ANNALES DE L’I. H. P. BRUNO DE FINETTI La prévision : ses lois logiques, ses so
ANNALES DE L’I. H. P. BRUNO DE FINETTI La prévision : ses lois logiques, ses sources subjectives Annales de l’I. H. P., tome 7, no 1 (1937), p. 1-68. <http://www.numdam.org/item?id=AIHP_1937__7_1_1_0> © Gauthier-Villars, 1937, tous droits réservés. L’accès aux archives de la revue « Annales de l’I. H. P. », implique l’ac- cord avec les conditions générales d’utilisation (http://www.numdam.org/legal. php). Toute utilisation commerciale ou impression systématique est consti- tutive d’une infraction pénale. Toute copie ou impression de ce fichier doit contenir la présente mention de copyright. Article numérisé dans le cadre du programme Numérisation de documents anciens mathématiques http://www.numdam.org/ La prévision : ses lois logiques, ses sources subjectives par Bruno de FINETTI. AVANT-PROPOS. Dans les conférences que j’ai eu l’honneur de faire à l’Institut Henri Poincaré les 2, 3, 8, g et 10 mai 1 g3 ~, et dont les pages qui suivent reproduisent le texte, je me suis proposé de donner une vue d’ensemble sur deux sujets dont je me suis particulièrement occupé, et d’éclaircir la liaison étroite qui les unit. Il s’agit, d’une part, de la définition de la probabilité (que je considère comme une entité purement subjective) et de la signification de ses lois, et, d’autre part, des notions et de la théorie des événements et nombres aléatoires « équivalents » ; le lien entre les deux questions réside en ce que cette dernière théorie constitue la solution, pour le cas le plus typique, du problème du raisonnement inductif selon la conception subjective de la probabilité (et éclaircit ainsi, en général, la façon dont le problème de l’induction est posé). D’ailleurs, même s’il n’en était pas ainsi, autrement dit même si l’on n’acceptait pas le point de vue subjectif que nous avons adopté dans la première partie. la seconde n’en conserverait pas moins sa validité et constituerait un chapitre intéressant du calcul des probabilités. L’exposé est divisé en six chapitres, dont les deux premiers ont pour objet la première question, les deux suivants la seconde, et les deux derniers l’examen des conclusions qu’on peut en tirer. La plupart des questions traitées ont été développées, tantôt en détail, tantôt succincteriient, mais toujours d’une façon fragmentaire (~ ), dans mes ( 1 ) Un exposé plus complet de mon point de vue, sous forme d’essai purement critique et philosophique, sans formules, constitue l’ouvrage î 321. 2 , ~ . . ’ travaux antérieurs; parmi eux, ceux qui ont trait aux questions étudiées ou effleurées dans ces conférences se trouvent indiqués dans la liste bibliographique ( ~ ). ’ Pour de plus amples détails concernant la matière de chacun des . chapitres, je renvoie aux publications suivantes : :. Chapitre I. - La logique dr~ probable : [26], ~3~~. Chapitre II. - L’évaluation d’une probabilité : [49], [65], [70]. Chapitre III. - Evénements équivalents : [29], [40]. Chapitre IV. - Nombres aléatoires équivalents: [46], [47], [48]. Chap. V. - Considérations sur la notion d’équivalence: [51], [62]. Chapitre VI. - Observation et prévision: [32], [56], [62]. Chacun de ces chapitres constitue une des cinq conférences (2), à l’exception des Chapitres IV et V qui correspondent à la quatrième, et dont le texte a été amplifié pour mieux éclaircir la notion utilisée d’intégration dans l’espace fonctionnel. Le texte des autres conférences n’a pas subi de modifications essentielles, à part plusieurs améliorations, entre autres au début du Chapitre III, où, pour plus de clarté, l’exposition a été complètement remaniée. Pour ces retouches j’ai profité des précieux conseils de MM. Fréchet et Darmois, qui ont bien voulu assister à ces conférences, et de M. Castelnuovo, qui a lu plusieurs fois le manuscrit et les modifications successives; la rédaction du texte a été revue par mon collègue M. V. Carmona et par M. Al. Proca, qui m’ont suggéré un certain nombre d.’heureuscs variantes de forme. Pour leur aimable aide j’ai le devoir de leur exprimer ici ma sincère reconnaissance. Enfin, je ne veux pas terminer ces lignes sans renouveler mes remerciements à M. le Directeur et aux membres du Comité de Direction de l’Institut Henri Poincaré pour le grand honneur qu’ils m’ont fait en m’invitant à donner ces conférences à Paris. Trieste, le 19 décembre iQ36, XV. (1 ) Voir page 66; les nombres en chiffres gras renvoient toujours à cette liste ( chiffres romains pour les mémoires d’autres Auteurs; chiffres arabes pour ceux de l’auteur, rangés par ordre chronologique général ). (2) Leurs titres étaient ceux des six chapitres, à l’exclusion du Chapitre V. 3 INTRODUCTION. Henri Poincaré, le savant Immortel auquel cet Institut est dédié, et qui a vivifié avec ses idées géniales tant de branches des mathématiques, est sans doute aussi le penseur qui a attribué à la théorie des probabi- lités le domaine d’application le plus vaste et un rôle tout à fait essentiel dans la philosophie scientifique. « Les faits prévus, dit-il, ne peuvent , être que probables. Si solidement assise que puisse nous paraître une prévision, nous ne sommes jamais absolument sûrs que l’expé- rience ne la démentira pas ». Le calcul des probabilités repose sur « un instinct obscur, dont nous ne pouvons nous passer; sans lui la Science serait impossible, sans lui nous ne pourrions ni découvrir une loi, ni l’appliquer ». « A ce compte, toutes les sciences ne seraient que des applications inconscientes du calcul des probabilités; con- damner ce calcul, ce serait condamner la Science tout entière » ( ~ ). Ainsi, les questions de principe relatives à la signification et à la valeur de la probabilité, cessent d’être isolées dans une branche , particulière des mathématiques, et acquièrent l’importance de pro- blèmes fondamentaux du point de vue gnoséologique. De pareilles questions admettent évidemment autant de réponses différentes qu’il y a d’attitudes philosophiques possibles; en donner une, ne signifie pas dire quelque chose qui puisse convaincre et satisfaire tout le monde, mais la connaissance d’un point de vue donné peut néanmoins être intéressante et utile même à ceux qui ne sauraient le partager. Le point de vue que j’ai l’honneur d’exposer ici peut être considéré comme la solution extrême du côté.du subjectivisme ; le lien unissant les diverses recherches que je me propose de résumer est constitué en effet par le principal but commun qu’elles poursuivent, à côté d’autres objectifs plus immédiats et plus concrets; ce but est celui de ramener dans le cadre de la conception subjective et d’expliquer même les questions qui semblent la démentir, et qui sont couramment invoquées contre elle. La première conférence aura pour objet de montrer (1) [XXVIII], p. 213) 216, 2I,. 4 comment les lois logiques de la théorie des probabilités peuvent être rigoureusement établies en se plaçant au point de vue subjectif; dans les autres on verra comment, tout en refusant d’admettre l’existence d’une signification et d’une valeur objective, on peut se rendre compte des raisons, elles-mêmes subjectives, pour lesquelles dans une foule de problèmes les jugements subjectifs de divers individus normaux ne diflèrent pas essentiellement les uns des autres, ou même coincident exactement. Les cas les plus simples feront l’objet de la deuxième con- férence ; les conférences suivantes seront consacrées à la question la plus délicate de cette étude, savoir à l’explication subjective de l’usage que nous faisons dans nos prévisions futures des résultats de l’observa- tion, de l’expérience du passé. Ce point de vue n’est qu’un des points de vue possibles, mais je ne serais pas tout à fait sincère si je n’ajoutais qu’il est le seul qui ne soit pas en conflit avec les exigences logiques de mon esprit. Si je ne veux pas en conclure qu’il est « juste )). c’est que je sais bien que, aussi paradoxal que cela puisse paraître, rien n’est plus subjectif et personnel que cet « instinct de ce qui est logique » chez les divers . mathématiciens, lorsqu’il s’agit de l’appliquer à des questions de principe. ’ CHAPITRE I. LA LOGIQUE DU PROBABLE. Considérons la notion de probabilité telle quelle est conçue par nous tous dans la vie quotidienne. Considérons un événement bien déterminé, et supposons que nous ne sachions pas à l’avance s’il se produira ou non ; le doute dans lequel nous sommes au sujet de son apparition est suscep- tible d’une comparaison, et, par conséquent, d’une graduation. Si l’on admet uniquement : i 10 qu’un événement incertain ne peut nous paraître que : (a) aussi probable, (b) plus probable et (c) moins probable qu’un autre; 20 qu’un événement incertain nous semble toujours plus probable qu’un événement impossible et moins probable qu’un événement certain ; et qu’enfin, 3° un événement E’ ne peut qu’apparaître plus probable qu’un autre E’!, lorsqu’on juge E’ plus probable qu’un troisième E estimé .lui-lnême plus probable que E" (propriété transitive), il suffira 5 d’ajouter à ces trois axiomes évidemment banals, un quatrième, lui-même de nature purement qualitative, pour pouvoir construire rigoureu- sement toute la théorie des probabilités. Ce quatrième axiome nous dit que les inégalités se conservent dans la somme logique : si E est un événement incompatible avec E1 et avec E~, alors sera plus ou moins, ou uploads/Philosophie/ la-prevision-ses-lois-logiques-ses-sources-subjectives-bruno-de-finetti.pdf
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- Publié le Sep 11, 2022
- Catégorie Philosophy / Philo...
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