1 De la génération spontanée à la théorie de l’évolution : une histoire du viva
1 De la génération spontanée à la théorie de l’évolution : une histoire du vivant 3ème conférence : L’évolution biologique1 Après avoir présenté les précurseurs de la théorie de l’évolution, une partie de l’exposé sera consacré à Jean-Baptiste de Lamarck et à l’hérédité des caractères acquis. Puis la genèse de la théorie de l’évolution de Charles Darwin sera expliquée, en lien avec la situation politico-sociale de l’Angleterre du XIXème siècle et la propre vie de Darwin. La séance se terminera par l’exposé de quelques répercussions de cette théorie qui dépassent la biologie. Introduction Nous avons vu précédemment comment les êtres humains s’étaient de tous temps interrogés sur la nature, en essayant de la comprendre et comment, au fil de l’histoire, leur sens aigu de l’observation et leur intelligence les avaient amenés à bâtir des concepts et élaborer des outils de plus en plus performants. Nous avons également vu comment les concepts, variables au cours du temps, les avaient amenés à une connaissance de plus en plus approfondie du vivant. Dans cet exposé, nous examinerons, de manière bien plus précise que ce qui a déjà été indiqué, comment la théorie de l’évolution biologique a progressivement été établie jusqu’à sa formulation, toujours d’actualité, dans L’origine des espèces de Charles Darwin, parue pour la première fois en 1859. Nous verrons successivement l’histoire des classifications, les précurseurs de la théorie de l’évolution et la théorie de Charles Darwin. I – Les classifications De tout temps, l’être humain s’est intéressé à l’histoire naturelle. Nous savons que l’homme du Paléolithique dessinait des animaux sur les parois des cavernes avec des détails qui étaient la preuve de son sens de l’observation. Les êtres humains ont certainement su très vite distinguer ce que nous appelons actuellement les espèces et leur ont donné un nom. Il leur fallait en effet dénommer, pour se comprendre, les différentes formes du monde animal ou végétal, objets de leur chasse ou de leur cueillette, ou pour se protéger ou encore, plus simplement pour satisfaire leur curiosité. En bref, très vite, l’être humain a eu besoin de reconnaître les différentes formes vivantes et de les classer. Il existe, par exemple, des listes de formes vivantes gravées sur des tablettes babyloniennes. D’autre part, depuis le XVIIème siècle, plusieurs voyageurs naturalistes ont 1 Cette conférence est la troisième d’une série de six données pendant l’année universitaire 2010-2011 dans le cadre d’un cours intitulé « De la génération spontanée à la théorie de l’évolution : une histoire du vivant » à l’Université Vie Active de l’Université Catholique de Lyon. 2 rapportés que les hommes des contrées lointaines donnaient des noms d’espèces aux animaux et végétaux de leur région et que ces noms correspondaient aux espèces déterminées sur des critères que nous qualifions de nos jours comme scientifiques. 1.1 - La classification des formes vivantes avant Linné La classification a ainsi d’abord été établie de manière quelque peu informelle et par nécessité. Tous les historiens reconnaissent que ce sont les Grecs anciens et notamment Aristote qui ont abordé de manière claire et précise les questions de classification. Aristote s’est beaucoup intéressé aux animaux en les classant notamment en enaima et anaima, et aux végétaux mais ses travaux de botanique ont été perdus. Il a décrit toutes les formes des trois Règnes (animal, végétal et minéral) et caractérisé le temps comme changement des êtres vivants selon diverses modalités : croissance et déclin, altération, dégénération et donc modification irréversible de leur aspect. Son disciple Théophraste est considéré comme le premier botaniste : il a décrit et nommé 500 espèces végétales dont d’ailleurs certaines n’existaient pas dans la Grèce antique, ce qui signifie qu’il s’était documenté à partir de divers récits, de voyages, de rencontres et certainement d’examen d’échantillons ramenés des pays lointains par Alexandre le Grand. Il semble bien que les premiers Ioniens et Grecs – les Anciens - aient compris que les individus d’une même espèce se ressemblaient, se croisaient entre eux mais pas avec ceux des autres espèces, même s’ils pouvaient exceptionnellement être des hybrides. Cependant, les critères de la classification n’ont pas toujours été très clairs pendant des siècles. Dioscoride, par exemple, a écrit un traité portant sur 700 espèces de plantes classées en « plantes aromatiques, plantes alimentaires, plantes médicinales, plantes veineuses (?), plantes toxiques ». Au début du Moyen-âge occidental, apparaît le concept de Scala naturae, l’Echelle de la Nature, provenant d’ailleurs des philosophes de l’Antiquité, depuis Empédocle (-485 à - 425). La Scala naturae n’est pas une simple classification mais avant tout un concept philosophique donnant un niveau hiérarchique aux éléments naturels, qu’ils soient de nature temporelle ou divine. A la base de la Scala naturae, se situe le monde minéral ; juste au- dessus, c’est le monde végétal, puis vient le monde animal, puis l’Humanité confrontée en permanence au bien (l’esprit) et au mal (la chair). Au-dessus viennent les Anges et, au sommet, Dieu. Chaque niveau est également subdivisé en échelons hiérarchisés. Par exemple, les animaux sont subdivisés en animaux sauvages, animaux domestiques, oiseaux, poissons, insectes. Les serpents, enfin sont classés dans la dernière catégorie. Les Anges sont également subdivisés en Séraphins, Chérubins, Trônes qui saisissent la raison des choses directement en Dieu (première hiérarchie), puis en Dominations, Vertus et Puissances qui considèrent les actions à accomplir d’après les causes universelles (deuxième hiérarchie) et enfin en Principautés, Archanges et Anges gardiens qui exécutent les œuvres (troisième hiérarchie). Cette Scala naturae qui persistera pendant longtemps, est le signe de la certitude que Dieu a créé les espèces séparément et chacune fixée à une place bien déterminée. La Scala naturae représente finalement un concept indispensable auquel se réfèreront pendant longtemps les classifications qui permettront d’appréhender l’Ordre de la Nature. Très tôt, des ensembles d’espèces très proches avaient été reconnues : poissons, oiseaux, quadrupèdes, par exemple. Gossner (début du XVIème siècle) classe ces espèces par ordre alphabétique dans chacune de ces catégories. Dès le XVIème siècle, on voit apparaître 3 des classifications pour lesquelles les êtres retrouvent un certain ordre de la nature. Césalpin (1519-1603), par exemple, rassembla les espèces en genres et espèces. Tournefort (1656- 1707) classe les plantes en fonction de leur ressemblance en cherchant à découvrir l’ordre de la nature. Il innove l’écriture des livres en Français et non plus en Latin. Il conserve cependant le nom des plantes en latin et fait abstraction des données du passé pour reprendre tous les critères de classification avec ordre et méthode, estimant qu’il faut étudier les diverses parties d’un organisme pour en comprendre l’ensemble et il donne une importance particulière aux genres qui rassemblent plusieurs espèces. 1.2 – Carl Von Linné Linné (1707-1778) est né dans le Sud-Est de la Suède actuelle. Son père, pasteur, passionné de jardinage et de botanique lui a appris à identifier les plantes. Linné suit ensuite des études de médecine aux universités de Lund et d’Uppsala, et c’est alors qu’il commence à bâtir la liste des espèces du monde entier. Il sera aidé par Petrus Artedi (1705-1735) qui se chargera notamment de la classification des poissons. Linné établit une classification hiérarchique des êtres vivants. Chez les végétaux, il se fonde sur les rapports des étamines entre elles ou avec le pistil. Il finit ainsi par définir des unités de base, les classes. Puis il subdivise les classes en ordres, les ordres en genres, les genres en espèces, les espèces en sous-espèces. Il arrive ainsi à cinq grandes divisions hiérarchisées.. Cette science classificatoire qui permet de grouper les êtres les uns par rapport aux autres prendra le nom de taxonomie. Linné donne à chaque espèce un double nom latin : le premier est le genre, le second l’espèce. Ex : Rana temporaria, la grenouille rousse. Les travaux de Linné font l’objet de nombreux ouvrages dans le célèbre Systema naturae qui, par la suite, a influencé toutes les sciences naturelles, notamment l’édition de 1758. Ce système de classification sera ensuite adopté dans le monde entier en un peu plus de 100 ans. En effet, dès les XVIIème et XVIIIème siècles, l’étude des sciences naturelles prend une grande importance en Europe. Des enseignements sont dispensés au Jardin du Roi, à Paris, ce qui favorise les échanges et les contacts entre savants de tous pays. Au tout début du XIXème siècle, étaient créées les Sociétés savantes où amateurs et spécialistes décrivaient leurs travaux. Tout ceci favorisait les contacts à une époque où, tout comme maintenant, on voyageait beaucoup. Très vite, l’idée d’une classification internationale a été adoptée. Après de nombreuses péripéties, le système de nomenclature de Linné finit par être adopté. Un congrès international créé sous l’impulsion de Blanchard se tient à Paris en 1889 ; une nomenclature basée sur le système de Linné est alors proposée. L’idée est adoptée en 1892 et une commission de travail est mise en place en 1895. Il faut attendre 1905 pour que paraissent en Français, Anglais et Allemand la première édition des « Règles internationales de la Nomenclature zoologique ». L’énoncé de ces règles est périodiquement remis à jour. En 1961, il a été remplacé par le uploads/Philosophie/ de-la-generation-spontanee-a-la-theorie 1 .pdf
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- Publié le Mai 06, 2021
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