1 Bibliothèque Nationale de France - Cours méthodique et populaire de philosoph

1 Bibliothèque Nationale de France - Cours méthodique et populaire de philosophie François JULLIEN Professeur de Philosophie, sinologue Université Paris VII – Denis Diderot Un concept est un outil technique pour penser. Cet outil permet de dépasser les perceptions sensibles que nous pouvons avoir de la réalité qui nous entoure. Il permet de dépasser ce que tout individu pense des faits qui l’entourent. A l’instar de la philosophie (dont elles se sont largement issues), les sciences humaines élaborent, travaillent elles aussi à l’aide de concepts. Toutes les sciences produisent des concepts. Si ce travail de construction conceptuelle semble aller de soi pour la médecine, les mathématiques, la physique, cette évidence est moins partagée quand il s’agit de parler, de penser les faits que nous vivons quotidiennement, les faits sociaux. Ces derniers sont vécus de manière sensible, subjective. Comme le note ici François JULLIEN, « c’est grâce à ces outils que les sciences élaborent dans la pensée ». Le philosophe distingue le « concept » de « notions voisines » :  Le concept est à distinguer de « l’idée » que l’on peut avoir à l’esprit concernant tout objet. Le concept est différent de l’image que tout individu peut avoir de la réalité. Le concept n’est pas « une image des choses ». Il est différent des représentations communes que nous avons tous des faits qui nous entourent : la famille, le chômage, le travail, l’espace, l’environnement… Pour reprendre Descartes, le concept n’est pas « l’idée d’un fait ».  Le concept doit également être distingué de « la notion ». La notion est une connaissance élémentaire, une ébauche de connaissance. Le concept est un produit : le chercheur – ici le philosophe mais cela vaut également pour tout chercheur en sciences sociales et humaines – crée des concepts. Elaborés, créés, les concepts ont plusieurs fonctions : Première fonction : « le concept totalise un tout ». Le concept totalise un tout (toutes les caractéristiques de l’objet qu’il définit) en marquant des limites. Il pose les limites de ce qu’est l’objet. Exemple : définir ce qu’est la violence physique par rapport à la violence psychologique ou économique. Le concept permet ainsi de définir (mettre des limites, préciser les contours de l’objet) pour penser. Les limites permettent de mieux cerner un sujet, de circonscrire ses caractéristiques ou les éléments qui le constituent. Le concept permet de dire ce qu’est l’objet, ce qu’il n’est pas. Exemple : en philosophie, le philosophe va définir ce qu’est le « courage ». Le sociologue, l’historien et le psychologue vont définir ce qu’est la famille, ce qu’est une manière d’habiter... L’épidémiologiste ou le sociologue va définir ce qu’est la santé. Concept : éléments de définition 2 Seconde fonction du concept : passer de la diversité des cas à l’unité de l’idée. Le recours au concept pour penser la réalité permet de passer des cas individuels, de la diversité des formes vécues de la réalité à l’abstraction, à une définition unifiée de l’objet. Partant des formes variées de cohabitation des individus, des générations liées par le sang, le concept de « famille » permet de dépasser les singularités en sélectionnant des caractéristiques qui vont permettent une unité de définition. Recourant au concept, on passe de « la diversité des choses à l’unité d’idées ». Le concept de « famille conjugale » permet, par exemple, de classer des réalités singulières sous « une unité » de définition. Cette unité conceptuelle définit des ménages qui, au-delà de leur grande diversité dans le temps et dans l’espace, présentent des caractéristiques communes (un ménage composé d’un couple des parents et leurs enfants). L’invention du concept permet de ranger, de classer, de mettre en ordre des éléments de la réalité. Le recours au concept permet de penser la réalité. Il est la condition requise pour passer du « sens commun » c’est-à-dire des notions spontanées communément partagées, transmises par nos expériences sociales au « sens savant », à savoir la connaissance scientifique des faits sociaux. Le sens savant peut se définir comme une connaissance fine, rigoureuse, maîtrisée des réalités qui nous entourent. Comme ne note François JULLIEN dans son cours, « une unité compréhensive comprend le divers (les éléments divers) du fait pour le penser ». Le concept permet l’abstraction, c’est-à-dire l’accès à une autre vision du réel. Définir et utiliser des concepts pour penser revient à aller de… vers Pluralité des sensations perçues Unité par assemblement Sens commun Sens savant Le concept met de l’ordre dans les caractéristiques de la réalité étudiée. Il ordonne ainsi la pensée. Le concept peut être défini comme un outil de la connaissance. Compte-tenu de la fonction qu’il joue, il est central dans la philosophie classique de l’Europe des XVII et XVIIIème (Descartes, Kant). La création de concepts ainsi que leur usage apportent une réponse à la question posée par la philosophie (puis par les sciences sociales et humaines) à savoir « Comment puis-je penser, appréhender la réalité ? » Le concept est donc pensé comme outil de la connaissance, qu’elle soit philosophique, sociologique, anthropologique, historique, juridique… http://www.cnrtl.fr/definition/concept : CONCEPT, subst. masc. A.− Vx. Faculté, manière de se représenter une chose concrète ou abstraite; résultat de ce travail; représentation. Synon. conception. Ainsi le talent, de même que la goutte, saute quelquefois de deux générations. Nous avons de ce phénomène, un illustre exemple dans George Sand en qui revivent la force, la puissance et le concept du maréchal de Saxe de qui elle est petite-fille naturelle (Balzac, Albert Savarus,1842, p. 17).Les Quatre Saisons de MlleAbbéma sont, comme concept, une niaiserie bien féminine (Huysmans, L'Art mod.,1883, p. 297).La description qu'en [du cerveau] fabrique le Français avec le concept logique de son esprit (E. et J. de Goncourt, Journal,oct. 1889, p. 1054). B.− Usuel 1. PHILOS. Représentation mentale abstraite et générale, objective, stable, munie d'un support verbal. Le concept de vérité, le concept de cercle. Synon. catégorie, classe, schème, symbole. Cette philosophie du concept est devenue chez Platon la dialectique, et chez Aristote, la construction métaphysique et scientifique que l'on sait, où la méthode est demeurée essentiellement dialectique (L. Lévy- Bruhl, La Mor. et la sc. des mœurs,1903, p. 63).Le philosophie, remontant du percept au concept, voit se condenser en logique tout ce que le physique avait de réalité positive (Bergson, L'Évolution créatrice,1907, p. 320).Qu'est-ce qu'un concept? [selon Kant] C'est un moyen de juger, c'est-à-dire un universel, une forme de classe sous laquelle on peut subsumer un singulier (O. Hamelin, Essai sur les éléments principaux de la représentation,1907, p. 30): 1. Quand je fixe un objet dans la pénombre et que je dis : « c'est une brosse », il n'y a pas dans mon esprit un concept de la brosse, sous lequel je subsumerais l'objet et qui d'autre part se trouverait lié par une association fréquente avec le mot de « brosse », mais le mot porte le sens, et, en l'imposant à l'objet, j'ai conscience d'atteindre l'objet. Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception,1945, p. 207. (…) 3 Note établie par Marie-Elisabeth COSSON – Formatrice – Askoria Saint-Brieuc – Novembre 2018 uploads/Philosophie/ definition-concept-novembre-2018-note-me-cosson.pdf

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