours (le premier et le second exigés par la procédure athénienne) de l'accusation et deux discours (idem) de la défense, également pour des affaires d'homicide. Antiphon enseigne, et démontre dans ses œuvres, des procédés techniques pour faire un bon discours. D'abord, il préconise une disposition en cinq parties, puis il donne une liste d'arguments-type, les τόποι / topoi utilisables dans toutes les plaidoiries. C'est également lui qui, selon la tradition, introduit la technique du vraisemblable, éliminant tour à tour les hypothèses invraisemblables pour prouver l'innocence ou la culpabilité de l'accusé. Œuvre mathématique[modifier] Antiphon était également bon mathématicien. Aux côtés de son compagnon Bryson, Antiphon a été le premier à donner une borne inférieure et supérieure de pi grâce au calcul de l'aire de polygones inscrits et circonsrits au cercle13. Il a essayé d'appliquer cette méthode pour résoudre la quadrature du cercle, problème dont on a depuis démontré qu'il n'avait pas de solution. Œuvre philosophique[modifier] Papyrus original de "Sur la vérité." Dans le domaine strictement philosophique, Antiphon est un auteur original, mais méconnu. Auteur d'un traité Sur la Vérité, un ouvrage Sur la Concorde, ainsi qu'un autre Sur la Politique, dont il ne reste rien que quelques fragments. Il s'est semble-t-il attaché à prendre une voie différente d'Aristote. Autant le stagirite affirmait la vérité ontologique de la forme dans la nature, autant Antiphon énonçait la supériorité de la Matière sur le Monde. Pour lui en effet la Matière constitue l'essence de la nature des êtres. Cette doctrine se caractérisait par le concept d'arrythmiston14. À la même époque, les Atomistes utilisaient le mot grec de rythmos pour décrire les limites physiques des atomes. L'arrytmiston est dans l'esprit d'Antiphon le substrat du monde "libre de structure". Il utilisait pour illustrer sa théorie l'image du lit enterré d'après le témoignage d'Aristote : au livre I de son traité de la Vérité, Antiphon indiquait Si l'on enfouissait un lit et si le bois en se putréfiant donnait naissance à un rejeton vivant, on n'aurait pas un lit mais du bois 15 L'essence du lit est végétal, son ordonnancement est un accident fait par l'homme. La vraie réalité est le support délié de toute structure, les figures particulières des choses ne sont que les agencements fugaces de l'opportunité du mouvement du Monde. Pour lui, le substrat libre de structure du Monde n'a besoin de rien, ni ne conçoit rien d'autre en plus, mais est indéterminé et sans manque16 Même la notion de temps est à ses yeux à soustraire du substrat primordial du monde. Ainsi, il indiquait Le temps est pensée ou mesure, non le substrat des choses17, théorie appliquée concrètement par notre philosophe dans la recherche de la résolution géométrique de la quadrature du cercle. La vision philosophique selon Antiphon de ce problème géométrique se retrouve dans sa tentative de la rectification géométrique de la courbe. La seule réalité étant alors l'homogénéité de l'espace18, où se déploie cette courbure géométrique. Antiphon, le contestataire libertaire[modifier] Antiphon met ses connaissances au service du peuple. Pour aller vers le bonheur, vers l'hédonisme libertaire, il prône une vie selon la Nature, il recommande d'aller à l'encontre des conventions sociales, idée qu'on retrouve également chez les Stoïciens, Diogène de Sinope, Aristippe de Cyrène et les Cyrénaïques. Il recommande de tourner le dos aux richesses, aux honneurs et aux valeurs familiales19 car ces "fausses valeurs" éloignent du bonheur et de l'autonomie. Il veut privilégier l'être sur l'avoir. « (Dans la vie) tout paraît petit et de courte durée. La vie, c’est un dé qu’on lance : on ne peut pas revenir en arrière. Il y a des gens qui ne vivent pas leur existence présente : ils mettent tout leur zèle à se préparer, pour ainsi dire, à vivre une autre vie qui n’est pas de ce monde ; en attendant, le temps file…20 » Selon lui, pour vivre selon la Nature, pour se connaître soi-même, il faut connaitre les lois de la Nature. Cette connaissance ne peut passer que par la philosophie qui permet de comprendre les choses et ainsi de conjurer la peur et fabriquer de la rationalité et du plaisir. Il est ainsi également un précurseur du concept de droit naturel que développeront plus tard Hobbes, Locke et Rousseau. Notes[modifier] 1. ↑ Le texte de Cécilius sur Antiphon est la source principale de pseudo-Plutarque, 832e [archive]. 2. ↑ Cf. Fernanda Decleva Caizzi 1969 ; voir aussi les trad. françaises dans l'éd. de Louis Gernet 1923 et la Première Tétralogie, dans Barbara Cassin 1995, p. 279-294. 3. ↑ Cf. Pendrick 2002 ; Untersteiner 1967, p. 178-195 et 1993, vol. 2, p. 45, n. 17. 4. ↑ Voir une synthèse des positions dans Narcy 1989 [DPhA], la bibliographie détaillée de Vidoni c. 2009 et les notes de Dorandi 1999. Voir aussi le compte rendu sur Gagarin 2002 uploads/Philosophie/ antiphon-wiky.pdf
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- Publié le Fev 05, 2022
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