1 IIA309, in Dialectics. (Entretiens de Varna, 1973). Éd. C. Perelman, M. Nijho
1 IIA309, in Dialectics. (Entretiens de Varna, 1973). Éd. C. Perelman, M. Nijhoff, 1975, pp. 92-108 Les formes nouvelles de la justice sociale. Essai de conclusion IIA115, in Christianisme social 67, juillet-septembre 1959, pp. 462-471 Les formes nouvelles de la justice Note éditoriale. Note éditoriale. « Le ‘lieu’ de la dialectique » constitue le texte d’une conférence que Ricœur professe en 1973 à l’occasion des Entretiens organisés par l’Institut International de Philosophie à Varna - en Bulgarie – autour du thème « Dialectiques ». Comme le titre le suggère, Ricœur aborde une question à l’époque très débattue, à la fois historico-philosophique et théorique : l’identification du lieu génétique et privilégié de la dialectique hégélienne, qu’il ne situe ni dans l'auto-développement de la pensée et du langage ─ selon la position défendue, par exemple, par Jean Hyppolite ─ ni dans la nature, au sens de Engels et du marxisme-léninisme orthodoxe. Ricœur présente plutôt la dialectique comme le seul discours adéquat pour penser l’« action sensée », en reprenant ─ dans une synthèse très efficace ─ les arguments développés dans les années précédentes, dès le Cours sur Le concept philosophique de volonté (1967) et le projet d’enseignement sur le Discours philosophique de l’action (1969), présenté à l’occasion de sa candidature au Collège de France : considérations dont on trouve un écho dans l’essai Le problème de la volonté et le discours philosophique (1968) ─ réédité dans le recueil Anthropologie philosophique 1 ─ aussi bien que dans l’article « Volonté », rédigé pour l’Encyclopædia universalis. C’est la conviction selon laquelle ni la phénoménologie ni la philosophie analytique ne permettent de « penser » dans toute son amplitude l’« actualisation de la liberté », qui conduit Ricœur à s’interroger sur la possibilité de réactiver la « dialectique de la volonté » déployée par Hegel dans les Principes de la philosophie du droit, tout en renonçant au système et à l’ontologie qui le sous-tend. La valeur ajoutée et l’intérêt principal de l’article « Le lieu de la dialectique » réside dans la prise de distance de Ricœur par rapport à l’ « élargissement-affaiblissement » de la dialectique au champ entier de l’expérience ─ en tant qu’expérience « dialogique » ─ qu’il attribue et reproche à Gadamer. Cette prise de distance permet de cerner la spécificité, souvent négligée, de la « reprise » ricœurienne de la dialectique dans l’herméneutique. (R. Picardi2, pour le Fonds Ricœur). 1 P. Ricœur, Anthropologie philosophique. Écrits et conférences 3, Textes rassemblés, établis, annotés et présentés par Johann Michel et Jérôme Porée, Paris, Éditions du Seuil, 2013, pp. 123-145. 2 Roberta Picardi a établi ce texte grâce au soutien de la bourse intra-européenne Marie Curie (IEF/ Intra- European Fellowship) de la Commission européenne (Numéro du Programme PIEF-GA-2012-328259). « Le 'lieu' de la dialectique » IIA309, in Dialectics. (Entretiens de Varna, 1973). Éd. C. Perelman, M. Nijhoff, 1975, pp. 92-108 © Comité éditorial du Fonds Ricœur 2 IIA309, in Dialectics. (Entretiens de Varna, 1973). Éd. C. Perelman, M. Nijhoff, 1975, pp. 92-108 Mots clés : Dialectique, volonté, action, désir, théorie-praxis, historicité, expérience. [Page 92] emander quelle est la place originaire de la dialectique, c'est, de manière plus explicite, poser la question suivante : si la dialectique a un sens, quelle est l'expérience centrale, paradigmatique, susceptible de donner un contenu à cette revendication? Mais il faut auparavant élucider ce qui est signifié par la clause hypothétique : si la dialectique a un sens. L'hypothèse, me semble-t-il, comporte deux intentions : d'une part, certaines choses n'existent ou ne sont connues que si une autre chose opposée existe ou est connue en même temps. D'autre part, l'opposition est telle qu'elle ne s'achève pas dans un zéro, c'est-à-dire ni dans le zéro logique produit par la contradiction de deux propositions, ni dans le zéro physique résultant de l'équilibre de deux forces opposées. L'hypothèse de la dialectique s'inscrit donc en dehors des deux sortes d'opposition décrites par Kant dans « Essai pour introduire en philosophie le concept de grandeur négative ». Si la dialectique a un sens, une troisième sorte d'opposition doit être supposée, que l'on peut appeler une opposition productive, en entendant par là une opposition qui, d'une manière ou d'une autre, permet, favorise ou engendre une chose nouvelle, dans la réalité ou dans l'expérience, qualitativement distincte des termes opposés. Il doit être bien entendu que ces deux caractères ne sont pas autre chose que des critères d'identification qui ne sauraient être transformés en traits formels, sous peine de contredire le caractère fondamental de la dialectique qui apparaîtra plus loin, à savoir de ne procéder que du mouvement même des contenus. Si la notion d'opposition productive a un sens, la première question qui se pose est de savoir où une telle opposition productive peut être observée, identifiée, reconnue, à titre primaire, de telle manière que sa première exemplification devienne un paradigme, un modèle, pour des cas semblables. Trois « lieux » peuvent entrer en compétition et devenir de bons [Page 93] candidats à ce rôle paradigmatique : la logique, la nature ou la réalité humaine. Ces trois possibilités sont précisément celles qui ont été explorées par Hegel et qui fournissent à son système ses trois divisions principales : la dialectique « avant la création, » la dialectique dans les choses naturelles, la dialectique dans les choses humaines. Ce sont là, en effet, les trois parties de L'Encyclopédie des Sciences Philosophiques. Mais dans la philosophie hégélienne, sous le régime du savoir absolu, aucune question de priorité entre les trois candidats ne peut se poser. Les trois syllogismes qui achèvent l'Encyclopédie des Sciences Philosophiques signifient précisément qu'il est toujours possible de traiter une des régions du royaume dialectique comme la médiation entre les deux autres. Il peut être dit avec un droit égal que la nature médiatise la logique et l'esprit, que la logique médiatise la nature et l'esprit, que l'esprit médiatise la logique et la nature. L'hégélianisme est ce système où la question de priorité ne se pose pas et où les trois lieux possibles de la dialectique sont rigoureusement réciproques. La question de priorité se pose dès que la prétention au savoir absolu en philosophie s'effondre, c'est-à-dire dès que le savoir absolu s'avère n'être qu'une prétention. Toutes nos questions sur la dialectique procèdent de cet effondrement, de notre incrédulité à l'égard de la prétention au savoir absolu. Tous ceux qui, à des titres divers, se disent dialecticiens partent de cette incrédulité ; c'est pourquoi ils ne tiennent dans leurs mains que les morceaux brisés du système effondré. Ma propre investigation n'échappe pas à la règle. Quelqu'un pourrait dire ici: s'il n'est plus possible d'être hégélien au sens de Hegel, pourquoi se soucier encore de dialectique? Pourquoi ne pas évacuer le problème avec la solution ? La question est parfaitement légitime. Je pense néanmoins qu'il ne faut pas vider l'enfant avec le bain, ni rejeter toute dialectique en même temps que le savoir absolu. La question est en effet de savoir si chez Hegel lui- même la conviction qu'il y a quelque part de la dialectique, que quelque chose est dialectique, n'a pas précédé le système lui-même et ne l'a pas motivé. On ne peut écarter l'hypothèse que le système soit lui-même une sorte d'arrangement ultime de procès dialectiques fragmentaires, capables de survivre au D 3 IIA309, in Dialectics. (Entretiens de Varna, 1973). Éd. C. Perelman, M. Nijhoff, 1975, pp. 92-108 système d'une manière ou de l'autre, parce qu'ils n'en résultent pas, mais parce qu'ils l'ont plutôt motivé. La lecture de Hegel m'a renforcé dans cette conviction. C'est pourquoi il me paraît légitime de demander: « qu'est-ce qui est dialectique? », même si nous ne disposons d'aucun système pour embrasser tous les processus dialectiques partiels dans une totalité close. [Page 94] Si donc il est légitime de s'interroger en général sur le lieu de la dialectique, il peut l'être aussi de tenter d'identifier la région privilégiée où quelque chose est susceptible d'être dialectique. Ma thèse est que, s'il y a un lieu où des oppositions productives peuvent être observées, reconnues, identifiées, ce lieu est la réalité humaine. La logique me paraît être en effet disqualifiée comme candidate. Et cela, pour une raison fondamentale qui tient à la nature même de la dialectique. Si Hegel a raison, la logique dialectique n'est pas une logique formelle, mais le mouvement même des choses. Il ne saurait donc y avoir une logique dialectique, au sens où nous prenons aujourd'hui ce mot, c'est-à-dire au sens d'une discipline formelle, indifférente à son contenu. Si quelque chose est dialectique, cela signifie précisément que les aspects logiques, auxquels nous avons déjà fait allusion en cherchant quelque critère nominal de la dialectique, ne sauraient être formalisés. La dialectique ne peut être que le procès même des choses procédant par opposition productive. Mais la nature ne peut non plus être tenue pour le foyer primaire du procès dialectique. C'est seulement, me semble-t-il, par une sorte de rétrospection de la réalité humaine dans la nature que la nature peut apparaître après coup comme la condition réelle, l'étape préparatoire et uploads/Philosophie/le-lieu-de-la-dialectique.pdf
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- Publié le Sep 26, 2021
- Catégorie Philosophy / Philo...
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