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L—m ÇA p L413 t'a-3" PIERRE FRANCA-WSTEL LA RÉALITÉ FIGURATIVE éléments structurels de sociologie de l’art 11S 047794 9 DENOÈL/GONTHJER ŸÇQUlSITIOA, N'B‘l H - me A i». 1.0" î I ESPACE GENETIQUE ET ESPACE PLASTIQUE Tous les arts plastiques sont des arts de l’espace. La notion de Forme ne leur est pas réservée et l'on commet souvent l’erreur d’employer ce dernier terme, en parlant d’eux, sans de suffisantes réserves. La Forme est musicale, littéraire, mathématique aussi bien que plastique; la notion de Forme s'applique même à une interprétation générale de l'activité de l'esprit. En revanche, il n’y a pas d’art plastique en dehors de l’espace et la pensée humaine, lorsqu’elle s’exprime dans l’espace, prend nécessairement une Forme plastique. Tout signe plastique est par consé- quent spatial. Il ne s’ensuit pas, d'ailleurs, que les arts plastiques soient sans rapports avec le temps ni avec le mouvement, mais ils se rencontrent sur ce terrain avec d’autres signes tandis qu’ils sont inconcevables sans espace et que tout art — même la musique ou la littérature ——— qui, d’une manière quelconque, entre dans l’espace revêt un caractère plastique. Il est donc capital d’étudier la Forme plastique en fonc- tion de la notion d’espace. D’autant plus que cette notion est variable suivant les pays et suivant les époques. Ainsi les œuvres d’art traduisent la conception que les artistes et leur temps se font de l'espace, tandis que les conceptions générales, et spécialement mathématiques, de l’espace nous renseignent sur les intentions des artistes à une époque donnée. On a cependant très peu avancé dans cette voie de l’analyse comparée des valeurs plastiques et des autres valeurs intellectuelles. C’est à peine si, dans les milieux historiques, littéraires et philosophiques, on s’est avisé du fait que les œuvres d'art sont des signes au même titre 128 LA RÉALITÉ FIGURATIVE que les mots et que les symboles mathématiques. En fait, ce sont les peintres et les critiques qui, dans les dernières décennies, ont entrevu d’abord 1e problème — d'où résulte tout un aspect de l'art contemporain. J’ai cru qu’il ne serait pas sans intérêt de présenter quelques remarques sur la nature de l'espace plastique telle qu'on peut la concevoir aujourd’hui à partir de l’étude des Formes de l'art contemporain. Il m'a paru, en outre, que les recherches faites, en Suisse par Piagct et en France par Wallon, sur l’éveil de l’intelli- gence et la formation des cadres de la pensée chez l'enfant, ainsi que la publication récente des ouvrages qui résument les enquêtes et les théories de ces deux maîtres, fournis— saient un prétexte favorable a‘ la comparaison des modes de représentation très neufs de l'espace qui sont à la base de la psychologie et de la mathématique aussi bien que de l’art d'aujourd’hui. Je dois bien préciser encore, avant d'aller plus loin, que, dans le présent travail, j'e’tablirai des analogies entre la topologie, la psychologie de l'enfant et l’art contemporain sans cependant les confondre. Les topologues ont découvert dans une certaine intuition de l’espace, plus simple que celle de la géométrie euclidienne, une voie théorique et pra- tique qui leur permet de résoudre, sous un angle de généralité supérieure, certains problèmes fondamentaux de la géométrie. Piaget a vu le rapport qui existe entre l’intui- tion topologique de l’espace mathématique et les degrés élémentaires de la perception de l'espace chez l'enfant. Je crois apporter, pour ma part, un élément nouveau dans le problème de l’interprétation des langages plastiques en montrant qu’ils supposent tous, à la base, une certaine intuition fondamentale de l’espace, qu'on se gardera d’iden— tifier avec la topologie mais qui illustre, d’un autre point de vue, la même réalité psychologique que celle dont les travaux de Piaget et de Wallon nous ont, de leur côté, montré l’apparition aux tout premiers stades de la vie mentale des hommes. Le présent travail n’ayant qu'un caractère indicatif et ne pouvant faire état d'une analyse très concrète des formes plastiques, je me bornerai à invoquer une connaissance relativement superficielle des œuvres d’art contemporaines et à utiliser comme références le matériel d’enquête psycho- logique que les œuvres de Piaget et de Wallon mettent aisé- ment a‘ la portée de tous 5°. Elles fournissent un immense matériel d'observations et de faits qui suffisent largement 129 LES CADRES IMAGINAIRES DE LA FIGURATION à éclairer les données de la question plus large que je désire élucider. Remettant à une autre occasion la considération des faits plastiques en eux-mêmes ainsi que leur confrontation avec d'autres disciplines —-— ethnographie, psychologie du comportement, techniques de la vie moderne —, ma seule ambition serait de montrer ici comment les problèmes soulevés à propos de la psychologie enfantine se trouvent également à la base de la conception moderne de l’espace plastique, source et justification de la création artistique contemporaine, en même temps que d’une interprétation renouvelée des formes d’art de toutes les époques. Du point de vue qui nous intéresse, l'essentiel des théories de Wallon et de Piaget consiste en ceci : qu’à la conception traditionnelle d'un espace inné ou intuitionniste se substitue la notion d’un espace génétique. Il n’y avait pas, au fond, d’opposition fondamentale entre les artistes de la Renaissance, théoriciens de la repré— sentation classique de l’espace illusionniste, comme Alberti ou Léonard, et Kant théoricien beaucoup plus moderne des catégories de l'entendement, parmi lesquelles figurait l’espace. L’espace apparaissait toujours chez eux comme une donnée sensible de la connaissance. Et un Henri Poin- care’ s'attachait encore à affiner et à éclaircir les conditions de l’intuition spatiale en géométrie plutôt qu'a‘ mettre en cause la nature et la progressivité de cette intuition. On relira de ce point de vue, avec un grand intérêt, le livre de Brunschvicg sur Les Etapes de la philosophie mathématique, parce qu’on y verra comment les hommes mêmes qui ont semé depuis des siècles les germes de la pensée mathéma- tique contemporaine l’ont fait sans prendre une conscience claire de ce qu’ils préparaient. Et fatalement, du reste, car si les principes sur lesquels se fonde la conception actuelle des structures de la pensée aussi bien que celle des élé- ments premiers de la géométrie peuvent se trouver des précurseurs, il n’en est pas moins certain que la conscience nette de l’existence des faits et des liaisons qui sont à la base de la pensée moderne a dû rester enveloppée, sans quoi le progrès décisif aurait été franchi depuis des géné- rations 57. Ce qui est extrêmement frappant c'est de voir comment les progrès se font, à une même époque, parallèlement dans les différentes disciplines. Piaget et Wallon aboutissent à une conception génétique et active des structures de la pensée dans le moment même où les mathématiciens subs- tituent à la conception de l’intuitionnisme euclidien. accep- tée depuis des générations, celle d'un intuitionnisme pri- mitif, « topologique », sur lequel s’édifie secondairement, par une élaboration personnelle et active de l’esprit, la LA RÉALITÉ FIGURATIVE 130 conception euclidienne de l'espace 58. L’une des choses que je voudrais démontrer, c’est que ce double mouvement de la pensée psychologique et mathématique de notre temps s'accompagne d’une évolution identique de la pensée plas— tique les cubistes et leurs successeurs ont posé les bases d’une représentation non euclidienne et justement topo- logique du monde et ils ont, par la‘ même, ouvert nos yeux sur toute une série de représentations plastiques anciennes, méconnues aussi bien pour leur beauté que pour leur valeur significative. Prenant les travaux de Piaget et de Wallon, nous consta- tons ce qui suit. L’enfant n’apporte pas avec lui l’intuition innée d'un espace conforme à la représentation usuelle d’un univers fait pour l’action et conforme aux postulats de la représentation usuelle d'un univers fait pour l’action et conforme aux postulats de la géométrie euclidienne. Il commence avec la vie à explorer le monde extérieur, mais ses conduites sont d’abord dirigées par des hypothèses qui ne coïncident pas avec les constructions pratiques auxquelles il s’arrêtera vers la huitième année et qui demeureront valables pour l’adulte. De là résulte la conception d’un espace dont les coordonnées, contrairement à la thèse clas- sique, varient et, par voie de conséquence, la possibilité d’une distinction entre l’intuitionnisme fondamental de l’espace et la reconnaissance d’une forme fixe de cet espace, conforme aux coordonnées d’Euclide et, dans l'état présent de notre civilisation, à l'expérience usuelle de l'homme. On aboutit moins, en effet, à la négation de l’intuition spatiale qu’à la négation du caractère absolu de l'espace. L’enfant n'a pas à découvrir une réalité en soi, une chose pour ainsi dire concrète, mais à développer des facultés actives de représentation et à construire un univers sur deux plans distincts : perceptif et représentatif. L’essentiel de la doctrine de Piaget consiste, en effet, dans le carac- tère actif de la perception 59. Elle s’oppose, ainsi, à la doc- trine de la Forme, structure préformée dans l'organisme, a priorisme biologique, pour lui substituer celle du Schème problématique. Il ne s'agit plus de saisir un objet autour duquel s’organisent les perceptions; toute conduite ou perception est rattachée à une source pour ainsi dire his— torique, elle dépend des conduites et uploads/Philosophie/ francastel-1948.pdf

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