L'Aurore naissante OU La racine de la philosophie de l’astrologie et de la théo

L'Aurore naissante OU La racine de la philosophie de l’astrologie et de la théologie Avertissement écrit par Louis-Claude de Saint-Martin pour accompagner sa traduction de l’ouvrage publié par l’Imprimerie de Laran à Paris en 1800 www.Philosophe-inconnu.com 2006 AVERTISSEMENT DU TRADUCTEUR Jacob Boehme, connu en Allemagne sous le nom du Philosophe teutonique, et auteur de l'Aurore naissante, ainsi que de plusieurs autres ouvrages théosophiques, est né en 1575, dans une petite ville de la Haute Luzace, nommée l'ancien Seidenburg, à un demi-mille environ de Görlitz. Ses parents étaient de la dernière classe du peu- ple, pauvres, mais honnêtes. Ils l'occupèrent pendant ses premières années à garder les bestiaux. Quand il fut un peu plus avancé en âge, ils l'envoyè- rent à l'école, où il apprit à lire et à écrire ; et de là ils le mirent en apprentissage chez un maître cordonnier à Gör- litz. Il se maria à 19 ans, et eut quatre garçons, à l'un desquels il enseigna son métier de cordonnier. Il est mort à Görlitz en 1624, d'une maladie aiguë. Pendant qu'il était en apprentissage, son maître et sa maîtresse étant absents pour le moment, un étranger vê- tu très simplement, mais ayant une belle figure et un as- pect vénérable, entra dans la boutique, et prenant une paire de souliers, demanda à l'acheter. Le jeune homme ne se croyant pas en état de taxer ces souliers, refusa de les vendre ; mais l'étranger insistant, il les lui fit un prix excessif, espérant par là se mettre à l'abri de tout repro- che de la part de son maître, ou dégoûter l'acheteur. Ce- lui-ci donna le prix demandé, prit les souliers, et sortit. Il s'arrêta à quelques pas de la maison, et là d'une voix haute et ferme, il dit : « Jacob, Jacob, viens ici. » Le jeune homme fut d'abord surpris et effrayé d'entendre cet étranger qui lui était tout à fait inconnu, l'appeler ainsi par son nom de baptême ; mais s'étant remis, il alla à lui. L'étranger d'un air sérieux, mais amical, porta les yeux sur les siens, les fixa avec un regard étincelant de feu, le prit par la main droite, et lui dit : « Jacob, tu es peu de chose ; mais tu seras grand, et tu deviendras un autre homme, tellement que tu seras pour le monde un objet d'étonnement. C'est pourquoi sois pieux, crains Dieu, et révère sa parole ; surtout lis soigneusement les www.philosophe-inconnu.com 1 L’AURORE NAISSANTE – AVERTISSEMENT Écritures saintes, dans lesquelles tu trouveras des conso- lations et des instructions, car tu auras beaucoup à souf- frir ; tu auras à supporter la pauvreté, la misère, et des persécutions ; mais sois courageux et persévérant, car Dieu l'aime et t'est propice. » Sur cela l'étranger lui serra la main, le fixa encore avec des yeux perçants et s'en alla, sans qu'il y ait d'indi- ces qu'ils se soient jamais revus. Depuis cette époque, Jacob Boehme reçut naturelle- ment, dans plusieurs circonstances, différents dévelop- pements qui lui ouvrirent l'intelligence, sur les diverses matières, dont il a traité dans ses écrits. Celui dont je publie la traduction est le plus informe de ses ouvrages ; indépendamment de ce que c'est celui qu'il a composé le premier, et qu'il ne l'a pas terminé, en ayant été empêché par une suite des persécutions qu'il éprouva, il ne l'avait entrepris, ainsi qu'il le dit lui-même, que comme un mémorial, et pour ne pas perdre les no- tions et les clartés qui se présentaient en foule à son en- tendement, par toutes sortes de voies. Aussi cette Aurore n'est-elle pour ainsi dire qu'un germe et qu'une esquisse des principes que l'auteur a développés dans ses écrits subséquents. D'ailleurs comment aurait il pu produire à cette épo- que-là des fruits plus abondants et plus parfaits ? Ce nou- vel ordre de choses dans lequel étaient comme entraînées toutes les facultés de son être, ne lui offrait encore, en quelque façon, qu'un amas confus d'éléments en combus- tion. Ce n'était pas seulement un chaos ; mais c'était à la fois un chaos et un volcan ; et dans le choc et la crise où se trouvaient tous ces éléments, il ne pouvait saisir les objets qu'à la dérobée, comme il nous en avertit dans plusieurs endroits. Il avoue aussi très souvent son incapacité et son in- suffisance. Il déclare n'être encore que dans les douleurs de l'enfantement, et il dit formellement au chap. 21, que cette œuvre n'est que le premier bourgeon de la branche. Néanmoins dans les ouvrages qu'il a fait succéder à celui-ci, il faut convenir que quant à la forme et à la ré- daction, il y a aussi une infinité de choses à désirer. L'art d'écrire si perfectionné dans notre siècle, et dans le siècle précédent, ne l'était point lorsque cet auteur a vécu ; et même, soit par le rang où il était né, soit par www.philosophe-inconnu.com 2 L’AURORE NAISSANTE – AVERTISSEMENT son éducation, soit enfin par des raisons plus profondes, et qui ont permis que l'arbre fût recouvert d'une écorce aussi peu attrayante, afin d'éprouver ceux qui seraient propres ou non à manger de ses fruits, Jacob Boehme est resté, en fait de style, au-dessous des écrivains, dont il fut le contemporain ; ou pour mieux dire, il n'a pas même songé à avoir un style. En effet, il se permet des expressions et des compa- raisons peu distinguées ; il se laisse aller à des répétitions sans nombre ; il promet souvent des explications qu'il ne donne que fort loin de l'endroit où il les avait promises ; il se livre à de fatigantes déclamations contre les adversai- res de la vérité ; enfin pour en supporter la lecture, il ne faut nullement chercher ici le littérateur. En outre, il faut s'attendre à trouver dans cette Au- rore même, quelques contradictions, ou si l'on veut, quel- ques inadvertances. Quoique l'auteur annonce qu'il n'a écrit que pour lui et pour soulager sa mémoire, on ne pourra douter qu'en écrivant il n'ait eu en vue aussi les autres hommes, puisqu'à tous les pas il parle comme s'adressant à une seconde personne ; puisqu'il donne souvent des avis salutaires à ses lecteurs ; et que ces mêmes lecteurs, il les renvoie à la vie future, où, dit-il, ils ne pourront plus douter de ce qu'il avance ; enfin parce qu'il avoue en plusieurs endroits être obligé de publier le fruit de ses connaissances, de peur d'être condamné lors du jugement, pour avoir enfoui son talent. On a lieu de présumer également que, soit lui, soit les amis instruits qui l'ont connu, soit même les rédacteurs de l'édition allemande qui me sert de texte, ont fait quel- ques corrections à l'Aurore naissante ; et qu'ils y ont insé- ré, après coup, quelques passages qui ne paraissent pas à leur place, puisque vu leur profondeur, ils auraient dû être précédés d'explications et de définitions, qui en apprenant le sens qu'ils devaient avoir, les eussent rendus plus pro- fitables ; et parce qu'on trouve cités dans cette Aurore plusieurs des écrits de la même plume, qui n'ont été composés qu'après celui-ci. Il ne faut pas non plus être étonné de voir l'auteur entrer en matière, sans être retenu par des difficultés, qui arrêtent aujourd'hui toutes les classes scientifiques. Lors- qu'il songea à exposer sa doctrine, il n'eut point à com- battre des obstacles qui sont nés depuis, et qui rendraient à présent son entreprise si difficile. Les sciences physi- www.philosophe-inconnu.com 3 L’AURORE NAISSANTE – AVERTISSEMENT ques n'avaient point encore pris le rang dominant et presque exclusif qu'elles ont de nos jours ; elles n'étaient pas en conflit, comme elles le sont devenues, avec les sciences divines, morales et religieuses. Ainsi d'un côté, en parlant de la nature, Jacob Boehme pouvait employer alors les mots de propriétés, qualités, essences productrices, vertus, influences, qui sont comme proscrits de la nomenclature actuelle. De l'autre, en parlant des sciences divines, morales et religieuses, il trouvait tout établie dans la pensée des hommes l'existence de Dieu, celle de l'âme humaine, spi- rituelle et immortelle, celle d'une dégradation, et celle des secours que la main suprême transmet depuis la chute universellement et journellement à l'espèce humaine dé- générée ; et si à cette époque, on n'avait point encore appris à l'homme, qu'il peut et doit lire toutes ces notions là dans lui-même, avant de les puiser dans les traditions, ainsi que mes écrits le lui ont enseigné de nos jours, au moins la croyance commune était-elle accoutumée à les regarder comme fondamentales, et comme étant consa- crées dans ce qu'on appelle les livres saints. Car la révolution de Luther avait bien en effet dévoilé des abus très révoltants, mais ne portant point le flam- beau jusque dans le fond des choses ; elle laissait encore l'esprit de l'homme s'appuyer en paix et en silence, sur la persuasion de la dignité de son être, et sur des vérités, les unes terribles, les autres consolantes, dans lesquelles son cœur trouve uploads/Philosophie/ saint-martin-louis-claude-l-aurore-naissante-ou-la-racine-de-la-philosophie 1 .pdf

  • 22
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager