NOTE D’ANALYSE Le Mécanisme africain d’évaluation par les pairs : un outil au s
NOTE D’ANALYSE Le Mécanisme africain d’évaluation par les pairs : un outil au service de la gouvernance Par Claire Magnoux 12 septembre 2014 Résumé Le Mécanisme africain d’évaluation par les pairs ou MAEP est un instrument, au rayonnement continental, établi par et pour les États africains. Regroupant 34 pays sur 54 sur la base d’une adhésion volontaire, il est destiné à évaluer les pratiques des États en matière de gouvernance, dans quatre domaines : la démocratie et la gouvernance politique, la gouvernance et la gestion économiques, la gouvernance d’entreprise et le développement socio-économique. En garantissant à la fois une auto-évaluation de l’État, une évaluation externe et enfin une évaluation par les pairs, le mécanisme offre l’opportunité d’une double fenêtre de dialogue : entre l’État et sa société civile et entre les États eux-mêmes. ________________________ Abstract African Peer Review Mechanism: insight and perspectives The African Peer Review Mechanism (APRM) is a review mechanism settled for and by African countries. 34 countries on 54 voluntarily joined the APRM. Its aim is to assess state practice of governance in four areas: democracy and political governance, economic governance and management, corporate governance and socioeconomic development. It allows for a self-assessment, an external assessment and a peer review, and so creates two-folded dialog opportunity: between state and its civil society and between states themselves. GROUPE DE RECHERCHE ET D’INFORMATION SUR LA PAIX ET LA SÉCURITÉ • 467 chaussée de Louvain B – 1030 Bruxelles Tél. : +32 (0)2 241 84 20 Fax : +32 (0)2 245 19 33 Courriel : admi@grip.org Internet : www.grip.org Fondé à Bruxelles en 1979 par Bernard Adam, le Groupe de recherche et d’information sur la paix et la sécurité s’est développé dans un contexte particulier, celui de la Guerre froide. Composé de vingt membres permanents et d’un vaste réseau de chercheurs associés, en Belgique et à l’étranger, le GRIP a depuis acquis une expertise reconnue sur les questions d’armement et de désarmement (production, législation, contrôle des transferts, non-prolifération), la prévention et la gestion des conflits (en particulier sur le continent africain), l’intégration européenne en matière de défense et de sécurité, et les enjeux stratégiques asiatiques. Centre de recherche indépendant, le GRIP est reconnu comme organisation d’éducation permanente par la Fédération Wallonie-Bruxelles. En tant qu’éditeur, ses nombreuses publications renforcent cette démarche de diffusion de l’information. En 1990, le GRIP a été désigné « Messager de la Paix » par le Secrétaire général de l’ONU, Javier Pérez de Cuéllar, en reconnaissance de « Sa contribution précieuse à l’action menée en faveur de la paix ». NOTE D’ANALYSE – 12 septembre 2014 MAGNOUX Claire. Le Mécanisme africain d’évaluation par les pairs : un outil au service de la gouvernance. Note d’Analyse du GRIP, 12 septembre 2014, Bruxelles. http://www.grip.org/fr/node/1354 ― 2 ― Introduction Le Mécanisme africain d’évaluation par les pairs (MAEP) a fêté ses onze ans le 9 mars 2014. Cette structure peu connue et singulière vise principalement les États africains, afin que l’évaluation soit une source d’amélioration et d’inspiration, à travers le partage de bonnes pratiques en matière de gouvernance. Créé en 2003 par le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) et indépendant de toute structure régionale, il regroupe 34 États africains sur 54, qui ont adhéré volontairement au mécanisme. Le processus d’évaluation se décompose en plusieurs phases, dont les principales sont la réalisation d’une auto-évaluation par l’État de ses pratiques de gouvernance, d’une deuxième évaluation réalisée par des experts extérieurs nommés par les structures du mécanisme et d’une présentation d’un rapport final compilant l’ensemble des données récoltées devant l’ensemble des chefs d’États et de gouvernements. L’évaluation par les pairs s’opère au stade du rapport final et donne lieu à la formulation de recommandations au pays évalué, afin qu’il puisse procéder à des réformes si nécessaires. La mise en œuvre de ces recommandations est examinée, théoriquement, tous les cinq ans, faisant du MAEP un processus continu de longue durée. La création du MAEP s’inscrit dans la vision du développement en cours depuis le milieu des années 1990, époque à laquelle a été mis en lumière un lien de causalité entre la bonne gouvernance et le développement. La mise en place du mécanisme permet aux États évalué de s’approprier un concept d’abord développé et utilisé par les institutions et bailleurs internationaux. Les quatre domaines explorés sont : la démocratie et la gouvernance politique, la gouvernance et la gestion économiques, la gouvernance d’entreprise et le développement socio-économique. Cette note a pour objectif d’offrir un panorama clair du fonctionnement et des enjeux du MAEP. Elle explorera ses origines à travers d’une part, son géniteur, le NEPAD, et d’autre part, le contexte doctrinal autour du concept de gouvernance. L’analyse s’attardera ensuite sur le fonctionnement du mécanisme qui s’opère grâce à une double armature institutionnelle, établie à la fois au niveau continental et au niveau national, et qui a pour singularité d’intégrer la société civile. Enfin, elle analysera les défis majeurs auxquels est confronté le mécanisme. 1. Aux origines du mécanisme 1.1. L’état d’esprit du NEPAD comme fondement… Le MAEP s’inscrit dans l’état d’esprit qui a sous-tendu la création du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD). Le cadre opérationnel, adopté par l’Organisation de l’Union africaine, donne comme objectif au NEPAD l’éradication de la pauvreté, la croissance économique, le développement durable et l’intégration de l’Afrique dans l’économie mondiale1. 1. Le cadre opérationnel adopté par l’Organisation de l’Unité africaine (devenue l’Union africaine en 2002), établissant le NEPAD en octobre 2001, prend sa source dans la fusion du ― 3 ― Le MAEP voit le jour en 2001 à l’initiative de cinq pays (Afrique du Sud, Algérie, Égypte, Nigeria et Sénégal) désireux de créer un cadre d’action permettant aux pays d’être les premiers acteurs de leur développement. C’est dans cette perspective qu’en mars 2003, lors du 6e sommet du Comité des chefs d’État et de gouvernement chargés de la mise en œuvre du NEPAD, les États africains ont adopté une Déclaration sur la gouvernance démocratique, politique, économique et des entreprises2 détaillant leurs engagements : « (…) nous, chefs d’État et de gouvernements des États membres de l’Union africaine, sommes convenus de travailler ensemble en termes de politiques et d’actions pour atteindre les objectifs suivants : la démocratie et la bonne gouvernance politique ; la gouvernance économique et sociale ; le développement socio-économique ; le mécanisme d’évaluation entre pairs. » Le Mécanisme est ainsi présenté comme un outil de promotion et de mise en œuvre de la Déclaration, auquel les États adhèrent de façon volontaire. Il est conçu comme un instrument aux mains des États africains, en cohérence avec la philosophie du NEPAD qui veut qu’en matière de développement, l’initiative provienne des États eux-mêmes. Le mode opératoire, à savoir l’examen par les pairs, n’est pas structuré autour de la dichotomie classique « sanction/approbation », mais est construit comme un forum d’échange de bonnes pratiques entre États. Ce concept n’est pas nouveau. En effet, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a mis en place un système similaire dès sa création en 1961. L’intérêt de ce type d’évaluation réside dans ce que l’OCDE nomme « la pression par les pairs »3, source d’émulation entre les acteurs étatiques, qui en découvrant les avancées de chacun, seraient plus enclins à mener certaines réformes sur leur propre territoire. De même, ce modus operandi a été adopté en 2003, année de création du MAEP, dans le cadre du « Processus de Kimberley », au cours duquel les États doivent annuellement transmettre aux autres États participants un rapport détaillant leurs activités en matière de certification des diamants, se soumettre volontairement à des visites d’inspection menées par des représentants d’États participants et accueillir des missions d’inspection quand un faisceau d’indices suffisant suggère un non-respect du système de certification4. Certains éléments de base sont communs à l’ensemble des systèmes d’évaluation : des rapports mettant en lumière la situation des États dans un ou plusieurs domaines définis, évaluant les progrès réalisés et des missions d’évaluation sur le territoire des États. D’autres sont particuliers aux systèmes d’examen par les pairs : comme par exemple la transmission de l’ensemble de ces derniers aux autres États faisant partie du mécanisme d’évaluation. Le MAEP se distingue par le fait qu’il évalue la gouvernance de manière transversale. « Programme de renaissance de l’Afrique pour le millénaire » (MAP) et du plan Omega, opéré en juillet de la même année. 2. Déclaration sur la gouvernance démocratique, politique, économique et des entreprises, 9 mars 2003, 6e Sommet du comité des chefs d’État et de gouvernement chargés de la mise en œuvre du NEPAD. 3. « Qu'est-ce-que l'examen par les pairs ? », OCDE. 4. Décision administrative du système d'évaluation par les pairs révisée à Washington (2012) ― 4 ― 1.2. … et la gouvernance comme champ d’application « Le mandat du Mécanisme africain d’évaluation entre pairs consiste à s’assurer que les politiques et pratiques des États parties sont conformes aux valeurs convenues dans le domaine de la gouvernance politique, économique et des entreprises, ainsi qu’aux codes et normes de la Déclaration sur la uploads/Politique/ african-peer-review-mechanism-insight-and-perspectives.pdf
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- Publié le Mai 21, 2021
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