7 Fiche 1 Libertés publiques et libertés fondamentales I . Les libertés publiqu
7 Fiche 1 Libertés publiques et libertés fondamentales I . Les libertés publiques II. Un régime juridique spécifi que III. La notion de libertés fondamentales Si toutes les sociétés démocratiques sont fondées sur le respect et la garantie des droits de l’homme et des libertés publiques, contrairement à de nombreux pays, le droit positif français ne comporte aucune défi nition, ni aucune énuméra- tion de ces droits et libertés. Le vocabulaire lui-même est très incertain : libertés publiques, libertés fondamentales ou droits fondamentaux, droits de l’homme ou droits humains sont autant de formules utilisées. Libertés publiques et libertés fondamentales n’étant pas tout à fait synonymes, il convient de les distinguer. I . Les libertés publiques La liberté est la faculté reconnue à l’homme d’agir de manière autonome, c’est un pouvoir d’autodétermination en vertu duquel l’homme choisit son comportement personnel. Néanmoins, parce que l’homme vit en société, la liberté de chacun doit être conciliée avec celle des autres. La liberté est une prise de conscience par l’individu à la fois des nécessités sociales et également de sa propre responsabilité. Le qualifi catif public exprime l’opposabilité de cette liberté à la puissance publique. Il traduit donc l’intervention des pouvoirs publics. Mais l’expression n’est que très rarement employée au singulier. Les libertés publiques sont reconnues par la Constitution de 1958 et enseignées à partir de la réforme des programmes uni- versitaires en 1954 et 1962. Ce sont des libertés reconnues aux individus, protégées par la loi, et garanties par l’État. Si les libertés publiques sont expressément mentionnées dans la Constitution , elles ne font pas l’objet en tant que telles d’une défi nition textuelle. La doctrine a donc conceptualisé cette expression , elle considère les libertés publiques comme étant l’expression d’un pouvoir d’autodétermination reconnu par des normes à valeur au moins législative et bénéfi ciant d’une protection renforcée même à l’égard des pouvoirs publics. 8 Pour expliquer cette défi nition, il convient d’en reprendre les éléments. D ’abord, les pouvoirs d’autodétermination sont ceux que l’homme exerce sur lui-même sans que l’intervention d’autrui soit nécessaire. L ’individu doit pouvoir penser ce qu’il veut, aller où il veut, se réunir quand il veut sans que l’intervention de quiconque soit sollicitée. Entendue dans un sens restrictif, cette défi nition exclut les droits créances qui exigent une intervention de la société (le droit à la santé, le droit à la culture ou encore le droit au logement). Une défi nition plus large des libertés publiques englobe les droits créances, en effet ce qui rend publique une liberté c’est précisément l’intervention du pouvoir politique pour la reconnaître et l’aménager. Ensuite, les libertés publiques ont une valeur au moins législative. La Constitution de 1958 réserve en effet à la loi et au législateur le pouvoir de proclamer l’existence de nouvelles libertés publiques. C ’est une caractéristique des libertés publiques. Enfi n, reconnaître que les libertés publiques bénéfi cient d’une protection renforcée même à l’égard des pouvoirs publics renvoie à la notion d’État de droit. L ’État de droit, auquel est opposé l’État de police, est un système institutionnel dans lequel la puissance publique est soumise au droit. Le juriste autrichien Kelsen a redéfi ni cette notion d’origine allemande (Rechtsstaat) au début du xxe siècle, comme un État dans lequel les normes juridiques sont hiérarchisées de telle sorte que sa puissance s’en trouve limitée. Dans ce modèle, chaque règle tire sa validité de sa conformité aux règles supérieures. L’État de droit se met en place progressivement dès la fi n du Moyen-Âge. En Grande-Bretagne dès 1215, la Grande Charte proclame un certain nombre de droits (par exemple la liberté d’entrée et de sortir du royaume) qui pro- tègent les individus contre l’arbitraire. En 1679 est institué l’Habeas corpus et en 1689 est proclamé le Bill of Rights qui affi rme dans son article premier : « Que le prétendu pouvoir de suspendre les lois ou l’exécution des lois par l’autorité royale, sans le consentement du Parlement, est illégal. » La Déclaration d’indépendance américaine de 1776 affi rme que le gouvernement repose sur le consentement du peuple et que les hommes ont le droit de changer de gouvernement lorsqu’ils sont victimes d’abus et d’usurpations qui tendent au « despotisme absolu ». La Révolution française, en affi rmant en 1791 qu’« il n’y a pas en France d’autorité supérieure à la loi », prolonge cette tradition selon laquelle, la loi protège l’individu contre l’arbitraire. II. Un régime juridique spécifi que Le statut des libertés publiques en France s’est formé de manière progressive. Il n’y a pas un texte constitutif mais une succession de textes qui traduisent des vues différentes des libertés. Leur protection juridique traduit la conception idéologique des rapports de l’homme avec la société. La conception française s’est affi rmée au 18e siècle dans un texte reconnu encore aujourd’hui comme fondamental, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Les libertés publiques se caractérisent par un régime juridique dans lequel la loi joue un rôle fondamental. L ’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du 9 Fiche 1 • Libertés publiques et libertés fondamentales citoyen de 1789 (« La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi ») lui reconnaît un rôle majeur puisqu’elle seule détermine les conditions d’exercice des libertés et en fi xe les limites. La loi est clairement la première garantie des droits et libertés. C ’est aussi l’article 34 de la Constitution de 1958 qui réserve au législateur la compétence pour proclamer l’existence de nouvelles libertés publiques. Article 34 La loi fi xe les règles concernant : les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques ; la liberté, le pluralisme et l’indépendance des médias ; les sujétions imposées par la Défense nationale aux citoyens en leur personne et en leurs biens ; la nationalité, l’état et la capacité des personnes, les régimes matrimoniaux, les successions et libéralités ; la détermination des crimes et délits ainsi que les peines qui leur sont applicables ; la procédure pénale ; l’amnistie ; la création de nouveaux ordres de juridiction et le statut des magistrats ; l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures ; le régime d’émission de la monnaie. La loi fi xe également les règles concernant : le régime électoral des assemblées parlementaires, des assemblées locales et des instances représentatives des Français établis hors de France ainsi que les conditions d’exercice des mandats électoraux et des fonctions électives des membres des assemblées délibérantes des collectivités territoriales ; la création de catégories d’établissements publics ; les garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires civils et militaires de l’État ; les nationalisations d’entreprises et les transferts de propriété d’entreprises du secteur public au secteur privé. La loi détermine les principes fondamentaux : de l’organisation générale de la Défense nationale ; de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources ; de l’enseignement ; de la préservation de l’environnement ; du régime de la propriété, des droits réels et des obligations civiles et commerciales ; du droit du travail, du droit syndical et de la sécurité sociale. […]. La deuxième caractéristique du régime juridique des libertés publiques tient au rôle des juges français qui en sont les gardiens. Dans la doctrine classique, ce rôle appartient au juge judiciaire ; c ’est traditionnellement au juge judiciaire que revient la compétence de protéger la liberté individuelle et la propriété privée. Mais le juge administratif et le juge constitutionnel ont toujours eu le souci du respect et de la garantie des droits et libertés. Il faut ainsi admettre le rôle non négligeable du juge administratif dans la protection des libertés garanties par la loi face à l’administration. Il a par exemple mis en place des mesures de protection spécifi ques, dans la jurisprudence Benjamin de 1933, il sanctionne les mesures de police administrative lorsqu’elles sont disproportionnées par rapport aux troubles à éviter (Conseil d’État, 19 mai 1933, Benjamin, Lebon, p. 541). Pourtant, l’attitude 10 du Conseil d’État face aux mesures prises dans le cadre de l’État d’urgence incite à relativiser ces propos. À partir de 1971, le Conseil constitutionnel a reconnu certaines libertés comme fondamentales leur conférant une valeur constitutionnelle. Si la plu- part des libertés publiques ont une valeur constitutionnelle, certaines n’ont qu’une valeur législative, demeurant incontestablement plus vulnérables : ainsi en est-il du droit à l’avortement reconnu par la loi Veil de 1975 (voir 74-54 DC du 15 janvier 1975, Interruption volontaire de grossesse). D ’autres garanties juridictionnelles existent, tant au niveau européen qu’inter- national, puisque plusieurs traités portent sur la protection des droits et libertés. Ainsi en est-il de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales de 1950 qui est la uploads/Philosophie/ extrait 3 .pdf
Documents similaires
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/HcpOiCuYgwfhO290rm6wYtNl0TuwnJiHasaK7sABBAJN04YGBpIodI29SoWyJ45rZst6ashjCxMEw5nxsUeOPo8q.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/SANWsBvk3iwzDSNXjg06sOCsS1qd7JzKXB8qo4GbJdmvnpqlIblF27ZdWniwfyUz0xMjjaslYr0t5hYJLIfdhlKy.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/X124mXBZ8B46UosSrzzyLXP0qoLLVBQykXoMeExIqvf9DfERxaS8Rw4OCyLe87I5YRXyrKPUDx5HLwEeN5Lx2rT3.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/9ABr7z0BgCr7ZfD99PzXVhphEsQT62AujCUv82lLMUNTJVRXyei3j3k6Qs4dZCOYiaeYRFYNKkl1AAY1aaDhEDgw.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/APO6gxuRz9d965ZO61VxQlglWMuthilO3KPQqguq1kuvsfn9D25Jp4e0N0jCpD4QD3RVnabDRGS6uNDET5EoCujj.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/0JjJwpFPpaiso20s6FNbpYWcmVDfLXQkUOjtyncD1zxcA4gwnKwkWE3kQCRM8ayTl2k8l13LlVJuuDbN4ZMun2tr.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/g6l6SrV4VP2lSNP9Y4OzOWBlzMkAIZvArWbFsYnF76cEgPLuqTof5I2wi7v7EGnXmKwDZWRZoM66To30Mr4wINqc.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/uNSHp3MOdbJsd4LpVqoOw6pyKhBzbdhBvou35wG0cDg5FHZDHAwkaYC50WjxXcRkjbydv9yVeWsK8BzFtYOiXkcj.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/iU4y8MDW0h0uEQirIYBF7ckSRBYxX8nDpQSMspGMhzOwwleiguNdZCdIMZiVjatiEw3XJy7EBAyIFt4hfa3UXDPm.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/F2BWlz9FUHO7WSLrsVxaoGuKf6aOMaj9qP2ytVU0q9SQEpGzX1Ry9SY5Pu4S18NRh1vnTrSbAHDgKYPp7llc8pVi.png)
-
44
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Mai 24, 2021
- Catégorie Philosophy / Philo...
- Langue French
- Taille du fichier 0.2420MB