La Lettre de la Cade n° 146-147 – Novembre/Décembre 2011 page 1 Coordination po

La Lettre de la Cade n° 146-147 – Novembre/Décembre 2011 page 1 Coordination pour l’Afrique de Demain Débats d’octobre et novembre 2011 : « Savoir et savoir-faire africains : dimensions spiri- tuelles, créativités et technologie moderne » et « La rentabilité des investissements en Afrique » Mensuel d’information - novembre-décem bre 2011 - n° 146-147 (numéro double) La Lettre de la CADE enda europe Éditorial DURBAN : un espoir pour 2015 L a 17e conférence de la Convention – Cadre des Nations unies sur les changements clima- tiques s'est terminée, après 15 jours d'assise et 48 heures de prolongation pour arriver à un consen- sus improbable, par un accord à minima. Aux cris d'alarme poussés tant par les ONG très présentes pour faire pression sur les négociateurs et la caravane tran- safricaine de l'espoir partie du Burundi que par les organisations internationales au premier rang des- quels l'Agence Internationale de l 'Energie (AIE) et le Programme des Nations-Unies pour l'Environnement (PNUE), les 193 pays représentés à Durban ont ré- pondu en différant une nouvelle fois leurs engage- ments contraignants de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Après le Sommet de Copenhague en 2009 très déce- vant et celui de Cancun où des espoirs à concrétiser s'étaient levés, la rencontre de Durban n'a pas répon- du aux attentes des pays les plus exigeants. Quels étaient les enjeux pour les différentes parties pre- nantes ? Pour les pays européens, une poursuite des engage- ments contraignants au titre de l'accord de Kyoto au- delà de son terme en 2012, moyennant un engage- ment global et contraignant pour les autres parties qui s'étaient tenues à l'écart des contraintes de Kyoto. Pour les autres pays industrialisés – Etats-Unis, Cana- da, Russie, Japon, Australie – se refuser à souscrire aux engagements de Kyoto tant que les pays émer- gents gros émetteurs de gaz à effet de serre s'en dis- pensent. Pour les pays émergents, il n'était pas question de rejoindre les pays industrialisés responsables dans leur ensemble, à leurs yeux, de l'état critique de la planète. Enfin les pays en développement, les plus nombreux, étaient partisans de reconduire pour 8 ans l'accord de Kyoto, de la mise en œuvre d'un Fonds Vert de 100 milliards $/an à partir de 2020 pour financer une poli- tique de transition énergétique et d'adaptation de leur économie. La négociation, très âpre, s'est déroulée sur fond de crise économique mondiale, vue par les uns comme une chance de changer de modèle économique (l'économie verte), par les autres comme un frein à toute évolution en l'absence d'un accord global et contraignant sur une politique mondiale de réduction des émissions de gaz à effet de serre. L'attachement des Européens et des représentants des pays en déve- loppement à l'égard d'une poursuite de l'accord de Kyoto s'explique par le besoin de préserver ses acquis en matière de comptabilisation des émissions, de va- lorisation des efforts de leur réduction et de recours aux mécanismes de marché pour atteindre les objec- tifs fixés. Les pays africains qui se sont exprimés d'une seule voix y voyaient également une opportuni- té liée au Mécanisme de Développement Propre (MDP) qui incite les pays industrialisés à développer chez eux des installations sobres en carbone. Au final, les pays se sont quittés sur un constat d'incapacité à s'engager dès maintenant (en dehors de (Suite page 20) La Lettre de la Cade n° 146-147 – Novembre/Décembre 2011 page 2 Cycle II : « La production du savoir et du savoir-faire » Compte-rendu de la rencontre-débat du 22 novembre 2011 La problématique évoquée par ce cycle est vaste ; elle touche tous les acteurs de la société, de ceux qui relèvent du système coutumier aux professeurs et chercheurs. Il rend hommage à Emile Hatcheu, univer- sitaire camerounais, grâce auquel a pu être organisé ce cycle. Cet ensei- gnant-chercheur se pose la question du développement des structures de savoir, de savoir-faire, de formation, d’enseignement en Afrique. Il a be- soin de soutiens et c’est à l’occasion d’une concertation avec lui que l’idée de ce cycle est née. R. Portel- la rapporte quelques anecdotes pour illustrer le sujet. Il discutait il y a quelques temps au Cameroun avec des jeunes chez un ami qui tient un maquis (ndlr : restaurant local sou- vent en plein air). L’un d’eux ayant cité le nom de Cheick Modibo Diar- ra, ce savant malien travaillant à la Nasa, a demandé si nous, jeunes Africains, auront la chance d’avoir le même parcours que lui ? Un ser- veur est intervenu pour dire que certes, ce Cheick Modibo Diarra est quelqu’un de compétent, mais c’est surtout quel- qu’un qui a de la sagesse et du sa- voir ancestral, ajoutant « je ne peux rien vous expliquer car vous n’avez pas encore acquis le mini- mum de sagesse requis ». Autre anecdote : Il a rencontré à Libreville des experts de la diaspora africaine dans le cadre d’une mis- sion de bailleurs de fonds sur le dé- veloppement durable. Un chef cou- tumier est intervenu pour dire « qu’il est aberrant, que vous, Afri- cains, veniez faire du transfert de savoirs sans vous demander com- ment, nous, nous avons pu préserver notre patrimoine, nos forêts, malgré nos problèmes. On a certaine- ment des techniques. Venez d’abord voir ce que nous ap- portons et confrontons-le avec ce que vous pouvez ap- porter avec vos technologies modernes. Mais ne faites pas l’inverse ». R. Portella cite l’ouvrage « L’Afrique au secours de l’Occident » de Anne-Cécile Robert qui met en valeur les connaissances africaines sus- ceptibles de servir le monde. En 2009, Sanou MBaye a apporté une réponse dans son ouvrage « L’Afrique au secours de l’Afrique » dans lequel il développe la thèse que l’Afrique doit dévelop- per elle-même ses savoirs endo- gènes, puiser dans son patrimoine et le mixer avec les technologies mo- dernes pour se développer. R. Por- tella termine son introduction en interrogeant les intervenants sur ce qu’on entend par patrimoine imma- tériel, savoir, connaissance. L e président de la CADE, Jean-Loïc Baudet, présente cette rencontre, la première d’un nouveau cycle sur « La production du savoir et du savoir-faire en Afrique ». C’est un sujet important tout parti- culièrement en cette période de crise, qui a d’abord été financière et qui est devenue éco- nomique et de civilisation, et qui ne touche pas seulement l’Europe. Elle pose des pro- blèmes de fond quant à l’orientation de nos sociétés, non seulement au plan économique mais également social, culturel, et nous inter- pelle tous. Au cœur du développement, il y a la production du savoir et du savoir-faire et, à travers ce nouveau cycle, nous nous interrogerons sur leur spécificité en Afrique, sur leur ouverture au monde et sur leur apport aux sociétés africaines. Ce thème, dont on n’aborde aujourd’hui que les prémices, sera développé sur deux ans. Il remercie Roland Portella, vice-président de la CADE, d’avoir accepté d’animer ce débat. Intervenants : Lucie Emgba, enseignante en histoire culturelle et mar- ché de l’art à l’Ecole d’Art et de Communication de Paris. Modeste Chouaïbou Nji Mfenjou, avocat à la Cour, écrivain, essayiste, auteur de « L’Afrique à l’époque du développement durable ».◘ Introduction de Roland Portella Roland Portella © CADE 1. « Savoir et savoir-faire africains : dimensions spirituelles, créativités et technologie moderne » De gauche à droite : Lucie Emgba, Rolland Portella et Modeste Chouaïbou Nji Mfenjou. © CADE La Lettre de la Cade n° 146-147 – Novembre/Décembre 2011 page 3 Pour Lucie Emgba, la question es- sentielle est de savoir comment pas- ser du singulier à l’universel. Com- ment faire en sorte que les savoirs endogènes deviennent quelque chose de commun, non seulement à l’Afrique, mais au monde ? Quant aux systèmes de pensée et de con- naissance, il est vrai qu’il y a un clivage de fait puisque les systèmes de pensée endogènes ont souvent été étudiés comme quelque chose de spécifique ; on a parlé de la « pensée sauvage », de la « pensée primitive » pendant longtemps. Or le système de connaissance est ap- pelé à devenir du partageable, con- duisant peut-être à l’uniformité alors que les systèmes de pensée peuvent être particuliers. On aborde ici le fameux relativisme anthropologique de la seconde moitié du XXe siècle. Pour Modeste Chouaïbou Nji Mfenjou, la question est de savoir s’il y a des savoirs et des savoir- faire en Afrique. On est dans un monde qui affirme haut et fort que l’Afrique est en marge, qu’elle ne contribuerait pas assez ou qu’elle ne bénéficierait pas assez parce qu’elle -même ne produirait pas assez, at- tendant que les autres le fassent pour elle et que, de plus, elle ne bé- néficierait pas d’un système de pen- sée endogène. Pour M. C. Nji Mfen- jou, ce système de pensée est bien présent mais n’est pas valorisé ce qui empêche l’Afrique de profiter de son savoir et de son savoir-faire. Pour faire transition avec le premier exposé, Roland Portella relate qu’une artiste africaine était relé- guée, dans uploads/Philosophie/ lettre-cade-146-147.pdf

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