Contribution à la réconciliation nationale L’histoire de la Guinée indépendante
Contribution à la réconciliation nationale L’histoire de la Guinée indépendante divise plus qu’elle ne fait l’unanimité. Elle fait l’objet de toutes les interprétations et oppositions. N’est-ce pas pour cela que sa transmission est occultée dans le cadre de l’enseignement formel? On ne l’enseigne pas, on l’occulte à dessein ; ce qui est une sorte de politiques anti- mémorielles ou d’imposition de l’oubli. De 1958 à nos jours, les crimes, les violations des droits humains, les frustrations et douleurs sont connus des Guinéens sans exclusion. Le premier régime a eu son univers concentrationnaire et ses victimes nombreuses. Le second aussi avait fait ses siennes. En 2009, la junte militaire a aussi fait ses victimes. Le régime Condé déchu le 5 septembre a fait des victimes nombreuses et a même aggravé les questions liées à l’ethnisme. Ces spirales de violences d’Etat, récurrentes, impunies, ont enfanté une crise de confiance verticale : celle-là entre l’Etat et ses citoyens. Si , aujourd’hui , assez appellent de leurs vœux à la réconciliation nationale , c’est qu’ils sont convaincus de la gravité des blessures causées par les agissements autocratiques des régimes successifs et aussi la multiplication des variantes historiques conflictuelles .La réconciliation , à la quelle appelle cette minorité avertie – par opposition à une certaine majorité émotive appelant à la réconciliation politique entre partis et acteurs opposés par l’idéologie et les sens de l’Etat- est celle entre l’Etat et ses citoyens. Cette réconciliation est aussi celle de l’Etat avec lui- même, ses valeurs proclamées. Comme tous les pays du monde, la Guinée n’a pas qu’un passé historique douloureux. Il est aussi fait de moments de consensus politiques forts ( l’indépendance de la Guinée ne serait jamais acquise le 2 octobre 1958 si les autres leaders politiques avaient appelé à voter le oui , je veux parler de Barry Diawadou, Barry III ; si les délibérations des étudiants de la FEANF et l’Union Générale des Etudiants de Guinée étaient à la défaveur du non ) , de patriotisme et d’exemples de courage, d’intégrité ( Koumadian Kéita , Ray Autra , Seck Bahi et d’autres anonymes décédés et vivants sont de ceux-là ). Ce passé fait de périodes sombres et d’unités est refusé et cet héritage n’est pas assumé. Pour certains, il est lugubre, pour d’autres, il est douloureux et il faut tourner sa page, disent-ils, sans la lire. Les stratèges de l’évacuation appellent à jeter à la mer les aprioris. D’autres appellent à en parler de quelques-uns de ses pans. Pourtant, nous avons des leçons à tirer de lui. Ne pouvant plus se souvenir, notre histoire récente devient une arme de division, d’exclusion alors qu’elle devait servir de moyen d’union, de cohésion et que sa lumière devait nous éclairer dans nos combats d’aujourd’hui et même de tous les jours. En 2011, il a été institué une Commission de Réflexion sur la Réconciliation Nationale. En 2016, après des années de travail et surtout de recueil des avis Guinéens sur la réconciliation nationale, elle a rendu son rapport. Les conclusions principales dont : la mise en place d’une commission de réconciliation, les manifestations de la justice, les réparations et la mise en place des garanties de non-répétition, n’ont pas été appliquées. Entre-temps, de nouvelles victimes ont été faites et le problème a eu d’autres extensions. Dans son adresse à la nation du 2 octobre 2021, le Président de la Transition, a indiqué qu’il œuvrera à la réconciliation nationale. Dans la Charte de la Transition, publiée la veille, il est noté parmi les missions assignées à la transition : la réconciliation nationale. Sinon même la poursuite du processus de réconciliation. Cela indique que les efforts déjà fournis seront capitalisés. Cette période de césure qu’est la transition est le moment propice à la réconciliation nationale. Etant donné qu’un rapport d’une commission dite de réflexion existe, proposer des idées visant à l’amender ne serait pas un mal. Mais nier l’idée qu’il urge d’aller à la réconciliation le serait. Ce papier, comme d’autres publiés par le passé, ambitionne d’amender le travail fort louable de la commission susmentionnée. A travers lui, je veux dire aux autorités de la Transition que l’heure d’installer la Commission définitive de Réconciliation Nationale est échue et qu’elles doivent prendre rendez-vous avec l’histoire et donner l’exemple de courage aux autres dirigeants et aux autres peuples. Le concept de la réconciliation nationale étant galvaudé, je m’efforce de le définir. J’amende, comme je l’ai dit, les différents jalons du processus de réconciliation nationale. C’est pour cela, à l’aide d’un Benchmarking des meilleures commissions de réconciliation à travers le monde , je parle de la commission définitive à mettre en place , du choix de ses membres , de sa composition , de ses mandats et des autres étapes du processus de réconciliation : justice ,excuses officielles , réparations , pardon , récriture et reconstruction de la mémoire. D’emblée, la réconciliation peut se définir de diverses manières. La réconciliation pourrait signifier le rétablissement normal des relations entre personnes, l’Etat et ses citoyens, entre les victimes et leurs oppresseurs. Cela veut dire que l’on se pose la question de savoir si les relations à rétablir étaient normales et saines. Si les relations existaient et étaient normales, les haines, les rancœurs, les replis identitaires, etc., causés par les effritements de liens, de la confiance, doivent être compris non pas comme la racine du problème, mais comme les effets induits du mal. Pour se remettre de ces effets ou les réduire, il faut pointer du doigt le mal racine et puis l’attaquer. La réconciliation est en ce sens une idée souvent réductrice d’un problème compliqué à diagnostiquer et à guérir. C’est pour cela, Brandom Ambert et Graine Kelly déclarent: « Regarder la réconciliation comme partir d’une prémisse selon laquelle les relations ont besoin d’attention pour conduire à la paix.[1]» McCandless, quant à lui, dira : « Il faut voir la réconciliation comme un objectif selon lequel il faut plus de relations coopératives entre parties.3 » Dans son sens le plus simple, la réconciliation signifie trouver un mode de vie à côté d’anciens ennemis – réels ou supposés – pas nécessairement pour les aimer, ou pour les pardonner, ou encore pour oublier le passé de quelque façon que ce soit, mais pour coexister avec eux, pour développer le degré de coopérations nécessaires, pour partager notre société avec eux, de sorte que nous vivions tous mieux ensemble que séparément. Nous le disons au quotidien qu’il faut rétablir la vérité. Pour certains, elle est toute faite et serait connue. Pour d’autres, c’est la leur. Nous savons aussi que nos mémoires individuelles sont lacunaires et celle collective est conflictuelle. La vérité de qui compterait ? Pour répondre à cette question, parlons de l’entité devant la rétablir ou la rechercher. I- Commission de réconciliation nationale La vérité ne peut être rétablie que par la mise en place d’une commission de réconciliation. Celle-là doit avoir un mandat précis et être composée d’Hommes portant un certain nombre de valeurs. La commission elle-même doit être une équipe et non un groupe. Cette commission doit avoir des fonctions essentielles dont la recherche de la vérité, l’enquête sur le passé, le recueil des doléances des victimes, la détermination des formes de réparations, la rédaction d’un rapport final intégrant les points susmentionnés et proposant des réformes pratiques. Elle doit s’orienter vers le passé et y rechercher la vérité au sujet des événements antérieurs ayant donné lieu à des violations des droits humains. Elle ne doit pas avoir vocation d’être un organe des droits de l’homme. Elle ne doit pas non plus être un substitut à un tribunal de justice. Elle n’est pas une juridiction. Elle doit chercher la vérité au sujet des cas précis, lesquels doivent être précisés et élucidés. Ces mécanismes sont ceux de la justice transitionnelle : recherche de la vérité, poursuites judiciaires, mesures de réparations et réformes des institutions.[2] Dans l’histoire, les commissions ont eu des dénominations différentes, mais elles œuvraient toutes au rétablissement de la vérité et partageaient cette fonction essentielle. Nous pouvons appeler la nôtre comme nous voulons, le plus important doit être sa composition, la définition de ses mandats. Peu importe le nom que l’on donnera à la commission ; une chose est sûre, il n’y aura pas de réconciliation sans vérité. La réconciliation et la vérité sont intimement liées. 1- Composition Reconstruire la mémoire collective en réveillant les mémoires individuelles pose un problème de méthodes. Car se réapproprier un passé occulté, du fait des calculs politiques ou des considérations individuelles, est ardu. Il faut le faire pour que la vérité historique se dégage, du moins une certaine vérité acceptable. Cette vérité historique doit être fidèle, la plus approchante possible des différents récits recoupés, analysés, traités et interprétés. Une vérité supposée historique, non acceptée par tous ou mal interprétée serait-elle supportable, lorsqu’elle est supposée trahie, tordue et manipulée ? L’imposition d’une vérité historique manipulée n’engendrerait- elle pas une réconciliation mensongère, factice, laquelle est dangereuse ? Pour que la vérité historique devant permettre la déduction des conséquences, des leçons nécessaires et uploads/Politique/ contribution-reconciliation-nationale.pdf
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- Publié le Jul 21, 2021
- Catégorie Politics / Politiq...
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