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http://www.jstor.org Ideologie et processus revolutionnaires Author(s): Francoi

http://www.jstor.org Ideologie et processus revolutionnaires Author(s): Francois Chazel Source: Revue Française de Sociologie, Vol. 30, No. 3/4, Sociologie de la Révolution, (Jul. - Dec., 1989), pp. 431-454 Published by: Éditions OPHRYS et Association Revue Française de Sociologie Stable URL: http://www.jstor.org/stable/3321589 Accessed: 31/05/2008 12:55 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of JSTOR's Terms and Conditions of Use, available at http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp. JSTOR's Terms and Conditions of Use provides, in part, that unless you have obtained prior permission, you may not download an entire issue of a journal or multiple copies of articles, and you may use content in the JSTOR archive only for your personal, non-commercial use. Please contact the publisher regarding any further use of this work. Publisher contact information may be obtained at http://www.jstor.org/action/showPublisher?publisherCode=ophrys. 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Dans le premier cas, le role primordial du << calvinisme politique >, pour reprendre l'expression de Walzer, est mis en evidence: l'ideologie est surtout abordee ici comme condition prealable a la revolution. Dans le second, l'attention se porte plut6t sur les enchainements des processus r6volutionnaires, avec un interet particulier accord6 au jacobinisme: les apports respectifs d'auteurs d6ej classiques - Quinet, Cochin - ou contemporains - Higonnet, Hunt- sont 6values et discutes sous cet angle, au cours d'une deuxieme et troisieme parties. En conclusion, l'auteur, apres avoir exprime ses reserves a l'6gard d'une interpretation purement << semiologique >> de la dynamique revolutionnaire, se prononce pour un modele plus complexe tenant compte des effets conjugues de l'id6ologie, des enjeux de pouvoir et des processus de mobilisation. Ce titre vise a definir un type d'interet, et non pas une demarche. I1 serait en effet illusoire de s'attaquer de front a un theme qui, par definition, est inepuisable. Nous chercherons simplement a eclairer le role de l'ideolo- gie dans la dynamique revolutionnaire a partir de deux cas privilegies : nous porterons pour une part notre attention sur quelques << temps forts >> de la Revolution franCaise et plus exactement sur les analyses significatives de notre point de vue qui leur ont ete consacrees. Mais c'est la Revolution anglaise qui nous fournira notre point de depart: nous nous referons ici, bien entendu, a la Revolution d'Angleterre, la << Revolution puritaine ?, envisagee essentiellement a partir de son imbrication originale du politique et du religieux, et non pas a la << glorieuse Revolution >> de 1688 qui, comme l'on sait, n'a de revolutionnaire que le nom. La Revolution puritaine presente en effet l'interet capital de consacrer le succes - certes momentan - d'une nouvelle forme de pensee et d'action, le radicalisme politique, qui s'est progressivement edifie sur un soubassement religieux. L'ouvrage de Michael Walzer, La Revolution des Saints, qui est depuis peu a la disposition du public francophone (1987), nous servira provi- soirement de fil conducteur. La Revolution anglaise de 1640 doit, selon Walzer, etre apprehendee comme l'aboutissement de cent annees de << calvinisme politique >>. Walzer defend en effet avec brio une these forte, 431 Revue francaise de sociologie consistant a affirmer l'existence d'un lien privilegie entre < ethique protestante et radicalisme politique ? (1). Cette these a manifestement des accents weberiens, mais l'argument developpe par Weber dans L'fthique protestante et l'esprit du capitalisme est en quelque sorte transpose de l'economique au politique: les <<affinites electives ?, pour reprendre l'expression celebre de Max Weber (1947, ed. 1964, pp. 108, 178-179), ne rapprochent plus l'ascetisme seculier de l'esprit d'acquisition et d'entre- prise capitaliste mais unissent une ethique de la conscience et du travail au zele ideologique et a l'activisme politique. Walzer s'accorde donc assez largement avec Weber sur les traits dominants de l'ethique calviniste, meme s'il est conduit par son objet a en eclairer d'autres aspects. Mais il se separe completement de la these weberienne en voyant dans le politique et le militaire le terrain d'application et d'expression privilegie de l'enga- gement puritain. Cette divergence en entraine une autre, non moins significative: a partir du moment ofu le lien etabli par Weber entre discipline puritaine et esprit d'entreprise capitaliste est rompu, ou pour le moins distendu, le puritanisme ne peut plus etre rattache directement a la modernite; il releve plutot du processus de modernisation, avec tout ce qu'il comporte de desordre, de luttes et de transformations, et doit etre compris comme une < ideologie de transition > (1987, p. 332). Selon l'interpretation de Walzer, le < saint > puritain apparait comme l'acteur principal de la phase cruciale et critique du processus de modernisation, qui culmine dans la Revolution anglaise (p. 34). Il ne saurait etre question de suivre dans le detail la maniere dont Walzer retrace la formation et le developpement du puritanisme pendant une periode d'environ un siecle, nous conduisant ainsi du calvinisme -analyse ici comme ideologie politique - a l'evocation d'une Angleterre preparee a la revolution par la diffusion des conceptions et de la discipline puritaines. Nous voudrions simplement relever quelques moments-cles dans son etude, envisagee d'un point de vue plus sociologique qu'histo- rique. D'abord, Walzer definit le socle ideologique sur lequel s'est edifiee l'entreprise collective des saints : le calvinisme lui apparait en effet comme < le systeme ideologique grace auquel les hommes ont su pour la premiere fois s'organiser pour (de) nouveaux types d'entreprise seculiere > (p. 34). Certes le calvinisme a un premier niveau prone l'ob6issance a l'autorite; I'homme d'apres La Chute ne peut echapper a sa vie miserable que dans la soumission a l'ordre social et politique: c'est Dieu qui institue les princes; < c'est Dieu ? encore < qui a inspire aux hommes cette crainte, sans laquelle il est certain qu'ils ne se soumettraient jamais > (2). Mais Calvin ne se borne pas a justifier la contrainte imposee par 1'Etat seculier; il engage les croyants sur la voie de la discipline chretienne. Celle-ci transforme la signification de la magistrature politique qui est desormais (1) Tel est le sous-titre de l'ouvrage, qui sage de Calvin, tire des Homelies sur le en traduit fidelement l'orientation. premier livre de Samuel. (2) Walzer cite ici (1987, p. 53) un pas- 432 Francois Chazel conque sur le modele de la vocation religieuse et dont 1'exercice exige une vigilance sans relache contre la corruption du monde. Plus generalement, elle requiert de la part des fideles une activite consciencieuse, organisee et systematique, tournee vers la construction d'une republique conforme a la Loi de Dieu. A ce titre, le calvinisme prepare deja < la revolution des saints >; et ce point essentiel est tenu pour etabli des la fin du chapitre deux. Walzer s'efforce ensuite de montrer - c'est a nos yeux son deuxieme apport majeur - comment s'edifie sur cette base une veritable ideologie de rupture avec l'ordre traditionnel. A bien des egards, c'est l'argument essentiel de l'ouvrage, et les chapitres Iv a vii - le cceur du livre- contribuent tous de quelque maniere a l'etayer. Toutefois, dans cette demonstration, une place particuliere revient au chapitre v consacre a ?< la mise en cause de l'ordre politique traditionnel >>: Walzer y etablit, a travers une analyse a la fois methodique et subtile de leurs ecrits, que les puritains rompent avec la vision de la grande chaine des etres, dont < la hierarchie medievale des ordres et des pouvoirs > paraissait constituer un modele reduit (pp. 168-187). Ils tendent aussi a rejeter la conception organique du politique, fondee sur une interdependance harmonieuse, et a substituer a l'image du corps politique celle du vaisseau de l'Etat, qui est pleinement compatible avec les idees de reforme et de mouvement et qui servira, dans les annees 1640, a justifier la rebellion contre le roi (pp. 188-199). Enfin ils sont tres eloignes de la perspective traditionnelle voyant dans l'Etat une immense famille : leur pensee suit plutot le cheminement inverse, la famille etant alors conque sur le modele du politique, ce qui explique l'accent mis sur le < gouvernement >> du foyer (pp. 199-215). Un refus aussi global des fondements de l'ordre social jusqu'alors communement acceptes conduit les puritains a s'engager sur les voies de l'invention politique; mais il n'en resulte pas que celle-ci doive prendre une forme revolutionnaire. Confronte a cette reelle difficulte, Walzer invoque essentiellement la pregnance du theme de la guerre permanente chez les puritains, theme qu'il developpe au cours du chapitre viii. Cette guerre est d'abord une inces- sante lutte spirituelle contre les tentations de Satan mais elle est uploads/Politique/ chazel-ideologie-procesus-rev.pdf