CHUTE ET ÉLÉVATION. L'APOLITIQUE DE SIMONDON Author(s): Bernard Stiegler Source

CHUTE ET ÉLÉVATION. L'APOLITIQUE DE SIMONDON Author(s): Bernard Stiegler Source: Revue Philosophique de la France et de l'Étranger, T. 196, No. 3, GILBERT SIMONDON (JUILLET 2006), pp. 325-341 Published by: Presses Universitaires de France Stable URL: http://www.jstor.org/stable/41099863 Accessed: 17-02-2017 19:10 UTC JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact support@jstor.org. Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at http://about.jstor.org/terms Presses Universitaires de France is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Revue Philosophique de la France et de l'Étranger This content downloaded from 132.248.9.8 on Fri, 17 Feb 2017 19:10:21 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms CHUTE ET ÉLÉVATION. L'APOLITIQUE DE SIMONDON Du mode d'existence des objets techniques a pour but d'inventer un nouveau rapport de la culture à la technique dans un contexte où le machinisme, c'est-à-dire le processus industriel de concrétisation comme réalisation du devenir technique, a pour conséquence, du côté du prolétaire, sa perte d'individuation : l'ancien individu tech- nique, porteur d'outils, qu'était l'ouvrier, devient le servant de la machine, qui est le nouvel individu technique. Cet état de fait est un cas particulier de ce qui apparaît plus généralement comme une dimension entropique de la technologie machinique, ce qui induit un conflit entre la culture, qui est la réalité néguentropique de l'individuation psychique et collective, et la technique, qui est pourtant la condition de cette individuation. À cet état de fait, qui constitue donc un blocage de l'indivi- duation psychique et collective, à cette « aliénation », Simondon affirme qu'il y a une issue : celle qui passe par la théorisation du devenir technique qu'il appelle une mécanologie, et dont le premier axiome est que, s'il peut y avoir une aliénation de l'homme (ou de la culture) par la technique, elle est causée non par la machine, mais par la méconnaissance de sa nature et de son essence. La mécano- logie a confiance dans la connaissance qu'elle est en charge de cons- tituer dans une optique clairement politique, même si, par ailleurs, Simondon dit que l'on ne peut jamais connaître l'individuation - la technique étant aussi, comme devenir des individus techniques, une individuation (et nous verrons en conclusion que c'est précisément parce que l'individuation ne peut être connue que sa connaissance ne peut être que politique). Et pourtant, précisément sur ce point de l'existence d'un proces- sus d'individuation technique, Simondon n'est pas clair. 1 / II ne Revue philosophique, n 3/2006, p. 325 à 341 This content downloaded from 132.248.9.8 on Fri, 17 Feb 2017 19:10:21 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms 326 Bernard Stiegler parle nulle part de processus parle partout, dans Du mod d'individus techniques, tandis lumière des notions de forme qu'une phase de l'être relative de laquelle il vient à exister : i d'individuation. 2 / S'il dévelo chique comme étant toujours d il ne parle jamais du rôle qu - pour autant qu'il y ait une in sément dans ce qui relie le psych cision théorique quant au lien technique, mais aussi quant à s désindividuation en tant que p cet article. J'y examine en par guïtés sur les pensées de la reli don, induisant l'impossibilité Le discours de Simondon sur ment la manière de la penser tiel à la technique. Et pourtan révèle que la technique est p décomposition d'une unité m que la technique n'est qu'un chique et collective, et ne jou milieux pré-individuels, tan relevé Jean-Hugues Barthélém stabilisateur du transindividu support et le symbole de cette transindividuelle »*. Pour aut techno-logique. Au contraire, « L'être sujet peut se concevoir faitement cohérent des troi individuelle, individuée, trans ment mais non complètement nature, individu, spiritualité. Seul le transindividuel est te ménage une marge d'indécision 1. Du mode d'existence des objets (souligné par l'auteur). 2. L'individuation à la lumière des noble, Millón, 2005, p. 310. Revue philosophique, n° 3/2006, p. 325 à 341 This content downloaded from 132.248.9.8 on Fri, 17 Feb 2017 19:10:21 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms Chute et élévation 327 cisant que le pré-individ ment mais non complète dance » est incertaine. O aussi les discours que Sim gion, la morale et l'œuvr objets techniques, et sur lumière des notions deform fragilité, et elle concerne Simondon désigne Freud et non du désir. Or, le dé plètement » la sexualité, désir est la sexualité soci viduée. Or la transindi n'était que sexualité, il n sionnelle. Les animaux se qui constitue le processus tant que tel, est ce qui nature. Et cela veut dir psychique et collective n vital inachevé. Car si la v de la pré-invidualité psy vrai que pour autant que autrement et pas complète devient technique, et en technicité est un nouveau ment qu'est intrinsèquem sément en tant que pr l'individuation psychique dire sociaux. Pour le dire autrement, il n'y a pas de « phases [simplement et complètement] successives de l'être ». Il y a un éternel retour de l'individu transindividué au stade pré-individuel où le transindivi- duel redevient un matériau pulsionnel (et non seulement instinc- tuel). Or, ce qui constitue ce circuit, c'est la technicité de l'individuation. La modalité techno-logique de l'inachèvement, que l'on appelle, surtout depuis le XXe siècle, l'existence, est ce qui cons- titue l'individuation psychosociale en tant qu'elle individue un potentiel pré-individuel sursaturé non plus comme devenir et onto- genèse d'une espèce vivante, mais bien comme co-individuation d'un individu psychique et d'un groupe social à l'intérieur duquel il s'individue en y provoquant un processus de résonance interne où s'individue aussi l'ensemble des éléments techniques à travers les Revue philosophique, n° 3/2006, p. 325 à 341 This content downloaded from 132.248.9.8 on Fri, 17 Feb 2017 19:10:21 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms 328 Bernard Stiegler individus techniques, qui for qu'il faut analyser comme un où « le mort saisit le vif» 1. O à son tour qu'en relation intri ciale, dont il forme le troisièm La résonance en quoi consi interne au groupe et interne possible qu'en tant qu'il perm duation qui présuppose et que gieux est une modalité histo psychique et collective, c'est dans l'histoire de la psyché co aussi une modalité dé la tran sont les transindividuations q sociaux tout autant que les p qui ne sont rien sans elles, et tion. Et c'est comme modali teneur profondément techno époque de la « conscience mo rant, sublime et surmoïse. Mais l'individuation techniq constitution de l'individuation n'est pas pensée par Simondon telle que, en particulier dans religion du livre, c'est-à-dire e némata qui sont tout d'abord desquelles Simondon est muet Les rapports entre le psychi trans-former au fil de l'indivi lectifs et techniques, et cette vers une organologie générale de l'évolution du système tech technique, que produit l'indi tèmes sociaux, que produit l'in cation, droit, économie, etc.), l'individuation psychique. 1. J'ai commenté cette formule de catastrophe du sensible, Paris, Gali 2. En un autre sens que celui usité chez lui l'étude des éléments tech ques, lesquels composent à leur tou Revue philosophique, n 3/2006, p. 325 à 34 This content downloaded from 132.248.9.8 on Fri, 17 Feb 2017 19:10:21 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms Chute et élévation 329 C'est précisément en ce rétentions tertiaires (cf. i processus d'individuation l'épiphylogénétique1, et (polis), par une analyse de c'est-à-dire comme modal - telle qu'elle passe toujou par une mise en public pot qu'étudie Foucault à trav actuelle)2. L'hypomnèse comme constitution de ce nels3, est ce qui soutient l'anamnèse comme sélect elle consiste à la fois com vidue un pré-individuel qu Cette question est celle de Husserl et au-delà. C'est ici qu'apparaît la nécessité de relancer la pensée de l'individuation psychique et collective à travers la métastabilisation technique du transindividuel via les concepts de rétentions et de pro- tentions, telles qu'elles peuvent devenir collectives via les rétentions tertiaires. L'individuation est un processus à la fois temporel et spa- tial. Comme perception, c'est-à-dire comme temporalité, telle que celle- ci perçoit le spatial où elle distingue une figure sur un fond, l'individuation psychique est ce qui agrège des rétentions primaires, au sens de Husserl, qu'elle sélectionne dans les phénomènes depuis les cribles (les critères de sélection) que constituent ses rétentions secondaires individuelles. Ces rétentions secondaires individuelles constituent des horizons d'attentes, c'est-à-dire aussi des proten- tions. Et c'est parce qu'il y a de telles protentions que Simondon peut écrire que « s'il n'y avait pas une tension préalable, un potentiel, la perception ne pourrait parvenir à une ségrégation des unités qui est en même temps la découverte de la polarité de ces unités »4. Cette tension, c'est la protention constituée par la rencontre de la rétention et du perçu qui, en la tendant, la trans-forme en attente - et en attention. Et c'est pourquoi Simondon poursuit en posant que 1. La technique et le temps, Paris, Galilée, 1 et 2, 1994 et 1996. 2. Michel uploads/Philosophie/ bernard-stiegler-chute-et-elevation-l-x27-apolitique-de-simondon.pdf

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