L'athéisme En principe, le terme d'athéisme s'applique à la négation de l'exist

L'athéisme En principe, le terme d'athéisme s'applique à la négation de l'existence de Dieu . Ce qui correspond, en ce sens, à un acte de foi , opposé à celui qui consiste à affirmer l'existence de Dieu. Mais très souvent ce qualificatif est appliqué à ce qui est en réalité une forme de l'agnosticisme : il ne s'agit plus ici de nier l'existence de Dieu, mais de placer cette question hors sujet. L'athéisme, dans ce cas, revendique la possibilité de constituer une vision du monde, une morale, indépendamment de toute référence à la divinité, et de tout présupposé religieux. Le fameux "je n'ai pas eu besoin de cette hypothèse" de Laplace, relève de cette attitude, qui n'est pas une négation de l'existence de Dieu, mais la revendication d'une autonomie de la raison. On a ainsi affaire à un indifférence religieuse, qui se distingue de cette autre forme de l'agnosticisme qu'est l'acatalepsie, et où l'on se pose peut-être la question de l'existence de Dieu, mais l'on conclut à l'impossibilité à y apporter une réponse. Le mot d'athéisme a ainsi un sens mal déterminé, et est d'un emploi de plus en plus rare en philosophie où on tend à y voir une expression vieillie. En revanche, le sens de ce mot est très net et d'un usage fréquent dans l'histoire des idées. Historiquement, on peut dire qu'en tous temps et par tous pays, les religions dominantes, confisquant pour leur compte toute possiblité de constituer une morale ou une vision consistante du monde, d'avoir vie intérieure, une spiritualité, si l'on veut, etc., ont flétri du nom d'athées les gens qui ne partageaient pas la croyance commune. Elles ont réprouvé et proscrit sons le nom d'athéisme toute velléité de pensée indépendante. On imagine sans peine la gravité d'une telle accusation, là surtout où la force du sentiment religieux, déjà si grande, avait à ses ordres le pouvoir séculier, soit que la religion, essentiellement nationale, fût le lien même de la cité et la première des institutions politiques, soit que, se plaçant au-dessus des États, par la seule autorité de son prestige elle dictât la loi aux gouvernements. Quand on sait ce qu'était au Moyen âge l'accusation d'hérésie, on comprend quelle horreur devait s'attacher au reproche d'athéisme. A vrai dire, l'athéisme pur et simple était à peine conçu : toute impiété, même infiniment moindre, passoit pour démoniaque, pour le triomphe du malin; il fallait avoir fait quelque pacte avec le diable, pour s'écarter si peu que ce fût de la stricte orthodoxie. Dans les textes de la scolastique, dans saint Anselme, par exemple, quand, pour établir l'existence de Dieu , on fait intervenir ceux qui la nient, on sent que c'est là une conception abstraite, une hypothèse monstrueuse, on plutôt une sorte d'artifice littéraire : l'athéisme est présenté comme une aberration de l'esprit, l'athée est appelé l'insensé, insipiens. Il se trouvait bien parfois quelque esprit aventureux pour prendre la défense de l'insensé, comme ce Gaunilon, moine de Marmoutiers, qui discutait si judicieusement, dans un livre Pro insipiente, le célèbre argument de saint Anselme; mais ceux-là, ou gardaient soigneusement l'anonyme, ou se livraient bien plutôt à une sorte de jeu dialectique qu'à des attaques impliquant de leur part une intention impie et soulevant contre eux une véritable passion. Ces défenseurs de l'athéisme théorique se comportaient pratiquement en fort bons catholiques : on ne leur demandait rien de plus. La moindre hérésie, au contraire, une pratique insignifiante en elle-même, mais qui pouvait paraître une, tentative d'échapper à la direction de l'Église ou de s'en passer, étaient réprimées avec la dernière rigueur. C'est seulement à mesure que, les esprits s'émancipant, l'athéisme à la fois moins rare et plus sérieux menaça de devenir agressif, qu'il devint couramment un objet d'anathème dans la chaire et de réfutation dans les livres. En aucun temps d'ailleurs le fanatisme ne s'est montré scrupuleux : mérité ou non, le reproche, d'athéisme n'a jamais manqué d'être lancé par la passion religieuse à tout ce qui l'irritait, ni de servir d'arme aux haines politiques et sociales, partout où il pouvait perdre ceux à qui on l'adressait. La société grecque si souple, si ouverte, si naturellement tolérante, n'a pas ignoré ce genre particulier de délation, qu'on aurait pu croire réservé aux peuples moins éclairés ou plus crédules. Il faut croire que c'est un fléau universel, aussi bien compatible avec l'esprit et la légèreté qu'avec la plus lourde sottise. Sans rappeler le procès de Socrate, où le tribunal et le public furent de bonne foi, sinon les accusateurs, Aristote, on le sait, "poursuivi pour crime d'athéisme", dut quitter Athènes "afin que les Athéniens ne se rendissent pas une deuxième fois coupables envers la philosophie". La vérité est qu'il était suspect d'attachement aux rois de Macédoine ; mais ce grief apparemment ne suffisait pas, il fallait mettre en cause la religion pour soulever la passion populaire. A Rome, où le sentiment religieux était pourtant, à ce qu'il semble, autrement simple et fort, on ne voit pas qu'il ait été à ce point ombrageux. Il y en a bien des raisons. D'abord, la vraie religion des Romains; c'était le culte des morts lequel n'a guère d'athées, inspiré qu'il est par des sentiments bien plus que par des idées dogmatiques. Puis, Rome fut toujours hospitalière aux cultes étrangers, aux dieux des peuples vaincus, ce qui suppose, en dépit d'un formalisme proverbial, un réel fonds de tolérance, que cette tolérance tint de l'instinct politique, de l'esprit positif ou de toute autre cause. Enfin, la hardiesse spéculative ne fut jamais le fait des Romains, surtout au temps où le sentiment religieux eut chez eux toute sa force; là où la philosophie existait à peine, elle ne pouvait guère donner d'ombrage L'accusation d'athéisme eut son maximum de fréquence et de gravité quand un esprit philosophique très éveillé, très alerte, armé en guerre et d'humeur batailleuse, plus tourné d'ailleurs vers les questions pratiques et sociales que vers la haute spéculation, se dressa en face d'une théologie arrêtée, hautaine en ses dogmes, en possession de longue date d'une autorité incontestée et sans bornes sur tout le temporel. Ce serait pourtant une erreur de croire que les théologiens proprement dits aient seuls, durant les derniers siècles, dénoncé comme athées les philosophes dont ils avaient à se plaindre. Les philosophes, il faut bien le dire, se sont prodigué le même reproche les uns aux autres. Quand la philosophie, se proposait presque universellement pour but l'édification, quand tout ouvrage philosophique devait tourner à la gloire de Dieu, presque nécessairement la forme et le ton de la polémique s'imposaient : de là le nombre presque incalculable d'écrits qui se donnent par leur titre même , ou leur sous-titre, comme composés contre les athées. Un des meilleurs est, par exemple, le grand ouvrage de Cudvvorth, The true intellectuel system of the Universe, wherein all the reason and the philosophy of Atheism is confuted, Lond., 1678. Locke, qui a tant écrit, et si bien, en faveur de la tolérance, esprit libre s'il en fut, et le moins mystique du monde, ne demande guère aux gens que de n'être pas athées (ni papistes) ; mais pour les athées il est plein de rigueur; sa conviction était qu'une société d'athées serait impossible, que l'athéisme par conséquent ne peut avoir droit de cité dans un Etat. Cette question a passionné nos philosophes français du XVIIIe siècle, qui tiennent de Locke en si grande partie leur fonds de doctrine Dans l'article « Athéisme » de son Dictionnaire philosophique, Voltaire y revient à plusieurs reprises : il conclut avec beaucoup de sens que ce n'est pas l'athéisme qui est mortel à la vie sociale, mais bien le fanatisme. Au reste, il tient, quant à lui, l'athéisme pour fort déraisonnable, et quoiqu'il ait, dit-il, connu quelques athées qui étaient de très bons physiciens, il avoue être bien surpris «que des hommes qui démêlent si bien les ressorts de la nature s'obstinent à méconnaître la main qui préside si visiblement au jeu de ces ressorts». Ni ce théisme de Voltaire, ni celui de Rousseau n'empêchèrent d'ailleurs un très vif courant d'athéisme de se répandre, de prédominer même, à la fin du XVIIIe siècle, dans la société élégante et lettrée, non pas en France seulement, mais dans une grande partie de l'Europe. N'oublions pas cependant l'influence de Jean-Jacques sur une immense catégorie de lecteurs en dehors des salons : plus d'une des figures de la Révolution sembla, on le sait, avoir pour credo la profession de foi du vicaire savoyard. Philosophiquement parlant, il y a certainement des athées, mais il n'est pas facile de fixer un criterium exact auquel on les reconnaisse. Chaque école de métaphysique a sa conception de l'univers, entend à sa manière la cause, la fin, l'essence des choses, et, quand elle s'est formé une idée de l'infini, incline à regarder comme athées les doctrines qui s'en font une idée différente. C'est ce qui explique qu'un Spinoza ait pu être, plus violemment peut-être qu'aucun autre penseur, honni comme le prince des athées, lui dont Schleiermacher a pu uploads/Philosophie/ dieu-deisme-atheisme.pdf

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