Être singulier pluriel" DU lVIÊME AUTEUR clJez le même éditeur LE TITRE DE LA L

Être singulier pluriel" DU lVIÊME AUTEUR clJez le même éditeur LE TITRE DE LA LETTRE, avec Philippe Lacoue-Labarthe, 1972. LA REMARQUE SPÉCULATIVE, 1973. LE PARTAGE DES VOIX, 1982. HYPNOSES, avec Mikkel Borch-Jacobsen et Eric Michaud, 1984. L'OUBLI DE LA PHILOSOPHIE, 1986. L'EXPÉRIENCE DE LA LIBERTÉ, 1988. UNE PENSÉE FINIE, 1990. LE SENS DU MONDE, 1993. LES MUSES, 1994. ÊTRE SINGULIER PLURIEL, 1996. Chez d'autres éditeurs LOGODAEDALUS, Flammarion, 1976. L'ABSOLU LITTÉRAIRE, avec Philippe Lacoue-Labarthe, Le Seuil, 1978. EGO SUM, Flammarion, 1979. L'IMPÉRATIF CATÉGORIQUE, Flammarion, 1983. LA COMMUNAUTÉ DÉSŒUVRÉE, Christian Bmu"gois, 1986 et 1990. DES LIEUX DIVINS, TER, 1987. LE MYTHE NAZI, avec Philippe Lacoue-Labarthe, L'Aube, 1991. LA COMPARUTION, avec Jean-Christophe Bailly, Christian Bmu'gois, 1991. LE POIDS D'UNE PENSÉE, Le Griffon d'argile, Québec et Presses Universitaires de Grenoble, 1991. CORPUS, Anne-Marie Métailié, 1992. THE BIRTH TO PRESENCE, Stanford, 1992. NIUM, avec François Martin, Éditions Erba, 1994. A. Etre singulier Galilée © Éditions Galilée, 1996. 9, rue Linné, 75005 Paris. En application de la loi du 11 mars 1957, il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement le présent ouvrage sans autorisation de l'éditeur ou du Centre français d'exploitation du droit de copie (CFC), 3, rue Hautefeuille, 75006 Paris. ISBN 2-7186-0470-0 ISSN 0768-2395 {( Ramenez, comme moi, la vertu égarée sur la terre oui, ramenez-la vers le corps et vers la vie; afin qu'elle donne un sens à la terre, un sens humain! L..J Que votre esprit et votre vertu servent le sens de la terre, mes frères L..l L'homme et la terre des hommes n'ont pas encore été découverts L . .J » NIETZSCHE * Ainsi parlait Zarathoustra, Première partie, "De la vertu qui donne ", 2, traduction Henri Albert, révisée par Jean Lacoste, Œuures, Il, Paris, Robert Laf- font, 1993, p. 342. Cette épigraphe est choisie en toute conscienceo Je prends le risque de lui voir prêter cet accent chrétien, idéaliste et humaniste, à quoi on reconnaît sans peine les bien-pensants dont les vertus et les valeurs, aveugles et complices à la fois, ont laissé se déchaîner, tout ce qui aura conduit l'humanité de notre siècle à désespérer d'elle-même. Et sans doute, Nietzsche lui-même aura parti- cipé, à sa façon, de cette douteuse piété moralisante. Cependant, le mot de " sens" est bien rare chez lui, et plus rare encore son usage positif: on fera donc bien de ne pas en précipiter ici l'interprétation. Ce texte en appelle à " un sens humain", mais c'est en affirmant que l'homme reste à découvrir. Pour que l'homme soit découvert, et pour que "sens humain" prenne un sens, il faut d'abord que soit défait tout ce qui prétendait à la vérité sur la nature, sur l'es- sence ou sur la destination de " l'homme ". Autrement dit, il faut qu'il n'y ait plus rien de ce qui, au titre du sens, rapportait la terre et l'homme à un horizon désignable. Nous sommes désormais, c'est encore Nietzsche qui l'avait dit, "sur l'horizon de l'infini", c'est-à-dire là où " il n'y a plus de ., terre" " - et " il n'y a rien de plus terrible que l'infini l . " Allons-nous enfin entendre cette leçon, sommes-nous peut-être enfin devenus capables de l'entendre - ou bien, nous est-il désormais impossible d'entendre autre chose qu'elle? Et pouvons-nous penser une terre et un homme qui soient ce qu'ils sont, c'est-à-dire rien que terre et homme, mais qui ne soient donc aucun des horizons cachés sous ces noms, aucune des "perspectives" ou des " vues" en vue desquelles nous avons désespéré et défiguré les hommes? " L'horizon de l'infini ", c'est: plus d'horizon du tout, mais le "tout" (tout ce qui est) partout reporté, repoussé au dehors comme au dedans de " soi "0 Plus de ligne tracée ni à tracer pour orienter et pour recueillir le sens d'une marche ou d'une navigation. C'est la brèche ou l'écartement de l'horizon lui-même, et sur la brèche, nous. Nous comme la brèche elle-même, tracé hasardeux d'une rupture 0 Je veux souligner la date à laquelle j'écris ceci : en cet été 1995, rien ne s'im- pose plus (à vrai dire, comment l'éviter ?), pour désigner la terre et les hommes, qu'une énumération sans ordre de noms propres tels que ceux-ci: Bosnie-Her- zégovine, Herzeg-Bosna, Tchétchénie, Rwanda, Serbes de Bosnie, Tutsis, Hutus, Tigres de libération de l'Eelam Tamoul, Serbes de Krajina, Casamance, Chiapas, Jihad islamique, Bengladesh, Armée secrète pour la libération de l'Arménie, Hamas, Kazakhstan, Khmers rouges, ETA militaire, Kurdes (UPK!PDK), Monta- 1. Le Gai Sauo/r, III, 124, traduction Henri Albert, ibid po 131. 11 Être singulier pluriel taire, IVlouvement pour l'autodétermination, Somalie, Chicanos, Chiites, FNLC- Canal historique, Liberia, Givat Hadagan, Nigeria, Ligue du Nord, Afghanistan, Indonésie, Sikhs, Haiti, Roms de Slovaquie, Taïwan, Birmanie, OLP, Irak, Front Islamique du Salut, Sentier lumineux, Vaulx-en-Velins, Neuhof" On sait que l'énumération aurait du mal à s'achever, si l'on voulait recenser les lieux, les groupes, les instances qui sont le théâtre et l'enjeu de conflits sanglants entre des identités dont on ne peut plus dire à tout coup et avec assurance si elles sont intranationales, infranationales ou transnationales, si elles sont" culturelles ", " religieuses ", " ethniques ", " historiques ", si elles sont légitimes ou non, et selon quel droit, si elles sont réelles, mythiques ou fantasmatiques, si elles sont auto- nomes ou si elles sont" instrumentalisées " par de tout autres groupes de puis- sance politique, économique et idéologique ... Telle est aujourd'hui la " terre" que nous sommes censés" habiter ", et dont le nom de Sarajevo sera devenu le nom-martyre, c'est-à-dire le nom-témoin: tels sommes-nous, nous qui sommes censés dire nous comme si nous savions ce que nous disons et de qui nous parlons. Cette terre, c'est tout, sauf un partage d'humanité. C'est un monde qui n'arrive pas à faire monde, un monde en mal de monde et de sens du monde. C'est une énumération - et de fait, seul fait ici surface le nombre, la prolifération de ces pôles d'attraction et de répulsion. C'est une liste interminable - et de fait, tout se passe comme si l'on était réduit à la dresser, dans une comptabilité qui ne comporte aucun bilan. C'est une litanie - c'est-à-dire une prière, n:lais de pure douleur et de pur égarement, cette plainte qui sort tous les jours de la bouche de millions de réfugiés, de déportés, d'as- siégés, de mutilés, d'affamés, de violés, de retranchés, d'exclus, d'exilés et d'expulsés. Je parle de compassion: mais ce n'est pas une pitié qui s'attendrit sur elle- même et se nourrit de soi. Com-passion : c'est la contagion, le contact d'être les uns avec les autres dans ce tumulte; Ni altruisme, ni identification: l'ébranlement de la contiguïté brutale. Que nous veut cette prolifération, qui n'a d'autre sens visible que la multipli- cation indéfinie des sens centripètes, des sens fermés sur eux-mêmes et sursa- turés de signification - des sens qui n'ont plus de sens dès lors, du moins, qu'ils ne renvoient plus à rien d'autre qu'à leur propre clôture, à leur horizon d'ap- propriation, et ne propagent au dehors que la destruction, la haine et le déni d'existence ? Si elle voulait nous annoncer, cette multiplicité autistique, déchirante et déchi- rée, que nous n'avons pas commencé à découvrir ce qu'il en est de l'être-à- plusieurs, alors même que" la terre des hommes" n'est rien d'autre que cela? Si elle voulait donc nous annoncer qu'elle est elle-même la première mise à nu d'un monde qui n'est que le monde, mais qui l'est absolument et sans réserve, n'ayant aucun sens hors de cet être même: singulièrement pluriel et plurielle- ment singulier? Avertissement Le pren1ier et principal essai de ce livre, et qui lui donne son titre, n'est pas composé de n1anière entièrement suivie, n1ais plu- tôt discontinue et par reprises successives de quelques thèrnes. On peut, dans une certaine mesure, lire ses paragraphes sans ordre. On y trouvera parfois de la répétition. Cette disposition est l'effet d'une difficulté fondalnentale. Ce texte ne dissiInule pas l'ambition de refaire toute la " philosophie première» en lui don- nant pour fondation le " singulier pluriel» de l'être. Ce n'est pas une alnbition de l'auteur, c'est la nécessité de la chose n1ên1e, et de notre histoire. J'espère, au moins, faire sentir cette nécessité. Mais en même telnps, outre la force qui me manquerait pour exécuter le traité" de l'essence singulière plurielle de l'être», la forme du traité d'ontologie n'est plus ce qui convient lorsque le singulier de l'être même, et donc celui de sa science, sont en question. Cela Inême n'est pas neuf. Depuis Nietzsche, au moins, et pour toutes sortes d'autres raisons qui se rejoignent sans doute dans celle que j'invoque, la philosophie est en Inal de sa « forme », c'est-à-dire de son "style», c'est-à-dire enfin de son adresse. Con1n1ent la pensée s'adresse-t-elle à la pensée (ce qui veut dire aussi, à tout le Inonde, sans qu'il s'agisse pour autant de la " con1préhension », de l'" entendeinent » qu'on dirait « comlIlUn ») ? Con1ment la pensée est-elle dans l'adresse? (Le traité uploads/Philosophie/ jean-luc-nancy-etre-singulier-pluriel-galilee-1996.pdf

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