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La Légende de MARX ou ENGELS fondateur Extrait du Plusloin, le site http://www.plusloin.org/plusloin/spip.php?article108 La Légende de MARX ou ENGELS fondateur - Maximilien Rubel - Date de mise en ligne : samedi 26 décembre 2009 Plusloin, le site Copyright © Plusloin, le site Page 1/8 La Légende de MARX ou ENGELS fondateur Sommaire • AVERTISSEMENT • POINTS DE VUE A PROPOS DU (...) • I • II • III • IV • V • VI • VII • VIII • IX AVERTISSEMENT A l'occasion du 100' anniversaire de la naissance de Friedrich Engels, la ville de Wuppertal avait organisé, en mai1970, une conférence scientifique internationale : réunis à cette occasion, près de cinquante spécialistes de plus de dix pays européens ainsi que d'Israël et des Etats- Unis se sont efforcé de faire le point des recherches modernes sur la pensée de celui qui passe universellement pour avoir été, aux côtés de son ami Karl Marx l'un des fondateurs du... « Marxisme ». Invité à participer a cette conférence, j'ai tenu à soumettre comme texte de discussion une série de thèses critiques portant sur le thème de la responsabilité d'Engels dans la genèse de l'idéologie dominante du XXème siècle, le « marxisme » dans le cadre d'une manifestation plus « scientifique » que commémoratrice, il m'a paru normal et urgent de faire partager mes réserves critiques à une assemblée informée des problèmes que pose l'évolution des idées clans leur rapport avec les événements et les bouleversements qui ont marqué I'histoire du XX° siècle. J'avais donc fait parvenir aux organisateurs un document en huit points, rédigé en allemand, que j'avais intitulé : Gesichtspunkte zum Thema « Engels als Begründer ». J'eus la surprise, en arrivant à Wuppertal, d'être reçu par les responsables de la Conférence qui me firent part de leur embarras : mes collègues soviétiques et est- allemands, s'étant sentis personnellement offensés à la lecture de mes Points de vue, menaçaient de quitter la Conférence si ma contribution n'était pas retirée des débats ! Après de longues tractations nous tombâmes d'accord sur une formule apparemment susceptible d'apaiser I'irritation des représentants « scientifiques » des pays « socialistes » les textes ne seraient plus lus à la tribune, mais seulement commentés et discutés. On serait tenté de narrer le détail du débat auquel donnât lieu les Points de vue si les objections formulées avaient mérité le qualificatif de « scientifiques » et si le comportement de certains participants n'avait traduit le refus total d'engager une discussion risquant de remettre en question l'ensemble des positions idéologiques du « marxisme-léninisme ». Du même coup, ce refus obstiné sinon insultant suffisait pour confirmer, aux yeux de l'observateur impartial, la critique fondamentale que l'on peut diriger contre l'emploi même du concept de « marxisme », emploi dont mes Points de vue dénonçaient précisément l'aberration [1]. L'épilogue de cette Conférence devait souligner une nouvelle fois le bien-fondé d'une dénonciation qui, sous la forme d'une simple réflexion sémantique, représentait en fait une défense de la théorie sociale de Marx en tant qu'opposée à la mythologie marxiste. En effet, les organisateurs n'ont pas craint de manquer aux règles élémentaires du code de l'édition généralement respectées en démocratie « bourgeoise » le texte incriminé, communiqué à la demande des responsables, ne figure pas dans le volume réunissant les contributions envoyées préalablement à Wuppertal 2. Habent sua fata libelli... Nous donnons ci-après une traduction française du texte refusé par la Conférence de Wuppertal, [2]en l'enrichissant de quelques commentaires. Copyright © Plusloin, le site Page 2/8 La Légende de MARX ou ENGELS fondateur POINTS DE VUE A PROPOS DU THÈME « ENGELS FONDATEUR « « Pour le triomphe final des principes établis dans le Manifeste communiste, Marx misait uniquement et exclusivement sur le développement intellectuel de la classe ouvrière tel qu'il devait résulter nécessairement de l'action solidaire et de la discussion. » « F. ENGELS Avant-propos à la quatrième édition du Manifeste communiste, 1er mai 1890. » I Le marxisme n'est pas venu au monde comme un produit authentique de la manière de penser de Karl Marx, mais comme un fruit légitime de l'esprit de Friedrich Engels. Si tant est que le terme de marxisme recouvre un concept rationnel, ce n'est pas Marx mais Engels qui en porte la responsabilité ; et si, aujourd'hui comme hier, la querelle de Marx est à l'ordre du jour, elle se rapporte principalement à des problèmes dont Engels ne s'est absolument pas préoccupé ou qui n'ont trouvé chez lui qu'une solution partielle. Ces problèmes - pour autant qu'ils puissent être résolus ne pourraient donc être maîtrisés qu'avec l'aide de Marx lui-même. Cela ne signifie nullement qu'Engels doive être écarté des discussions actuelles, mais il est légitime de se demander dans quelle mesure il pourrait intervenir dans toute confrontation concernant des écrits de Marx qui, ayant échappé à son attention, ne s'en trouvent pas moins au centre du débat. En termes plus généraux, cette question pourrait être formulée comme suit : quelles sont les limites de la compétence d'Engels en tant qu'exécuteur incontesté du legs intellectuel de Marx, auquel on fait encore appel pour élucider les problèmes matériels et moraux de notre temps ? II Cette interrogation oblige à examiner un problème central, celui des rapports intellectuels entre Marx et Engels, « fondateurs » d'un ensemble de conceptions idéologiques et politiques groupées artificiellement sous l'appellation de « marxisme ». En soi, le fait que cette question doive être posée révèle un phénomène très caractéristique de notre époque, que l'on serait tenté de désigner dès maintenant comme le « mythe du XXe siècle ». Au demeurant, rappelons que les « fondateurs » ont parfois eux-mêmes évoqué l'interprétation mythologique pour souligner le caractère particulier de leur amitié et de leur collaboration intellectuelle : Marx n'invoquait il pas ironiquement l'exemple des antiques « Dioscures » ou celui d'Oreste et de Pylade, tandis qu'Engels raillait la rumeur selon laquelle « Ahriman- Marx » aurait détourné du chemin de la vertu « Ormuzd-Engels . [3] On constate également la tendance inverse, les efforts de plus on plus fréquents d'opposer Marx à Engels : le premier serait le « vrai » fondateur, le second étant ravalé au rang de « pseudo-dialecticien » [4]. III Copyright © Plusloin, le site Page 3/8 La Légende de MARX ou ENGELS fondateur Toute investigation sur les rapports de Marx et d'Engels est d'avance vouée à l'échec Si elle ne se débarrasse pas de la légende de la « fondation » et ne prend pas pour point de départ méthodique l'aporie du concept de marxisme. Ce fut le mérite de Karl Korsch, alors au seuil d'une révision radicale de ses positions intellectuelles, d'avoir tenté, voilà vingt ans, une critique du marxisme qui équivalait à une déclaration de guerre. Korsch n'allait cependant pas jusqu'à oser le geste ultime débarrasser le concept de marxisme de ses résidus mythologiques. Au lieu de quoi, il se borna, non sans embarras, à surmonter la difficulté par l'usage d'artifices linguistiques destinés à conserver et à sauver d' « importants éléments de la doctrine marxienne » en vue de la « reconstruction d'une théorie et d'une pratique révolutionnaires ». Dans ses Dix thèses à propos du marxisme aujourd'hui, il est question tantôt de I' « enseignement de Marx et d'Engels », tantôt de la « doctrine marxiste », de la « doctrine de Marx », du « marxisme », etc. [5] Dans la 5e thèse, où il est question des précurseurs, fondateurs et continuateurs du mouvement socialiste, Korsch va jusqu'à oublier le nom d'Engels, l'alter ego de Marx ! Pourtant, il n'était pas loin de la vérité lorsqu'il écrivait : « Toutes les tentatives de rétablir l'enseignement marxiste comme un tout et dans sa fonction primaire de théorie de la révolution sociale de la classe ouvrière sont aujourd'hui des utopies réactionnaires » (2e thèse). Au lieu d' « utopies réactionnaires », Korsch aurait pu parler aussi bien de « mythologie aberrante » pour se rapprocher de la vérité. IV Vu l'impossibilité de définir rationnellement le sens du concept de marxisme, il semble logique d'abandonner à l'oubli le mot même, pourtant si couramment et si universellement employé. Ce vocable, dégradé au point de n'être plus qu'un slogan mystificateur, porte dès l'origine le stigmate de l'obscurantisme. Marx s'est vraiment efforcé de s'en défaire lorsque, dans les dernières années de sa vie, sa réputation ayant brisé le mur du silence qui entourait son oeuvre, il fit cette déclaration péremptoire : « Tout ce que je sais, c'est que moi je ne suis pas marxiste. [6] » Le fait qu'Engels ait légué à la postérité cet avertissement - combien révélateur - ne lui enlève pas la responsabilité d'avoir, cédé à la tentation d'accorder à ce terme injustifiable la sanction de son autorité. Chargé d'être le gardien et le continuateur d'une théorie à l'élaboration de laquelle il avouait n'avoir contribué que pour une modeste part [7], et persuadé de réparer un tort en glorifiant un nom, Engels a encouru le risque de favoriser la genèse d'une superstition dont il ne pouvait uploads/Philosophie/ rubel-la-legende-de-marx-ou-engels-fondateur.pdf

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