LOGIQUE ET ONTOLOGIE Table des Matières A. Séminaire interuniversitaire de rech
LOGIQUE ET ONTOLOGIE Table des Matières A. Séminaire interuniversitaire de recherche B. Thématique D'aucuns, au XXème siècle, ont pensé que le formidable déploiement des outils d'analyse de la logique symbolique sonnait le glas de la métaphysique. En exigeant de tout discours qu'il réponde à des règles de formulation très précises qui permettent non seulement de distinguer nettement les expressions logiques bien formées des expressions grammaticalement incorrectes et dénuées de sens, mais aussi d'identifier clairement les conditions de vérité de chaque énoncé, le positivisme logique a porté à la métaphysiques traditionnelle et, singulièrement à sa partie la plus abstraite qui traite de la question de l'être, un coup si rude que certains le crurent fatal. Force est cependant de constater aujourd'hui que la logique n'a pas mis fin à l'interrogation ontologique et que, au contraire, elle lui a fourni tout à la fois de nouveaux outils et de nouveaux enjeux. 1. Présupposés métaphysiques de la logique contemporaine Il faut dire tout d'abord que la logique symbolique issue des travaux fondateurs de Frege et Russell n'était pas elle-même dénuée de tout présupposé métaphysique. Bien au contraire, tant sa grammaire que son axiomatique étaient sous-tendues par des options ontologiques plus ou moins explicitement revendiquées. Ainsi, toute l'analyse logique de la prédication en termes de fonctions propositionnelles et de leurs arguments impliquait une distinction tranchée des objets réduits à de simples référents dénués de sens, et des concepts caractérisés par leurs traits définitoires. Dépourvus de référence propre, les concepts - propriétés ou relations - sont seulement dotés d'une extension en raison de leur rôle de principes classificatoires des objets du monde. Cette analyse, on le sait, réside au fondement tout à la fois d'une réinterprétation complète de la question même de l'existence, d'un nouvel affûtage du rasoir d'Occam et d'un critère d'identification des présupposés ontologiques d'une théorie. Avec Frege et Russell, en effet, la question de l'existence se dédouble, puisqu'elle peut revêtir soit la forme extrathéorique d'une interrogation sur l'« ameublement du monde », c'est-à- dire sur ce qui doit être considéré comme objet simple pouvant servir d'argument aux fonctions propositionnelles des théories sur le monde, soit la forme intrathéorique d'une interrogation sur la satisfaction des fonctions propositionnelles par les objets du monde, c'est-à-dire sur le caractère vide ou non de l'extension de tel ou tel concept théorique. La question « Leo Sachse existe-t-il ? » n'est pas du tout de la même nature que la question « Les martiens existent-ils ? ». Si les noms propres désignent directement des objets du monde et comportent donc d'emblée un présupposé de référence, les termes conceptuels n'impliquent quant à eux aucune reconnaissance implicite de l'existence d'objets du monde ; un concept, en effet, peut être parfaitement sensé sans pour autant être satisfait par quelque objet que ce soit. Une telle analyse logique, on le voit, fournit aux disciples d'Occam un rasoir particulièrement tranchant : chaque fois qu'une expression du langage a un sens et des traits définitoires, on peut la délier de tout engagement ontologique en remplaçant la question de sa référence - quel objet cette expression désigne-t-elle ? - par la question de sonextension - par quels objets (désignés par ailleurs par des noms propres) cette expression est-elle éventuellement satisfaite ? Et, à cet égard, en dépit des prétentions explicites de la plupart des philosophes analytiques à la neutralité métaphysique de leur entreprise, les travaux de Russell, de Carnap ou de Quine pour montrer le caractère conceptuel d'expressions qui ne sont référentielles (ou « dénotantes ») qu'en apparence ont assurément une portée nettement nominaliste. Certes, ce n'est pas à la logique - mais éventuellement à la théorie de la connaissance, qui peut distinguer les authentiques objets connus par fréquentation directe et les pseudo-objets qui ne sont identifiés que par description conceptuelle -, qu'il revient de dire quel est l'ameublement ultime du monde. Mais il est clair que l'analyse logique frégéo-russellienne fournit un outil très performant pour déterminer ce qui, dans tel ou tel discours, joue le rôle d'une fonction propositionnelle et est donc dénué de tout engagement ontologique, et ce qui y joue le rôle d'unargument de ces fonctions et comporte donc un présupposé de référence. Le célèbre critère ontologique de Quine repose, on le sait, entièrement sur cette analyse. Explicitement mis au point pour guider la chasse aux entités superflues qui peuplent la « barbe de Platon », ce critère allait d'ailleurs, on le sait, permettre à Quine de dénoncer l'arrière-fond platonicien de l'objectivisme sémantique qui avait sous-tendu le combat antipsychologiste de Frege et Russell. En définitive, c'est donc bien à une redéfinition majeure de l'ontologie qu'a mené l'analyse logique frégéo-russellienne, redéfinition qui s'inscrit dans la direction exactement opposée à celle prise à la même époque par les luxuriantes théories de l'objet issues de l'analyse logique brentanienne qui assimilait toute prédication à un jugement d'existence. Mais, en plus de cette redéfinition de l'ontologie, ce sont aussi quelques parti-pris ontologiques lourds de conséquence qu'ont cru bon d'imposer les fondateurs de la logique symbolique contemporaine en raison du projet logiciste que celle-ci devait initialement servir. Pour prendre deux exemples célèbres, on rappellera premièrement la stratification de l'ensemble des objets du monde en types hétérogènes et l'adoption d'axiomes extra logiques controversés. La stratification, que rendait nécessaire le souci d'éviter les paradoxes logiques dans le système frégéen, pose évidemment question et elle a été jugée suffisamment suspecte pour que d'aucuns développent des systèmes logiques alternatifs qui permettraient de se passer. Quant à l'axiome multiplicatif et à l'axiome de l'infini, qui sont nécessaires à mettre en œuvre une théorie des classes susceptible de fonder l'ensemble des mathématiques, ils introduisent dans le système logique des affirmations d'existence qui sont extrinsèques à la simple généralisation existentielle, laquelle permet d'affirmer qu'il y a des (objets qui sont) F dès qu'on a identifié au moins un individu singulier a qui est F. La logique comme outil d'investigation métaphysique Que, dans la mesure où elle formule les lois de la rationalité, la logique ne soit pas elle-même dénuée de toute prise de position ontologique, c'est, en définitive, ce qui ressort des travaux mêmes qui ont par ailleurs insufflé l'espoir d'une philosophie rigoureuse qui se détournerait de la métaphysique pour se consacrer entièrement à l'élucidation du discours scientifique. En fait, comme l'avaient déjà vu les Grecs sous l'idée de Logos, les structures et principes de l'être qui se laisse dire dans le discours rationnel ne sont pas totalement indépendants des structures et des principes de la rationalité du discours qui permet de le dire. Et c'est pourquoi aujourd'hui doivent être envisagés à nouveaux frais les rapports de la logique symbolique et de l'ontologie voire de la métaphysique tout entière. Autrefois banni par la philosophie analytique, le terme même de « métaphysique » a d'ailleurs été récemment réinvesti et même fièrement revendiqué au sein même de cette tradition. Sous l'impulsion de l'école de Manchester ou de l'école australienne, des philosophes font aujourd'hui de la logique l'instrument privilégié de l'investigation métaphysique. A cet égard, il faut sans doute distinguer deux versants de ces nouvelles interactions, ouvertement revendiquées, entre logique et « métaphysique », et plus particulièrement entre logique et ontologie formelle. D'un côté, en effet, la pensée métaphysique prend la logique pour outil et elle cherche, dans les différents développements formels - standard et non standard - de la logique, les lois fondamentales et les principes d'inférence susceptibles de guider ses raisonnements. La logique se met alors au service de la métaphysique et lui fournit les formalismes indispensables à structurer sa pensée et son discours. De l'autre côté, cependant, en vertu de leurs contraintes de rationalité propres, les systèmes logiques imposent de tirer des conséquences inattendues des thèses métaphysiques initiales, mais aussi et surtout de repenser entièrement certains problèmes métaphysiques dont le dispositif logique fait ressortir des aspects formels qui étaient jusqu'alors passés inaperçus. Prolongement de la rationalité philosophique, la logique devient alors elle-même investigation métaphysique. Le développement des logiques modales illustre bien ces deux versants des rapports entre logique et métaphysique. D'abord mis au point comme outils pour formaliser les notions de nécessité et de possibilité ainsi que de dépendancenécessaire, les systèmes de logique modale ont rapidement fait, pour eux- mêmes, l'objet d'investigations formelles et de développements techniques, lesquels n'ont pas manqué de rejaillir en retour sur la compréhension de certaines notions métaphysiques, comme celles d'individu ou de monde possible. Ainsi, dès les premières tentatives d'extension de la logique modale des propositions aux prédicats et à la quantification, sont apparus d'importants problèmes métaphysiques comme celui de l'identification d'un individu à travers les mondes possibles. Dans une perspective essentialiste, on pourrait se fonder sur la différence entre les propriétés accidentelles de l'individu, qui peuvent varier de monde à monde, et ses propriétés essentielles, qui le définissent et sont indispensables à l'identifier à travers les mondes. Mais cela obligeait alors à remettre sérieusement en question le paradigme analytique selon lequel des objets au sens propre ne peuvent être caractérisés par des traits définitoires. Telle est d'ailleurs l'objection que Quine adressera à la logique modale quantifiée de Barcan Marcus uploads/Philosophie/ logique-et-ontologie 1 .pdf
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- Publié le Apv 22, 2021
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