COMMENTAIRE DE LA LETTRE D'ÉPICURE A MÉNÉCÉE Author(s): Jean Salem Reviewed wor
COMMENTAIRE DE LA LETTRE D'ÉPICURE A MÉNÉCÉE Author(s): Jean Salem Reviewed work(s): Source: Revue Philosophique de la France et de l'Étranger, T. 183, No. 3, ÉPICURE LE FORMALISME (JUILLET-SEPTEMBRE 1993), pp. 513-549 Published by: Presses Universitaires de France Stable URL: http://www.jstor.org/stable/41097054 . Accessed: 26/07/2012 13:22 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact support@jstor.org. . Presses Universitaires de France is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Revue Philosophique de la France et de l'Étranger. http://www.jstor.org COMMENTAIRE DE LA LETTRE D'ÉPICURE A MÉNÉCÉE PLAN DE LA (( LETTRE A MÉNÉCÉE )) Si la Lettre à Hérodote rassemble les « éléments » de la vérité physique (cf. les § 36-37 de cette Lettre), la Lettre à Ménécée expose, quant à elle, l'essentiel de l'éthique épicurienne : il s'agit donc d'y enseigner « les éléments » (orrons ta) nécessaires pour vivre comme il faut (§ 123)1. Ces principes de la vie heureuse sont comme des atomes (gtqixsioC) de morale : en les opposant au néant des opinions vaines (xevat 8ó£a&), on parviendra à contrebattre les idées fausses et les craintes sans fondement, qui ont aussi peu de poids et de consistance que le vide (xsvóv) au sein duquel se meuvent les atomes2. Préambule : § 122 et début du § 123 [éd. Conche, p. 217-219]. Différer de philosopher, c'est différer d'être heureux. 1. Nous nous référerons constamment ici à l'édition et à la traduction de la Lettre à Ménécée qu'a données M. Marcel Conche, in Epicure. Lettres et maximes, Villers-sur-Mer, Ed. de Mégare, 1977 ; rééd. : puf, 1987. 2. G. Rodis-Lewis a pu écrire : « Tout Tépicurisme se joue avec le couple du plein et du vide » ; cf. Epicure et son école (op. cit. dans notre Bibliographie), p. 211. Revue philosophique, n° 3/1993 rp - 18 514 Jean Salem Les § 123 à 132 vont maintenant développer les différents pré- ceptes du « quadruple remède » ou télrapharmakon9 . I - II n'y a rien à craindre des dieux : § 123 à 124 [éd. Conche, p. 217-219]. Depuis : « IIpcoTov jzèv tov 6eòv Ç<pov açOapxov xal fiaxaptov vo(aíCcúv, ... » (§ 123) jusqu'à : «... ¿ç áXXÓTpiov vojiîÇovtsç » (§ 124). Les dieux n'interviennent pas dans les affaires humaines. II - // n'y a rien à craindre de la mort : § 124 à 127 [éd. Conche, p. 219-221]. Depuis : « SuvéOiÇs Se èv tc£ vo(x£Çeiv... » (§ 124) jusqu'à : «... {XYjxe araXmCcufxev ¿ç tcocvtcoc oùx èaójxevov » (§ 127). La mort consistant dans la privation de la sensibilité, la crainte de la mort est une crainte sans objet. III - On peut supporter la douleur : § 127 à 130 [éd. Conche, p. 221- 223]. Depuis : « 'AvaXoytdTéov Se àç tcov ê7ui6u(jiuov... » (§ 127) jus- qu'à : «... tc*> Se xaxtù toî>[xtcoXiv ¿>ç áyocOcjí » (§ 130). Epicure - se livre à une classification des désirs (désirs naturels et désirs vains) ; il affirme que le plus grand plaisir auquel nous puissions aspirer, nous l'obtenons par la cessation de toute douleur en nous ; - puis il affirme par surcroît que le plaisir est le souverain bien (mais, ajoute-t-il, une prudente estimation des plaisirs et des 3. Prises dans l'ordre I, II, IV, III, les quatre parties de cette Lettre corres- pondent, en effet, exactement au texte de l'inscription que Diogene d'Œnoanda avait fait graver, au ne siècle apr. J.-C, sur les murs d'un portique de sa ville ; cf. C. W. Chilton éd., Diogenes Œnoandensis. Fragmenta, Teubner, 1967, ainsi que la traduction anglaise de ces fragments : Oxford Univ. Press, 1971. Ce compendium de la pharmacopée épicurienne se retrouve notamment : - dans le groupe formé par les Maximes fondamentales I à IV ; - dans la Maxime fondamentale XI (cf. également : MF X) ; - chez Philodème, dans le traité Contre les [Sophistes], col. IV, 1. 10-14. Notons enfin que ces quatre « ingrédients » de la sagesse d' Epicure sont plu- sieurs fois énumérés chez Cicerón (en partie. : De fin., I, xix, 62-64). Commentaire de la lettre d'Epicure à Ménécée 515 peines doit nous faire parfois préférer certaines douleurs à des plaisirs modiques et généralement très instables : car de tels renoncements sont susceptibles, au bout du compte, de nous pro- curer un plaisir plus élevé). IV - On peut atteindre le bonheur : § 130 à 132 [éd. Conche, p. 223- 225]. Depuis : « Kai ty)v auTapxeiav Se àyaoòv [xéya vofxiÇofxev... » (§ 130) jusqu'à la fin du § 132. Epicure - prône l'indépendance (auxapxeta) pour le sage ; - indique que pour se suffire à soi-même (i.e. : pour être indépen- dant), il faut savoir vivre le cœur content de peu ; - oppose (sans les nommer ici) le plaisir en mouvement qui ne délivre pas l'âme de ses maux, et le plaisir stable qui, seul, carac- térise l'ataraxie4 ; - fait un éloge de la « prudence » (çpovrçtJiç), laquelle nous apprend ce qu'il faut choisir et ce qu'il faut éviter. Conclusion : début du § 133 à la fin [éd. Conche, p. 225-227]. Le sage récapitule alors les quatre « ingrédients » du quadruple remède, en résumant ainsi tout ce qui a été dit jusqu'ici. Il déclare, en effet, à Ménécée : « Conçois-tu maintenant que quelqu'un puisse être supérieur au sage, - qui a sur les dieux des opinions pieuses, [= partie I de la Lettre] - qui est toujours sans crainte à la pensée de la mort, [== partie II] - qui est arrivé à comprendre quel est le but de la nature, [= partie III] - qui sait pertinemment que le souverain bien est à notre portée et facile à se procurer... ? » [= partie IV] 4. Epicure distingue, on le sait, le plaisir en mouvement du plaisir en repos (ou plaisir catastématique). « L'absence de trouble et l'absence de douleur (aT<xpa£ía xal amovía), déclare-t-il, sont des plaisirs en repos (xaTaarqiJUXTixaí), au contraire la joie (x&pá) et la gaieté (eùçpoouvy)) sont regardées, par leur activité (èvepyeicf), comme des plaisirs en mouvement » (D. L., X, 136). 516 Jean Salem Puis Epicure dit quelques mots des convictions fondamentales du sage au sujet de la causalité de ce qui arrive : le sage ne croit pas à la nécessité universelle (ou destin) et, à la différence de la foule, il ne tient pas le hasard pour un dieu. En demandant à son disciple de méditer toutes ces choses à part lui comme avec son semblable, l'auteur rappelle enfin que sa philo- sophie prétend apporter tout à la fois à l'homme la paix avec soi- même et l'amitié avec autrui. ÉTUDE DÉTAILLÉE DE LA « LETTRE A MÉNÉCÉE )> Préambule : § 122 et début du § 123. « Que nul, étant jeune, ne tarde à philosopher, ni vieux, ne se lasse de la philosophie. Car il n'est pour personne, ni trop tôt ni trop tard, pour assurer la santé de l'âme. » Pareille déclaration appelle au moins trois commentaires : • L'éthique épicurienne est une éthique d'extrême urgence. Cf. Pyth., § 85 : les hommes, « pris trop profondément dans le cercle de quelqu'une des occupations courantes », diffèrent de jouir ; cf. également la SV 14 : « Nous sommes nés une fois, il n'est pas possible de naître deux fois, et il faut n'être plus pour l'éternité : toi, pourtant, qui n'es pas de demain, tu ajournes la joie (áva6áXXy) to XocCpov) ; la vie périt par le délai (fxeXXY)cr(x6ç) et chacun de nous meurt affairé. »5 • L'éthique épicurienne se présente comme une médecine de rame. Si la philosophie réjouit d'emblée, c'est que, dans toutes les autres activités, nous sommes malades ; seule la philosophie guérit. - Cf. Porphyre, Ad Marc, 31 [= Us. 221] : « Vain est le discours 5. La tonalité presque « pascalienne » de ce genre de formules ne doit pas surprendre outre mesure : Lucrèce (cf. DRN, III, 1071-1072), puis les stoïciens - Sénèque notamment (cf. sa critique de 1' « ajournement », de la dilatio, qui nous fait toujours remettre à plus tard le temps de la méditation, dans le traité De la brièveté de la vie, ix, 1 et passim) - développeront à l'époque romaine une problématique qui évoque bien souvent, pour le lecteur moderne, les célèbres pages des Pensées consacrées au « divertissement ». Commentaire de la lettre d'Epicure à Ménécée 517 du philosophe par lequel l'homme n'est guéri d'aucune passion (7ca0oç), car de même que la médecine n'est d'aucun secours (6çsXoç) si elle ne guérit pas les maladies du corps, de même uploads/Philosophie/ commentaire-de-la-lettre-d-x27-epicure-a-menecee.pdf
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- Publié le Oct 15, 2021
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