Philosophie Écrit Épreuve commune Sujet: « Le corps peut-il être objet d’art? »
Philosophie Écrit Épreuve commune Sujet: « Le corps peut-il être objet d’art? » L’épreuve de philosophie de la banque commune d’épreuves porte, à l’écrit, sur un domaine choisi dans une liste de six domaines possibles. Cette année, pour la session 2014, il s’agissait du domaine « l’art, la technique ». Le jury avait élaboré un sujet visant à éviter au maximum la simple récitation de cours, de topos et de fiches. L’objectif était de donner aux candidats l’opportunité d’articuler une réflexion conceptuelle et une analyse d’exemples. Dans la plupart des copies ayant obtenu les meilleures notes, on voyait d’ailleurs l’effort fait par les candidats pour se doter d’une culture générale et artistique. Sur un plan formel, il convient de signaler que le niveau moyen d’orthographe a rarement été aussi bas. Et il s’agit aussi pour les candidats les plus faibles d’un problème d’expression. Il faut attirer l’attention des candidats sur le fait que des défaillances en orthographe sont peu acceptables dans le cadre du concours. Le jury attire aussi leur attention sur la nécessité de respecter des normes élémentaires en matière de présentation de la copie et, en particulier, de soigner l’écriture qui doit être lisible. Au-delà même de ces attentes, les candidats doivent s’efforcer de maîtriser davantage l’expression de leurs propos, ce qui implique, entre autres, de proscrire le recours systématique à des formules frappantes mais dépourvues de signification que l’on peut trouver dans nombre de copies (Ex : « le corps est ce volume qui se détache du vide », « la persistance immobile de la fulgurance du point résolutoire », « le jaillissement spontané de la faconde spirituelle », « l’espace charnel ne peut s’insérer dans une zone plastique » etc…). Sur un plan plus méthodologique, il est étonnant de constater qu’un grand nombre de copies n’appliquent pas suffisamment, certaines exigences fondamentales concernant la dissertation : trop souvent l’introduction apparaît comme formelle, le sujet n’est que trop peu analysé, et trop peu problématisé. Des formules rhétoriques ne sauraient se substituer à un abord méthodique du sujet (pour ne prendre qu’un exemple plusieurs fois rencontré : l’insistance sur « l’émerveillement » que suscite le corps humain, ou sur la « fascination » qu’il provoque chez l’artiste, ne revient pas à analyser la notion en jeu…). D’un côté, un grand nombre de copies ont proposé des développements très rapides qui survolaient le sujet et se limitaient à quelques remarques imprécises. De l’autre, on peut signaler le défaut inverse présenté par des copies qui ont proposé des développements très longs mais insuffisamment synthétiques (certaines de ces copies finissaient par ressembler à un catalogue d’exemples). Les candidats doivent être encouragés à développer leurs analyses sans pour autant verser dans le délayage. Si les normes de l’exercice sont globalement respectées, elles le sont donc de façon trop purement formelle : on trouve trop de références philosophiques allusives ou d'exemples non analysés. Rappelons qu'une référence à Platon ou Kant qui tient en deux lignes est inutile. Peu de candidats passent du temps à analyser en détail un exemple ou à déployer le raisonnement d'un auteur. Peu de candidats également explicitent en quel sens ils entendent les termes du sujet pour pouvoir, à telle ou telle étape du raisonnement, répondre à la question du sujet. De façon générale, la progression argumentative est souvent dénuée de toute dialectique interne. Les parties semblent construites sur des « références » prédéfinies à « caser » dans la copie. Le jury souhaite d’ailleurs insister sur le soin qu’il convient d’apporter aux transitions entre les parties : ces dernières contribuent à la logique et à la cohérence du raisonnement ; l’absence de transitions suffisamment élaborées est l’indice d’un manque de travail sur la structure argumentative du développement. L’analyse du sujet s’est avérée, on l’a déjà compris, le plus souvent rapide et formelle. Trop de candidats questionnent le sujet de manière purement verbale, sans interroger la signification des notions et de la question. Les termes du sujet – en l’occurrence cette année : le corps, l’art, l’objet et, de façon connexe, l’œuvre (d’art) – ont ainsi été trop peu travaillés. On ne demande pas aux candidats de produire une définition impeccable des termes en présence, dès l’introduction, mais, au minimum, une définition de travail qu’ils pourront approfondir et déplacer progressivement par la suite. Les bonnes copies sont celles qui ont su interroger le terme d’objet dès l’introduction et ont véritablement utilisé (et non pas seulement évoqué) la double dimension de l’art : les enjeux liés aux beaux-arts et ceux relatifs à la technique. Dans la plupart des cas cependant, les candidats ont été gênés par l’expression « objet d’art », et si certains ont certes tenté de distinguer objet et « œuvre d’art », peu y sont réellement parvenus. En dehors de brèves remarques introductives, l’ambiguïté de l’expression « objet d’art » n’a dès lors, chez de nombreux candidats, pas fait l’objet – pour ainsi dire – d’une véritable analyse. Une série de distinctions fondamentales, entre objet et œuvre, entre œuvre et praxis, aurait permis aux candidats de constituer le noyau d’une véritable réflexion. Certaines copies ont à juste titre essayé de définir le corps Concours d'entrée - Rapport 2014 p.1 en terme d’organicité. Ou elles sont parties d’une définition du corps comme matière dotée d’une forme. Faire le lien avec l’art était alors possible. Mais là encore, on peut signaler que la notion même de corps a fait l’objet, dans la majorité des cas, de définitions initiales insuffisamment articulées. Enfin, une grande proportion de copies se caractérisent par l’absence de réflexes philosophiques élémentaires : face à un sujet demandant si le corps peut-être objet d’art, l’analyse minimale consistait à distinguer un sens ontique (« est-il possible que le corps soit un objet d’art ? ») d’un sens déontique (« est-il permis de faire du corps un objet d’art ? »). Cette distinction a souvent été posée, mais sans être suffisamment analysée et élaborée. Il n’est pas étonnant, compte tenu des limites qui viennent d’être signalées, qu’un trop grand nombre de copies aient paru si faiblement problématisées et se soient contentées d’une approche essentiellement descriptive et a- conceptuelle. La problématique la plus fréquemment avancée par les candidats s’est structurée autour de l’opposition entre le corps-matière et l’art placé du côté de l’esprit. Ces copies « spiritualistes » soutenaient alors que le corps étant sensible et vil, il est paradoxal ou contradictoire, selon les cas, de le prendre pour objet. Une telle position pouvait évidemment être envisagée et examinée, mais construire la problématique exclusivement autour d’elle amenait les candidats à s’enfermer dans une thèse monolithique contraire à la réalité de l’histoire de l’art elle-même. Dans le même ordre d'idées, et le plus souvent dans le cadre de cette problématique « spiritualiste », un certain nombre de copies ont parfois confondu expression de la pensée et expression de convictions religieuses sans nuances et sans distance : ainsi on a pu lire « la Genèse démontre », « le corps est objet d’art du divin ». Ce type de construction, autour d’oppositions artificielles, semblait parfois avoir pour seul but de déplacer le sujet de manière à le traiter sur la base de la récitation de topos sur les rapports entre le corps et l’âme. D’autres copies, à l’inverse, finissaient par occulter la question même du corps rabattue sur celle du rapport entre matière et forme. La démarche consistant à construire la problématique autour d’oppositions conceptuelles sommaires a évidemment pu se décliner de façon diverse. Certaines copies ont privilégié une opposition entre le corps-utile et l’art-inutile – au mépris des fonctions sociales, religieuses et même tout à fait pratiques de l’art (conserver un corps, exposer une relique, etc.). D’autres ont préféré partir de l’opposition entre la mortalité du corps et la durabilité de l’œuvre d’art – au mépris cette fois-ci des arts éphémères. D’autres encore se sont appuyées sur l’opposition entre le corps-nature et l’art placé du côté de la culture. Dans tous les cas, les candidats étaient amenés à se demander comment le corps peut seulement être objet d’art et passaient l’essentiel du développement à tourner autour d’une question artificiellement construite. Dans le cadre de telles problématiques, l’identification de l’art à la beauté a conduit le plus souvent à court-circuiter la question de la beauté naturelle, interdisant aux candidats d’aborder réellement la problématique de la corporéité. L’analyse kantienne des tatouages maori ou l’approche du corps humain comme paradigme de la « beauté adhérente » n’apparaissaient pas ou peu. L’idée que l’art cherche à reproduire la vie et à rivaliser avec elle, quand elle était (très rarement) exposée, n’était pas articulée à la question du corps. Les problématiques qui viennent d’être évoquées ont en commun de reposer sur des distinctions conceptuelles fragiles présentées d’emblée comme des dualismes indépassables ou sur une conception simpliste de l’art ou du corps. De fait, l’identité de l’art était trop souvent présupposée sans être interrogée (« l’art est ce qui est beau et ce qui est représenté ») et opposée à d’autres notions sans effort de justification. Quant à uploads/Philosophie/ philo-commun-ecrit.pdf
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- Publié le Nov 14, 2021
- Catégorie Philosophy / Philo...
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