Faut-il renoncer à définir le Beau ? Nota bene : je ne propose pas une disserta
Faut-il renoncer à définir le Beau ? Nota bene : je ne propose pas une dissertation mais des éléments permettant de l’élaborer… Depuis Socrate, dont l’un des objectifs visait à atteindre les « essences », la question de la définition est une question philosophique ? Comment parler des choses sans préalablement les définir avec précision. La renonciation à une définir est donc un problème philosophique majeur, car comment parler du beau, et donc de l’art sans un accord sur ce qu’est le beau. Si l’on doit donc y renoncer, pourquoi et avec quelles conséquences ? Nous verrons donc dans une première partie du statut philosophique de la notion, Le problème de la définition : le statut philosophique du beau et la question de la perception Qu’est-ce que la Beauté ? La question pose le problème du statut philosophique de la notion. Le beau est une notion commune. Le problème qui se pose pour elle comme pour d’autres est de l’ amener à une conceptualisation scientifique (au sens de rigoureuse et donc pouvant prétendre à un statut philosophique). Socrate, le premier, a affronté le problème et le formule sans ambiguïté dans le Grand Hippias à propos du beau. Pour les Scolastiques, solidaire des options de la basse Antiquité, la beauté consiste en connaissance intuitive et en délectation, elle est source de joie. Ce qui pose la question de la perception du beau. Le beau est délectable, comme tel il pose la question du sens, mais il appartient à l’ordre des transcendantaux, – par quoi on touche à l’être. Le beau se présente sous un double aspect : métaphysique (la question de son essence) et psychologique : la perception du beau. La question de la définition du beau pose donc elle de la perception du beau. Cette perception est-elle une connaissance, une vision, une contemplation? Peut-elle atteindre le beau de la même manière qu’on peut atteindre la vérité ? A quelles conditions et selon quels critères. Autrement dit, peut-on convaincre autrui que quelque chose est beau ? L’un des points discutés est la question de la perception du beau par l’intelligence usant des sens comme d’instruments. Kant s’en est occupé dans la critique du jugement et donne sa définition du beau : « ce qui plait universellement sans concept ». La perception du beau passe par les sens. Si le beau est ce qui plaît, comme le dit Thomas d’Aquin, alors, ce qui plaît est nécessairement subjectif, et on ne peut trouver un critère ou un fondement au jugement de goût, donc au beau. On peut donc admettre que l’esprit renonce à définir le beau, puisque nécessairement relatif et profondément subjectif. La question qui se pose est donc celle d’un critère objectif qui permette de définir ce qui est beau, non pas en fonction d’un sujet mais en fonction d’un objet, en l’occurrence l’œuvre d’art, traditionnellement associée à la beauté. Le beau : catégorie de l’essence, et catégories de l’existence Or, dans le domaine de l’esthétique, les choses se divisent en laides et belles. Les catégories du Laid, du Monstrueux, du Révoltant, du Répugnant, de l’Ignoble, de l’Immonde, de l’Abject, de l’Obscène sont des catégories de l’existence comme l’a souligné justement Jean-Paul Sartre… Si on définit le beau, comment rendre compte de ces catégories ? Pour rendre compte de la division instinctive des choses en catégorie du beau et du laid l’intelligence a deux choix : nier cette distinction et les choses ne peuvent plus s’analyser selon cette catégorisation « instinctive », ou chercher ou construire de nouvelles catégories qui rendent compte des choses en dehors de la perception du beau et du laid. Pris dans cette contradiction, l’art comme la philosophie entreprend de résoudre ce dilemme et de surmonter cette division invincible entre beauté et laideur, en résorbant la laideur dans une espèce de la beauté, et en nous transportant au-delà du beau (esthétique) et du laid. Et en ce cas, la question de la définition du beau n’a plus guère de justification philosophique. Sans compter que se pose le problème suivant : peut- on tout représenter, y compris le pire ? Le laid transporte à la frontière où la moralité et l’esthétique se rejoignent. On conçoit donc à ce stade de l’analyse qu’un certain nombre de problèmes peuvent rendre la notion de beau inutiles. On peut donc renoncer à définir le beau pour pouvoir intégrer toutes les catégories que la notion de beauté interdit de représenter. Jankélévitch postule ainsi qu’on ne peut rien dire de la musique. On peut en faire, mais guère en parler. Singulier paradoxe puisqu’il en parle néanmoins, fût-ce pour dire qu’il est impossible de le faire. Mais si pareille renonciation peut être féconde pour l’art, il n’est pas certain qu’elle le soit pour la philosophie. Comment ne pas abdiquer devant ces contradictions? La définition de beau comme essence exclut de l’art les catégories du laid, et d’autre part, le beau est prisonnier des sens, donc d’un inévitable relativisme. Il dépend du sujet, de l’époque, de la culture, voire du degré de formation. Sauf à postuler un « sens » particulier à la source du sentiment esthétique mais que rien ne peut prouver ; il faut renoncer à définir le beau. Et pourtant non. En distinguant la valeur artistique – les qualités techniques d’une œuvre d’art quelle que soit ce qu’elle représente - et sa valeur esthétique – la beauté d’une œuvre ou sa capacité à faire éprouver un sentiment esthétique. C’est en maintenant cette distinction qu’on peut maintenir l’idée de la beauté et sa réalité. Comme le dit justement A. Malraux, « si les mots art et beauté avaient la même signification, Goya ne serait pas un artiste ». Or, l’auteur des Cauchemars est un grand artiste. On conçoit combien la question de la définition d’une notion est centrale en philosophie. Au centre de l’esthétique, se trouve la notion de beau, et renoncer à elle reviendrait à renoncer à toute pensée philosophique sur l’art, et donc à une philosophie de l’art. En même temps, la notion connaît des variations, comme toute notion. uploads/Philosophie/ faut-il-renoncer-a-definir-le-beau.pdf
Documents similaires
-
12
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Oct 24, 2021
- Catégorie Philosophy / Philo...
- Langue French
- Taille du fichier 0.2096MB