ESTHÉTIQUE ET MYSTIQUE: Étude critique d'un livre récent Author(s): Louis Vande

ESTHÉTIQUE ET MYSTIQUE: Étude critique d'un livre récent Author(s): Louis Vander Kerken Source: Revue philosophique de Louvain, Vol. 47 (1949), pp. 126-136 Published by: Peeters Publishers Stable URL: https://www.jstor.org/stable/26333205 Accessed: 28-05-2022 23:50 UTC JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact support@jstor.org. Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at https://about.jstor.org/terms Peeters Publishers is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Revue philosophique de Louvain This content downloaded from 154.59.125.43 on Sat, 28 May 2022 23:50:23 UTC All use subject to https://about.jstor.org/terms 126 Louis Vander Kerken sant à expliciter les motifs de la conviction qu'il s'est formée grâce à la synthèse par convergence. Enfin la connaissance d'autrui ne semble pas pouvoir se libérer d'une part plus ou moins importante de « construction » à partir d'éléments objectifs sans doute, mais qui semblent finalement dé pendants, dans leur interprétation et donc dans leur utilisation syn thétique, de l'expérience personnelle du connaissant, en y compre nant se s connaissances générales. Bref, il semble difficile d'admettre que nous puissions atteindre en ce domaine un degré de certitude comparable à celui que nous donne le raisonnement. Hector HaROUX. Louvain. Hector HaROUX. ESTHÉTIQUE ET MYSTIQUE Etude critique d'un livre récent « Let us... become quite clear, as far as it is possible to do so, without being a mystic...» (p. 187). Le problème de l'affinité qui pourrait exister entre l'expérience esthétique et l'activité religieuse ne cesse, semble-t-il, d'intéresser les esprits. A son tour M. Geddes Mac Gregor, docteur de l'université d'Oxford, vient de consacrer une étude à la question. Son livre nous paraît assez important et en certains points assez discutable aussi, pour que nous nous y attardions quelque peu (1). M. Mac Gregor a cru devoir commencer son étude par une recherche sur l'essence de l'acte esthétique considéré en lui-même. Il a très bien senti que le problème de l'affinité dépend avant tout de la solution du problème esthétique comme tel : « for, as we shall see, to have ascertained the nature of aesthetic experience is at least half the battle » (p. 121). Son livre se divise naturellement en <1J Gcddca Mac GREGOR, Aeathetic Expérience in Religion. London, Mac millan, Co. Ltd, 1947, 264 pp. This content downloaded from 154.59.125.43 on Sat, 28 May 2022 23:50:23 UTC All use subject to https://about.jstor.org/terms Esthétique et mystique 127 deux parties : qu'est-ce que cette activité esthétique ? et quel est son rapport avec l'activité religieuse ? Quant à la première de ces questions, il préfère l'aborder par l'histoire de la philosophie esthétique, méthode qui présente de réels avantages, à côté de certains inconvénients. — Qu'est-ce que le beau ? Question qui ne date pas d'hier. Un bon nombre de philo sophes ont essayé d'y trouver une réponse : le Socrate de Platon, Platon lui-même, Aristote, Plotin, saint Thomas, Vico, Kant, Hegel, les modernes. Seulement pour la plupart d'entre eux — et peut-être pour tous — la question esthétique se pose en fonction d'une pensée philosophique déjà établie ; autant dire qu'ils l'ont abordée avec une idée préconçue, celle de trouver avant tout une solution en accord avec leur système, au risque de ne pas tenir suffisamment compte des faits. Heureusement Benedetto Croce fait exception. L'auteur le considère comme le maître de l'esthétique moderne et au fond de l'esthétique tout court. Le second chapitre nous donne un résumé clair et intéressant de l'esthétique crocéenne, et qui suit pas à pas les dix-huit chapitres de YEstetica. Ce n'est pas que M. Mac Gregor admire sans réserve cette esthétique brillante, riche, mais un peu cavalière, et qui ne s'em barrasse guère de points de départ dûment contrôlés. Et d'abord il lui reproche son agnosticisme. La philosophie pour Croce est plutôt une science de la totalité de l'esprit concret : la scientia scientiarum qui s'oppose aux sciences proprement dites uniquement comme à des connaissances systématiques partielles. Au fond cela inclut déjà une certaine négation de la possibilité d'une pensée vraiment philo sophique comme nous l'entendons, nous ; mais, comme le remarque très bien l'auteur : « Merely to deny metaphysics is, from the stand point of metaphysics, to defend a metaphysic theory ». — M. Mac Gregor refuse avec décision cette attitude ; il défend, lui, un réalisme spirituel, dont la note réaliste est assez prononcée. Ainsi par exemple : on sait que Croce, sans autre forme de procès, a tout simplement réparti l'activité de l'esprit humain en quatre domaines bien distincts : celui de l'intuition (esthétique) ; celui de la pensée, celui de l'économie et celui de la morale. Dans cette division, seule l'intuition est première et indépendante : pas de pensée sans intuition, pas d'utilité sans intuition et pensée, pas de morale sans tout le reste. Nous regrettons que l'auteur accepte d'emblée cette répartition : « That is to eay, we accept his doctrine of four moments or grades of mind, and the relationships that he This content downloaded from 154.59.125.43 on Sat, 28 May 2022 23:50:23 UTC All use subject to https://about.jstor.org/terms 128 Louis Vander Kerken establishes amongst them in the Estetica » (p. 78). N'est-ce pas se faciliter la tâche, voire s'exposer aux dangers d'un certain empirisme ? Un exposé dialectique η'aurait-il pas été ici à sa place ? 11 y a bien des corrections, des amendements, des additions, mais qui ne par viennent pas à nous tranquilliser tout à fait. Outre son agnosticisme M. Mac Gregor reproche encore à Croce d'avoir identifié à ce point intuition et expression esthétique que — toujours selon l'auteur — toute communication de l'expérience esthé tique devient impossible. 11 faudrait, semble-t-il, pour cela quelque chose qui dépasse ce qu'il y a de strictement individuel et par con séquent d'incommunicable dans cette expérience, une sorte d'objet commun que la forme esthétique assumerait, un point de rencontre possible, jouissant nécessairement d'une certaine indépendance vis à-vis des sujets respectifs, bref quelque chose de physiquement réel, mettons « the physical object that 1 have hung on the wall and called Moonlight ». Malheureusement Croce « is quite agnostic — encore son agnosticisme ! on finira bien par admettre qu'il est néfaste — about the existence of this physical object apart from mind » (p. 76). 11 faudra donc bien chercher un peu plus loin que Croce. La solution, l'auteur la trouve dans YEinfühlung de Lipps. — Peut être cependant abandonne-t-il ici un peu vite son maître de la pre mière heure. Un philosophe moins effrayé par ce soi-disant agnos tique n'aurait-il pas essayé quand même — oh, sans résultat définitif, bien sûr — de le raisonner plus longuement ? Et M. Mac Gregor lui-même ne l'a-t-il pas senti vaguement : « To this hypothesis Croce might no doubt say that a doctrine of Einfühlung so interpreted does not say more than he would say » (p. 89). Mais peu importe, le complément de la théorie de Lipps, comme M. Mac Gregor nous l'explique, s'avère bien nécessaire et inévitable. Croce, Lipps, c'est bien, ce n'est pas tout : il y a encore saint Thomas. Lui aussi a traité de l'intuition sensible — seulement est elle aussi « quite alogical, innocent of ail intellectual reflection » que l'intuition crocéenne ? — Bien sûr, nous dit-on, équivalemment, la doctrine de saint Thomas en ce point est géniale, profonde, au moins pour son temps. Elle éclaire encore de sa lumière indéfectible la recherche philosophique de nos jours ; mais saint Thomas a cessé de philosopher sur cette terre depuis bien des siècles ; entretemps la pensée humaine ne s'est point arrêtée et nous avons maintenant « our difficultés in the light of modem knowledge » (p. 119). Inutile donc, nous dit M. Mac Gregor, de chercher chez saint Thomas une This content downloaded from 154.59.125.43 on Sat, 28 May 2022 23:50:23 UTC All use subject to https://about.jstor.org/terms Esthétique et mystique 129 solution dernière. Autant chercher dans le Deutéronome des principes pour l'architecture des églises modernes : « One might almost as well ask whether Moses would have prefered Palladian dômes or Per pendicular towers » (p. 119). Il se pourrait cependant que tout le monde ne soit pas de cet avis : les thomistes d'aujourd'hui, même les plus progressistes, seraient peu satisfaits si on leur déclarait que le Docteur angélique est distant d'eux à peu près comme le taber nacle qui abritait l'arche d'alliance l'est de nos églises d'aujourd'hui. Disons donc que l'auteur a exagéré un peu pour mieux nous faire saisir une pensée qui contient certainement de la vérité. L'apport de saint Thomas au problème qui nous occupe est somme toute très réel, quoiqu'un peu négatif cependant, bref : « we do not believe that one who so loved and sought truth as did Saint Thomas would have seriously opposed our view, uploads/Philosophie/louis-vander-kerken-esthetique-et-mystique-etude-critique-d-x27-un-livre-recent.pdf

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