CRUZ DAVID PHILOSOPHIE CONTEMPORAINE Éthique de l’environnement Évaluation du s
CRUZ DAVID PHILOSOPHIE CONTEMPORAINE Éthique de l’environnement Évaluation du semestre Travail remis à M. Olivier Tinland MASTER 1 Philosophie Université Paul Valery 11 décembre 2020 Introduction. Bien qu’il ait un consensus scientifique par rapport au désastre écologique que nous vivons actuellement, le débat sur ses causes, ses conséquences et les actions à mettre en œuvre pour éviter que la détérioration de l’environnement ne s’aggrave, reste encore ouvert. Dans ce contexte précis, l’éthique de l’environnement estime qu’il est nécessaire et urgent de repenser la relation entre l’être humain et la nature. L’homme doit donc renoncer à sa prétention d’être le maître absolu de la nature et adopter une attitude de respect envers elle. De plus, la nature ne peut pas avoir simplement une valeur instrumentale, comme si elle serait une sorte de « stock » au service de l’être humain, mais au contraire devrait avoir une valeur intrinsèque. Ainsi, le fait d’attribuer une valeur intrinsèque à la nature et le rejet d’un point de vue anthropocentrique, implique un élargissement du champ de l’éthique traditionnelle en prenant en compte les éléments naturels non-humains (êtres vivants et non-vivants) et l’environnement où ils se trouvent. Dans la préface du livre Éthique de l’environnement. Nature, valeur, respect, Hicham-Stéphane Afeissa définit cette nouvelle éthique de la manière suivante : En effet, définie de façon général, l’éthique de l’environnement est une entreprise qui vise à déterminer les conditions sous lesquelles il est légitime d’étendre la communauté des êtres et des entités à l’endroit desquels les hommes doivent se reconnaître des devoirs, de la vie animale la plus fruste à l’ensemble des écosystèmes qui composent notre environnement naturel. (Afeissa, 2007, p. 10) L’objectif de ce texte est de répondre à trois questions clés qui permettront de mettre en évidence les principaux débats au sein de l’éthique de l’environnement. Les questions sont : 1) En quoi une éthique de l’environnement constitue-t-elle une remise en cause des éthiques existantes ? 2) Pourquoi vouloir attribuer une valeur intrinsèque aux entités naturelles ? Quels sont les obstacles à une telle attribution ? et 3) L’anthropocentrisme est-il une condition ou un obstacle à l’éthique de l’environnement ? 1. Éthique traditionnelle et éthique de l’environnement. L’écologiste américain Aldo Leopold a été un des pionniers à montrer que le projet écologiste avait besoin de remettre en question les éthiques traditionnelles. Selon lui, « il n’existe pas à ce jour d’éthique chargée de définir la relation de l’homme à la terre, ni aux animaux, ni aux plantes qui vivent dessus » (Leopold, 2000, p. 257). En effet, dans son livre intitulé Almanach d’un comté des sables il propose ce qu’il a appelé une éthique de la terre (Land Ethic) comme réponse à l’incapacité des éthiques traditionnelles à surmonter l’attitude typique de domination et d’exploitation de l’être humain à l’égard de la nature. Également, il critique que ces éthiques considèrent la communauté morale comme un domaine où les entités non-humains et les écosystèmes ne sont pas acceptées. Il suggère alors le concept de la communauté biotique. Ainsi, l’être humain a des devoirs vis-à-vis de la nature dans la mesure où il n’est qu’un élément de la communauté biotique. Leopold nous dit que Bref, une éthique de la terre fait passer l’Homo Sapiens du rôle de conquérant de la communauté-terre à celui du membre et citoyen parmi d’autres de cette communauté. Elle implique le respect des autres membres, et aussi le respect de la communauté en tant que telle. (Leopold, 2000, p. 258-259) Aldo Leopold répondrait à la première question, en indiquant qu’une éthique de la terre prend distance des éthiques traditionnelles dans le moment où elle affirme que les éléments non- humains font aussi parti de la communauté morale en adoptant un point de vue non anthropocentrique. Néanmoins, on peut encore poser la question suivante : Quelles seraient les raisons pour affirmer que l’éthique traditionnelle est essentiellement anthropocentrique ? Lynn White Jr. et Richard Sylvan Routley essaient de répondre à cette question. Le premier réalise une analyse historique de la catastrophe écologique actuelle en découvrant des racines judéo- chrétiennes qui se trouvent à la base de l’éthique traditionnelle. Sur un autre plan, Richard Routley propose l’argument du « premier homme » pour défendre l’idée qu’il est nécessaire de fonder une nouvelle éthique qui ne soit pas simplement une éthique appliquée. 1.1. Racines religieuses de l’éthique traditionnelle. Dans l’article intitulé Les racines historiques de notre crise écologique, Lynn White Jr a pour but de dévoiler les origines culturelles de la catastrophe écologique que nous vivons. Il s’agit d’analyser les croyances et les axiomes d’ordre religieuse qui sont à la base des systèmes éthiques contemporains afin de démontrer que la tradition occidentale fait aussi parti du problème environnemental. En effet, il affirme que « l’écologie humaine est conditionnée en profondeur par des croyances sur notre nature et notre destinée-à savoir par la religion » (Goffi, 1994, p. 300). En d’autres termes, pour la tradition judéo-chrétienne la nature est un objet de domination vis-à-vis de l’homme car il est le seul à avoir des caractéristiques ontologiques supérieures tels qu’une âme, un être ou une conscience. En effet, selon White Jr, le dualisme entre l’être humain et la nature qu’on trouve dans toutes les éthiques traditionnelles (soit dans la déontologie ou dans l’utilitarisme) est l’héritage du mythe chrétien de la création. Dans ce mythe, l’homme a été créé à l’image de Dieu pour régner sur la planète, ayant une sorte de droit divin d’exploiter les ressources naturelles et les animaux. De plus, l’auteur remarque que la foi aveugle d’un progrès a aussi des racines dans cette idée d’une origine divine pour autant qu’elle présuppose une conception linéaire de la temporalité. Le troisième élément de la tradition occidentale qui a été remis en cause par White Jr est la science moderne lorsqu’il dit que l’étude de la nature avait pour objectif d’essayer de comprendre la mentalité de Dieu. Cette étude religieuse de la nature est nommée par l’auteur comme la théologie naturelle et elle est le fondement historique de la science moderne. White Jr conclut son argumentation en disant que Il n’existe pas de nouvel ensemble de valeur fondamentales que notre société ait accepté pour remplacer celle du Christianisme. Il s’ensuit que nous continuerons à souffrir d’une crise écologique qui s’aggrave, à moins que nous ne rejetions l’axiome chrétien que la nature n’a pas de raison d’être sinon de servir l’homme. (Goffi, 1994, p. 308) Finalement, l’auteur prouve que des croyances telles que le dualisme homme-nature, la foi dans le progrès et la science moderne sont l’héritage de l’anthropocentrisme chrétien qui doit être surmonté pour éviter que la crise écologique ne s’aggrave. Par conséquence, il serait urgent de fonder un nouvel système de croyances qui puisse fournir les bases conceptuelles suffisantes pour faire face aux défis écologiques actuels. 1.2. Le chauvinisme humain et le premier homme. Les arguments donnés par Leopold et White Jr impliquent que l’éthique de l’environnement ne peut pas être une application des éthiques existantes dans un domaine précis, mais qu’elle devrait être considérée comme une éthique normative indépendante. Dans l’article intitulé A-t-on besoin d’une éthique environnemental ? le philosophe Richard Sylvan Routley présente de nouveaux arguments qui renforcent la thèse précédemment défendue par Leopold et White Jr en identifiant le « chauvinisme humain » comme le principe essentiel des éthiques traditionnelles. Tout d’abord, Routley se demande si l’éthique de l’environnement devait rejeter ou non la tradition occidentale. Cependant, il évite de penser cette tradition de manière homogène et c’est pour cette raison qu’il reprend la distinction de Passmore entre les trois attitudes principales à l’égard de la relation de l’être humain et de la nature : le despote, l’intendant et le coopérateur. Celle du despote ou tyran est la plus répandue dans la pensée occidentale et la plus facile à refuser pour l’éthique de l’environnement puisqu’elle présuppose que la nature n’est qu’une propriété de l’être humain. Alors que « du point de vue d’une éthique de l’environnement, l’homme, n’a pas la liberté d’agir à sa guise » (Afeissa, 2007, p. 35). Ensuite, le cas de l’intendant - celui qui s’occupe de veiller au bien-être de la nature - est aussi repoussé étant donné qu’il implique une sorte de colonisation de zones naturelles qui n’ont pas besoin d’une interférence humaine. La troisième attitude, celle du coopérateur, qui est décrite par Routley comme la tentative de l’homme pour perfectionner la nature, est également écartée car la nature finirait par être déterminée selon les critères d’utilité humaine et par conséquent, anthropisée dans son intégralité. La stratégie argumentative de Routley est précisément de montrer que l’éthique de l’environnement doit avoir un statut indépendant des autres systèmes éthiques, car elle ne peut pas partager un des principes centraux de l’éthique traditionnelle, à savoir le chauvinisme humain. Il s’agit donc de caractériser le principe d’équité et de liberté - on a le droit d’agir comme on veut tant qu’on ne nuit pas aux autres personnes ou à soi-même - comme essentiellement anthropocentrique. C’est pour cela qu’il affirme que Appelons ce principe chauvinisme (humain) fondamental uploads/Philosophie/ ethique-de-l-x27-environnement.pdf
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- Publié le Mar 25, 2022
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