1 NORMAN PALMA AXIOLOGIE ET ESCHATOLOGIE DANS LE NOUVEL ORDRE MONDIAL 2 I De la

1 NORMAN PALMA AXIOLOGIE ET ESCHATOLOGIE DANS LE NOUVEL ORDRE MONDIAL 2 I De la formation de la raison théorique Il n’est pas difficile de constater qu’à l’époque actuelle nous assistons à l’émergence d’une nouvelle division du monde. Il est question, plus concrètement, d’une déchirure entre les Etats-Unis et la vieille Europe, pour reprendre le terme employé par Donald Rumsfeld ; secrétaire d’Etat de la Défense. En effet, le conflit des Etats-Unis avec l’Irak a fait apparaître, au sein de la communauté des nations, deux positions bien différentes entre ceux qui sont pour des actions unilatérales et ceux qui considèrent que toute intervention internationale ne peut se faire qu’avec l’aval des Nations Unies. C’est ainsi qu’avec la deuxième guerre du Golfe, l’effort de construction de l’ordre international va être mis en question. Car, rappelons que la création d’un ordonnancement international, est la condition nécessaire au dépassement des actions unilatérales des forts contre les faibles. En effet, le but principal d’un tel ordre est non seulement de promouvoir les échanges et la solidarité entre les nations, mais aussi et surtout de lutter contre les injustices réciproques. Ceci en vue de maintenir et consolider la paix entre les nations. Donc, d’assurer la paix perpétuelle (Kant) entre les nations. Par conséquent, la création d’une véritable communauté des nations, se manifestant dans l’universalité des relations, ne peut être que le résultat du processus conventionnel, donc de la raison instituante. De telle sorte que la négation 3 de l’ordre international ne peut être que le résultat de la manifestation d’un système de valeurs, pour lequel la convention est la substance même de la pratique entre les nations. C’est précisément cette rupture qu’il s’agit de comprendre, car la conventionnalité implique la garantie des droits réciproques et est conditionnée par la force de la raison et non pas par la raison de la force. Cela dit, il est important de saisir que le processus conventionnel – dont la finalité est la création d’une communauté d’égaux au niveau des nations, comme au niveau international – a comme point de départ l’unité1 des valeurs d’ordre universel, plus précisément, cette instance métaéthique qu’est l’En-soi éthique. Par conséquent l’unité de l’idée du Vrai, de la Justice et du Bien. Car ce noyau des valeurs d’ordre universel, est la vérité dans son unité et son dévoilement se manifeste à travers l’idée de la Justice, pour s’accomplir dans le règne du Bien qui est le Bien suprême : le « Summum Bonum. » L’axiologie est, ainsi, le savoir des valeurs d’ordre universel. Par conséquent, du processus qui mène à la réalisation et à l’accomplissement éthique de l’humain. En tant que telle, l’axiologie s’oppose à l’ontologie, de la même manière que la méta éthique s’oppose à la métaphysique2. En tout cas, c’est la manifestation de cette dimension que les classiques grecs appelaient le « logos » qui conditionne le monde. De plus, la connaissance de ce processus n’est pas d’ordre contemplatif, mais plutôt d’ordre rationnel. Pour cela même la philosophie première nous dit que la raison 1 Car il convient de rappeler que toute pensée a une source unique, a laquelle elle emprunte son unité et sa logique finaliste. 2 Ainsi, selon son concept et sa réalité, la connaissance de l’Absolu éthique n’est pas d’ordre métaphysique, comme on tend à le dire, mais d’ordre métaéthique. 4 théorique doit conditionner la raison pratique. Plus précisément la raison conventionnelle. Car c’est par convention que ce mouvement se réalise, en s’objectivant dans un processus institutionnel. Mais la convention sociale ne peut pas se manifester sans la loi du plus grand nombre ; donc, sans l’individualisme. Par conséquent, la naissance de l’individualisme est le point de départ du processus conventionnel. Plus précisément, le mouvement dans lequel l’égalité en puissance – « l’isothymia » : l’égalité en dignité3 - devient égalité en acte à travers l’égalité devant le droit (« isonomia ») et l’égalité devant le pouvoir. (« isocratia ») Ainsi, le processus conventionnel est, dans sa manifestation politique, le mouvement qui mène de l’individualisme au pluralisme et à l’Etat de droit. Puis de l’Etat de droit à l’Etat de justice, en passant par l’Etat démocratique. De sorte que ce processus d’accomplissement mène au niveau des particularités (des nations), à la création d’une communauté d’égaux et, au niveau international, à la communauté des nations. En effet, l’homme est non seulement un animal politique – comme l’avait souligné Aristote -, mais aussi un animal cosmopolite. Car le propre de toute partie est de s’occuper du soin de tout et de s’achever à travers son accomplissement. Il devient, dès lors, clair que dans son processus d’accomplissement politique l’homme prend conscience de la nécessité de dépasser la communauté du sang (raciale) et des croyances (religieuses), en vue de se constituer en tant que 3 Car le fondement de cette égalité est la dimension universelle de cet être, son appartenance au genre humain. De sorte que tout humain est aussi humain que tout autre humain. « Homo homini homo », disaient les latins. En effet, malgré les préjugés, l’homme est un homme pour tout homme. 5 communauté juridique, c’est à dire conditionné par l’idée du droit et de la justice. Car il ne s’agit pas de donner le pouvoir aux hommes ou aux croyances, mais à la raison axiologique, au « logos » qui peut et doit gouverner le monde. 6 II De la perversion de la raison Le monde de la conventionnalité va émerger à nouveau avec la Révolution anglaise. Le « logos », produit de l’esprit de la philosophie grecque, avait perdu sa raison d’être avec l’avènement du christianisme comme doctrine officielle ; avec le Concile de Nicée, en 325. A partir de ce moment le pouvoir était légitimé par le Dieu de l’Ancien Testament. De sorte que le retour de la pratique de la raison – de la conventionnalité – ne pouvait pas se manifester d’une manière cohérente. Sa nouvelle objectivation ne pouvait être alors, en même temps, que le chemin de sa redécouverte. Dans l’histoire de la philosophie nous appelons les moments essentiels de ce cheminement : l’empirisme anglais, les lumières françaises et l’ « aufklaerung » allemand. Avec la Révolution française va se poser à nouveau, au niveau théorique, la logique du processus de dépassement de l’esprit de Jérusalem. Hegel, pour sa part, considéra que dans ce mouvement l’Absolu (qui est Dieu) laisse la place à la Raison. Se posait, dès lors, la question de savoir quel est le contenu de la raison théorique devant se manifester au niveau de la pratique. Se posa, par conséquent, la question du contenu du « logos » de l’Idée, de l’idéologie4. Mais cette interrogation, malgré les tentatives de l’école des idéologues, resta sans réponse pendant un bon moment de ce temps historique. L’idée de Hegel, selon laquelle le devenir autre du monde est un 4 Rappelons que c’est Destutt de Tracy le premier à avoir développé ce terme, en 1798, dans son Mémoire sur la question : « Quels sont les moyens de fonder la moralité des peuples ». Avec Volnay et Cabanis ils vont constituer ce que Bonaparte va appeler le groupe des idéologues. 7 processus d’accomplissement, dévoile plus la nécessité de sa connaissance que sa connaissance elle-même. C’est dès lors, plutôt la philosophie de Marx qui va se présenter à la conscience agissante de l’époque, comme la réponse la plus concrète à la question du devenir autre du monde. Cela dit, ce devenir autre n’est pas pour Marx le résultat de la manifestation de la Raison dans le monde, mais plutôt la conséquence du développement de l’être de la nature. Donc, du matérialisme dialectique. Plus précisément de la dialectique de la matière. Par conséquent, pour Marx le développement de la contradiction fondamentale doit conduire au dépassement de la contradiction et à la conciliation de l’être du monde avec lui-même. Ce qui veut dire que la logique de la contradiction mène nécessairement à son propre dépassement. Ce qui est hautement problématique, car la loi des contraires est le fondement de l’Etre et il ne peut pas y avoir de réalité – quelle qu’elle soit – en dehors de cette règle. De plus, chez Marx l’accomplissement de l’être du social est le résultat de la négation de la moralité s’objectivant dans les institutions. En d’autres termes, ce processus n’est pas le résultat de la pratique de la raison se manifestant à travers la conventionnalité. Cette négation du « logos » va, ainsi, produire une pratique qui va conduire à l’autodestruction de ces sociétés en elles-mêmes5. Car la pratique de la raison s’objective à travers la conventionnalité, dans un ordre institutionnel – produit 5 C’est précisément ce que va comprendre la direction de l’armée allemande, lorsque début 1917, elle décide d’introduire Lénine et ses compagnons en Russie. Pour le Maréchal Ludendorff, en effet, la révolution marxiste ne pouvait que ramener la Russie à l’état de la barbarie. 8 du droit, de l’économie et du politique – conditionné par une finalité axiologique : la création d’une communauté d’égaux, se manifestant dans la plénitude uploads/Philosophie/ axiologie-et-eschatologie-dans-le-nouvel-ordre-mondial.pdf

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