1 Journées d’études « Lire Heidegger » Réflexions sur les lectures de Heidegger

1 Journées d’études « Lire Heidegger » Réflexions sur les lectures de Heidegger dans la philosophie française contemporaine Résumés d’interventions (ordre alphabétique) Norman Ajari Doctorant contractuel à l’Université Toulouse - Jean Jaurès « Origine & Répétition. Reiner Schürmann et la différence ontologique » C’est peu dire que de reconnaître que la pensée de Reiner Schürmann est méconnue. Bien qu’honorée, naguère, par des phénoménologues français du calibre de Gérard Granel ou Dominique Janicaud ; bien qu’aujourd’hui relue et réinterprétée par d’importants tenants d’une ontologie « anarchiste », comme Giorgio Agamben ou Mehdi Belhaj Kacem, nos contemporains restent rares, qui se risquent à entrer en dialogue avec ce philosophe allemand d’expression française. Né en 1941 et mort en 1993 de complications liées au virus du SIDA, Schürmann enseigna près de vingt ans (de 1975 jusqu’à sa mort) à la New School of Social Research de New-York, au sein de laquelle il fut introduit par Hannah Arendt et par Hans Jonas. Ancien pensionnaire d’un kibboutz, ordonné prêtre auprès des Dominicains de la province française mais vite défroqué, admirateur de Heidegger avec lequel il s’entretint, Docteur d’État en philosophie de la Sorbonne… sa brève existence semble en concaténer d’innombrables, ce que résume peut-être l’un de ses concepts : celui d’identité pérégrinale. S’il est l’auteur de nombreux articles en diverses langues, c’est en Français qu’est rédigée la colonne vertébrale de son œuvre. Elle se compose de quatre ouvrages en nom propre : un premier essai sur Maître Eckhart ; un récit autobiographique mâtiné de philosophie qui n’est pas sans évoquer la façon kierkegaardienne ; un second essai, tiré de sa thèse, consacré à 2 Heidegger ; et enfin une monumentale généalogie de la philosophie européenne, où se déploie toute l’originalité de sa pensée, qui fut publiée à titre posthume par Granel : Des Hégémonies brisées. Le livre sur Heidegger, dont il sera surtout question dans cette intervention, s’intitule Le Principe d’anarchie, Heidegger et la question de l’agir. Il s’agit d’une volumineuse interprétation de l’œuvre du philosophe allemand, parue en 1982 et fort influencée, non seulement par la mystique rhénane, mais encore par la philosophie française de son temps : Deleuze et Foucault, notamment. La brève communication que je proposerai ne visera pas à présenter la pensée de Reiner Schürmann dans toute son ampleur, ni à tenter témérairement d’en offrir une vue d’ensemble. Elle s’attachera, plus modestement, à en présenter un point d’entrée localisé. À savoir : l’interprétation que livre Schürmann de la différence ontico-ontologique dont Martin Heidegger fit le cœur de sa méditation de l’histoire de l’être. Il s’agira, tout d’abord, d’insister sur le dédoublement de la différence ontologique qu’établit Schürmann, qui n’est qu’en deuxième lieu différence de l’être avec l’étant. Elle est avant tout, à ses yeux, dissension de la pensée avec l’être et les multiples répétitions possibles de l’appel qu’il lui intime. C’est l’assomption d’un mode particulier de cette répétition qui donne à l’histoire de l’être son impulsion parménidienne. De ceux deux conceptions de la différence découlent deux concepts d’origine que Schürmann ne cesse d’articuler, et dont il faudra comprendre le jeu. Cette communication se conclura par une brève comparaison du traitement de cette question par Schürmann avec celle, voisine mais cependant bien différente, que propose Jacques Derrida. Flora Bastiani Enseignante à l’Université Toulouse - Jean Jaurès « Heidegger et Levinas » Angel Alvarado Cabellos Doctorant en philosophie à l’Université de Wuppertal (Allemagne) « L’angoisse et la chair chez Heidegger et Henry » Anne Coignard Enseignante à l’Université Toulouse - Jean Jaurès « Être au monde, habiter les œuvres » 3 Dans notre exposé, nous reviendrons sur « L’origine de l’œuvre d’art » pour examiner la manière dont Heidegger pense ensemble la relation avec les œuvres d’art et la possibilité d’être au monde. Cela, pour examiner comment Maldiney, dans L’art, l’éclair de l’être reprend le questionnement heideggerien. Il s’agira, surtout, de mettre ces réflexions en regard du diagnostic porté par Hannah Arendt, dans « La crise de la culture », où elle l’affirme que nos sociétés du loisir et du divertissement organisent l’impossibilité de vivre auprès des œuvres et corrélativement d’habiter un monde. L’enjeu sera prendre au sérieux le diagnostic d’Arendt, c’est-à-dire de considérer qu’il nous concerne. Cela nous permettra d’interroger en retour ce qui se passe, aujourd’hui, pour le lecteur d’Heidegger ou de Maldiney. Quels effets ces lectures peuvent-elles encore produire ? Nous nous appuierons sur notre expérience d’enseignement de ces textes pour examiner dans quelle mesure ils ne peuvent d’abord qu’être reçus avec incompréhension ou nostalgie, et, in fine, pour demander comment ils pourraient encore réveiller la relation aux œuvres. Madalina Guzun Doctorante à l’Université de Wuppertal (Allemagne) et à l’Université Paris- IV « L’infini, “s’il y en a”. Derrida, lecteur de Heidegger » Le but de cet exposé sera d’analyser la lecture derridéenne de Heidegger autour de la question de l’éthique, qui se trouve liée chez Derrida avec la question de la philia, qu’il emprunte à Heidegger, et avec celle de l’hospitalité. En partant de ce que d’aucuns considèrent soit comme un manque dans la pensée Heidegger, soit comme un fil qu’il n’a pas été suffisamment développé, nous traiterons tout d’abord le reproche concernant ledit « solipsisme existential » de Sein und Zeit − i.e. le fait que l’autrui ne soit pas décisif pour « mon » authenticité –, tout en rappelant la méfiance à l’égard de l’éthique comme « discipline » de la philosophie que Heidegger exprime dans la Lettre sur l’humanisme. Tout en gardant cette méfiance à l’égard d’une éthique qui impose des normes bien définies, Derrida va essayer de frayer, dans son commentaire sur la « voix de l’ami », un chemin laissé ouvert par Heidegger, qui va conduire le philosophe français à la schématisation d’une éthique qui, loin de se construire autour des règles morales, visera plutôt l’« éthicité de l’éthique », ses conditions de possibilité du côté de l’« impossible ». Si, par cela, il démontrera que l’autrui joue un rôle essentiel dans mon arrivée à l’authenticité, il essayera par la suite d’esquisser nos devoirs envers autrui à partir de la notion héraclitéenne de philia et des commentaires que Heidegger en fait dans ses 4 écrits tardifs. À partir de là, néanmoins, Derrida développe un sens de l’ethos qui diffère de manière fondamentale de celui que l’on trouve chez Heidegger et qui fera jouer ainsi une pensée de l’infini contre une compréhension centrée dans la finitude, répondant chacune à une idée divergente du divin. Masumi Nagasaka Chercheur postdoctorale à l’Université Toulouse - Jean Jaurès et à l’Université d’Osaka « Face à l’ontothéologie – Kant, Heidegger et Levinas » Dans cet exposé, nous tenterons d’esquisser un portrait de la lutte contre l’ontothéologie, abordée de différentes manières à travers Kant, Heidegger et Levinas. Ce faisant, nous chercherons à comprendre quelle figure peut aujourd’hui revêtir la critique de la métaphysique ontothéologique dans l’héritage de ces trois penseurs. Dans la dialectique transcendantale de la Critique de la raison pure, Kant caractérise l’ontothéologie comme ce qui soutient l’argument ontologique de l’existence de Dieu. Il déploie sa critique à l’encontre de cet argument en introduisant la distinction entre le concept et la chose, à savoir, celle entre les dimensions logique et ontologique. En audacieux successeur de Kant, Heidegger articule la notion de métaphysique en la caractérisant d’onto-théo-logie. Chez lui, la critique de la métaphysique ontothéologique ne prend plus la forme d’une critique de l’argument ontologique, mais plutôt celle d’une critique de la métaphysique qui remplace l’être par l’étant, l’Anwesen par l’Anwesende, bref, d’une critique de la métaphysique de la présence (Vorhandenheit / Anwesenheit / Gegenwärtigkeit). Levinas se montre sensible à ce déplacement heideggérien de la critique de l’ontothéologie. En lisant Kant et Heidegger dans ses cours présentés dans Dieu, Temps et Mort, il rappelle que la faute de l’ontothéologie ne consiste pas à remplacer l’être par l’étant, mais l’autrement qu’être par l’être. David Nowell Smith Maître de conférences à l'Université d'East Anglia (Royaume-Uni) « Le langage comme mouvement : Heidegger, Derrida, Nancy » Quand Martin Heidegger propose l’ « archaïsme souabe », die Be- wëgung, pour décrire l’ouverture originaire du langage, il vise à une motilité 5 multidirectionnelle. Tout d’abord il indique la relation réciproque entre das Sagen et das Sprechen, tel que le logos « recueillant » se verbalise en même temps qu’une phrase, un mot, arrivent à recueillir des étants dans une configuration singulière. Cette réciprocité ressemble à la structure de la différence ontologique, mais, comme le remarque Jacques Derrida (« Le retrait de la métaphore »), il s’agit ici d’ « entamer » [sa traduction du Aufriss de Heidegger] cette différence, à la fois point d’ouverture et point d’excès. Cela mène à une motilité antérieure à la différence ontologique même, motilité qui marque la structure interne du langage : rappelant le fil conducteur de son essai, « die Sprache als Sprache zur Sprache bringen », Heidegger entend que ce bringen qui assure la convergence de ces diverses articulations de la Sprache. La Sprache ne devient propre à elle-même, ne se « recueil » elle-même, que par ces divisions uploads/Philosophie/ resumes-1.pdf

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