Sociologie des émotions SOC - 7161 Plan de cours Automne 2017 Fabrice Fernandez

Sociologie des émotions SOC - 7161 Plan de cours Automne 2017 Fabrice Fernandez Professeur adjoint de sociologie Sociologie des émotions (Soc - 7161) – Fabrice Fernandez 1 Informations générales Coordonnées et disponibilités : Fabrice Fernandez (Professeur adjoint) Bureau 4477 Pavillon Charles De Koninck Faculté de sciences sociales Département de sociologie 1030, avenue des Sciences-Humaines Université Laval Québec (Québec) G1V 0A6 Présentation : https://www.soc.ulaval.ca/?pid=1717 Adresse électronique : fabrice.fernandez@soc.ulaval.ca Tél. : 418-656-2131 poste 2661 Disponibilités Mercredi 10h00 à 17h00 bureau 4477 (avec RDV) Du 5 sept. 2017 au 16 déc. 2017 Jeudi 10h00 à 17h00 bureau 4477 (avec RDV) Du 5 sept. 2017 au 16 déc. 2017 Illustration page de garde : Sarah Arnal (avec l’aimable autorisation de l’auteure) Sociologie des émotions (Soc - 7161) – Fabrice Fernandez 2 Sociologie des émotions Introduction « Mais toutes ces expressions collectives, simultanées, à valeur morale et à force obligatoire des sentiments de l’individu et du groupe, ce sont plus que de simples manifestations, ce sont des signes, des expressions comprises, bref, un langage. Ces cris, ce sont comme des phrases et des mots. Il faut dire, mais s’il faut les dire c’est parce que tout le groupe les comprend. On fait donc plus que de manifester ses sentiments, on les manifeste aux autres, puisqu’il faut les leur manifester. On se les manifeste à soi en les exprimant aux autres et pour le compte des autres. C’est essentiellement une symbolique. » Marcel Mauss, L’expression obligatoire des sentiments, 1921 Les émotions, généralement considérées comme des expériences personnelles et intimes, constituent une part essentielle de notre vie sociale, à la fois un flux d’énergie qui constitue le moteur primordial de nos activités et un langage social qui participe de notre connaissance du monde. Dans ce séminaire de sociologie des émotions, on explore la manière dont celles-ci sont façonnées par les structures et les institutions sociales, mais aussi la façon dont elles circulent et sont travaillées, contrôlées ou mobilisées comme une force de transformation sociale. Objectif général du cours Ce séminaire propose d’examiner les questions pertinentes à l’étude des émotions, mais aussi des affects et des sentiments dans une perspective sociologique. Prenant place dans le cadre général d’une réflexion que nous élaborons depuis plusieurs années, l’objectif de ce cours est de présenter un état de la réflexion sociologique sur les émotions afin de doter les étudiant-e-s d’outils de réflexions et d’analyse de cette dimension essentielle à la compréhension de la vie sociale. Précurseur des études sociologiques sur les émotions, Marcel Mauss (1921) considérait l’étude des émotions comme une « symbolique », un « langage social » (Fernandez, Lézé, Marche, 2008) permettant d’atteindre les rapports de force et les rapports de sens de la vie sociale sans se perdre dans les contingences, la multiplicité de ses formes et le pittoresque. Atteindre « des sentiments d’hommes en chair et en os » était pour le neveu d’Émile Durkheim une façon de s’assurer de ne pas demeurer dans l’abstrait et les vues de l’esprit. Faire de l’étude du concret une étude du complet, « tonalité affective » comprise, offre ainsi aux sciences sociales à la fois un critère d’exactitude, mais aussi et peut-être surtout la voie royale vers l’étude des normes obligatoires et des valeurs désirables qui forment la trame même de la vie sociale. Sociologie des émotions (Soc - 7161) – Fabrice Fernandez 3 L’étude des émotions en sciences sociales, de l’histoire à la sociologie, a connu ces quatre dernières décennies un développement spectaculaire, repérable par des états de la littérature (Lutz, White, 1986) ou des manuels imposants (Kemper 1990, Harre, Parrot 1996; Turner & Stets, 2006; 2014) et pouvant désormais être confirmé par la prolifération de publications dans ces champs aussi divers que la sociologie du travail, les Gender studies, les études subculturelles, la sociologie de la santé, la sociologie de la déviance, la sociologie des mouvements sociaux, la sociologie politique, la sociologie des sciences et de la connaissance, la sociologie de la famille, etc. L’observation des émotions est en effet un angle d’approche particulièrement fécond pour rendre intelligible la transformation sociale des sensibilités, tout en dépassant des oppositions classiques mais statiques et tranchées qui font ordinairement obstacle à la recherche en sciences sociales : micro-macro ; raison-émotion ; individu-société ; objectivité- subjectivité ; psychologie-sociologie. Prenant appui sur l’ouvrage Les émotions. Une approche de la vie sociale que j’ai co-dirigé (Fernandez, Lézé, Marche, 2014), en lecture obligatoire, l’objectif de ce séminaire est de comprendre le lien dynamique entre les échelles locales et générales de la vie sociale en tentant de percer les secrets du lien social et du changement social. Reconnu comme une section à part entière (la section 25) de l’Américan Sociological Association depuis 1986, la sociologie des émotions prend désormais de plus en plus ses marques au sein de la sociologie francophone. Il faut dire qu’après un siècle de rationalisation et de désenchantement, les émotions occupent une place centrale dans toutes les sphères de la vie sociale : les « drames » qui se répercutent dans les médias avec leur rhétorique compassionnelle, la « ferveur » que provoque les grands rassemblements qu’ils soient politiques, sportifs ou religieux, les « craintes » collectives envers des risques nouveaux ou plus anciens (virus, addiction à l’internet, catastrophe industrielle et écologique, terrorisme), le renouveau et le déploiement des églises charismatiques dans le monde, la logique « d’engagement » politique ou professionnel où il convient de montrer, voire de démontrer, sa « motivation » ou son « intelligence émotionnelle », les soulèvement ou les mobilisations populaires portés par la colère ou l’indignation, la mise en scène de « l’espoir » dans la levée de fonds pour les grandes causes, les « scandales » politiques ou les « affaires » judiciaires qui défraient la chronique en activant des peurs collectives, les conflits qui mettent en scène des « sentiments d’appartenance » et d’anciennes « haines », les politiques internationales et la santé publique qui en appellent désormais au « bonheur » en intégrant de plus en plus au domaine du soin des compétences de « gestion des émotions » ou la mesure de la « subjectivité » et de la « qualité de vie », tout cela sur fond de capitalisme émotionnel, nous conduisant à adopter dans nos vies privées des comportements de type « économique ». Autant de dimensions, de questions et d’enjeux sociaux qui alimenteront nos questionnements au sein de ce séminaire. Sociologie des émotions (Soc - 7161) – Fabrice Fernandez 4 Objectifs spécifiques Les objectifs spécifiques du séminaire sont les suivants : - Approfondir et consolider, à partir de repères théoriques et de travaux de recherche empiriques, ses connaissances sur les différents cadres d’analyse et de conceptualisation des émotions. - Savoir porter un regard critique sur les différentes formes de construction sociale des émotions, des affects et des sentiments. - Savoir reconnaitre les principaux enjeux sociaux, moraux et politiques au regard des émotions, des sentiments et de l’intimité affective dans la société contemporaine. - Être capable de rendre intelligible ces enjeux à l’oral mais aussi à l’écrit dans le cadre d’un article structuré et problématisé. Contenu du cours Ce programme s’organise en cinq thèmes distincts : - Après une séance d’introduction générale, le séminaire s’attache à cerner la façon dont on peut penser les émotions en sciences sociales, durant deux séances spécifiques. La première visera à re-contextualiser la façon dont les émotions ont été pensées dès le 19éme siècle au sein des approches naturalistes et organicistes tout d’abord puis, par la psychanalyse freudienne et par les pères fondateurs de la sociologie (Max Weber, Émile Durkheim, sans oublier le rôle particulier tenu par son neveu Marcel Mauss). Je consacrerais la seconde séance à dresser un panorama théorique de la sociologie contemporaine des émotions (de l’interactionnisme aux théories culturelles, rituelles, structurelles des émotions, en passant par les approches cognitives) et à la manière dont de mes propres travaux s’inscrivent au sein de cette sociologie. - Le deuxième thème de ce séminaire traite de la place singulière que tiennent les émotions pour comprendre ce que Erving Goffman qualifie de « couplage flou », soit l’articulation entres les échelles d’analyses micro et marco. - Le troisième thème intitulé Les émotions à l’épreuve du social et de la culture est consacré aux formes de socialisation émotionnelle, aux subcultures émotionnelles, au travail émotionnel et aux règles de sentiments, sans oublier les façons dont les émotions s’articulent au genre ou sont « racialisées ». - La quatrième thème « Normes, valeurs, pouvoir et émotions » s’intéresse à la manière dont les émotions s’immiscent dans les mécanismes du pourvoir mais aussi de résistance à ce pouvoir. - Enfin le dernier thème constituera la séance conclusive et portera sur les enjeux méthodologiques de l’étude des émotions. Sociologie des émotions (Soc - 7161) – Fabrice Fernandez 5 Approche pédagogique Ce séminaire se veut un lieu de convivialité, d’échanges, de discussions, de partage d’idées et de réflexions, un lieu ouvert et dynamique où la participation de tou-te-s est souhaitée. L’objectif est à la fois de donner des repères précis et précieux uploads/Philosophie/ cours-uni-laval-sociologie-des-e-motions-pdf 2 .pdf

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