1 RAPPORT DE CORRECTION DE DISSERTATION DE CULTURE GENERALE Conception emlyon B

1 RAPPORT DE CORRECTION DE DISSERTATION DE CULTURE GENERALE Conception emlyon BS/HEC Paris Le sujet 2 Attentes du jury 3 Remarques de correction 4 Conseils aux futurs candidats 7 2 3 Préalables : Un changement important est intervenu cette année, puisque a été mise en place une nouvelle épreuve "fusionnée" sur le principe d'une co-conception et d'un co-pilotage de l'équipe de correcteurs entre l'emlyon business school et HEC Paris, avec une concertation et un travail conjoint entre les deux concepteurs. La correction de cette nouvelle épreuve a nécessairement pris en compte les critères d'évaluation des deux écoles et en a réalisé une synthèse. Pour la conception du sujet, certaines pratiques, propres notamment à l’emlyon business school, ont évolué. Le sujet proposé peut prendre une forme interrogative, mais cela n’a plus rien d’obligatoire (le sujet cette année n’était pas une question) ; le thème étudié peut apparaître dans le sujet (comme cette année : « la mémoire ») mais là encore nous ne considérons pas cela comme une règle absolue : un sujet comme « se souvenir de soi », ou « pourquoi raconter ses souvenirs ? » était possible. Il est fortement conseillé aux candidats d’être synthétiques et incisifs, même si plus aucune limite explicite du nombre de pages ne leur est imposée. Enfin, les fautes d’orthographe et/ou de syntaxe ne donnent pas lieu à des pénalités chiffrées (comme auparavant pour l’emlyon) mais il est bien sûr tenu compte de la qualité de l’expression écrite, qui joue un rôle important dans l’évaluation. Nous réaffirmons par ailleurs des règles fondamentales : le sujet de culture générale qui sera proposé aux candidats dans le cadre de cette fusion sera immédiatement lisible et compréhensible, il appartiendra au cœur du champ notionnel, et tout candidat qui a travaillé pendant l’année pourra le traiter ; il engagera une réflexion philosophique qui pourra être alimentée par des références culturelles variées, notamment littéraires. Le sujet cette année : Le sujet proposé cette année ne se présentait pas sous forme de question mais reprenait le thème de la mémoire et l’associait à un autre concept, ce qui aurait dû permettre non seulement de mobiliser les connaissances acquises, mais de réfléchir à nouveau sur le sens de la notion étudiée. Nous attendions des candidats qu’ils ne prennent pas les concepts du sujet pour une évidence, mais en fassent l’analyse, et s’étonnent du rapprochement entre blessures et mémoire. Car si, en restant encore trop simple, on considère la mémoire comme une activité de restitution des représentations passées, c’est au présent que se fait cette restitution. Même si l’on s’en tient à la définition d’une mémoire seulement restitutive, elle sert à assurer l’unité et la cohérence de la conscience, dans ses actions comme dans ses connaissances. Ne dit-on pas que la mémoire est l’acte même de la conscience, et que, sans mémoire, la conscience serait aliénée par la discontinuité de l’instant ? Selon cette définition - encore une fois discutable - de la mémoire, cette dernière faculté devrait paraître protéger le moi des affections liées au devenir, réassurer la conscience, assurer sa reconnaissance. Comment dès lors une restitution du passé pourrait-elle blesser cette mémoire, et donc cette conscience, alors que cette faculté semble plutôt avoir pour vocation la maîtrise du moi sur son propre devenir ? 4 C’est donc que l’existence - indubitable - des blessures de la mémoire : regret, nostalgie, retour du refoulé, prouve que la mémoire n’est pas le produit d’une activité dominatrice de restitution, mais qu’elle a une autonomie, une puissance d’inertie, un pouvoir de rémanence qui en fait une source de souffrance pour la maîtrise de soi de la conscience. Nous attendions des candidats qu’ils questionnent le sujet, qu’ils l’affrontent et qu’ils définissent au fur et à mesure la mémoire, comme une activité – et non simplement une « zone de stockage » comme nous l’avons trouvé – mais aussi les blessures, qui ne pouvaient être résumées à l’oubli, à l’hypermnésie, ou même aux seuls traumatismes du passé. Nous attendions également une réflexion sur les sens de la mémoire : mémorisation mais aussi rappel des souvenirs, mémoire individuelle mais aussi collective, mémoire volontaire mais aussi involontaire… là où le concept semble aller de soi dans de nombreuses copies. Nous rappelons aux candidats que si « la mémoire » peut sembler un concept « connu » puisqu’il a été étudié tout au long de l’année, ils doivent – c’est précisément le sens de l’exercice demandé ! - le repenser, le réinterroger et le redéfinir dans le cadre du sujet donné. Le sujet, qui ne présentait pourtant pas de difficultés de compréhension, ni de piège, n’est souvent pas lu pour lui-même. Au terme de « blessures » est substitué celui de « dysfonctionnements » ou même « d’oubli » - sans que soit expliqué en quoi l’oubli peut être une blessure - et la mémoire blessée se réduit à la mémoire amnésique. Le pluriel « des » blessures n’est pas interrogé, et laisse place à une homogénéisation plate, les blessures se réduisant au souvenir traumatique. Les blessures de la mémoire ne sont pourtant pas la mémoire des blessures. Mais c’est surtout le concept de « mémoire » lui-même qui souffre cruellement d’absence de définition. La mémoire est essentialisée, voire personnifiée, ce qui entraîne un examen mécanique des relations entre elle et ses blessures. Certains candidats n’ont pas vu le double sens - objectif et subjectif – du génitif « de la mémoire » et ne traitent donc du sujet que de manière partielle. Mais, même lorsque ce double sens est aperçu, peu de copies parviennent à donner vie et mouvement à leur réflexion : la troisième partie, en particulier, est juxtaposée aux deux premières de manière artificielle, les candidats convoquant, sans l’articuler à ce qui précède, un exposé sur l’identité ou même sur « l’homme » en général qui ne pourrait se passer de mémoire. 5 La plupart des candidats n’envisagent qu’une mémoire d’événements passés douloureux, et seuls quelques-uns abordent la question du retour douloureux du souvenir des événements heureux (la nostalgie …) : là où le sujet appelait à une réflexion sur la temporalité, et l’expérience vécue d’un passé à la fois révolu et présent, nous n’avons souvent qu’une conception paradoxalement statique de la mémoire, décrite comme un objet pouvant être abîmé. Les copies respectent en général les règles formelles de la dissertation, mais la composition est souvent fragile, voire peu cohérente. Il est fréquent qu’après une tentative louable d’analyse, le candidat oublie ses efforts et leurs résultats, pour se lancer dans un plan qui a un rapport incertain avec le problème qu’il a pourtant dégagé. Si cette année le sujet a semble-t-il permis de mobiliser avec un relatif bonheur des références littéraires pertinentes (Fictions de Borgès, La légende des siècles de Hugo, Andromaque de Racine, L’Odyssée de Homère, Le Voyageur sans bagage de Anouilh …) c’est aussi précisément là, que parfois le bât blesse. La récitation des références remplace l’analyse et l’usage répétitif des illustrations donne un tour descriptif au propos, au détriment d’une pensée conceptuelle. L’organisation la plus commune des parties commence par décrire les différentes blessures de la mémoire (1), avant d’en chercher les causes (2), puis de se demander comment les guérir, ou plus généralement : que faire de ces blessures ? (3) Une autre progression récurrente débute par la description d’une mémoire atteinte par la maladie ou les « dysfonctionnements », une mémoire blessée (1), avant d’envisager une mémoire elle-même blessante (le souvenir est douloureux) (2) et d’envisager enfin une guérison possible, par la remémoration volontaire, la commémoration, ou le pardon (3). Lorsque le candidat articule bien ces différentes parties, et surtout redéfinit au fur et à mesure la mémoire, en interroge les différentes modalités, une telle composition peut réussir à proposer une réflexion pertinente. Ainsi, certaines copies - qui sont notées au- dessus de 10, et peuvent obtenir jusqu’à 13 ou 14, à proportion de la qualité à la fois de l’écriture et de la réflexion - ne produisent pas une juxtaposition statique, mais sont attentives au cœur du problème, et s’approprient le sujet : une copie se demande par exemple comment la mémoire peut être blessée si elle n’est pas une substance corporelle, mais une activité temporelle, une autre interroge la norme implicite d’une mémoire sans blessure : si la mémoire ne peut être blessée, n’est-elle pas qu’un stockage numérique inhumain d’informations ? Les très mauvaises copies (de 1 à 5) sont rares, mais nous en avons trouvé : elles sont mal écrites, les idées sont mal organisées et surtout, elles substituent totalement au traitement du sujet la récitation de bribes de cours plus ou moins maîtrisées. Certaines copies ne respectent pas les règles élémentaires de la dissertation (une introduction claire, trois parties, une conclusion) et d’autres deviennent illisibles par la multiplication de ratures, de fautes d’orthographe, ou une graphie quasiment indéchiffrable. 6 A rebours de la majorité des copies qui n’interroge jamais la mémoire comme faculté de la conscience, qui la présente comme une simple activité mécanique de stockage, uploads/Philosophie/ rapport-hec-la-me-moire-2019.pdf

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