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See discussions, stats, and author profiles for this publication at: https://www.researchgate.net/publication/280876779 Wittgenstein et la philosophie du cinéma Article · January 2014 CITATIONS 0 READS 1,173 1 author: Some of the authors of this publication are also working on these related projects: Enseigner la philosophie avec le cinéma (dir.) View project Apocalypse View project Hugo Clemot Université Gustave Eiffel 44 PUBLICATIONS 8 CITATIONS SEE PROFILE All content following this page was uploaded by Hugo Clemot on 13 September 2015. The user has requested enhancement of the downloaded file. امخاطبات AL-MUKHATABAT ISSN 1737-6432 Numéro 09/Janvier 2014 Page 57 Wittgenstein et la philosophie du cinéma Hugo CLÉMOT (Université Panthéon-sorbonne, Paris 1 – PhiCo/EXeCO) Abstract Wittgenstein did not write a lot about film. His thought is nevertheless a precious resource to approach the analytical philosophy of film. His arguments and his defense of the autonomy of the humanistic understanding are indeed useful to question the assumptions of the leading approaches of the field. Among this assumptions, even the priority of the filmic theory over the practice of film criticism is put into question when one follows one of the philosophical heir of Wittgenstein, Stanley Cavell. ّص ملخ ّل مصدرا ّ تفكرِ مج إذا كاٌ فٔتجيشتآً قد استطاع اٌ ٓكتب ي مْضْع الشٔينا فإٌ مٔٔيا مقاربة اليقاشات الي تدّر ي فلشفة الشٔينا التحلٔلٔة . ّ حججُ ّ ّ بالفعل فإٌ دفاعُ عً استقالٔة الفَه اإىشاىٕ ا تلْح فحشب صاحة لشؤال ّجاٍة امياٍج ّ ي أّلْٓة اليظرٓة الفلنٔة ذاتَا على امنارسة ّنا ٍٕ جعليا ىيزع اى الشك امَٔنية،ّ إى اليقدٓة على إثر ما قاو بُ ّاحد مً بن ّرثتُ مً الفاسفة ّ ٍْ ستاىلٕ كفال . Résumé Si Wittgenstein a peu écrit sur le cinéma, sa pensée est une ressource précieuse pour aborder les débats qui animent la philosophie analytique du cinéma. En effet, non seulement ses arguments et sa défense de l’autonomie des Humanités s’y révèlent utiles pour interroger la pertinence des démarches dominantes, mais c’est la priorité même de la théorie filmique sur la pratique critique qu’on est conduit à remettre en cause à la suite de l’un de ses héritiers philosophiques, Stanley Cavell. امخاطبات AL-MUKHATABAT ISSN 1737-6432 Numéro 09/Janvier 2014 Page 58 1 Wittgenstein et le cinéma 1.1 Wittgenstein sur le cinéma Wittgenstein a peu écrit sur le cinéma. Dans son introduction à la lecture des Recherches philosophiques de Wittgenstein, David Stern nous apprend que Wittgenstein propose bien, dans un manuscrit de janvier 19291, une distinction entre monde mental « primaire » et monde physique « secondaire », qu’il illustre à l’aide d’une analogie cinématographique : le monde « intérieur » primaire de mon expérience est au monde « secondaire » qui comprend tout le reste, à savoir le monde « extérieur » mais aussi les autres esprits et l’essentiel de ma vie mentale, ce que l’image qu’on voit au cinéma est aux images de la pellicule filmique qui passent dans le projecteur2. Mais cette distinction est rejetée dès octobre 19293, les mondes primaire et secondaire n’étant plus considérés comme deux mondes, mais en fait comme deux façons de parler différentes que la philosophie aurait pour tâche de clarifier. Ce procédé analogique d’élucidation conceptuelle se retrouve dans d’autres textes et contextes problématiques comme au paragraphe 105 du Big Typescript4, aux paragraphes 51 et 54 des Remarques philosophiques5, à la page 19 de Wittgenstein et le Cercle de Vienne6, au paragraphe 233 des Fiches7, etc. Par exemple, Jacques Bouveresse en cite et commente plusieurs échantillons dans le contexte de la réflexion wittgensteinienne sur le temps8. Mais c’est à peu près tout et cela ne constitue pas à proprement parler une réflexion philosophique sur les problèmes conceptuels soulevés par le cinéma9. On tend d’ailleurs souvent à en déduire que le cinéma ne pouvait être pour lui qu’une distraction amusante, un moyen de se détendre à la fin de ses longues journées de dur 1 Ludwig Wittgenstein, Wittgenstein’s Nachlass, The Bergen Electronic Edition, Oxford University Press, 2000, manuscrit (MS ensuite) 105, p. 118. 2 Voir David Stern, Wittgenstein's Philosophical Investigations: an introduction, Cambridge, Cambridge University Press, 2004, p. 27-28. 3 Wittgenstein, Wittgenstein’s Nachlass, op. cit., MS 111, p. 8-9. 4 Wittgenstein, The Big Typescript, Wiener Ausgabe, Band 11, Michael Nedo (dir.), Vienne et New York, Springer, 2000, § 105, p. 519-520. 5 Wittgenstein, Philosophische Bemerkungen, Francfort, Suhrkamp, 1948 ; Remarques philosophiques, § 51, trad. fr. Jacques Fauve, Paris, Gallimard, 1975, p. 81 et § 54, p. 83. 6 Ludwig Wittgenstein und der Wiener Kreis, Oxford, Blackwell, 1967 ; trad. fr. Gérard Granel, Wittgenstein et le Cercle de Vienne, Mauvezin, TER, 1991, p. 19. 7 Wittgenstein, Zettel, G.E.M. Anscombe et G.H. von Wright (éd.), Oxford, Blackwell, 1967 ; trad. fr. Jean-Pierre Cometti et Élisabeth Rigal, Fiches, Paris, Gallimard, 2008, § 233, p. 63. 8 Jacques Bouveresse, « Les « énigmes du temps » », Essais III. Wittgenstein et les sortilèges du langage, Marseille, Agone, 2003, p. 210-234. 9 Jean-Philippe Narboux soutient qu’il faut distinguer cet emploi analogique d’un autre usage argumentatif joué par le film dans la réflexion de Wittgenstein sur le concept de preuve mathématique telle qu’on la trouve exposée dans ses Cours sur les Fondements des mathématiques. Voir Jean-Philippe Narboux, « La preuve par le film », Stanley Cavell. Cinéma et philosophie. Actes du colloque Stanley Cavell, Marc Cerisuelo et Sandra Laugier (éd.), Paris, Presses de la Sorbonne Nouvelle, 2001, p. 151-190 qui commente le passage de Wittgenstein’s Lectures on the Foundations of Mathematics (1939), Cora Diamond (ed.), Chicago et Londres, The University of Chicago Press, 1976, p. 72-73 ; trad. fr. E. Rigal, Cours sur les fondements des mathématiques (1939), Mauzevin, TER, 1995, p. 64-65. امخاطبات AL-MUKHATABAT ISSN 1737-6432 Numéro 09/Janvier 2014 Page 59 labeur conceptuel1, « comme une douche [qui le] lavait de [s]on cours2 », pour citer ce que Derek Jarman lui fait dire dans l’excellent film qu’il lui a consacré. Pourtant, ce que dit Wittgenstein à un moment dans ses Remarques mêlées semble témoigner de ce que certains films avaient aussi à ses yeux des vertus instructives : « Un film américain, bête et naïf, peut, malgré toute sa bêtise, et même grâce à elle, nous apprendre quelque chose. Un film anglais, dans sa fatuité sans naïveté, ne peut rien nous apprendre. J’ai souvent tiré une leçon d’un film américain stupide3. » Le pari de cet article est que, malgré la rareté de ses remarques écrites sur le cinéma, Wittgenstein peut nous aider à approcher philosophiquement le phénomène cinématographique. 1.2 La philosophie du cinéma d’après Wittgenstein À la suite de Vincent Descombes, on peut en effet distinguer trois usages possibles de la philosophie de Wittgenstein4 : « exégétique », « herméneutique » et « dialectique ». L’usage exégétique consiste à rechercher ce que Wittgenstein a vraiment pensé à partir d’une étude minutieuse de ses textes. L’usage herméneutique revient à se demander ce que Wittgenstein aurait dit sur tel ou tel sujet qu’il n’a pas, ou seulement très peu, abordé. L’usage dialectique cherche à employer les arguments de Wittgenstein pour penser les problèmes qui se posent à nous. Or, si l’usage exégétique de Wittgenstein sur le cinéma semble à première vue fort restreint compte tenu de la rareté des sources primaires, cela n’est pas le cas pour les deux autres. 1.2.1 L’emploi dialectique : Wittgenstein critique de la philosophie du cinéma On retrouve en effet déjà dans les débats qui se sont développés dans la branche analytique de la philosophie contemporaine du cinéma un usage « dialectique » des arguments de Wittgenstein. À l’instar de Richard Allen5 et de Malcolm Turvey1, il est 1 Voir Robert Sinnerbrink, New Philosophies of Film. Thinking Images, introduction, New York et Londres, Continuum, 2011, p. x, qui cite Richard A. Gilmore, Doing Philosophy at the Movies, Albany, State University of New York Press, 2005. 2 Discours attribué à Wittgenstein dans le film que Derek Jarman lui a consacré en 1993. Voir Derek Jarman, « Wittgenstein. Le film de Derek Jarman », in Derek Jarman/Terry Eagleton, Wittgenstein: The Terry Eagleton Script and the Derek Jarman Film, Londres, BFI, 1993 ; trad. fr. Patricia Farazzi, Derek Jarman/Terry Eagleton, Wittgenstein. Le scénario de Terry Eagleton ; le film de Derek Jarman, Paris-Tel Aviv, L’éclat, 2005, p. 139. 3 Wittgenstein, Vermischte Bemerkungen (1977), G.H. von Wright et Heikki Nyman (dir.), 2nde éd., Oxford, Basil Blackwell, 1980, [accès restreint en ligne] [URL : <http://ota.ahds.ac.uk/desc/0562>], consulté le 15 janvier 2012 ; trad. angl. P. Winch, Culture and Value, Chicago, Chicago University Press, 1980 ; trad. fr. G. Granel, Remarques mêlées, Paris, GF Flammarion, 2002 (1984), p. 124. 4 Voir Vincent Descombes, « Réponse sous forme d’entretien », Vincent Descombes. Questions disputées, sous la direction de Bruno Gnassounou et Cyrille Michon, Nantes, Cécile Defaut, 2007, p. 378-379. 5 Voir R. Allen, Projecting Illusion. Film spectatorship and the impression of reality, New York, Cambridge University Press, 1995 ; « Film Spectatorship: A Reply to Murray Smith », The Journal of Aesthetics and Art Criticism, vol. 56, no 1, hiver, 1998, p. 61-63 ; R. Allen, « Looking at Motion Pictures (Revised) » [en ligne], uploads/Philosophie/hugo-clemot-sur-le-cinema.pdf
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- Publié le Jul 29, 2022
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