Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l'Univ

Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l'Université de Montréal, l'Université Laval et l'Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. Érudit offre des services d'édition numérique de documents scientifiques depuis 1998. Pour communiquer avec les responsables d'Érudit : info@erudit.org Article « La compétence de contextualisation au coeur de la situation d’enseignement-apprentissage » Laetitia Sauvage Luntadi et Frédéric Tupin Phronesis, vol. 1, n° 1, 2012, p. 102-117. Pour citer cet article, utiliser l'information suivante : URI: http://id.erudit.org/iderudit/1006488ar Note : les règles d'écriture des références bibliographiques peuvent varier selon les différents domaines du savoir. Ce document est protégé par la loi sur le droit d'auteur. L'utilisation des services d'Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d'utilisation que vous pouvez consulter à l'URI https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Document téléchargé le 20 mai 2016 01:47 | 102 La compétence de contextualisation au coeur de la situation d’enseignement-apprentissage Laetitia Sauvage Luntadi & Frédéric Tupin Université de La Réunion, CREN & LCF UMR8143 CNRS, 15, Avenue Rene Cassin, BP 7151,97715 Saint Denis Messag,Cedex 9 Saint Denis 97715, Réunion laetitia.sauvage@univ-reunion.fr frederic.tupin @wanadoo.fr Mots-clés : situation professionnelle, enseignement-apprentissage, contextualisation, théorie de la structuration, compétences, contextes Résumé. La notion de « situation professionnelle », telle que nous proposons de la visiter, suppose de questionner, dans un même mouvement, la place des contextes et le rôle des acteurs au sein des situations d’enseignement-apprentissage. Il s’agit pour nous d’interroger la contextualisation de la démarche d’enseignement engagée au regard des publics accueillis et des conditions d’exercice de la profession d’enseignant. Définir la contextualisation comme « un art de faire » qui relève d’une compétence professionnelle sup- pose alors de poser la légitimité du/des « contexte(s) » comme vecteur(s) explicatif(s). Le modèle conceptuel développé s’inscrit dans la lignée de la théorie de la structuration d’Anthony Giddens (1987). Il est complété par le modèle écologique du développement humain proposé par Bronfenbrenner (1986). Title: The Competency of Contextualization At the Heart of the Teaching-Learning Situation Keywords: professional situation, teaching-learning, contextualization, theory of structuration, competencies, contexts Abstract. The notion of «professional situation,» as we propose to examine it, entails questioning simultaneously the place of contexts and the role of actors in teaching-learning situations. We propose to examine the contextualization of the teaching process in light of the groups welcomed and the conditions in which the teacher’s profession is practiced. Defining contextualization as «an art of doing» in line with a professional competency thus means postulating the legitimacy of the «context(s)» as an explanatory medium or media. The conceptual model here developed follows in the tradition of Anthony Giddens’ (1987) theory of structuration and is complemented by the ecological model of human development advanced by Bronfenbrenner (1986). Volume 1, numéro 1 | janvier 2012 | 103 Introduction Si toute situation scolaire est « mise en présence des élèves et du maître dans une situation sociale instituée », la « rencontre » ne se réalise pas nécessairement, pour reprendre une terminologie empruntée à Goffman. On peut donc distinguer ce premier registre de la « situation scolaire », au sens générique de l’expression, d’une « Situation d’Enseignement-Apprentissage », situation de communi- cation dont l’expression fine s’effectue dans le cadre d’interactions sociales, pédagogiques et didactiques « potentiellement acquisi- tionnelles » (De Pietro et al., 1989). La Situation d’Enseignement-Apprentissage renvoie alors à un espace de pratique professionnelle au sein duquel est susceptible de s’exprimer une dynamique d’enseignement-apprentissage (E/A). Mais si cette dynamique s’exprime par l’intermédiaire des relations entre enseignant et enseignés (1er niveau d’interactivité), ces processus médiateurs ne peuvent être actualisés qu’au regard des conditions environnementales qui caractérisent la situation. Nous sommes alors confrontés à un deuxième niveau d’interactivité : celui s’exerçant entre enseignement-apprentissage et contextes. La Situation d’Enseignement-Apprentissage (S.E.A.) est effectivement aujourd’hui appréhendée dans toute sa complexité : système agi et agissant, doublement interactif et donc fondamentalement dialectique. Au-delà du didactique (Brousseau, 1998 ; Chevallard, 1999), le S.E.A. renvoie, de fait, aux dimensions pédagogiques de la pratique (Bru, 1991), mais aussi à ses aspects sociologiques (Tupin et Dolz, 2008). Cette spécificité de la Situation d’Enseignement-Apprentissage invite alors à une mise en perspective pluridisciplinaire confron- tant systématiquement l’action conjointe du maître et des élèves (champ didactique et pédagogique) et les éléments du contexte dans lequel cette action s’insère (champ social et caractéristiques sociolinguistiques notamment). Cependant, cette complexité nécessite l’élaboration d’outils méthodologiques « novateurs », la mise à jour empirique de cette double interactivité n’ayant pas ou peu été réalisée dans les travaux existants. Il s’agira alors, dans le cadre de cette contribution, de montrer méthodologiquement et empirique- ment l’existence de ces liens dynamiques entre contraintes contextuelles et action en situation. Selon Dolz et al. (2008), la situation s’analyse en termes « d’actualisation des contraintes contextuelles »; la conception dynamique de la situation au sein de laquelle ni la singularité de l’action, ni son caractère donné ne sont niés est ainsi mise en avant. Nous tenterons ici d’argumenter, d’illustrer cette conception dialectique de la situation professionnelle comme mouvement permanent entre marges d’action et données écologiques. À la recherche de la dimension processuelle de l’action, nous nous appuierons sur une double perspective théorique : socioconstruc- tiviste et éco-systémique. C’est bien cette approche « renouvelée » qui nous conduira à interroger les différentes modalités de contextualisation pouvant être mises en œuvre en situation. Celles-ci permettent-elles à l’enseignant d’orienter ses choix? Pourraient-elles nous orienter vers une compétence professionnelle spécifique? Insufflent-elles (hypothèse de travail) différentes dynamiques d’apprentissage? Il s’agit alors de pouvoir rechercher parmi l’ensemble des processus interactifs en jeu dans l’enseignement-apprentissage les différentes modali- tés d’actualisation des indices prélevés dans l’environnement par l’enseignant « en situation » et ainsi de confronter à l’empirie notre conception dialectique de la S.E.A. Ce serait donc, par hypothèse, la capacité à intégrer différentes sphères contextuelles qui condi- tionnerait, pour partie, la nature des processus à l’œuvre dans la gestion de cette situation professionnelle particulière qu’est celle d’enseigner. 1. Théories de l’acteur 1.1 Reflets de l’ouverture du champ S’il est de coutume d’affirmer que les théories de l’acteur sont « situationnistes » (Giraud, 1994), il importe, de façon liminaire, de nuan- cer ce propos. Cela nécessite de préciser que si ces théories supposent, pour une large part, d’adopter la notion de situation comme élément pertinent, ce postulat énoncé, la réalité scientifique interprétative des faits sociaux s’avère complexe et diversifiée, dès lors | 104 que ces théories sont loin d’être homogènes. Certaines sont issues de l’évolution (voire de la « reconversion ») de modèles conceptuels tendanciellement holistes, d’autres s’inspirent d’une version aménagée de l’individualisme propre à l’économie néo-classique et à la théorie des jeux. De la même façon, pour rester dans les oppositions binaires, nécessairement simplifi catrices, certaines relèvent de la micro-sociologie (Lapassade, 1996) et s’attachent principalement à l’étude des interactions en situation de face à face, tandis que d’autres s’attachent à décrire des phénomènes nettement plus étendus sur les plans temporels et/ou spatiaux. Dès lors, on le comprend, les frontières de la situation diff èrent d’un paradigme à l’autre, et le rôle de cette dernière (ou son impact au regard des dynamiques sociales) également. Les théories de l’acteur se sont éloignées des modèles holistes qui, dans leur version la plus tranchée, telle qu’elle est proposée par Boudon et Bourricaud (1982 : 196), supposent que « Les comportements individuels doivent être fondamentalement conçus comme la conséquence des structures sociales qui sont ainsi posées comme première dans l’ordre de l’explication. » Pour autant, dire que les théories de l’acteur « ... considèrent que la situation est, en tendance, explicative des comportements observables ou, plus précisément, que la rationalité du sujet est indissociable du contexte dans lequel elle s’exprime » (Giraud, idem) ne réduit pas la polysémie des conceptions sous-jacentes à l’utilisation de cet idiome, ni la défi nition du rôle de l’acteur, de ses potentialités sociales et de ses marges d’action. On oscille alors entre une posture où les conditions imposées par la situation constituent le vecteur le plus contraignant des modalités de l’action, réduisant ainsi le rôle individuel à celui d’un « acteur d’opportu- nités », pour reprendre l’expression de Giraud (idem) et, à l’autre bout du spectre, une conception nettement plus centrée sur le « sujet inter-agissant » porteur dans sa relation avec autrui — au travers d’ajustements inter-individuels et de confl its — des dynamiques sociales et de leur compréhension. C’est sans doute en posant le curseur « quelque part » entre ces deux bornes que l’on est le mieux à même d’expliquer et de comprendre les situations d’enseignement-apprentissage, mais une troisième dimension manque alors à l’appel. Pour l’intégrer, on s’achemine alors vers un schéma à trois pans où : 1 ° les déterminismes ne sont pas absents, mais dépossédés de leur toute-puissance explicative; 2 ° la situation peut-être envisagée comme une miniature, un concentré et un lieu d’actualisa- tion des conditions contextuelles qui contraignent, à des degrés divers, les sujets et qui limitent ou inhibent les marges d’action des enseignants; 3 ° dans certains cas, plus marginaux, les acteurs en présence peuvent s’aff ranchir des uploads/Philosophie/ ob-014dd9-competence-contextualisation.pdf

  • 16
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager