II/ De la notion de « Communauté linguistique » à celle de « politique linguist

II/ De la notion de « Communauté linguistique » à celle de « politique linguistique» La pertinence des différentes variations à travers le temps, l’espace ou les strates sociales qui caractérisent toutes les langues vivantes, servent à définir des groupes particuliers. Avec ces groupes se pose le problème de savoir ce que l’on entend par : « communauté linguistique ». Tout au long de l’histoire, chaque Etat-Nation s’est aventuré à mettre en place pour l’ensemble de ses communautés présentes sur son territoire une politique ou des politiques linguistiques particulières comme par exemple le Canada, l’Afrique du Sud, la France etc. Communauté linguistique ou sociale ? Dés que la linguistique s’est mise en place la notion de Communauté linguistique a été utilisée par différents linguistes qui chacun lui a donné une définition différente. Par exemple pour Léonard Bloomfield (Le langage, Paris, Payot, P.44.) : Une communauté est un groupe de gens qui agit au moyen d’un discours …Les membres d’une communauté linguistique peuvent parler d’une façon si semblable que chacun peut comprendre l’autre ou peuvent se différencier au point que des personnes de régions voisines peuvent ne pas arriver à se comprendre les unes avec les autres». Cette affirmation que des membres d’une même communauté peuvent ne pas se comprendre entre eux nous semble toujours paradoxale. Pour André Martinet (Eléments de linguistique générale, Paris, Armand colin, 1964,p.148) la communauté linguistique apparaît quand: « Il y a langue, dés que la communication s’établit (…) et qu’on a à faire avec une seule et même langue tant que la communication est effectivement assurée ». Pour ces deux linguistes c’est la langue en usage qui préside à la définition de la « communauté linguistique » et non pas la communauté elle-même. William Labov (in Sociolinguistique, Payot, Paris, 1975, P. 338.) lui, ne considère pas la communauté linguistique : « comme un ensemble de locuteurs employant les mêmes formes » mais « comme un groupe qui partage les mêmes normes quant à la langue …..et comme un groupe de locuteurs qui ont en commun un ensemble d’attitudes sociales envers la langue ». Enfin nous terminerons avec Charles Ferguson (in Diglossia, Word, vol.15,1959) qui au travers de sa réflexion sur la diglossie définit la communauté linguistique de façon implicite : « Dans beaucoup de communautés linguistiques, deux ou plusieurs variétés de la même langue sont utilisées par certains locuteurs dans des conditions différentes ». On remarque à l’instar de Louis-Jean Calvet (in Sociolinguistique, Que sais-je ? Paris, 2004) que dans tous ces exemples de définitions, la démarche est la même on part de la langue (sans la définir pour définir le groupe), cependant qu’un certain nombre de points ne sont pas évoqués par leur auteur. Louis–Jean Calvet les présente dans le document : Qu’est-ce qu’une communauté linguistique ? que vous avez en document additif Voyons de façon générale de quoi relève une politique linguistique en termes de définition, gestion du plurilinguisme, des exemples d’actions sur la langue. Une science n’a de la force que si elle se traduit par une application forte sur le terrain. Ainsi elle peut démontrer son utilité et surtout son efficacité sociale quand il s’agit d’une science humaine. Ainsi les applications de la sociolinguistique sont nombreuses mais là où elles ont été majeures et très élaborées concerne l’intervention sur les langues et les relations entre l’Etat et les langues. Pour mieux comprendre les enjeux, reportons nous sur les deux définitions importantes proposées par Louis-Jean Calvet (op. cit) sur : 1) la politique linguistique 2) la planification linguistique Pour la politique linguistique : « Un ensemble de choix conscients concernant les rapports entre langue(s) et vie sociale » Pour la planification linguistique:« la mise en pratique concrète d’une politique linguistique» soit le passage à l’acte par les autorités compétentes ou n’importe quel autre groupe. Par exemple on parle souvent de « politique linguistique familiale » élaborée au sein de la famille ou bien un groupe, par exemple : un groupe de l’ethnie Serer se réunissant en congrès pour mettre en place leur propre politique linguistique. Cependant que, dans le rapport entre vie sociale et langue seul l’Etat a le pouvoir de passer au stade de la planification et de mettre en place sur le terrain ses choix politiques souvent dictés par un consensus légitimé par le vote d’un parlement ou autre lorsqu’il s’agit d’une démocratie. Il y a cependant des politiques linguistiques qui sont trans-frontalières par exemple : celle de la francophonie déployée et soutenue par l’Organisation Internationale de la Francophonie. Comme il existe de petites entités qui dans le même Etat fait l’objet d’une politique linguistique spécifique comme en France avec les langues régionales : le breton, le créole etc. Toute politique linguistique implique une gestion du plurilinguisme que Louis - Jean Calvet définit selon deux modes à l’intérieur « in vivo » et à l’extérieur « in vitro ». Selon lui l’une procède des pratiques sociales c’est la gestion in vivo de l’intérieur concerne la façon dont les locuteurs confrontés chaque jour à des problèmes de communication arrivent à les résoudre. Par exemple la création des parlers minimas ou langues approximatives comme les sabirs et les pidgins, ou bien les langues véhiculaires comme le swahili pour l’Afrique de l’Est, l’hindi pour l’Inde, ou le mandarin pour la Chine. Ce sont ici des usages imposés par les pratiques sociales. Et l’autre de l’intervention sur ces pratiques, c’est la gestion in vitro, qui elle, va concerner le pouvoir, les institutions au travers des spécialistes. En s’appuyant sur les descriptions, analyses, propositions et hypothèses sur les situations linguistiques émises par les linguistes depuis leur laboratoire de recherche, les pouvoirs publics vont faire des choix et les appliquer. Ces deux approches sont différentes et peuvent générer des conflits au niveau de leurs rapports, dans le sens ou les choix in vitro peuvent aller à contre sens de la gestion in vivo ou des sentiments linguistiques des locuteurs, comme par exemple imposer à toute une nation une langue nationale dont personne ne veut. Par conséquent on voit bien comme le souligne Calvet que : « la politique linguistique pose donc tout à la fois des problèmes de contrôle démocratique (ne pas laisser faire n’importe quoi par les « décideurs » et d’interaction entre l’analyse des situations que fait le pouvoir et celle souvent intuitive du peuple». La politique linguistique peut aussi amener des changements volontaires dans la langue suite à des interventions sur la morphologie, la grammaire ou le lexique. Ces interventions ont plusieurs fonctions dont les plus importantes sont la modernisation notamment dans le lexique et l’écriture exemple avec chinois, son épuration comme pour le turc en 1923 ou sa défense en la renforçant à tous les niveaux comme pour le norvégien en 1814. Voir dans les documents additifs le texte de Calvet sur Exemples de réformes sur les langues On voit donc que toute politique linguistique a une double fonction, celle de relever à la fois du symbolique et de l’idéologie comme avec la Norvège : effacer à tout prix toute trace de la domination danoise et ainsi d’affirmer à tous par l’unification linguistique la réalité de la nation norvégienne. En conclusion sur cette partie nous dirons que dans les situations plurilingues, les Etats parfois font la promotion de telle ou telle langue qui jusqu’alors avait été dominée ou bien retire à d’autre un statut dont elle jouissait. Tout cela revient en fait à modifier le statut et les fonctions sociales des langues en présence. Calvet illustre ce propos par l’exemple de l’Indonésie qui devenue indépendante en 1940 décide d’adopter le malais comme langue nationale langue qui était principalement utilisée dans les ports et sur les marchés comme langue de communication. Alors qu’à l’époque la langue la plus parlée dans l’archipel était le javanais au côté de plus de 200 parlers différents regroupés en 17 ensembles dialectaux. Ce choix avait l’avantage de mettre en fonction officielle « la langue de personne» donc pas de conflits ethniques à son sujet. Il s’agit donc là d’une intervention in vitro sur la langue, en effet celle-ci sera rebaptisée bahasa indonesia : langue indonésienne. Il fallait lui donner un lexique approprié à ses nouvelles fonctions de langue nationale et officielle et pour ce faire on décida d’une stratégie « d’asiatisation » du lexique ne jamais choisir un terme d’une langue internationale européenne s’il n’en existait pas en bahasa, toujours prioritairement le prendre dans une langue asiatique. Enfin on peut se demander, en reprenant L-J Calvet à la lumière de ce que l’on a vu précédemment, ce que doit être la langue pour qu’une politique linguistique soit possible ? La réponse présuppose deux propriétés de la langue : 1) la propriété de changement interne comme on l’a vu dans la 1ere partie du cours. Ce changement est visible tout au long de l’histoire d’une langue car comme l’avait dit Saussure en son temps : toutes les langues changent invariablement à travers le temps (axe diachronique) ; 2) la propriété de changement externe à savoir les changements dans les rapports uploads/Politique/ 2eme-partie-de-la-notion-de-communaute-linguisitque-a-celle-de-politique-ling.pdf

  • 30
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager