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www.webdeleuze.com LES COURS DE GILLES DELEUZE www.webdeleuze.com Leibniz > 16/12/1986 > Le pli, récapitulation Il s’est passé tant de choses qu’on se reconnaît à peine. Je ne sais pas très bien ce que vous vous rappelez dans ce qu’on fait. Une fois dit qu’il ne faut pas que le mouvement étudiant perde sa force, parmi les activités secondaires, il est suggéré que vous devriez faire une pétition, adressée au président de l’université pour soulever l’hypothèse: les barreaux qu’on vous a mis sont-ils compatibles avec la sécurité ? Au cas où ça flamberait, ici, comment s’échappera-t- on ? D’autres part que l’histoire des clefs, des portes fermées, ouvertes, pas fermées, pas ouvertes, vous nuit gravement dans vos efforts intellectuels. Il faudrait faire une pétition, très poli. Les barreaux, quand même, réfléchissez ! Bon. Dans les séances précédentes où vous étiez très peu nombreux, on a parlé de ce qui s’est passé, je ne pense pas qu’il soit nécessaire de revenir sur ce point, à moins que quelqu’un ait une déclaration à faire ? Je redis, mais c’est évident pour tout le monde, ce qui importe réellement, c’est que ce mouvement étudiant se prolonge, se continue, qu’il ne se relâche pas. C’est pour ça que je crois très important toutes les tentatives des étudiants, au niveau de chaque université pour faire même des éléments de contre-projet de l’organisation de l’université. Les profs aussi peuvent un peu se démener. Bon. Nous reprenons, étonnés d’en être déjà à la quatrième séance. La semaine prochaine commencent les vacances, les vacances vont du 20 au 6. On me dit que, comme d’habitude, le 6 est un mardi, chaque fois qu’on rentre c’est un mardi, voilà; nous nous retrouverons le 6. Aujourd’hui je voudrais faire tous les efforts pour finir la première partie, quitte à abréger des choses, mais c’est pas grave, et je voudrais procéder par remarques numérotées. Ma première remarque , vous vous rappelez, c’est en quoi consiste cette partie introductive, et je vous disais : c’est très simple, c’est que la philosophie baroque de Leibniz se présente sur deux étages. Ce que je n’ai pas dit c’est que, déjà là, dans l’idée d’un monde à deux étages, il y a quelque chose qui doit nous frapper parce que ça engage la réflexion philosophique en général. A savoir est-ce que ce monde baroque à deux étages, sur lequel je ne reviens pas, ça engage la réflexion philosophique toute entière parce que, peut-être est ce que c’est un moment très important dans un problème qui agite, à ce moment là, depuis très longtemps la métaphysique, à savoir le fameux problème des deux mondes. Le monde intelligible et le monde sensible. Est-ce que la philosophie baroque, ou plus précisément, est-ce que Leibniz, en nous présentant un monde à deux étages, ne s’inscrit pas dans cette tradition tout en la remaniant très profondément. Comment vont se distribuer ces deux étages ?. (2 phrases manquantes) www.webdeleuze.com Leibniz opère un remaniement très profond de la distinction des deux mondes. D’autant plus que ces deux étages, on a vu en quoi ils consistaient, et je vous disais que le monde baroque, c’est le monde du pli qui va à l’infini, et qui d’abord se différencie, se dédouble en deux sortes de plis. A un étage, nous avons les replis de la matière et à l’autre étage, les plis dans l’âme. Replis de la matière et plis dans l’âme. Et l’étage des replis de la matière, c’est comme le monde du composé, du composé à l’infini, la matière n’en finit pas de se replier et de se déplier, et l’autre étage, c’est l’étage des simples. Les âmes sont simples. D’où l’expression: les plis dans l’âme, dans l’âme. On avait vu un vague programme de l’étude des replis de la matière, et puis on s’était lanc dans l’analyse de qu’est-ce que ça veut dire les plis dans l’âme. Deuxième remarque. Pour répondre à cette question qu’est-ce que c’est ces plis dans l’âme, nous étions partis d’une recherche- il faut bien que les deux étages communiquent-, une recherche concernant un élément génétique idéal, élément génétique idéal des replis de la matière. Dans une première séance on avait étudié les replis de la matière, pourquoi la matière est une puissance qui ne cesse de se replier, et puis on était passé à l’hypothèse d’un élément génétique idéal des replis de la matière. Et sans doute, s’il y a un tel élément, il fait déjà partie de l’autre étage. Or notre réponse avait été que l’élément génétique des replis de la matière, c’est quoi ? C’est la courbure variable ou l’inflexion. Figure 1. Chez Leibniz le monde est fondamentalement affecté d’une courbure. On a vu l’importance que ça a, du point de vue de la physique de la matière, mais, bien au delà de la physique de la matière, dans les mathématiques et dans les id alités mathématiques. C’est que l’idéalité mathématique est courbe: une courbure de l’univers. C’est un thème Leibnizien très profond. Ca ne nous étonnait pas, vous vous rappelez, de nous apercevoir que l’inflexion, ou la courbure variable, va à l’infini. On l’avait vu, je vous le rappelle très brièvement, par les propriétés mêmes du nombre irrationnel, ou du nombre «sourd» comme on dit au 17ème siècle; le nombre irrationnel ou sourd est, à la fois, inséparable d’une courbure sur la droite, et aussi bien engendre une série infinie. Donc la courbure variable, ou l’inflexion, va à l’infini. L’idée d’une série infinie allait définir un des chapitres les plus importants des mathématiques de Leibniz. Troisième remarque: de l’inflexion- c’est à dire courbure variable, de l’inflexion au point de vue. Sans doute le concept d’inflexion avait déjà une très grande originalité caractéristique de la philosophie de Leibniz, accordez lui également que l’introduction du point de vue comme concept philosophique devait avoir, pour la philosophie une extrême importance. De l’inflexion au point de vue, pourquoi ? Parce que la courbure variable renvoie à des centres. Centres de courbure, du coté de la concavité de la courbe, figure 2. Donc la courbure variable est inséparable de vecteurs de concavité. Et le centre, compris comme centre de courbure variable, qu’est-ce qu’il est ? Il est sommet, il est point de vue. Qu’est ce que ça veut dire, il est sommet ? Ca veut dire qu’il est le lieu des points où se rencontrent les tangentes à chaque point de la courbe variable. Vous vous rappelez ? Je dirais qu’un tel centre de courbure est un point de vue sur la portion de courbe définie par un vecteur de concavité. Or c’est ça qui était essentiel. Je voudrais que vous compreniez, indépendamment de toute chose très scientifique ou très philosophique, comment précisément on passe, comme naturellement, c’est une espèce de déduction que je voudrais vous proposer. Comment on passe de l’idée d’inflexion ou de courbure variable à celle de point de vue. www.webdeleuze.com J’avais essayé de montrer en quel sens c’était très important, et ça Michel Serres, dans son livre sur Leibniz l’a montré d’une manière parfaite, en quel sens, c’était très très important que, finalement, chez Leibniz, se faisait la substitution du centre conçu comme centre de configuration d’une figure régulière, à cette notion de centre se substituait celle de point de vue. Au centre du cercle se substitue le sommet du cône, le sommet du cône est point de vue. Donc c’est comme par un enchaînement n cessaire qu’on passe de l’idée variable à celle de point de vue ou sommet. A la géométrie du centre se substitue une géométrie des sommets, une géométrie des points de vue. Ca va, ça ? C’est clair ? Quatrième remarque, mais encore une fois, ça vaut pour toutes les remarques d’aujourd’hui, ce sont les étapes d’une déduction. Retenez bien que nous sommes comme passés de l’idée d’inflexion à celle de point de vue. C’est ça qui me semble fondamental. Comprenez, si on avait commencé par se donner la notion de point de vue chez Leibniz, on aurait pu dire, bien sûr, des choses intéressantes, mais on aurait pas compris ce qui l’amenait à ça. Quand un philosophe découvre des nouveaux concepts, ce n’est pas comme ça, tout d’un coup, dans sa tête. Il y est amené par toutes sortes de problèmes. Il fallait d’abord que l’univers soit affecté d’une courbure, et bien plus d’une courbure variable, c’est le monde élastique, c’est la physique de l’élasticité chez Leibniz, il fallait que l’univers fut affecté d’une courbure variable pour, qu’après, la notion de point de vue soit vraiment fondée concrètement. Sentez comment on passe de l’inflexion au point de vue. Le centre de courbure variable n’est plus un centre, au sens de centre d’un cercle, c’est à dire centre d’une configuration régulière, c’est un site, c’est un sommet. C’est un sommet en fonction duquel je vois, c’est à dire que c’est quelque chose qui donne à voir. Quatrième remarque: mais alors qu’est-ce que c’est un point de vue ? 1) Premier caractère, il me semble, un point de vue est toujours uploads/Philosophie/ deleuze-le-pli-cours-sur-leibniz.pdf
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- Publié le Dec 04, 2022
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