Cours Voir Colas Duflo, La finalité dans la nature de Descartes à Kant, PUF, 19
Cours Voir Colas Duflo, La finalité dans la nature de Descartes à Kant, PUF, 1996. Les critiques de la finalité suffisent-elles à tuer dans l'oeuf le retour Swinburnéen de la théologie naturelle ? Il s'agira dans ce cours de faire valoir l'intérêt des polémiques autours de la notion de finalité. Il s'agit d'un concept classique et d'un sujet de discussion très actuel, notamment dû à une resurgescence de la théologie naturelle dans les années 80 (liée à la crise du darwinisme). On déterminera ce que la philosophie a à en dire. Il existe un néo finalisme contemporain, il faut en proposer une critique des diverses variantes. La singularité de notre position tient au refus de trois thèses. 1) On refuse d'affirmer que l'ensemble des thèses néo-finalistes se réduisent à des discours obscurantistes (il y a un noyau argumentatif qui réclame discussion). L'anthropisme, la théologie naturelle inscrite dans le champs de la philo analytique sont des discours structurés et pas des discours de propagande. Il y a bien un argumentaire auquel il faut répondre théoriquement, il faut discerner l'idéologie de l'argumentation dans les courants néo- finalistes des 30 dernières années. 2) 3) Nous n'acceptons pas les anti-finalistes qui répondent en scientifiques darwinistes au néo-finalisme. La science est impuissante à répondre aux finalistes parce qu'ils ces derniers se placent dans le champs métaphysique. Nous montrerons que les finalistes prennent pied sur une situation argumentative singulière que Meillassoux appelle la "tenaille finaliste" qui les rendent immunisés à toute réponse de type scientifique. 4) 5) On s'oppose à ceux qui considèrent aussi que la question du finalisme est essentiellement philosophique et qu'elle a été réglée depuis longtemps de multiples façons par les grands penseurs critiques de la question tels Spinoza, Hume ou Kant. Cette doxa est largement répandue parmi les philosohes de tradition continentale. Tout se passe comme si la question était réglée. Pour contrer cette thèse, on s'attardera longtemps sur les grands argumentaires de l'anti- finalisme et montreront leur insuffisance face aux formes contemporaines du finalisme. Il s'agira alors de pointer où réside la faiblesse des principaux argumentaires anti-finalistes. Cette faiblesse tient en la croyance en la nécessité des lois naturelles, physiques et biologiques. La constance des lois de la nature est un fait et non une essence. L'intérêt de cette thèse sur la modalité des lois physiques fournit à l'antifinalisme un argumentaire plus efficace que ce que nous examinerons. La tenaille finaliste : face au néo finalisme, ce n'est pas une bonne stratégie que de laisser l'homme de science s'en charger. Les pensées finalistes viennent de la métaphysique, ses arguments ne ressortissent pas du ressort de la science, notre contre-argumentaire doit être philosophique. Si la science est démunie, c'est en raison d'un certain type d'argumentation qui fait éclater le caractère strictement métaphysique du débat. Il se trouve que les argumentaires des deux principaux camps finalistes (le créationisme et l'anthropisme) se veulent appuyés par les découvertes des sciences de la nature. Ils s'appuient sur certains résultats de la science contemporaine pour légitimer l'existence d'une cause surnaturelle et intelligente du monde physique et biologique. Si leur argumentaire aboutit au même résultat, à savoir qu'il est sinon certain du moins extrêmement probable qu'il existe une cause intelligente du monde, leur façon d'établir ce résultat est opposée en un sens précis. Les créationistes prétendent démontrer leur finalisme en faisant fond sur l'échec de la science contemporaine, du darwinisme plus précisément, à expliquer l'emergence par les seuls lois de la nature tant des premiers constituants de la vie que des organismes plus complexes au cours de l'évolution. Le créationisme tend plus précisément à montrer qu'il est impossible d'établir que la vie a pu emerger par un processus hasardeux tant les probabilités sont faibles eu égard aux lois physico-biologiques. On part donc des échecs supposés de la science à expliquer l'évolution pour fonder l'extrême probabilité d'une cause autre que celle du hasard et des lois naturelles seules à même d'expliquer la complexité du vivant. Robert Shapiro dans un ouvrage traduit en 1994 (Quelle est l'origine de la vie ?) donne une exemple d'estimations qui ont pu être faites à propos de l'apparition des premiers composantes vivantes dans un milieu terrestre supposé il y a trois milliards d'années dépourvu d'organismes. Ses calculs aboutissent à l'idée qu'une enzyme constituée de 200 acides aminées a pu être produite par hasard selon une probabilité de 10^20. Sachant qu'il faut quelque 2000 enzyme pour produire une bactérie par hasard, il y a environ 1/10^40000 chances de créer une bactérie. Hoyle s'était livé à de pareils calculs, et la probabilité d'un tel événement s'avérait équivalente à celle d'une tornade passant dans un entrepôt de ferrailleur et construisant un Boing 742 au passage. Or pour le calcul de cette faible probabilité, on s'est déjà donné toutes constituées les enzymes dont il est question, mais si on remonte à la soupe primitive dans un milieu où tous les organismes se déplacent au hasard la probabilité d'apparition de la vie serait de 1/10^100000000000. Cette probabilité est employée par les finalistes comme preuve de l'insuffisance des probabiltés à rendre compte de l'existence de la vie. Le modèle épicurien et lucrécien du hasard consite à dire que les organismes les plus complexes ont été constitués sur la base d'un temps infini qui autorise de telles probabilités. Pour ce qui est de l'apparition de la vie telle que nous l'avons succintement décrite, on ne dispose pas d'un pareil temps infini (qui nous autoriserait à croire qu'une telle probabilité pu se réaliser) dans la mesure où la Terre s'est créé il y a 4 milliards d'années (l'intervale de temps est fini). Les créationistes concluent que l'emergence de la vie doit être finalisée. Un autre argument créationiste nous provient de Schutzenberger, paru dans les cahiers de ... de 1991. On y lit que "la thèse du darwinisme est que la selection et le hasard des mutations suffit pour expliquer l'évolution de la vie, des origines jusqu'à nous. Mais la selection naturelle n'explique en rien comment surgirait des espèces douées de propriétés anatomiques et physiologiques nouvelles. C'est alors que le darwinisme a recours aux mutations aléatoires. Or depuis les débuts de la biologie moléculaire on sait que ces modifications au hasard du génome sont tout à fait analogue à celles qui se produisent quand on copie un texte : mot répété ou intervertit, lettres déformées ou omises, etc. Pour les darwiniens, l'histroire de la vie est à l'échelle près celle des manuscrits grecs et latins qui ne nous sont parvenus qu'à la suite d'une chaîne de copies et recopies répétées tout au long du moyen-âge. L'analogie va si loin que l'on pourrait utiliser pour la philologie des algorithmes inventés pour reconstituer l'arbre généalogique des protéines. Pourant personne n'accepterait l'hypothèse selon laquelle tel manuscrit d'une comédie latine d'origine douteuse ne serait que le dernier avatar d'un traité de jardinage malmené au hasard par une succession de scribes peu soigneux. Ce serait pourtant méthématiquement moins improbable que la théorie darwinienne affirmant qu'il a suffit du hasard pour que s'accumule dans une même lignée d'animaux toutes les mutations requises pour aboutir aux éttonantes machines violentes que sont les animaux. A l'heure actuelle aucun auteur darwinien ne s'est risqué à présenter des estimations chiffrées rendant possibles de tels mécanismes embryologiques". Dans les deux cas on prend pied sur l'extrême improbabilité de l'emergence et de l'évolution de la vie pour en inférer l'impossibilité d'un hasard à l'origine de la vie et de son évolution, et par alternative suggérer le créationisme. Il ne s'agit pas de nier la valeur de la science, ce n'est donc pas un discours fanatico-religieux – il ne s'agit pas de célébrer l'apparition divine pour argumenter, mais de procéder au sacrifice du hasard. On trouve des arguments similaires chez Richard Denton, Evolution d'une théorie en crise traduit en 1988. Son manifeste est fixiste alors qu'il est lui-même généticiens, 13eme chapitre s'intitule "hors du hasard". P. Tort publie chez PUF en 1997 un recceuil de réponses à Denton. Le créationisme ne suffit pas à faire comprendre quelle est l'efficacité contemporaine du néo-finalisme. Il n'est pas exclu que la science trouve une solution scientifique (par un autre calcul) qui renverse cet argument. Si le néo-finalisme était réductible au créationisme c'est à la science qu'il reviendrait de leur répondre. Mais le néo- finalisme ne se réduit pas au créationisme, sa force provient du fait qu'il parvient au même résultat selon deux stratégie opposées. Car en effet supposons que la science réponde victorieusement au créationisme, que l'on découvre que l'emergence de la vie ainsi que son évolution étaient largement probables : une autre version du finalisme entrerait en jeu et y verrait le signe de sa propre victoire. Plaçons nous dans la position la plus favorable en apparence pour les anti-finalistes scientifiques. Les finalistes se trouveraient conforter, cela à l'aide encore une fois d'un raisonnement probabiliste. Car désormais le finaliste ne ferait plus fond sur le hasard exhorbitant qui aurait donner lieu aux organismes mais sur le hasard tout aussi improbable qui a constitué un monde pourvu précisément des uploads/Philosophie/ cours-meillassoux-copie-2.pdf
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- Publié le Jul 13, 2022
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