Histoire de la biologie JEAN THÉODORIDÈS Directeur de Recherche honoraire au CN

Histoire de la biologie JEAN THÉODORIDÈS Directeur de Recherche honoraire au CNRS. Membre de la Royal Society of Medicine (Londres). Ancien Président de la Société Française d'Histoire de la Médecine. Sixième édition corrigée. QUE SAIS-JE ? ------------------------------------------------------------------------------------------------------------ Du même auteur : Zoologie Contribution à l'étude des parasites et phorétiques de Coléoptères terrestres, Hermann, Paris, 1955. Eugrégarines parasites de Coléoptères du Parc National Albert (avec P. JOLIVET), Bruxelles, 1959. Faune terrestre et d'eau douce des Pyrénées-Orientales, fasc. 8 : Sporozoaires et Cnidosporidies, Hermann, Paris, 1963. Nématodes parasites et phorétiques d'Invertébrés, in : Traité de Zoologie, vol. IV, Masson, Paris, 1965. Parasitology of marine zooplankton, Advances in marine Biology, 25, 1989. Histoire des Sciences Histoire de la Zoologie des origines à Linné (avec G. PETIT), Hermann, Paris, 1962. Un grand médecin et biologiste : Casimir-Joseph Davaine (1812.1882), Pergamon Press, Oxford, 1968. Stendhal du côté de la Science, Editions du Grand Chêne, Aran, 1972. Alexandre de Humboldt, observateur de la France de Louis-Philippe, 1835-1847, Pedone, Paris, 1972. Les sciences biologiques et médicales ü Byzance, C.N.R.S., Paris, 1977. Un zoologiste de l'époque romantique, Jean-Victor Audouin (17971841), C.T.H.S., :ibliothèque Nationale, Paris, 1978. Constantin von Economo (1876-1931), The man and the scientist (avec L. VAN BOGAERT), Osterreischische Akademie der Wissenschaften, Wien, 1979. Histoire de la rage, Masson, Paris, 1986. Des miasmes aux virus, Pariente, Paris, 1991. La thèse prophétique d'Ernest Duchesne (1897) sur L'antagonisme entre les moisissures et les microbes (présentation), Pariente, Paris, 1991. Pierre Rayer (1793-1867) : un demi-siècle de Médecine française (sous presse). ISBN 2 13 043930 6 Dépôt légal – 1ere édition : 1965 6eme édition corrigée : 1995, février © Presses Universitaires de France, 1965, 108 boulevard Saint-Germain, 75006 Paris. --------------------------------------------------------------------------------------------------------- NOTE DES ÉDITEURS Maurice Caullery, membre de l'Académie des Sciences, avait tenu en des jours noirs, à être le premier auteur de la collection «Que sais-je?», alors en projet et inconnue du public. Son adhésion immédiate à une entreprise que le succès n'avait pas encore consacrée justifiait que son livre Les étapes de la biologie, inaugurât une encyclopédie dont il ne cessa jusqu'à sa mort de suivre avec amitié les progrès, qu'il appuya souvent de son autorité et à laquelle il apporta personnellement d'autres précieuses contributions. Le présent ouvrage remplace par la force des choses celui paru en 1941 (et maintes fois depuis réimprimé). Le nombre et l'importance des travaux publiés depuis cette date en matière d'Histoire de la Biologie justifiaient la présentation au public d'une synthèse entièrement nouvelle sur ce grand sujet. INTRODUCTION : Bien que le terme de Biologie ait été utilisé en 1802 simultanément par Lamarck et Treviranus, précédés par Roose (1797) et Burdach (1800), l'étude de la vie et des êtres vivants avait déjà connu un passé de plusieurs siècles. De l'Antiquité au XVIIe siècle, la Biologie progressa à pas lents en raison de l'insuffisance des moyens optiques pour observer les «infiniment petits» ou les fragments de tissus ou d'organes des êtres plus grands. L'invention du microscope permit de combler cette lacune. En outre, dès le XVIIIe siècle, la Biologie devint expérimentale et l'on voit se préciser à partir de 1850 les grands problèmes de la Biologie générale. La formulation de la théorie cellulaire fera alors de la cellule l'unité de vie, tandis que de nos jours les perfectionnements de la microscopie et de la chimie physique et biologique ont repoussé cette unité à l'échelle moléculaire. Dans le présent ouvrage, de dimensions réduites, l'accent sera davantage mis sur la biologie animale et humaine, l'histoire de la biologie végétale devant faire l'objet d'un autre volume de la collection «Que sais-je?». Un dernier point : durant ces dernières années, diverses tendances se sont manifestées parmi les historiens des sciences. L'historique d'une discipline scientifique doit-il être entrepris par des historiens, des philosophes ou des spécialistes de cette discipline ? Sans vouloir ouvrir ici un débat, nous pensons personnellement qu'il est impossible d'étudier correctement les étapes de la Médecine ou de la Biologie sans être soi-même médecin ou biologiste, mais qu'il est d'autre part indispensable pour le faire d'avoir des bases historiques et philosophiques suffisantes. CHAPITRE PREMIER - LES ORIGINES I. - La Préhistoire L'homme du Paléolithique supérieur connaissait toute une faune habituée au climat froid : bouquetins, chamois, rennes, antilopes saiga, mammouths, rhinocéros, ainsi que des espèces plus méridionales : lion, panthère, lynx, hyène des cavernes, etc. Les steppes étaient parcourues par des troupeaux de chevaux sauvages, de bisons et d'aurochs. Non seulement l'homme préhistorique a laissé de ces animaux d'excellentes figurations sculptées ou peintes dans les hauts lieux de l'art paléolithique que sont Lascaux, Le Mas d'Azil, Les Combarelles, Altamira, etc., mais il a su garder dans ces représentations «une mémoire précise de la forme en mouvement » (G. Petit). C'est ainsi que des observations biologiques intéressantes ont été faites sur ces espèces aujourd'hui disparues : figurations de combats de mâles de bisons ou de rennes, de femelles gestantes de divers Mammifères bien représentées, de bisons ou mammouths blessés perdant leurs intestins, des divers types de chevaux préhistoriques (libyques, celtiques, nordiques, tarpans...) dont certains sont représentés en train de marcher, de courir ou de hennir. Certaines statuettes de l'Aurignacien représentent des formes humaines féminines dont les caractères sexuels secondaires sont nettement exagérés. On a, semble-t-il, là les premières représentations plastiques du corps humain. Au Néolithique, l'homme est devenu cultivateur et éleveur et de nombreuses scènes de chasse sont les thèmes des peintures rupestres du Levant espagnol ou d'Afrique. On y trouve figurées de nombreuses espèces aujourd'hui absentes dans la même région, ce qui leur confère un caractère indiscutable de document biogéographique. Tout ceci montre que depuis les temps les plus reculés, l'homme s'intéressait au monde végétal et animal qui l'environnait, pour assurer sa propre subsistance, par la chasse, la pêche, la culture et l'élevage. Comme l'a dit Maurice Caullery: «Chacune de ces activités lui fournissait des connaissances d'ordre biologique fondées sur l'observation et bientôt sur l'expérimentation.» En somme, tout comme Monsieur Jourdain, l'homme primitif faisait de la biologie sans le savoir. D'autre part, il essayait de comprendre les problèmes posés par la maladie et la mort, la médecine n'étant après tout autre chose qu'une partie de la biologie de l'Homo sapiens. Ces notions empiriques allaient être précisées par les anciennes civilisations orientales. II. - L'Antiquité orientale 1. La Chine. - A une période très reculée (de 4700 à 3000 av. J.-C.) les Chinois avaient déjà des connaissances biologiques importantes sur divers animaux tels que les vers à soie, qu'ils élevaient en vue d'obtenir le précieux textile. Ils s'intéressèrent également très tôt à d'autres insectes (cochenilles de la laque, grillons utilisés dans des combats), à des Oiseaux employés pour la chasse et la pêche, aux Poissons (sélection de races à yeux télescopiques et à queues multiples) et aux Mammifères domestiques dont la biologie était étudiée dans des ouvrages zootechniques. Enfin, de nombreux animaux et plantes sont cités, en raison de leurs propriétés thérapeutiques, dans les pen ts'ao, traités de matière médicale. Dès le XIIe siècle, les Chinois savaient fabriquer les perles de culture en introduisant des corps étrangers chez l'huître perlière. Les Chinois ont également donné les plus vieux schémas connus d'anatomie humaine. Pour eux, l'organisme se résumait à 5 organes (poumons, coeur, foie, rate, reins) en rapport avec les 5 éléments cosmiques (bois, terre, métal, eau, fer) et 6 viscères (cholécyste, estomac, aesophage, intestin, vessie, 3 «cuiseurs») correspondant aux 6 émanations célestes. De plus, chaque organe était selon eux en rapport avec une «ouverture» (organe des sens ou méat) reliant le monde organique au cosmique. Les organes et les viscères étaient unis par un système de 12 canaux pairs et symétriques où circulaient le «souffle vital», le yin (principe négatif femelle froid), le yang (principe positif mâle chaud) et le sang. Pour les Chinois, le transit du sang dans l'organisme se faisait d'une façon circulaire, ce qui a induit certains historiens des sciences à affirmer qu'ils connaissaient la circulation du sang quarante siècles avant William Harvey. En réalité, cette conception «n'a absolument rien d'harveyen et repose uniquement sur un rapport d'analogie, non démontré, mais considéré comme évident, entre le cycle du sang dans les vaisseaux et celui des astres dans le ciel» (P. Huard). 2. L'Inde. - Les notions de Biologie humaine des anciens Indiens rappellent celles des Chinois : le corps humain est composé de 5 éléments (terre, eau, feu, vent, espace) qui se retrouvent dans la nature. Les phénomènes physiologiques sont expliqués en fonction de ces éléments (le vent serait le moteur premier de l'organisme, le feu agit dans la digestion qui transforme les aliments, etc.). Les anciens Indiens ont créé le terme de âyour véda (= science de la longue vie), que Filliozat propose de traduire par «Biologie», car cette appellation désigne l'ensemble des phénomènes vitaux normaux ou pathologiques. Leurs notions d'anatomie humaine étaient plus philosophiques que biologiques, mais la chirurgie était chez eux assez avancée. Les anciens Indiens avaient également des connaissances biologiques plus ou moins empiriques sur diverses espèces animales utiles : exigences écologiques de la cochenille de la laque, croisements de divers Mammifères uploads/Philosophie/ histoire-de-la-biologie.pdf

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